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31/12/2013 | FRANCE | N°11PA01576

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 31 décembre 2013, 11PA01576


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 mars 2011, présentée pour

la société Socinter/Socopa International, dont le siège est au 33 avenue du Maine, Tour Maine Montparnasse, à Paris Cedex 15 (75755), par Me A... B...;

La société Socinter/Socopa International demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n°0908910 en date du 28 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trente-sept titres de recette numérotés de 2009000008 à 2009000044 et émis à son encontr

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8 janvier 2009 par l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 mars 2011, présentée pour

la société Socinter/Socopa International, dont le siège est au 33 avenue du Maine, Tour Maine Montparnasse, à Paris Cedex 15 (75755), par Me A... B...;

La société Socinter/Socopa International demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n°0908910 en date du 28 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trente-sept titres de recette numérotés de 2009000008 à 2009000044 et émis à son encontre le

8 janvier 2009 par l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions (ONIEP) pour un montant total de 63 968,91 euros ;

2°) d'annuler ces titres de recette ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel ;

4°) de mettre à la charge de FranceAgriMer, substituée à l'ONIEP, le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaires ;

Vu le règlement (CE) n° 800/1999 de la Commission du 15 avril 1999 portant modalités communes d'application du régime des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2013 :

- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ladreyt , rapporteur public,

- les observations de Me Ferrer, avocat de la société Socinter/Socapa International, et de Me Alibert, avocat de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer ;

1. Considérant que, au cours de l'année 2001, la société Socinter/Socopa International a exporté des bovins vivants, par voie maritime depuis le port de Sète, à destination du Liban ; que, dans le cadre de ces opérations, elle a procédé, dans deux bureaux de douane différents, à savoir un premier bureau, dit "bureau intérieur", et un second bureau, dit "bureau de Sète", à des déclarations des quantités de viande bovine exportée ; que, sur la base de ces déclarations, elle a bénéficié, en application du règlement (CE) n° 800/1999 susvisé, d'aides à l'exportation sous la forme d'avances sur restitutions ; que les animaux destinés à l'exportation ont été ultérieurement transportés sur le port de Sète aux fins d'embarquement ; qu'une fois parvenus sur le port, et préalablement à leur embarquement, ils ont fait l'objet d'une pesée, effectuée par les soins de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) du port de Sète ; que cette pesée a révélé que le poids réel des animaux était très inférieur à la masse déclarée en douane par la société Socinter/Socopa International ; qu'à la suite d'un contrôle administratif, l'administration des douanes, se fondant notamment sur les données résultant du pesage effectué par la CCI du port de Sète, a procédé à la rectification des quantités déclarées en douane, tout en appliquant une marge de tolérance, au titre de la perte de poids naturelle des animaux durant le transport jusqu'à leur point d'embarquement, d'un montant de 8% pour les masses déclarées dans le bureau intérieur, et de 2% pour celles déclarées dans le bureau de Sète ; qu'un procès-verbal, daté du

16 décembre 2004, a été adressé à la suite de ce contrôle à la société Socinter/Socopa International pour lui notifier les infractions constatées ; que le procès-verbal a également été transmis à l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions (ONIEP), chargé de verser les restitutions à l'exportation et de recouvrir les sommes indûment perçues ; qu'un échange de lettres a eu lieu en 2007 et 2008 entre la société Socinter/Socopa International et l'Office mais qui n'a pas permis d'aboutir à la solution du litige ; que, le

8 janvier 2009, l'Office, aux droits duquel est venu l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer), a émis à l'encontre de la société Socinter/Socopa International trente-sept titres de recette pour un montant total de 63 968,91 euros ; que la société Socinter/Socopa International interjette régulièrement appel du jugement en date du

28 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces titres de recettes ;

En ce qui concerne les marges de tolérance appliquées :

2. Considérant que la société Socinter/Socopa International conteste l'application, dans son principe même, des marges de tolérance susévoquées aux différences constatées entre les masses déclarées en douane, d'une part, et celles relevées lors de la pesée dans les locaux de la chambre de commerce et d'industrie du port de Sète, d'autre part ; qu'à cette fin, elle fait notamment valoir que l'application de ces marges de tolérance est dépourvue de toute base légale ;

3. Considérant, toutefois, que la société requérante ne saurait utilement critiquer, à l'appui de ses conclusions dirigées contre les titres de recettes contestés, l'application de ces marges de tolérance, dès lors que cette application, dans les conditions sus-exposées, a eu pour seul objet et pour seul effet de limiter, à son profit, le montant des restitutions indûment versées qui ont été mises à sa charge par l'établissement public défendeur à la suite du contrôle administratif dont elle a fait l'objet ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 5, paragraphe 6, du règlement (CE)

n° 800/1999 susvisé : " Par dérogation à l'article 282, paragraphe 2, du règlement (CEE)

n° 2454/93, il peut être prévu, dans l'autorisation de déclaration d'exportation simplifiée, que la déclaration simplifiée contienne une estimation de la masse nette des produits, dans les cas où cette masse ne peut être établie avec exactitude qu'après chargement du moyen de transport pour des produits exportés en vrac ou dans des unités non standardisées. / La déclaration complémentaire comportant l'indication de la masse nette exacte doit être déposée dès l'achèvement du chargement. Elle doit être accompagnée des preuves documentaires attestant la masse nette exacte chargée. / Aucune restitution n'est octroyée pour la quantité dépassant 110% de la masse nette estimée. Lorsque la masse effectivement chargée est inférieure à 90% de la masse nette estimée, la restitution pour la masse nette effectivement chargée sera réduite de

10% de la différence entre la restitution correspondant aux 90% de la masse nette estimée et la restitution correspondant à la masse effectivement chargée (...) " ;

5. Considérant que la société Socinter/Socopa International soutient que ces dispositions feraient obligation à l'administration de lui appliquer une marge de tolérance d'au moins 10% ; que, toutefois, la marge de tolérance prévue par les dispositions précitées découle de la difficulté à estimer le poids des animaux avant leur chargement ; que, par suite, cette marge de tolérance ne saurait s'appliquer au titre de la perte de poids naturelle consécutive au transport des animaux exportés ;

6. Considérant que la société requérante se prévaut des prescriptions d'une note interne de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) en date du 12 juillet 1993, lesquelles prévoiraient l'application d'une marge de tolérance d'un montant de 12% ; que, toutefois, à supposer que cette note, dépourvue de valeur réglementaire, soit invocable, celle-ci n'est relative, en tout état de cause, qu'au prononcé d'éventuelles sanctions à l'encontre de l'exportateur et ne concerne aucunement le mode de liquidation des restitutions versées aux exportateurs ;

En ce qui concerne la violation de l'article 15, paragraphe 4, du règlement (CE)

n° 800/1999 de la Commission du 15 avril 1999 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 15, paragraphe 4, du règlement (CE)

n° 800/1999 de la Commission du 15 avril 1999 portant modalités communes d'application du régime des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles : " (...) 4. La partie différenciée de la restitution est payée sur la masse des produits qui ont fait l'objet des formalités douanières d'importation dans le pays tiers ; toutefois, il n'est pas tenu compte des variations de masses intervenues en cours de transport par suite de causes naturelles et reconnues par les autorités compétentes (...) " ;

8. Considérant que la société requérante soutient qu'aucune disposition du règlement précité ne détermine un pourcentage de tolérance qui permettrait d'évaluer les variations de masse intervenues en cours de transport des animaux par suite de causes naturelles ;

9. Considérant, toutefois, que, si les dispositions précitées autorisent les autorités douanières nationales à ne pas rectifier les masses déclarées au moment de l'embarquement dans l'Etat membre (UE) d'exportation, nonobstant la circonstance que, à l'arrivée dans le pays d'importation (hors UE), les animaux aient perdu du poids, dès lors que les variations de masses intervenues en cours de transport sont dues à des causes naturelles, la circonstance, en l'espèce, que les animaux aient perdu du poids à l'occasion de leur acheminement, au sein de l'Etat membre d'exportation, vers le point d'embarquement, demeure sans incidence sur le droit à restitution, calculé exclusivement en fonction du poids réel constaté au moment de l'embarquement et de la déclaration définitive d'exportation ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée, dans les circonstances de l'espèce, à se prévaloir des dispositions précitées pour solliciter l'application d'une marge de tolérance, quel que soit le montant de celle-ci, au titre de la perte de poids naturelle des animaux consécutive à leur acheminement vers leur point d'embarquement ;

En ce qui concerne la méthode de pesée mise en oeuvre :

10. Considérant que la société requérante critique la méthode de pesée mise en oeuvre par la CCI du port de Sète consistant à peser, dans un premier temps, le camion plein, puis, dans un second temps, une fois déchargés les animaux, le camion vide, puis par soustraction d'en déduire le poids des animaux ; que si la société requérante soutient que cette pesée ne serait pas fiable dès lors qu'il s'agit d'une pesée camion plein / camion vide et que la freinte a été plus importante que celle prise en compte, elle n'apporte aucun élément sérieux au soutien de ces affirmations ; qu'au demeurant, cette pesée n'a pas été réalisée à la demande de l'administration des douanes mais à celle de la société requérante elle-même qui l'a utilisée pour payer ses fournisseurs et calculer le montant dû au titre de la manutention et du transport du bétail ; que, par ailleurs, il ressort des termes mêmes de l'article 78 du code des douanes communautaires précité que les contrôles sont réalisés à partir des " documents et données commerciaux relatifs aux opérations d'importation ou d'exportation des marchandises dont il s'agit " ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les titres de recettes litigieux seraient entachés d'une erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'inégalité de traitement :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 78 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaires : " (...) 2. Les autorités douanières peuvent, après avoir donné mainlevée des marchandises et afin de s'assurer de l'exactitude des énonciations de la déclaration, procéder au contrôle des documents et données commerciaux relatifs aux opérations d'importation ou d'exportation des marchandises dont il s'agit ainsi qu'aux opérations commerciales ultérieures relatives aux mêmes marchandises. Ces contrôles peuvent s'exercer auprès du déclarant, de toute personne directement ou indirectement intéressée de façon professionnelle auxdites opérations ainsi que de toute autre personne possédant en tant que professionnel lesdits documents et données. Ces autorités peuvent également procéder à l'examen des marchandises, lorsqu'elles peuvent encore être présentées (...) " ;

12. Considérant que la société Socinter/Socopa International soutient être victime d'une distorsion de concurrence et d'une discrimination prohibée par le droit de l'Union européenne, au motif que seuls les exportateurs français seraient exposés au contrôle de leurs déclarations en douane ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que ce contrôle, prévu par les dispositions précitées de l'article 78 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du

12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaires, peut être diligenté à l'encontre de tout exportateur communautaire ayant effectué une déclaration dans les bureaux des douanes françaises ; qu'en l'espèce, si les autorités françaises n'ont compétence que pour contrôler les déclarations effectuées dans les bureaux des douanes françaises, la requérante ne démontre pas que les autorités des autres Etats membres de l'Union européenne ne procèderaient pas, en application du règlement du Conseil qui les y autorise, à des vérifications similaires ; que le moyen tiré d'une inégalité de traitement doit donc être écarté, sans qu'il soit besoin de poser sur ce point une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer pour poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que

la société Socinter/Socopa International n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par

le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'établissement public FranceAgriMer, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Socinter/Socopa International demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Socinter/Socopa International une somme de 3 500 euros à verser à FranceAgriMer sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Socinter/Socopa International est rejetée.

Article 2 : La société Socinter/Socopa International versera à FranceAgriMer une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11PA01576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01576
Date de la décision : 31/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

14-07-02 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Commerce extérieur. Exportations.


Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: M. Michel ROMNICIANU
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : ABENSOUR-GIBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-31;11pa01576 ?
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