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31/12/2013 | FRANCE | N°11PA02600

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 décembre 2013, 11PA02600


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2011, présentée pour M. A...D..., demeurant..., par MeB... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708736, 0708748 et 0720690/5-3 du 13 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses requêtes tendant à condamner la Caisse des dépôts et consignations à l'indemniser de ses pertes de revenus, de ses souffrances physiques, des frais médicaux entraînés par sa maladie professionnelle et des troubles dans les conditions d'existence causés, d'une part, par le refus de porter à huit ans la durée de

son congé de longue durée et, d'autre part, par le retard pris par la C...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2011, présentée pour M. A...D..., demeurant..., par MeB... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708736, 0708748 et 0720690/5-3 du 13 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses requêtes tendant à condamner la Caisse des dépôts et consignations à l'indemniser de ses pertes de revenus, de ses souffrances physiques, des frais médicaux entraînés par sa maladie professionnelle et des troubles dans les conditions d'existence causés, d'une part, par le refus de porter à huit ans la durée de son congé de longue durée et, d'autre part, par le retard pris par la CDC pour tenir son engagement de statuer sur sa demande de prolongation de son congé de longue durée ;

2°) d'annuler la décision du 13 novembre 2007 de la CDC rejetant sa demande d'indemnisation ;

3°) de condamner la CDC à lui verser la somme de 43 847,61 euros au titre de la perte de revenus ;

4°) de condamner la CDC à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des souffrances physiques ;

5°) de condamner la CDC à lui verser la somme de 10 000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence que lui a causé le refus de porter à huit ans la durée de son congé de longue durée ;

6°) d'annuler la décision de rejet de la demande indemnitaire du 2 mai 2007 sollicitée à raison du retard pris pour statuer sur sa demande de prolongation du congé de longue durée ;

7°) de condamner la CDC à lui verser la somme de 10 000 euros au titre du retard pris pour statuer sur sa demande de prolongation du congé de longue durée ;

8°) subsidiairement, de désigner un expert et lui donner pour mission de dire si le syndrome anxio-dépressif dont il a été victime a été contracté dans l'exercice de ses fonctions, de dire et chiffrer les préjudices subis du fait de sa maladie et de condamner la CDC à lui verser la somme fixée au vu de ses conclusions ;

9°) de mettre à la charge de la CDC une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 7 juillet 2011 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :

- le rapport de M. Gouès, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant de M. D...et de MeC..., représentant la Caisse des dépôts et consignations ;

1. Considérant que M. D...relève appel du jugement du 13 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses requêtes tendant à la condamnation de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à réparer, d'une part, les préjudices résultant des pertes de revenus, des souffrances physiques, des frais médicaux et des troubles dans les conditions d'existence causés par le refus de porter à huit ans la durée de son congé de longue durée, et, d'autre part, les préjudices résultant du retard pris par la CDC pour tenir son engagement de statuer sur sa demande de prolongation de son congé de longue durée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si M. D...soutient que le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer tirée de l'absence de réponse des premiers juges à sa demande de désignation d'un expert afin de rendre un avis sur l'imputabilité ou non au service de son syndrome anxio-dépressif, il ressort des pièces du dossier que le tribunal à répondu à cette demande en indiquant, au point 4 de son jugement, " que, dans ces conditions, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner une nouvelle expertise, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus d'imputabilité de sa maladie au service serait entaché d'erreur d'appréciation " ; que, par suite, ce moyen manque en fait et doit être écarté ;

Au fond :

En ce qui concerne le refus de prolongation du congé de longue durée :

Sur l'imputabilité au service des troubles dépressifs de M.D... :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. (...) " ; qu'aux termes de l'article 32 du décret du 14 mars 1986, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque le congé de longue durée est demandé pour une maladie contractée dans l'exercice des fonctions, le dossier est soumis à la commission de réforme. Ce dossier doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. La demande tendant à ce que la maladie soit reconnue comme ayant été contractée dans l'exercice des fonctions doit être présentée dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de la maladie. L'avis de la commission de réforme et le dossier dont elle a disposé sont transmis à l'administration dont relève l'agent intéressé. La décision de l'autorité compétente est prise après consultation du comité médical supérieur, qui se prononce sur les conclusions de la commission de réforme accompagnées des rapports d'enquête et d'expertise, ainsi que des observations de l'administration. " ; qu'aux termes de l'article 35 du même décret : " Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, les fonctionnaires en position d'activité ou leurs représentants légaux doivent adresser à leur chef de service une demande appuyée d'un certificat de leur médecin traitant spécifiant qu'ils sont susceptibles de bénéficier des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical prévu aux articles 5 et 6 un résumé de ses observations et les pièces justificatives qui peuvent être prescrites dans certains cas par les arrêtés prévu à l'article 49 du présent décret. Sur le vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause. Le dossier est ensuite soumis au comité médical compétent. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. L'avis du comité médical est transmis au ministre qui le soumet pour avis, en cas de contestation par l'administration ou l'intéressé, ou dans l'hypothèse prévue au deuxième alinéa de l'article 28 ci-dessus, au comité médical supérieur visé à l'article 8 du présent décret. (...) " ;

4. Considérant que M. D...soutient que les troubles de santé qui l'affectent sont imputables au service et que l'administration a commis une faute en refusant de le reconnaître ; qu'il fait valoir pour cela qu'à partir de sa réintégration au sein de la CDC le 1er septembre 1999 son état de santé s'est dégradé en raison du retrait de fonctions dont il a été victime à partir du mois de février 2000, du harcèlement moral dont il a été l'objet de la part de son supérieur hiérarchique et du refus de notation et de reprise d'ancienneté, arguant qu'avant sa réintégration il ne souffrait d'aucun traumatisme ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment du certificat médical du docteur Sebeyran du 17 août 1999, que M. D...souffrait d'hypertension depuis 1990 et d'une surcharge pondérale antérieure à sa réintégration ; qu'il ressort également des pièces du dossier qu'il rencontrait, à la même époque, à la fois des difficultés personnelles et financières, ainsi qu'en attestent le protocole d'accord signé entre la CDC et M. D...le 13 avril 2000 et la lettre du docteur Bigret du 9 janvier 2001 ; que, concernant le harcèlement moral allégué, il ressort des pièces du dossier, peu nombreuses sur ce point, et notamment de la lettre du docteur Bigret du 31 mars 2006, qu'il ne peut être question d'" agissements répétés " ni de " références à des difficultés relationnelles avec son administration sur le plan administratif " ; que les refus de notation et de reprise d'ancienneté invoqués M. D...ne peuvent être regardés comme étant en lien avec ses troubles de santé ; qu'enfin, concernant le retrait de fonctions allégué, s'il ressort des pièces du dossier qu'en février 2000 un autre collaborateur s'était vu proposer des fonctions qui s'apparentaient à celles occupées alors par M.D..., lequel devait au demeurant être placé en congé de longue maladie au mois de mai 2000, cette circonstance n'est pas davantage constitutive d'un harcèlement moral à l'encontre du requérant ; qu'il ressort du certificat médical du docteur Magerand du 11 mai 2006 que " les troubles psychopathologiques de M. D...ne sont nullement imputables au service " ; qu'il suit de là que les problèmes de santé rencontrés par M. D... ne sont pas imputables au service et qu'en conséquence, en l'absence de faute de l'administration, la responsabilité de cette dernière n'est pas engagée et il ne peut être fait droit aux différentes demandes indemnitaires présentées par M.D... ;

Sur le vice de procédure :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instruction, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. " ;

6. Considérant que M. D...soutient que les décisions du 7 avril 2006 de la commission de réforme et du 23 janvier 2007 du comité médical ont été prises sans qu'il ait été mis à même de consulter son dossier, en violation des dispositions précitées ; qu'il ressort des pièces du dossier que si pour la première de ces deux réunions M.D..., par un courrier du 14 mars 2006 a bien été informé par la CDC de la possibilité qui lui était offerte de prendre connaissance de son dossier, en revanche, pour la seconde réunion, à l'issue de laquelle le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. D...et par suite de prolonger son congé de longue durée, il n'est pas contesté qu'il n'a pas été invité à prendre connaissance de son dossier ; qu'ainsi c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que M. D...n'a pas été invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier, en méconnaissance des dispositions précitées ; qu'en conséquence, la décision du 5 mars 2007 lui refusant la prolongation de son congé de longue durée a été prise à la suite d'une procédure irrégulière qui l'entache d'illégalité ;

7. Mais considérant que cette irrégularité de procédure, qui présente un caractère fautif, ne serait toutefois de nature à ouvrir droit à l'indemnisation des préjudices allégués que si le lien de causalité entre le vice de procédure et ces préjudices était établi ; qu'en l'espèce M. D... n'a été privé ni de la possibilité de consulter son dossier administratif avant la décision précitée de la CDC ni de celle de formuler des observations écrites et de présenter des certificats médicaux à l'attention notamment du comité médical supérieur ; que dans ces conditions, et dès lors que les troubles de santé dont souffre le requérant sont dépourvus de lien avec le service, l'irrégularité de procédure entachant la décision lui refusant la prolongation de son congé de longue durée n'est pas de nature, en l'absence de lien de causalité avec les préjudices allégués, d'ouvrir droit à réparation de ces préjudices ;

En ce qui concerne le retard mis par la CDC à statuer sur la demande de prolongation du congé de longue durée :

8. Considérant que M. D...demande réparation des préjudices causés par la lenteur de la CDC à répondre à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et de prolongation de son congé de longue durée, en faisant valoir que les deux années écoulées entre sa demande précitée et la décision du 5 mars 2007 lui refusant la prolongation de son congé de longue durée présentent un caractère fautif et ont aggravé ses troubles de santé ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le retard pris par l'administration pour prendre sa décision est essentiellement imputable à M.D..., qui a produit un certificat médical dépourvu d'authenticité, conduisant la commission de réforme à retarder la délivrance de son avis ; qu'ainsi, aucun retard anormal directement imputable à la Caisse des dépôts et consignations n'est établi ; qu'il suit de là que M. D...n'est pas fondé à demander à être indemnisé des préjudices allégués à ce titre ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge la Caisse des Dépôts et Consignations, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter la demande de la CDC présentée sur le même fondement ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Caisse des dépôts et consignations en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 11PA02600


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11PA02600
Date de la décision : 31/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Serge GOUES
Rapporteur public ?: Mme BONNEAU-MATHELOT
Avocat(s) : LAROCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-31;11pa02600 ?
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