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29/01/2010 | FRANCE | N°08PA01102

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7éme chambre, 29 janvier 2010, 08PA01102


Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2008, présentée pour M. Jean-Jacques A, demeurant ..., par Me Hoin ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401355/7 en date du 6 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre des périodes couvrant les années 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 eu

ros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2008, présentée pour M. Jean-Jacques A, demeurant ..., par Me Hoin ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401355/7 en date du 6 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre des périodes couvrant les années 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2010 :

- le rapport de M. Dalle, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Larere, rapporteur public ;

Considérant que M. A, qui exerçait une activité individuelle de conseil aux entreprises soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, relève appel du jugement rendu le 6 février 2008 par le Tribunal administratif de Melun, rejetant ses demandes en décharge de droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes, mis à sa charge au titre de périodes couvrant les années 1996, 1997 et 1998, à la suite d'une vérification de comptabilité ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 16 septembre 2008, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Seine-et-Marne a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 2 597 euros, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. A au titre de l'année 1997 ; qu'il a également prononcé un dégrèvement d'un montant, en droits et pénalités, de 22 433 euros, correspondant à la totalité du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui a été assigné à M. A au titre de l'année 1998 ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont donc, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres et documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° (...) les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...) ;

Considérant que l'administration ne conteste pas que les opérations de vérification, qui ont débuté le 8 novembre 1999, se sont poursuivies après la date du 7 février 2000, à laquelle elles auraient dû s'achever et que la procédure d'imposition est ainsi entachée d'irrégularité ; qu'elle fait cependant valoir, à juste titre, que cette irrégularité n'était pas constituée à la date du 20 décembre 1999, à laquelle les rappels relatifs à l'année 1996 ont été notifiés à M. A et que, par suite, ces impositions, qui n'ont pas été affectées par les opérations de vérification conduites après cette date doivent rester à la charge de celui-ci ;

Considérant, toutefois, que les rappels relatifs aux années 1997 et 1998 ont été notifiés respectivement les 14 décembre 2000 et 12 avril 2001 à M. A ; que si l'administration fait valoir que ces redressements ne procèdent pas de la vérification de comptabilité mais de renseignements obtenus, par l'exercice du droit de communication, auprès de la banque et de clients du contribuable, il résulte de l'instruction qu'elle a confronté ces renseignements avec des données ressortant de la vérification de comptabilité ; qu'il n'est pas établi que ces données n'auraient pas été recueillies postérieurement à l'expiration du délai légal de l'article L. 52 précité, lors de la période pendant laquelle la vérification était devenue irrégulière ; que le requérant est par suite fondé à soutenir que les impositions mises à sa charge au titre des années 1997 et 1998 ont été établies selon une procédure irrégulière ; que l'administration ayant, ainsi qu'il a été dit plus haut, prononcé le dégrèvement des rappels relatifs à l'année 1998, il y a lieu d'accorder à M. A la décharge des rappels auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1997 ;

Considérant, en deuxième lieu, que le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable, personne physique ou morale, pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire ; que, par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance du service en charge de cette procédure, celui-ci est, en principe, tenu d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de cette procédure ; que toutefois, l'expédition de tout ou partie des actes de la procédure d'imposition au domicile ou au siège du contribuable sera réputée régulière s'il est établi que le pli de notification a été effectivement retiré par le contribuable ; qu'en revanche, lorsque ce pli est retourné par le service des postes à l'administration fiscale, faute d'avoir été retiré dans le délai imparti, il appartient à celle-ci de procéder à une nouvelle notification des mêmes actes au mandataire ;

Considérant que M. A, qui faisait l'objet depuis le 8 novembre 1999 d'une vérification de comptabilité et à qui des redressements avaient été notifiés en décembre 1999, décembre 2000 et avril 2001, a donné mandat au cabinet d'avocats 2CFR aux fins de le représenter auprès de l'administration fiscale, par un acte daté du 19 novembre 2001, porté à la connaissance du service ; que, malgré cette élection de domicile, le service a continué de lui adresser les pièces de la procédure et n'a pas adressé celles-ci au mandataire désigné ; qu'il n'est cependant pas contesté que M. A a effectivement reçu les plis contenant les actes de la procédure ; que la procédure d'imposition n'est donc pas irrégulière du seul fait que le mandataire désigné n'a pas été destinataire des actes de la procédure ; qu'en tout état de cause, le rappel de taxe sur la valeur ajoutée de l'année 1996, seule imposition encore en litige compte tenu des dégrèvements et décharge susmentionnés, prononcés par l'administration ou par la cour, n'étant assorti d'aucune pénalité autre que les intérêts de retard, le requérant ne peut utilement soutenir que son droit à un procès équitable serait méconnu du fait de la non transmission des éléments de la procédure à son avocat, dès lors que les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas applicables aux procédures administratives d'établissement des impositions ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ; que si ces dispositions ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit, en principe, se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux ; qu'il en est ainsi, lorsque, notamment, dans le cas où le siège de l'entreprise est au domicile du contribuable, les opérations de vérification se déroulent, à la demande de celui-ci, dans les locaux de l'administration dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire soit offerte au représentant de l'entreprise vérifiée ;

Considérant que si la vérificatrice n'a rencontré qu'une seule fois M. A dans le local où il exerçait son activité professionnelle - les autres entrevues s'étant déroulées dans les locaux de l'administration - il résulte de l'instruction que l'intéressé lui-même avait demandé que le contrôle se déroulât dans le bureau de la vérificatrice, après avoir fait valoir que sa comptabilité ne représentait pas un volume important et qu'il pouvait la transporter ; que six entrevues ont ainsi eu lieu dans le bureau de la vérificatrice ; qu'il n'est pas établi ni allégué que ces entretiens n'auraient pas donné lieu à une discussion entre la vérificatrice et le contribuable ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire ne peut qu'être rejeté ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'administration conteste et qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que les documents comptables adressés au service le 16 décembre 1999 par M. A seraient des originaux ; que la circonstance que ces documents n'auraient pas été restitués au contribuable avant la fin de la vérification de comptabilité est donc sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission départementale des impôts directes et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le moyen tiré par M. A de ce qu'il aurait reçu la convocation à la réunion de la commission départementale des impôts devant examiner son dossier vingt-sept jours avant la date de la réunion, en contravention avec l'article R* 60-1 du livre des procédures fiscales, lequel prévoit un délai minimum de trente jours, est inopérant au soutien de sa demande en décharge des impositions en litige ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; que le paragraphe 5 du chapitre III de ladite charte dispose : Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ;

Considérant que si le requérant soutient que l'administration lui a proposé de rencontrer l'inspecteur principal avant même d'avoir confirmé les redressements envisagés, ce moyen ne peut qu'être rejeté, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'année 1996, seule imposition encore en litige, dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'administration a confirmé le redressement en cause le 8 mars 2001 et que l'invitation à rencontrer l'inspecteur principal a été effectuée le 31 mai 2001 ; que, par ailleurs, M. A n'ayant pas donné suite à cette invitation et aucune divergence n'ayant pu par suite l'opposer à l'inspecteur principal, l'administration n'était pas tenue de lui proposer de rencontrer l'interlocuteur départemental ; que la circonstance que celui-ci lui ait néanmoins proposé une rencontre par un courrier daté du 20 novembre 2002, qui aurait été postérieur à la mise en recouvrement de l'imposition litigieuse, ne peut donc avoir aucune incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article R 256-8 du livre des procédures fiscales : (...) Le comptable public compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement est soit celui du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable, soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, celui compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement (...) ; qu'il résulte de l'instruction qu'en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'année 1996, seule imposition restant en litige, ainsi qu'il a été dit, M. A, souscrivait ses déclarations de chiffre d'affaires auprès de la recette des impôts de Coulommiers (Seine-et-Marne) ; que celle-ci était par suite territorialement compétente pour établir les avis de mise en recouvrement litigieux, en date des 7 novembre et 18 décembre 2002, même si l'intéressé a déménagé en Bretagne le 12 novembre 2001 et en a informé le service des impôts ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 230, alors en vigueur, de l'annexe II au code général des impôts : 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens ou services sont nécessaires à l'exploitation ;

Considérant qu'il est constant que le requérant ne conteste que le bien-fondé d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée de 1 941 F qui lui a été assigné au titre de l'année 1996, correspondant à de la taxe afférente à des dépenses d'entretien d'espaces verts situés autour de son habitation, qui était également le lieu d'exercice de son activité professionnelle ; que l'administration a estimé que ces dépenses n'étaient nécessaires à l'exploitation de l'intéressé qu'à hauteur du tiers seulement de leur montant ; qu'en conséquence, elle n'a admis la déduction que du tiers de la taxe grevant ces dépenses ;

Considérant que le rapport d'un tiers correspond à celui constaté par l'administration entre la surface de l'habitation de M. A affectée à l'exploitation, d'une part, la surface totale de ladite habitation, d'autre part ; que le requérant conteste ce rapport mais ne fait état d'aucun élément d'où il ressortirait qu'en retenant un prorata d'un tiers, l'administration aurait fait une évaluation insuffisante de la part des dépenses litigieuses nécessitée par l'exploitation ; que l'administration établit dans ces conditions le bien-fondé du rappel en cause ;

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

Considérant que ces pénalités n'ont été appliquées qu'aux rappels correspondant aux recettes omises, mis à la charge de M. A au titre des années 1997 et 1998 ; que les rappels en cause étant soit dégrevés, soit déchargés en exécution du présent arrêt, les moyens que présente M. A à l'encontre des pénalités pour manoeuvres frauduleuses sont devenus sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, en remboursement des frais exposés par M. A ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A à concurrence d'une somme totale, en droits et pénalités, de 2 597 euros, en ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de l'intéressé au titre de l'année 1997 et d'une somme totale, en droits et pénalités, de 22 433 euros, correspondant à la totalité du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel M. A avait été assujetti au titre de l'année 1998.

Article 2 : M. A est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes, mis à sa charge au titre de l'année 1997, restant en litige.

Article 3 : Le surplus des conclusions en décharge de M. A est rejeté.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 6 février 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA01102


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7éme chambre
Numéro d'arrêt : 08PA01102
Date de la décision : 29/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: Mme LARERE
Avocat(s) : CABINET ANDRÉ HOIN et PARTENAIRES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-01-29;08pa01102 ?
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