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04/05/2010 | FRANCE | N°08PA03657

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 mai 2010, 08PA03657


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2008, présentée pour l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION DE CHELLES (OPAC), ayant son siège 2 rue Wladislaw Pusz à Chelles (77505), par Me Cayla-Destrem ; l'OPAC demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0403143/5 du 22 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamné à verser à M. Bernard A la somme de 32 059,39 euros TTC en règlement du solde du marché signé le 23 décembre 1998 pour la réalisation de 20 maisons dans la ZAC de La Fontaine, somme assortie des intérêts au taux légal

compter du 11 décembre 2004 ;

2°) de condamner M. A à lui verser la somm...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2008, présentée pour l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION DE CHELLES (OPAC), ayant son siège 2 rue Wladislaw Pusz à Chelles (77505), par Me Cayla-Destrem ; l'OPAC demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0403143/5 du 22 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamné à verser à M. Bernard A la somme de 32 059,39 euros TTC en règlement du solde du marché signé le 23 décembre 1998 pour la réalisation de 20 maisons dans la ZAC de La Fontaine, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2004 ;

2°) de condamner M. A à lui verser la somme de 40 501,81 euros TTC en règlement du solde du marché, somme majorée des intérêts de droit courant à compter de la mise en demeure du 19 novembre 2003, capitalisés en application des dispositions de l'article 1154 du code civil ;

3°) de condamner M. A à lui rembourser la somme de 34 794,01 euros TTC, payée en exécution du jugement susvisé du Tribunal administratif de Melun ;

4°) de mettre à la charge de M. A la somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 avril 2010 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- les observations de Me Adam-Ferreira pour l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT MARNE ET CHANTEREINE HABITAT, et celles de Me Corbel-Roussel, pour M. A,

- connaissance prise des notes en délibéré en date des 21 et 22 avril 2010, présentées pour l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT MARNE ET CHANTEREINE HABITAT, par Me Cayla-Destrem,

- et connaissance prise des notes en délibéré en date du 22 avril 2010, présentées pour M. A, par Me Segers ;

Considérant que, par le marché signé le 23 décembre 1998, modifié par l'avenant notifié le 31 mars 1999, l'Office public d'habitations à loyer modéré de Chelles, devenu l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION DE CHELLES, puis l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT MARNE ET CHANTEREINE HABITAT (OPH), a confié à M. A, entrepreneur individuel exerçant sous l'enseigne B. A, la construction de 20 maisons groupées dans la zone d'aménagement concertée de La Fontaine à Chelles pour un montant de 1 451 224,14 euros TTC (9 519 406,35 francs) ; que les travaux, dont le délai d'exécution expirait le 8 septembre 1999 compte tenu d'un mois de préparation, ont été réceptionnés le 26 juillet 2000 avec réserves, les travaux extérieurs n'étant pas achevés à cette date ; que, le 24 juillet 2001, l'OPH a notifié à l'entrepreneur un décompte général faisant apparaître que le titulaire du marché était redevable d'une somme de 40 501,81 euros TTC envers l'office ; que, le 20 novembre 2003, le maître d'ouvrage à de nouveau notifié ce décompte général à l'entreprise en la mettant en demeure de payer cette somme en règlement du solde du marché ; que, par l'ordonnance du 26 avril 2004, le juge des référés du Tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de l'office tendant à ce que M. A soit condamné à lui verser une provision du montant susmentionné ; que, par jugement en date du 22 avril 2008, dont l'OPH fait appel, le Tribunal administratif de Melun l'a condamné à verser à M. A la somme de 32 059,39 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2004, en règlement du solde du marché ; que, par la voie de l'appel incident, M. A demande à la cour de condamner l'office à lui verser la somme de 72 561,20 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2002, au titre de la retenue de garantie, diminuée de la somme de 34 794,01 euros versée par l'office en application dudit jugement ;

Sur la compétence :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions des articles 47 à 53 de la loi susvisée du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises, devenus les articles L. 621-43 à L. 621-46 du code de commerce, d'où résultent d'une part, le principe de la suspension ou de l'interdiction de toute action en justice de la part de tous les créanciers à compter du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, d'autre part, l'obligation qui s'impose aux personnes publiques comme à tous les autres créanciers, de déclarer leurs créances dans les conditions et délais fixés, ne comportent pas de dérogation aux dispositions régissant les compétences respectives des juridictions administratives et judiciaires ; qu'il en résulte que, si est réservée à l'autorité judiciaire la détermination des modalités de règlement des créances sur les entreprises en état de redressement, puis de liquidation judiciaire, il appartient au juge administratif, s'agissant des créances contractuelles qui par leur nature relèvent de sa compétence, de fixer le montant des sommes qui sont dues à ce titre à l'une et l'autre partie, et de prononcer une éventuelle condamnation à l'encontre du cocontractant de l'administration, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur le recouvrement de cette créance ; qu'il s'ensuit que le défaut de déclaration par une personne publique de la créance qu'elle détiendrait sur une entreprise admise à la procédure de redressement ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif en fixe le montant, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur l'extinction de cette créance ;

Considérant, en second lieu, que l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde détermine les droits et obligations définitifs des parties ; qu'il appartient au juge administratif, de fixer le solde en tenant compte de tous les éléments actifs et passifs résultant d'obligations ayant une existence certaine et comprenant tant au profit de l'entreprise, la rémunération de ses travaux, qu'à sa charge, les sommes que le maître d'ouvrage est fondé à lui réclamer au titre de ses obligations contractuelles ; que la mise en redressement ou en liquidation judiciaire de l'entreprise est sans influence sur l'application de ces règles qui tiennent à la nature même du compte en cause ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la circonstance que l'OPH n'aurait pas procédé à la déclaration de la créance résultant des pénalités de retard et des retenues sur paiement encourues par M. A en raison des manquements à ses obligations contractuelles, lesquelles constituaient un élément ne pouvant être isolé du décompte du marché, et n'aurait pas demandé à être relevé de la forclusion dans les conditions prévues par les dispositions précitées du code de commerce, n'a pas d'incidence sur l'application des règles régissant l'établissement du décompte ; qu'il en est de même en ce qui concerne la retenue de garantie ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M. A, le tribunal administratif était bien compétent pour procéder à la détermination des droits et obligations des parties en règlement du solde du marché, en l'absence de décompte général devenu définitif, ainsi que l'on a bon droit relevé les premiers juges ;

Au fond :

Sur l'imputation à l'entrepreneur du montant des prestations réalisées par des entreprises tierces :

Considérant qu'aux termes de l'article 49 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux : 49.1. (...) lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, la personne responsable du marché le met en demeure d'y satisfaire dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. / Ce délai, sauf pour les marchés intéressant de la défense ou en cas d'urgence, n'est pas inférieur à 15 jours à compter de la date de notification de la mise en demeure. / 49.2. Si l'entrepreneur n'a pas déféré à la mise en demeure, une mise en régie à ses frais peut être ordonnée ou la résiliation du marché peut être décidée (...) 49.5. L'entrepreneur dont les travaux sont mis en régie est autorisé à en suivre l'exécution (...) / 49.6. Les excédents de dépenses qui résultent de la régie ou du nouveau marché sont à la charge d'un entrepreneur. Ils sont prélevés sur les sommes qui peuvent lui être dues ou, à défaut, sur ces sûretés éventuelles (...) ;

Considérant que M. A soutient que le montant de 79 447,82 euros TTC (521 143,56 francs TTC), correspondant aux factures des prestations réalisés par des entreprises tierces, a été porté à tort au passif de son décompte général par l'OPH, celui-ci n'ayant pas suivi les formalités de la mise en régie prévues aux articles 49.1 et suivants du cahier des clauses administratives générales précité, en l'absence notamment d'une mise en demeure portant sur ces travaux et de la démonstration de malfaçons ou de manquements suffisamment graves de sa part ; que l'OPH ne saurait utilement contester cette affirmation en se bornant à produire deux mises en demeure en date des 22 novembre 2000 et 21 janvier 2001, postérieures aux factures des entreprises tierces dont il prétend imputer le montant au décompte de M. A et qui ne permettent pas d'établir qu'elles se rapporteraient aux travaux correspondant aux factures en cause ; que, toutefois, si, dans ces conditions, M. A ne saurait supporter le surcroît de dépenses résultant de ces prestations, faute d'avoir été mis en mesure de faire valoir ses droits par ladite procédure, il ne saurait être rémunéré pour les travaux qu'il n'a pas réalisés ; qu'il y a lieu, à ce titre, de porter au passif de son décompte, les sommes de 2 230,67 euros TTC (14 632,34 francs), 9 756,39 euros TTC (63 997,72 francs), 3 640,30 euros TTC (23 878,80 francs) et 14 696,51 euros TTC (96 402,82 francs) au titre respectivement des prestations de boîtes aux lettres, espaces verts, portes de garages et carrelages, sommes figurant expressément dans le projet de décompte final de M. A dès lors que l'OPH n'apporte aucun élément de nature à établir que sa créance, relative à ces travaux, serait supérieure à ces sommes ; qu'il y a lieu également de porter au passif du décompte de l'entreprise A, au même titre, le solde des travaux de gros oeuvre prévus au marché dont s'agit et sous-traités à l'entreprise Aydin par M. A, soit, ainsi qu'il ressort de la facture adressée par ladite entreprise Aydin le 11 octobre 1999 et réglée directement à celle-ci par l'OPH, la somme de 34 774,70 euros TTC (228 107,06 francs), somme expressément admise par M. A dans ses dernières écritures ; que, dès lors, il y a lieu de porter au passif du décompte de l'entreprise A, à ce titre, la somme totale de 65 098,59 euros TTC au lieu de 79 447,82 euros TTC (521 143,56 francs) figurant au décompte général établi par l'OPH ;

Sur le règlement du marché :

Considérant qu'il y a lieu de fixer le solde du décompte en faisant état de tous les éléments actifs et passifs résultant d'obligations ayant une existence certaine et devant figurer sur ledit décompte ;

Considérant, en premier lieu, que le montant des travaux prévus au marché s'élève à la somme de 1 451 224,14 euros TTC, en tenant compte de l'avenant susmentionné et de la réduction du taux de TVA à 19,6 % ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu de porter au passif du décompte, le montant des prestations susmentionnées non réalisées par l'entrepreneur à hauteur de 65 098,59 euros TTC, ainsi qu'il vient d'être dit ; qu'il y a lieu également de porter au passif du décompte les sommes correspondant aux autres postes du décompte général non contestés en appel, soit, le montant des travaux payés directement aux sous-traitants à hauteur de 753 806,47 euros TTC (4 944 646,33 francs), le montant des pénalités de retard à hauteur de 69 728,89 euros TTC (457 391,53 francs) ainsi que le montant des acomptes déjà payés à l'entrepreneur à hauteur de 588 742,77 euros TTC (3 120 254,63 francs) ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il a été porté à l'actif du décompte de M. A, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la somme de 1 451 224,14 euros TTC correspondant à la totalité du prix du marché ; que dès lors, conformément à ce que soutient l'OPH, il n'y a pas lieu de comptabiliser au crédit de M. A, une retenue de garantie à hauteur de 72 561,20 euros TTC (475 970,30 francs TTC) au sens de l'article 13.21 du cahier des clauses administratives générales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le solde du décompte s'établit au montant de 26 152,58 euros TTC en faveur de l'OPH, somme dont doit être déclaré redevable M. A envers l'OPH à ce titre ; qu'il suit de là que l'OPH est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la totalité de sa demande et l'a condamné à verser à M. A la somme de 32 059,39 euros TTC en règlement du solde du marché ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Considérant, en premier lieu, que lorsqu'ils ont été demandés, et qu'elle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dûs en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la sommation de payer le principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; qu'il y a lieu, dès lors, de fixer le point de départ des intérêts sur la somme susmentionnée de 26 152,58 euros TTC au 10 novembre 2003, date de réception de la mise en demeure adressée à M. A d'avoir à payer le solde du marché ;

Considérant, en second lieu, que la capitalisation des intérêts a été demandée par l'OPH par sa demande de première instance, enregistrée le 2 juin 2004 ; qu'à cette date il n'était pas dû plus d'une année d'intérêts ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 10 novembre 2004 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OPH, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A la somme de 1 000 euros, au titre des frais exposés par l'OPH et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé en date du 22 avril 2008 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : M. A est déclaré débiteur envers l'OPH, en règlement définitif du solde des comptes du marché susvisé, de la somme de 26 152,58 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2003. Les intérêts échus le 10 novembre 2004, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : M. A versera à l'OPH la somme de 1 000 euros, au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative ;

Article 4 : Les surplus des conclusions des parties sont rejetés.

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N° 08PA03657


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA03657
Date de la décision : 04/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : CAYLA-DESTREM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-05-04;08pa03657 ?
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