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08/11/2012 | FRANCE | N°11PA00339

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 08 novembre 2012, 11PA00339


Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2011, présentée pour M. Hassan B, demeurant ..., par la SCP Comolet, Mandin et associés ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0810073/6-1 du 12 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a limité l'indemnisation des préjudices résultant des séquelles de l'opération chirurgicale qu'il a subie le 8 février 2007 à l'hôpital européen Georges Pompidou de Paris à la somme de 9 129 euros ;

2°) de déclarer l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) entièrement responsable desdits préju

dices et de la condamner en conséquence à lui verser les sommes de 10 524 euros au...

Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2011, présentée pour M. Hassan B, demeurant ..., par la SCP Comolet, Mandin et associés ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0810073/6-1 du 12 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a limité l'indemnisation des préjudices résultant des séquelles de l'opération chirurgicale qu'il a subie le 8 février 2007 à l'hôpital européen Georges Pompidou de Paris à la somme de 9 129 euros ;

2°) de déclarer l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) entièrement responsable desdits préjudices et de la condamner en conséquence à lui verser les sommes de 10 524 euros au titre des pertes de gains professionnels, 640 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel, 8 000 euros au titre des souffrances endurées, 79 526, 34 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs, 30 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et de la pénibilité, 30 000 euros au titre de la perte de retraite, 7 600 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, 8 000 euros au titre du préjudice d'agrément et réserver les postes de préjudices relatifs aux dépenses de santé restées à charge et futures ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Julliard, rapporteur,

- les conclusions de Mme Merloz, rapporteur public,

- et les observations de Me Hayère, pour M. B et celles de Me Litaudon, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

1. Considérant que M. B, né en 1957 et exerçant la profession d'artisan boulanger, a présenté en 2002, à la suite d'un entraînement de boxe, une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite ; qu'une opération de réparation de cette coiffe lui a été proposée pour laquelle il a été hospitalisé du 7 au 16 février 2007 à l'hôpital européen Georges Pompidou à Paris, suivie d'une rééducation au centre de la Châtaigneraie jusqu'au 9 juillet 2007 ; que l'immobilisation postopératoire du bras et de l'épaule de l'intéressé dans une orthèse thoraco-brachiale a entraîné une compression de son nerf cubital, à l'origine de séquelles douloureuses et d'une perte de force de sa main droite ; que M. B relève appel du jugement du 12 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a limité l'indemnisation des préjudices résultant de l'opération chirurgicale qu'il a subie le 8 février 2007 à l'hôpital européen Georges Pompidou de Paris à la somme de 9 129 euros ;

Sur l'étendue de la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris :

2. Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;

3. Considérant que M. B soutient qu'en jugeant que le retard fautif dans la prise en charge de la complication survenue à la suite de l'opération chirurgicale qu'il venait de subir, consistant en une compression ulnaire, n'avait été à l'origine que d'une perte de chance pour lui de bénéficier d'une atténuation des séquelles liées à cette complication, le tribunal a donné une interprétation erronée des termes du rapport d'expertise qui retient l'existence d'une faute de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) de nature à engager la responsabilité de cette dernière et à conduire à l'indemnisation intégrale de son préjudice ;

4. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise du professeur C en date du 18 novembre 2008 que si les séquelles que M. B présente à la main droite sont en relation directe avec la complication survenue, elle-même spécifique à la technique opératoire choisie, des précautions avaient été prises tant en préopératoire (coussin dans l'orthèse) qu'en peropératoire (protection du coude), qui n'ont pu empêcher sa survenance ; qu'en négligeant, en revanche, de prendre en compte les doléances du patient postérieurement à l'opération et en tardant à modifier les conditions d'immobilisation de son bras dans l'orthèse, les équipes médicales ont compromis les chances de M. B d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont limité la responsabilité de l'AP-HP à la réparation de la fraction du dommage corporel de M. B correspondant à l'ampleur de la chance perdue ;

5. Considérant qu'en fixant à 50% l'ampleur de la chance perdue par M. B d'atténuer les conséquences de la complication survenue, le tribunal a justement apprécié cette part ;

Sur l'indemnisation des préjudices de M. B :

En ce qui concerne les pertes de revenus :

6. Considérant qu'il y a lieu, ainsi que l'a fait le tribunal, de faire droit à la demande d'indemnisation de la perte de revenus de M. B au titre des mois d'octobre et de novembre 2007 en lui accordant la somme de 3 258 euros qu'il réclame et de rejeter sa demande au titre de ses revenus professionnels ultérieurs et de ses pensions de retraite futures, dès lors qu'il ne démontre pas davantage en appel qu'en première instance que les variations de revenus enregistrées à compter de 2008 seraient liées aux séquelles de la complication survenue à l'occasion de l'intervention chirurgicale qu'il a subie le 8 février 2007 au centre hospitalier européen Georges Pompidou, ni que ces séquelles auront des incidences sur le montant de ses revenus professionnels futurs ou de sa retraite ;

En ce qui concerne l'incidence professionnelle :

7. Considérant que compte tenu de l'augmentation de la pénibilité éprouvée au travail par M. B, en particulier dans ses activités de pâtissier, relevée par l'expert, la somme de 2 000 euros allouée à ce titre par le tribunal sera portée à 5 000 euros ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B a enduré des souffrances physiques et morales évaluées par l'expert à 2,5 sur une échelle de 7 que le tribunal a, à bon droit, indemnisées à hauteur de 3 000 euros ; que le tribunal a également, à juste titre estimé que le requérant ne pouvait demander l'indemnisation de son incapacité temporaire totale de 8 mois, dès lors que cette incapacité était en lien avec l'opération chirurgicale de l'épaule et ne pouvait être regardée comme étant directement liée à sa mauvaise prise en charge postopératoire ; que le tribunal a, en outre, fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, incluant son incapacité permanente partielle de 8% et son préjudice d'agrément, en allouant à M. B une somme globale de 10 000 euros ;

En ce qui concerne l'indemnité totale due à M. B :

9. Considérant que l'indemnité mise à la charge du tiers responsable doit être fixée à une fraction du préjudice total déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été dit, le préjudice indemnisable doit être fixé à 50% du préjudice total indemnisable ; que les préjudices subis par M. B ayant été fixés à 21 258 euros, le préjudice à indemniser s'élève à la somme de 10 629 euros ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner l'AP-HP à verser à M. B la somme de 10 629 euros ;

Sur les frais d'expertise :

10. Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 916, 20 euros par ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Paris en date du 18 décembre 2008, à la charge définitive de l'AP-HP ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par l'AP-HP ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à M. B est portée à 10 629 euros. Le jugement n° 0810073/6-1 du 12 novembre 2010 du Tribunal administratif de Paris est modifié en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 2 : Les frais d'expertise, d'un montant de 916, 20 euros, sont mis à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B et les conclusions d'appel incident de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris sont rejetés.

Article 4 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à M. B, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10PA03855

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N° 11PA00339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA00339
Date de la décision : 08/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme MERLOZ
Avocat(s) : SCP COMOLET, MANDIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-11-08;11pa00339 ?
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