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27/05/2014 | FRANCE | N°13PA02027

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 27 mai 2014, 13PA02027


Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2013, présentée pour la société B...Télévision, dont le siège est au 75 rue de Lourmel à Paris (75015), par Ellis société d'avocats ; la société B...Télévision demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205274/2-2 du 25 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de la retenue à... ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la s

omme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2013, présentée pour la société B...Télévision, dont le siège est au 75 rue de Lourmel à Paris (75015), par Ellis société d'avocats ; la société B...Télévision demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205274/2-2 du 25 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de la retenue à... ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2014 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour la société B...Télévision ;

1. Considérant que la société B...Télévision, qui exerce une activité de production audiovisuelle, a conclu un contrat de consultant le 3 septembre 2006 avec l'entreprise de droit suisse A...Art Production représentée par MmeA... ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité du 3 février au 25 juin 2010 portant sur les exercices clos en 2007 et 2008, l'administration fiscale a, selon la procédure de redressement contradictoire, mis à la charge de la société B...Télévision au titre des années 2007 et 2008, des suppléments d'impôts sur les sociétés, une retenue à... ; que la société B...Télévision relève régulièrement appel du jugement du 25 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (la source auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et, d'autre part, de l'amende prévue par l'article 1736-III du code général des impôts mise à sa charge au titre de la même période) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (la source auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et, d'autre part, de l'amende prévue par l'article 1736-III du code général des impôts mise à sa charge au titre de la même période) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

3. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

4. Considérant, en premier lieu, que l'administration fiscale estimant que le montant des honoraires versés à la société A...Art Production en exécution du contrat de consultant du 3 septembre 2006 est excessif a réintégré dans le résultat imposable de chacun des deux exercices clos en 2007 et 2008 la somme de 360 000 euros ; que pour justifier de la déductibilité des honoraires versés mensuellement à la société A...Art Production, la société B...Télévision a produit le contrat du 1er septembre 2006 ainsi que des factures portant le libellé " selon contrat du 3/9/2006 " sans plus de précision ; que l'objet du contrat du 3 septembre 2006 est défini par l'article 2 de celui-ci aux termes duquel " B...Télévision confie au consultant une mission générale, non exclusive afin de rechercher de nouveaux développements vers l'international en accord avec les lois suisses et les instructions de B...TV " ; que l'article 3 du même contrat stipule : " Le consultant garantit B...TV d'utiliser toute sa connaissance, son expérience et son influence en vue d'assister B...TV dans toutes les activités ci-dessous, l'ensemble des activités décrites ci-dessous n'étant pas limitatives : - assistance et conseils pour achats ou location de documents graphiques, anciens ou modernes pouvant être utilisés dans l'élaboration et le décor d'émissions télévisuelles - recherche de tous documents écrits, visuels ou sonores pouvant service à l'élaboration des portraits historiques, d'hommages, d'anniversaires etc. (...) de personnalités dans le monde politique, artistique ou autres - recherche d' éléments pour émissions culturelles et approfondissement des connaissances : artistes, comédiens, chanteurs, hommes ou femmes de légende, tant en France qu'à l'étranger (...) le consultant devra assurer de sa présence selon son planning le plus souvent possible les plateaux de tournage à Paris, en France ou à l'étranger (...) " ; que l'article 4 dudit contrat prévoit que la réalisation de ces prestations donne lieu au versement d'une rémunération de 40 000 euros par mois ; que l'administration a souligné dans sa proposition de rectification le montant élevé de ces honoraires dès lors qu'au cours de la période vérifiée, les émissions réalisées par la société B...Télévision l'ont été à base d'archives, que les concepts et émissions produites n'ont pas été vendues à l'étranger, que la majorité des recherches de la société A...Art Production sont faites sur internet et ne peuvent être qualifiées d'originales ou particulières alors qu'au demeurant la société requérante emploie un documentaliste salarié ; qu'en dépit de ces éléments relevés par l'administration, la société B...Télévision n'apporte toutefois aucun élément suffisamment précis portant sur la nature des prestations fournies par la société A...Art Production et la contrepartie, liée notamment à son développement à l'international, alors même qu'elle admet que la rémunération découlant du contrat s'élève à 8 % du coût des émissions de télévision en cause, qu'elle a pu recevoir de la société A...Art Production au regard des honoraires qu'elle lui a versés ; qu'en particulier, la société B...Télévision ne verse aucune correspondance ou échange de nature commerciale, aucun projet ou devis qui aurait été présenté à des chaînes de télévision française ou étrangère, aucun élément permettant d'attester de la présence sur les tournages de Mme A...représentante de la société A...Art Production ou des contacts établis par celle-ci en exécution du contrat du 3 septembre 2006 ; que, par suite, c'est à bon droit et sans méconnaître les règles de dévolution de la charge de la preuve, que les premiers juges ont considéré que le service devait être regardé - en l'absence de tout élément précis fourni par la société requérante pour répondre aux constatations de l'administration quant à l'étendue des prestations - comme apportant la preuve du caractère excessif de la rémunération versée par la société B...Télévision à la société A...Art Production au regard des contreparties qu'elle en a retirées ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'à l'appui de sa requête, la société B...Télévision fait également valoir que les honoraires complémentaires versés en 2008 pour un montant de 90 000 euros correspondent à la réalisation de prestations intellectuelles relatives à la conception d'émissions spéciales de caractère exceptionnel présentant un surcroît de travail pour la société A...Art Production ; que, les honoraires complémentaires versés en 2007 pour un montant de 75 000 euros et en 2008 pour un montant de 50 000 euros l'ont été pour des prestations ponctuelles dans le cadre de la préparation dans un délai exceptionnellement court de certaines émissions spéciales dédiées à des artistes récemment décédés engendrant également un supplément de travail pour la société consultante ; que, toutefois, la société B...Télévision n'apporte aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le Tribunal administratif de Paris sur son argumentation de première instance, reprise en appel sans élément nouveau ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

En ce qui concerne la retenue à... :

6. Considérant que, pour contester la retenue à la source auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et, d'autre part, de l'amende prévue par l'article 1736-III du code général des impôts mise à sa charge au titre de la même période; que, par suite, les conclusions aux fins de décharge de ladite retenue à... ;

Sur l'amende prévue par les dispositions de l'article 1736 du code général des impôts :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 241 du code général des impôts : " Les entreprises, sociétés ou associations qui procèdent à l'encaissement et au versement des droits d'auteur ou d'inventeur sont tenues de déclarer, dans les conditions prévues aux articles 87, 87 A, 89 et 89 A, le montant des sommes qu'elles versent à leurs membres ou à leurs mandants (la source auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes, et, d'autre part, de l'amende prévue par l'article 1736-III du code général des impôts mise à sa charge au titre de la même période) ; qu'aux termes de l'article 1736 III du même code : " Entraîne l'application d'une amende égale à 5 % des sommes non déclarées le non-respect des obligations prévues par les articles 87, 87A, 88 et 241 " et qu'aux termes de l'article 1729 B dudit code : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'un document qui doit être remis à l'administration fiscale (...) entraîne l'application d'une amende de 150 euros (...) 2. Sauf en cas de force majeure, les omissions ou inexactitudes constatées dans un document mentionné au 1 entraînent l'application d'une amende de 15 euros par omission ou inexactitude, sans que le total des amendes applicables aux documents devant être produits simultanément puisse être inférieur à 60 euros ni supérieur à 10.000 euros (...) " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société B...Télévision a omis de déclarer sur les formulaires de déclaration d'honoraires de 2007 et 2008 les droits d'auteur versés à M. D...B...gérant et associé de la société B...Télévision ; que si elle soutient qu'elle a déposé les déclarations litigieuses elle ne l'établit pas ; que, par suite, l'administration a pu, à bon droit, lui infliger l'amende en application des dispositions précitées de l'article 1736 III du code général des impôts sans que la société requérante puisse se prévaloir des dispositions de l'article 1729 B du code général des impôts ; que, par ailleurs, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

10. Considérant que pour rapporter la preuve du bien-fondé de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré appliquée aux suppléments d'impôts sur les sociétés auxquels a été assujettie la société B...Télévision, le ministre de l'économie et des finances fait valoir le caractère ni probant ni sincère de la comptabilité de 2008, l'importance des honoraires versés à la société A...Art Production établie en Suisse, la répétition de ces versements depuis 2006, l'absence de preuve de la prise en compte fiscale de la société A...Art Production en Suisse et l'absence de numéro de registre commercial sur les factures émises par la société A...Art Production ; qu'en se bornant à soutenir que l'administration fiscale ne rapporte pas la preuve, ce faisant, du manquement délibéré et ne s'est fondée que sur les montants des honoraires versés alors que ceux-ci constituent la contrepartie des prestations réalisées par la société consultante à son profit, la société B...Télévision ne conteste pas les faits ainsi constatés par le service ; que l'administration doit, dès lors, être regardée comme rapportant la preuve de l'intention délibérée d'éluder l'impôt ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société B...Télévision n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société B...Télévision est rejetée.

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N° 13PA02027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02027
Date de la décision : 27/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : ELLIS SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-05-27;13pa02027 ?
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