La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2010 | FRANCE | N°09PA01151

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 décembre 2010, 09PA01151


Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2009, présentée pour M. Jean-Christophe A, demeurant ..., par Me Castro ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0311526 du 19 décembre 2008 du Tribunal administratif de Paris en tant que, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 191 990 euros en ce qui concerne la totalité des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993, il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémenta

ires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1996, 199...

Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2009, présentée pour M. Jean-Christophe A, demeurant ..., par Me Castro ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0311526 du 19 décembre 2008 du Tribunal administratif de Paris en tant que, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 191 990 euros en ce qui concerne la totalité des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993, il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1996, 1997, 1998, 1999 et 2000 et des pénalités dont ces cotisations ont été assorties ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre une somme de 10 000 euros à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2010 :

- le rapport de M. Dalle, rapporteur,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me Castro, pour M. MITERRAND ;

Considérant que M. Jean-Christophe A, marié à Mme Elisabeth B jusqu'au 24 janvier 2006, date à laquelle leur divorce par consentement mutuel a été prononcé, a fait l'objet ainsi que son épouse en 2001 et 2003 de deux examens de situation fiscale personnelle portant sur les années 1998, 1999 et 2000 ; que, concomitamment, son activité de consultant a fait l'objet de trois vérifications de comptabilité, portant sur les années 1994 à 2000 ; qu'à l'issue de ces contrôles, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ont été mises à la charge des époux au titre des années 1992 et 1993 et 1996 à 2000 ; qu'au titre de 1992 et 1993, l'administration a imposé des salaires que M. A n'avait pas déclarés ; qu'au titre des années 1996 à 2000, elle a imposé les bénéfices non commerciaux liés à l'activité de consultant de l'intéressé, qu'il n'avait pas non plus déclarés ; qu'au titre de la seule année 1999, elle a taxé d'office, sur le fondement de l'article L. 66-1° du livre des procédures fiscales, des crédits, dont le caractère non imposable n'a pas été justifié, apparaissant sur un compte bancaire ouvert au nom des époux et sur un compte bancaire ouvert au nom de Mme B ; que M. A relève appel du jugement du 19 décembre 2008 du Tribunal administratif de Paris en tant que, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 191 990 euros en ce qui concerne la totalité des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 1992 et 1993, il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à la charge des époux au titre des années 1996, 1997, 1998, 1999 et 2000 et des pénalités dont ces cotisations ont été assorties ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que le requérant soutient que l'administration ne l'a pas informé, avant la mise en recouvrement des impositions en litige, de ce qu'elle avait, afin d'établir que son domicile fiscal se trouvait en France et que sa résidence n'était pas séparée de celle de son épouse, recueilli, dans l'exercice de son droit de communication, les procès-verbaux d'audition de lui-même et de M. Olivier C, établis par l'autorité judiciaire dans le cadre de la procédure pour fraude fiscale initiée à son encontre ;

Considérant que, s'il incombe à l'administration, lorsqu'elle envisage de modifier les bases d'imposition d'un contribuable, d'informer celui-ci de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir auprès de tiers dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition, en l'espèce, il résulte de l'instruction que les notifications de redressements des 30 novembre 2001 et 28 novembre 2003, consécutives à la vérification de comptabilité de l'activité de consultant de M. A et dont procèdent les impositions litigieuses, faisaient référence aux documents, issus des procédures d'instruction, intéressant MM. Olivier C ou Jean-Christophe A et obtenus par l'administration auprès de l'autorité judiciaire, dans le cadre du droit de communication défini aux articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, avec une précision suffisante pour permettre au requérant d'en demander la communication ; qu'ainsi le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition ne peut qu'être rejeté ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne l'application des articles 4 A et 4 B du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : 1. Sont considérés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) ; que, pour l'application des dispositions du paragraphe a du 1 de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;

Considérant que le requérant indique lui-même qu'au cours des années en litige son épouse et son fils unique, alors mineur, vivaient en France, dans le département du Gers ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressé, qui, ainsi qu'il a été dit, n'a divorcé qu'en janvier 2006, à la suite d'une demande de divorce par consentement mutuel introduite le 1er décembre 2005, n'aurait plus vécu avec sa famille pendant les années en litige ; que les attestations qu'il produit à cet égard, postérieures aux contrôles et dont deux seulement, établies par une employée et par une amie de Mme B, font état d'une séparation de fait, sont dépourvues de caractère probant ; qu'au contraire, les époux ont souscrit des déclarations de revenus communes au titre des années 1996, 1997 et 1998, n'ont souscrit aucune déclaration au titre des années 1999 et 2000 malgré l'envoi de mises en demeure par le service et, dans un courrier adressé à l'administration fiscale le 7 janvier 1999, le requérant a indiqué qu'il était toujours marié, que sa famille résidait dans le département du Gers et qu'il n'effectuait des séjours à Paris que pour des raisons professionnelles ; que, par ailleurs, l'administration a relevé que M. A avait signalé à diverses administrations l'adresse du 22 rue de Bièvre à Paris comme celle de son domicile, qu'une ligne téléphonique y était ouverte à son nom et qu'il y employait du personnel ; qu'à partir de relevés de téléphones portables et d'opérations bancaires, elle a constaté que la durée du séjour en France du requérant avait été de 276 jours en 1999 et de 250 jours en 2000 ; qu'elle a également déduit de renseignements recueillis auprès de la compagnie Air France que les séjours de M. A en Mauritanie, où l'intéressé soutient avoir établi son domicile à compter de 1995, n'avaient pas excédé 53 jours en 1998, 32 jours en 1999 et 20 jours en 2000 ; que le requérant conteste les constatations ainsi opérées par le service, sans apporter cependant d'élément de nature à les remettre en cause alors que l'administration soutient sans contredit que M. A n'établit pas avoir disposé en Mauritanie, au cours des années en litige, d'un foyer d'habitation permanent ; que, dans ces conditions, dès lors que l'intéressé vivait habituellement en France, que le centre de ses intérêts familiaux s'y trouvait et en l'absence d'indice tangible de séparation de fait, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que le foyer et par suite le domicile fiscal, au sens de l'article 4 B du code général des impôts, du requérant se trouvaient en France ; qu'en outre, il ressort des motifs d'un arrêt rendu le 13 janvier 2006 par la Cour d'appel de Paris, confirmé le 25 octobre 2006 par la chambre criminelle de la Cour de cassation, condamnant Jean-Christophe A pour fraude fiscale au titre des années 1998 et 1999, que l'intéressé avait en France son domicile fiscal, notamment parce que son foyer, au sens du a. de l'article 4 B du code général des impôts, s'y trouvait ;

En ce qui concerne l'application de la Convention fiscale entre la France et la Mauritanie :

Considérant que les revenus en cause consistent, d'une part, en des rémunérations versées à M. A en contrepartie de son activité de consultant, relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux, d'autre part, en des crédits bancaires d'origine inexpliquée, imposés sur le fondement de l'article L. 66-1° du livre des procédures fiscales ; que les articles 23 et 25 de la convention franco-mauritanienne du 15 novembre 1967, relatifs respectivement aux bénéfices non commerciaux et aux revenus non visés expressément , disposent : - Article 23 : 1. Les revenus qu'une personne domiciliée dans un État contractant retire d'une profession libérale ou d'autres activités indépendantes de caractère analogue ne sont imposables que dans cet État, à moins que cette personne, ne dispose de façon habituelle dans l'autre État contractant d'une base fixe pour l'exercice de ses activités. Si elle dispose d'une telle base, la partie des revenus qui peut être attribuée à cette base est imposable dans cet autre État (...) - Art. 25 : Les revenus non mentionnés aux articles précédents [revenus non visés expressément] ne sont imposables que dans l'État contractant du domicile fiscal du bénéficiaire à moins que ces revenus ne se rattachent à l'activité d'un établissement stable que ce bénéficiaire posséderait dans l'autre État contractant ;

Considérant que le requérant soutient qu'il était domicilié en Mauritanie, au sens de ces stipulations et que les revenus litigieux ne pouvaient par suite être imposés que dans cet État ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention susmentionnée : 1. Une personne physique est domiciliée, au sens de la présente convention, au lieu où elle a son foyer permanent d'habitation , cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer le domicile d'après l'alinéa qui précède, la personne physique est réputée posséder son domicile dans celui des États contractants où elle séjourne le plus longtemps. En cas de séjour d'égale durée dans les deux États, elle est réputée avoir son domicile dans celui dont elle est ressortissante. Si elle n'est ressortissante d'aucun d'eux, les autorités administratives supérieures des États trancheront la difficulté d'un commun accord ;

Considérant que, comme il a été dit, M. A résidait habituellement en France et y avait le centre de ses intérêts familiaux ; qu'il n'établit pas avoir noué de relations personnelles en Mauritanie ni avoir eu dans ce pays une base fixe ou un établissement stable à partir desquels il aurait exercé son activité ; que les stipulations précitées de la convention franco-mauritanienne ne faisaient donc pas obstacle à ce que les revenus litigieux fussent imposés en France ;

En ce qui concerne la demande d'imposition séparée :

Considérant qu'aux termes du 4 de l'article 6 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Les époux font l'objet d'impositions distinctes : a Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans le cas d'époux séparés de biens, le simple fait que les intéressés résident sous des toits séparés entraîne leur imposition distincte, dès lors que cette résidence n'a pas un caractère temporaire ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A étaient mariés sous le régime de la séparation de biens ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit plus haut, les pièces produites par M. A ne suffisent pas à établir qu'il aurait résidé sous un toit différent de celui de son épouse au cours des années en litige ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il devait faire l'objet d'une imposition distincte ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;

Considérant que le requérant conteste la majoration de 40 % qui lui a été appliquée au titre de l'année 2000, en application des dispositions précitées ; qu'il ne pouvait ignorer cependant que son domicile fiscal, au sens des articles 4 A et 4 B du code général des impôts, était situé en France, qu'il ne disposait d'aucune base fixe en Mauritanie et qu'il était par suite tenu de déclarer en France les revenus tirés de son activité de consultant ; que l'administration établit, dans ces conditions, la mauvaise foi du contribuable ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme en remboursement des frais exposés par M. A à l'occasion du présent litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

''

''

''

''

2

N° 09PA01151


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA01151
Date de la décision : 31/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CASTRO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-31;09pa01151 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award