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16/12/2010 | FRANCE | N°08PA04593

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 décembre 2010, 08PA04593


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2008, présentée pour M. et Mme B A, demeurant ...), par Me Gerbet ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0317268 du 1er juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1996 à 1998 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code

de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 29 août 2008, présentée pour M. et Mme B A, demeurant ...), par Me Gerbet ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0317268 du 1er juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1996 à 1998 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2010 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme A font appel du jugement du 1er juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il ont été assujettis au titre des années 1996 à 1998, ainsi que des intérêts de retard y afférents ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ; qu'aux termes de l'article L. 59 A du même livre : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminée selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du code général des impôts ; 2° lorsqu'il s'agit de différends portant sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du code général des impôts relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du bénéfice des entreprises industrielles commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code précité. ; qu'il résulte de ce qui précède que la commission départementale des impôts n'est pas compétente en cas de contestation portant sur les rémunérations de gérants majoritaires de sociétés à responsabilité limitée relevant de l'article 62 du code général des impôts ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de saisine de ladite commission ne peut qu'être écarté, alors même que le litige entre le contribuable et le service impliquait l'examen de questions de fait ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 62 du code général des impôts : Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211, même si les résultats de l'exercice social sont déficitaires, lorsqu'ils sont alloués : aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues à l'article 3-IV du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié ou dans celles prévues à l'article 239 bis AA (...) ;

Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que les sommes en litige seraient constitutives de bénéfices non commerciaux, et non de rémunérations visées par l'article 62 du code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction que M. A est gérant majoritaire de la société FGECO, société d'expertise comptable ; qu'il résulte également des stipulations du contrat de collaboration conclu le 18 octobre 1991 entre M. A et ladite société qu'il a perçu des rémunérations en contrepartie de travaux, relatifs notamment aux relations avec la clientèle, au développement et à la gestion interne du cabinet, ainsi qu'au contrôle des dossiers traités, qui s'apparentent à des fonctions de gestion ; que les allégations du requérant selon lesquelles il aurait été rémunéré en échange de son intervention personnelle dans le cadre des tâches techniques de suivi du dossier des clients ne sont pas établies par les pièces du dossier ; que l'administration doit ainsi être regardée comme établissant que les sommes litigieuses rémunéraient les fonctions de dirigeant de M. A ; que lesdites sommes ont, par suite, été à bon droit taxées sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts précité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. A était, au moment de l'inscription au passif de la société FGECO des sommes litigieuses, gérant de cette société dont il détenait avec son épouse 99,6 % des parts ; qu'il suit de là que les sommes correspondant aux rémunérations qui lui étaient dues à raison de son activité de dirigeant ont pu à bon droit être présumées mises à sa disposition dès leur inscription au crédit de son compte au passif de l'entreprise, nonobstant la circonstance que ledit compte était un compte fournisseur ; qu'au surplus, ce compte a enregistré, à son débit, quelques écritures qui ne sont pas en relation avec l'activité commerciale de la société FGECO et ne saurait ainsi être regardé comme ayant intégralement fonctionné comme un compte fournisseur ; qu'il appartient, en conséquence, à M. et Mme A d'établir que les sommes en cause ne pouvaient être effectivement prélevées pour des motifs indépendants de la volonté de M. A ; que les requérants, qui se bornent à invoquer la situation de trésorerie de la société FGECO au 30 septembre de chaque année en cause, ne produisent au dossier aucun élément permettant d'apprécier l'évolution de la trésorerie de l'entreprise et le montant des frais d'exploitation entre la date où lesdites rémunérations ont été créditées et le 31 décembre de l'année correspondante ; qu'il suit de là qu'ils ne sauraient, en tout état de cause, se prévaloir de ce que le contrat qui liait M. A à la société FGECO l'obligeait à laisser en trésorerie un montant égal à six mois de frais d'exploitation et de ce que l'appréciation de la trésorerie doit prendre en compte une somme de 200 000 F nantie auprès d'un établissement bancaire ; que, par suite, ils n'apportent pas la preuve qui, ainsi qu'il vient d'être dit, leur incombe, de ce que M. A était dans l'impossibilité de prélever les sommes en cause ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la décision d'admission partielle de la réclamation de M. A, que les sommes restant taxées sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts au titre des années 1996 et 1997 ont été déterminées à partir des rémunérations trimestriellement mises à la disposition de l'intéressé, qui facturait ses prestations à ce rythme ; que M. A ne soutient pas que les montants déterminés ainsi qu'il vient d'être dit seraient supérieurs aux montants effectivement crédités sur le compte fournisseur susmentionné ; qu'il ne saurait, par suite, utilement se prévaloir de ce que la méthode de calcul des fonds mis à disposition au 31 décembre de chaque année est erronée ; que, toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de la décision précitée que, si les sommes taxées sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts au titre de l'année 1998 ont été déterminées à partir des rémunérations trimestriellement mises à la disposition de l'intéressé en ce qui concerne les 3 premiers trimestres, les sommes taxées sur ce fondement au titre du quatrième trimestre correspondent aux montants effectivement encaissés par M. A ; que l'administration, à qui incombe la charge de la preuve du bien-fondé de l'imposition, n'établit, ni même d'ailleurs n'allègue, que les sommes ainsi versées au cours de ce quatrième trimestre ne peuvent correspondre à celles qui ont été mises à la disposition de M. A avant le 30 septembre 1998, et notamment à celles qui ont été taxées au titre de la période antérieure à cette date ; que les requérants sont, par suite, fondés à soutenir que la méthode de détermination de leurs revenus au titre de l'année 1998 est susceptible d'aboutir à une double taxation des mêmes sommes et, en conséquence, à demander la décharge de la taxation des sommes perçues au titre du quatrième trimestre 1998 et intégrées à ce titre dans leur revenu imposable de cette année, soit 205 000 F ;

Considérant, enfin, que la doctrine administrative référencée D. adm. 5 H 12 n° 6 ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ; qu'elle n'est, par suite, pas invocable sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l' intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ;

Considérant que la sous-estimation par les requérants de leur revenu imposable provient de la fausse qualification donnée par les intéressés aux sommes perçues par M. A, qui leur a permis de limiter leur revenu déclaré à raison des prestations rendues par l'intéressé à la société FGECO aux sommes effectivement encaissées et de minorer sensiblement, contrairement à ce qui est soutenu, le montant effectivement taxable ; que, M. A exerçant la profession d'expert comptable, la minoration du revenu déclaré du foyer fiscal doit être regardée comme ayant été effectuée sciemment ; que l'administration était, par suite, fondée à appliquer les pénalités exclusives de bonne foi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont seulement fondés à demander la réduction, à hauteur de 205 000 F, de leur base d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1998 et la décharge, en droits et pénalités, de l'impôt correspondant ; que, pour le surplus, il ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme sur le fondement de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La base d'imposition à l'impôt sur le revenu auquel M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 1998 est réduite de 205 000 F.

Article 2 : M. et Mme A sont déchargés des droits et pénalités correspondant à la réduction de base définie à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 1er juillet 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 08PA04593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA04593
Date de la décision : 16/12/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : GERBET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-16;08pa04593 ?
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