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31/07/2014 | FRANCE | N°13PA02949

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 juillet 2014, 13PA02949


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2013, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par Me D...; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105756/2 du 30 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 8 mars 2011 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à ses fonctions à compter du 3 avril 2011, d'autre part à la condamnation de l'OFPRA à lui verser une somme correspondant aux rémunérations qu'i

l aurait dû percevoir si son contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme ;...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2013, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par Me D...; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105756/2 du 30 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 8 mars 2011 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à ses fonctions à compter du 3 avril 2011, d'autre part à la condamnation de l'OFPRA à lui verser une somme correspondant aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir si son contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de condamner l'OFPRA à lui verser une somme correspondant aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir si son contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme, soit la somme de 26 780,16 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'OFPRA une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et notamment ses articles 34 et 37 ;

Vu l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2014 :

- le rapport de M. Pagès, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...a été recruté, à compter du 3 janvier 2011, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), par contrat à durée déterminée de

dix-huit mois, pour exercer en qualité d'officier de protection instructeur dans le cadre d'une campagne de recrutement destinée à assurer la résorption du stock de demandes d'asile en instance à l'OFPRA ; qu'il a alors été affecté à la division Afrique au sein de la 4ème section pour y traiter les demandes d'asile en provenance de la République Démocratique du Congo et de la Guinée avec l'assistance de deux officiers de protection chargés d'assurer son tutorat ; que, par décision en date du 8 mars 2011, l'OFPRA a mis fin à ses fonctions à compter du 3 avril 2011, au terme de la période d'essai de trois mois stipulée dans son contrat ; que M. C...a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de l'OFPRA à lui verser une somme correspondant au montant global des salaires qu'il aurait dû percevoir si son contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme ; que dans le cadre de ladite instance il a présenté une question prioritaire de constitutionnalité ; que, par une ordonnance en date du 21 mars 2013, le premier vice-président du tribunal administratif de Melun a refusé de transmettre au Conseil d'État ladite question de constitutionnalité que lui avait soumise M. C...de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 7 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 ; que, par un jugement du 30 mai 2013, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la requête de M. C...sur le fonds du litige qui lui était soumis ; que ce dernier relève régulièrement appel dudit jugement et réitère, en outre, sa question prioritaire de constitutionnalité ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 23-2 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. (...) Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige. " ; qu'aux termes de l'article R. 771-12 du code de justice administrative : " Lorsque, en application du dernier alinéa de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, l'une des parties entend contester, à l'appui d'un appel formé contre la décision qui règle tout ou partie du litige, le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité opposé par le premier juge, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de présenter cette contestation avant l'expiration du délai d'appel dans un mémoire distinct et motivé, accompagné d'une copie de la décision de refus de transmission (...) " ;

3. Considérant que, par une ordonnance en date du 21 mars 2013, le premier vice-président du Tribunal administratif de Melun a refusé de transmettre au Conseil d'État la question que lui avait soumise M. C...de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 7 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 ; que M. C... a, par un mémoire distinct, intitulé " question prioritaire de constitutionnalité ", présenté à l'appui de sa requête d'appel, d'une part, contesté le refus de transmission et, d'autre part, demandé à la cour de transmettre la même question au Conseil d'État en invoquant les mêmes moyens que ceux soulevés devant le tribunal ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : " Le décret qui fixe les dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État recrutés dans les conditions définies aux articles 4, 6, 6 quater, 6 quinquies et 6 sexies de la présente loi est pris en Conseil d'État après avis du Conseil supérieur de la fonction publique. Il comprend notamment, compte tenu de la spécificité des conditions d'emploi des agents non titulaires, des règles de protection sociale équivalentes à celles dont bénéficient les fonctionnaires, sauf en ce qui concerne les régimes d'assurance maladie et d'assurance vieillesse. " ; que M. C...soutient que cette disposition, en tant qu'elle renvoie au pouvoir règlementaire la possibilité d'autoriser l'État à fixer dans les contrats de recrutement des agents non titulaires, une période d'essai sans limitation de durée, est, non seulement entachée d'incompétence négative du législateur dont les compétences propres sont définies par les dispositions de l'article 34 de la Constitution, distinctes des compétences du pouvoir réglementaire définies par les dispositions de l'article 37 de la même Constitution, mais aussi contraire au principe d'égalité entre les agents non titulaires de l'État et les salariés du secteur privé, alors que cette différence de traitement n'est pas justifiée par la différence de situation entre eux ; qu'ainsi, cette disposition n'est pas conforme à la Constitution ; que, toutefois, l'article 7 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée se borne à confier à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État ; qu'en lui-même, le renvoi au décret ainsi opéré, qui n'a d'effet que sur lesdits agents non titulaires de l'État, ne crée aucune discrimination et ne porte atteinte à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu'il suit de là que la question prioritaire de constitutionnalité de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 7 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 ne présente pas un caractère sérieux ; que, dès lors, c'est à bon droit que le premier vice-président du Tribunal administratif de Melun a refusé de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée en première instance ; que, pour les mêmes motifs, il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'État la nouvelle question prioritaire de constitutionnalité présentée par M.C..., sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par l'OFPRA ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret du 17 janvier 1986 susvisé : " Le contrat ou l'engagement peut comporter une période d'essai dont la durée peut être modulée en fonction de celle du contrat. " ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire applicable aux agents publics ne fixe une limite précise à la durée de cette période d'essai, laquelle doit seulement être modulée en fonction de la durée du contrat ; qu'en outre, la période d'essai à laquelle peuvent être soumis les agents publics devant être assimilée à une période de stage, sa durée peut légalement tenir compte de la nature des fonctions exercées et de la période de formation initiale éventuellement prévue ; que, compte-tenu de la technicité et des responsabilités que comporte le métier d'officier de protection instructeur ainsi que de la période de formation qu'il nécessite pour pouvoir être exercé en toute autonomie par les agents nouvellement recrutés par l'OFPRA, les stipulations de l'article 3 du contrat de recrutement de M. C...qui prévoient une période d'essai de trois mois ne méconnaissent pas les dispositions précitées ; que, si M. C...soutient que la période d'essai comporte une durée égale au tiers de la durée du contrat lorsqu'elle est renouvelée, il est constant qu'en tout état de cause, la période d'essai de M. C...n'a pas fait l'objet d'un renouvellement ; qu'il suit de là que la décision du 8 mars 2011 par laquelle l'OFPRA a mis fin aux fonctions de M. C...à compter du 3 avril 2011 a le caractère d'une décision de licenciement en fin de période d'essai, nonobstant l'erreur de plume citant à tort l'article 43-2 du même décret relatif au licenciement à titre disciplinaire, erreur de plume sans incidence sur la légalité de ladite décision ;

6. Considérant, en premier lieu, que le licenciement d'un agent contractuel en fin de période d'essai n'entre dans aucune des catégories de mesures qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979 ; que le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision attaquée doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, si M. C...soutient que l'OFPRA aurait méconnu les règles relatives au délai de prévenance, les dispositions de l'article L. 1332-25 du code du travail qu'il invoque ne sont pas, en l'absence de dispositions expresses les rendant applicables aux agents publics, applicables au licenciement d'un agent contractuel de droit public ; que les dispositions du paragraphe 4-1-3 de la circulaire n° 1262 du 26 novembre 2007, rappelant les dispositions de l'article 45 du décret du 17 janvier 1986 ne sont applicables qu'en cas de non renouvellement de contrat et non, comme en l'espèce, en cas de licenciement à l'issue de la période d'essai ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose un délai de prévenance pour le licenciement d'un agent contractuel de droit public à l'issue de la période d'essai ; qu'en tout état de cause, le délai de trois semaines laissé à M. C...par le courrier du 8 mars 2011 l'avisant qu'il était mis fin à sa période d'essai à compter du 3 avril n'est pas excessivement court ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort du courrier du directeur de l'OFPRA adressé au requérant avec la décision attaquée que celle-ci est fondée sur l'insuffisance professionnelle de M. C...qui ne serait pas parvenu à réaliser les objectifs quantitatifs qui lui ont été assignés (travaux demandés par ses tuteurs, nombre de dossiers à instruire), n'aurait pas réussi à acquérir un niveau de compétence suffisant (manque de pertinence des recherches documentaires et des questionnements lors des entretiens avec les demandeurs d'asile, qualité insuffisante des projets de décisions) et dont l'attitude avec les demandeurs d'asile et le comportement avec les collègues chargés d'assurer son tutorat n'auraient pas été adaptés ; qu'en particulier, il est reproché au requérant un manque de neutralité à l'égard des demandeurs d'asile ; que, si M. C...conteste la matérialité des faits qui lui sont ainsi reprochés, ceux-ci sont établis par des attestations des anciens tuteurs du requérant et un rapport rédigé par M. A..., chef de la division Afrique et ancien supérieur hiérarchique de M. C...; qu'en considérant que ces faits étaient de nature à révéler une insuffisance professionnelle justifiant qu'il soit mis fin au contrat du requérant à la fin de sa période d'essai, le directeur de l'OFPRA n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, comme l'ont estimé avec raison les premiers juges ; que, dès lors, M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision en date du 8 mars 2011 par laquelle l'OFPRA a mis fin à ses fonctions à compter du 3 avril 2011 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive de la décision du 8 mars 2011 de nature à engager la responsabilité de l'OFPRA, les conclusions indemnitaires présentées par M. C... ne peuvent qu'être rejetées sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par l'OFPRA ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OFPRA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le versement au profit de l'OFPRA d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité posée par M. C...dans la présente instance.

Article 2 : La requête de M. C...est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13PA02949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02949
Date de la décision : 31/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-07-31;13pa02949 ?
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