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08/04/2009 | FRANCE | N°07PA02934

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 08 avril 2009, 07PA02934


Vu le recours, enregistré le 1er août 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406322/3 en date du 1er mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a accordé à la société Faur Construction la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1997 ;

2°) de remettre l'imposition litigieuse à la charge de la société Faur Constructio

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Vu le recours, enregistré le 1er août 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406322/3 en date du 1er mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a accordé à la société Faur Construction la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1997 ;

2°) de remettre l'imposition litigieuse à la charge de la société Faur Construction ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 84-406 du 30 mai 1984 modifié, relatif au registre du commerce et des sociétés ;

Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;

Vu la directive C.E.E. n° 82-891 du 17 décembre 1982 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2009 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Evgenas, rapporteur public ;

Et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 3 avril 2009, présentée pour la société Faur Construction ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Faur Construction a été constituée le 10 novembre 1996 et a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 10 décembre 1996 ; qu'elle a bénéficié d'un apport partiel d'actif de la société Cofor, approuvé le 23 décembre 1996 par son assemblée générale extraordinaire, laquelle a fixé la date d'effet de l'apport au 1er août 1996, lendemain de la clôture de l'exercice en cours de la société apporteuse ; que la société Faur Construction a déduit des résultats de son premier exercice, clos le 31 décembre 1997, la perte intercalaire afférente à l'activité de la branche apportée par la société Cofor, pendant la période du 1er août 1996 au 31 décembre 1996 ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, le service a refusé la déduction de cette perte, dans la mesure où elle concernait une période antérieure au 10 décembre 1996 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE fait appel du jugement en date du 1er mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a accordé à la société Faur Construction la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie en conséquence de ce redressement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-3 du même code : Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne. ;

Considérant qu'il ressort de l'examen du dossier de première instance que l'audience devant le Tribunal administratif de Melun s'est tenue le 8 février 2007 ; qu'à défaut d'une ordonnance fixant la clôture de l'instruction, celle-ci est intervenue le 4 février 2007 à minuit ; que la société Faur Construction a déposé le 29 janvier 2007 des pièces nouvelles sur lesquelles les premiers juges se sont fondés pour faire droit à la demande de la requérante ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces pièces aient été communiquées à l'administration et qu'un délai suffisant ait été donné à celle-ci pour répondre ; que le ministre est dès lors fondé à soutenir qu'en procédant de la sorte, le Tribunal a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Faur Construction devant le tribunal administratif ;

Sur la demande de la société Faur :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code générale des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu des dispositions de l'article 209 du même code : 1 - Le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises... 2 - Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminué des suppléments d'apports et augmenté des prélèvements effectués au cours de cette période... par les associés ;

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales : La fusion ou la scission prend effet : 1° En cas de création d'une ou plusieurs sociétés nouvelles, à la date d'immatriculation, au registre du commerce et des sociétés, de la nouvelle société ou de la dernière d'entre elles ; 2° Dans les autres cas, à la date de la dernière assemblée générale ayant approuvé l'opération sauf si le contrat prévoit que l'opération prend effet à une autre date, laquelle ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l'exercice en cours de la ou des sociétés bénéficiaires ni antérieure à la date de clôture du dernier exercice clos de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine ; qu'enfin aux termes de l'article 387 de ladite loi : La société qui apporte une partie de son actif à une autre société et la société qui bénéficie de cet apport peuvent décider d'un commun accord de soumettre l'opération aux dispositions des articles 382 à 386 ; que pour s'opposer à la prise en compte de la perte litigieuse dans les résultats de la société Faur Construction, le ministre fait valoir que, dès lors que cette dernière société était nouvelle, les dispositions précitées de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966 font obstacle à ce que l'apport prenne effet antérieurement à la date d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de cette société nouvelle ; que toutefois ces dispositions, qui dérogent au principe de la liberté de contracter et doivent donc être interprétées restrictivement ne sont applicables qu'aux fusions et scissions, et non à un apport partiel d'actif, quand bien même celui-ci aurait-il été soumis aux dispositions des articles 382 à 386, comme le permet l'article 387 de la loi, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas en l'espèce ; qu'il suit de là que c'est à tort que le service a estimé que l'effet de l'apport ne pouvait, pour ce motif, rétroagir avant la date d'immatriculation de la société ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales : Les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce... Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ;

Considérant que le ministre fait valoir à titre subsidiaire que la société Faur Construction ne saurait en tout état de cause prendre en compte les résultats de l'activité litigieuse réalisés avant la date d'ouverture de son premier exercice, fixée par ses statuts au 10 décembre 1996 ; que toutefois à supposer même que l'approbation, par l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 1996 de la société Faur Construction, du contrat d'apport d'actif en cause, lequel mentionnait la reprise au 1er août 1996 des résultats de l'activité réalisée au moyen des biens apportés par Cofor, ne puisse équivaloir au déplacement à cette date de l'ouverture de son premier exercice, faute pour cette modification d'avoir fait l'objet de la publication au registre du commerce et des sociétés prévue par l'article 49 du décret n°84-406 du 30 mai 1984, ladite approbation doit à tout le moins être regardée comme entérinant la reprise, autorisée par les dispositions précitées de l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, des engagements pris au titre de la période courant du 1er août 1996 au 10 décembre suivant par des personnes agissant au nom de la société Faur Construction en formation ; qu'ainsi les pertes résultant de cette reprise pouvaient être déduites des résultats du premier exercice de la société Faur Construction dés lors que l'effet rétroactif de l'apport ne remontait pas en deçà de la date à laquelle la société apporteuse avait clôturé son dernier exercice ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 1er mars 2007 et de prononcer le dégrèvement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle mises à la charge de la SA Faur Construction au titre de son premier exercice clos le 31 décembre 1997 ;

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Faur Construction et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 1er mars 2007 est annulé.

Article 2 : La société Faur Construction est déchargée des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle y afférente qui ont été mises sa charge au titre de son premier exercice ouvert le 1er août 1996 et clos le 31 décembre 1997.

Article 3 : L'Etat versera à la société Faur Construction la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 07PA02934


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07PA02934
Date de la décision : 08/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES - ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - DÉDUCTION D'UNE PERTE INTERCALAIRE AFFÉRENTE À L'ACTIVITÉ DE LA BRANCHE APPORTÉE ET CONCERNANT LA PÉRIODE ANTÉRIEURE À L'IMMATRICULATION D'UNE SOCIÉTÉ AU REGISTRE DU COMMERCE : APPLICATION DE L'ARTICLE 5 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 SUR LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES RELATIF AUX ENGAGEMENTS PRIS PAR LES REPRÉSENTANTS D'UNE SOCIÉTÉ AVANT QU'ELLE AIT ACQUIS LA JOUISSANCE DE LA PERSONNALITÉ ET QU'ELLE A ENSUITE RÉGULIÈREMENT APPROUVÉS APRÈS SA CONSTITUTION - (2).

19-04-01-04-04 Une société A, immatriculée au registre du commerce le 10 décembre 1996, a bénéficié d'un apport partiel d'actif approuvé le 23 décembre 1996 par son assemblée générale extraordinaire (A.G.E.) qui a fixé la date d'effet de l'apport au 1er août 1996, lendemain de la clôture de l'exercice en cours de la société apporteuse B.,,A a déduit des résultats de son premier exercice, clos le 31 décembre 1997, la perte « intercalaire » afférente à l'activité de la branche apportée pendant la période du 1er août 1996 au 31 décembre 1996, mais le service a refusé cette déduction, car elle concernait une période antérieure à l'immatriculation de A au registre du commerce.,,,Selon l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 : « Les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce... Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ».,,En l'espèce, A pouvait prendre en compte les résultats réalisés par la branche d'activité reprise avant la date d'ouverture de son premier exercice, fixée par ses statuts au 10 décembre 1996.,,En effet, à supposer même que, comme l'invoquait le ministre, l'approbation, par l'A.G.E. du 23 décembre 1996 du contrat d'apport partiel d'actif, mentionnant une date d'effet au 1er août 1996, ne puisse équivaloir au déplacement à cette date de l'ouverture de son premier exercice, faute pour cette modification d'avoir fait l'objet de la publication au registre du commerce prévue par l'article 49 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984, cette approbation par l'A.G.E. doit, à tout le moins, être regardée comme entérinant la reprise, autorisée par les dispositions précitées de l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966, des engagements pris au titre de la période courant du 1er août au 10 décembre 1996 par des personnes agissant au nom de la société A en formation. Ainsi, les pertes résultant de cette reprise pouvaient être déduites des résultats du premier exercice de A, dès lors que l'effet rétroactif de l'apport ne remontait pas en deçà de la date à laquelle B avait clôturé son dernier exercice.,,,[RJ1].

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES - ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - L'ARTICLE 372-2 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 SUR LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES NE S'APPLIQUE QU'AUX FUSIONS ET SCISSIONS - MAIS PAS AUX APPORTS PARTIELS D'ACTIFS - (1).

19-04-01-04-04 Une société A, immatriculée au registre du commerce le 10 décembre 1996, a bénéficié d'un apport partiel d'actif approuvé le 23 décembre 1996 par son assemblée générale extraordinaire (A.G.E.) qui a fixé la date d'effet de l'apport au 1er août 1996, lendemain de la clôture de l'exercice en cours de la société apporteuse B.,,A a déduit des résultats de son premier exercice, clos le 31 décembre 1997, la perte « intercalaire » afférente à l'activité de la branche apportée pendant la période du 1er août 1996 au 31 décembre 1996, mais, le service a refusé cette déduction, car elle concernait une période antérieure à l''immatriculation de A au registre du commerce.,,,,Selon l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966 « La fusion ou la scission prend effet : 1° En cas de création d'une ou plusieurs sociétés nouvelles, à la date d'immatriculation, au registre du commerce … de la nouvelle société ou de la dernière d'entre elles ; 2° Dans les autres cas, à la date de la dernière assemblée générale ayant approuvé l'opération sauf si le contrat prévoit que l'opération prend effet à une autre date, laquelle ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l'exercice en cours de la ou des sociétés bénéficiaires, ni antérieure à la date de clôture du dernier exercice clos de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine ». Ces dispositions, qui dérogent au principe de la liberté de contracter et doivent donc être interprétées restrictivement, ne sont applicables qu'aux fusions et scissions, et non à un apport partiel d'actif, quand bien même celui-ci aurait-il été soumis aux dispositions des articles 382 à 386, comme le permet l'article 387 de la loi, ce qui d'ailleurs n'a pas été le cas en l'espèce.,,,[RJ1].


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Ministre du budget, 28 février 1997, n°s 141459-150985.


Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme EVGENAS
Avocat(s) : MARECHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-04-08;07pa02934 ?
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