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23/09/2014 | FRANCE | N°14PA01009

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 septembre 2014, 14PA01009


Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2014, présentée pour la commune de Taiarapu-Est, représentée par son maire en exercice, par MeC... ; la commune de Taiarapu-Est demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300037 du 5 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à verser à M. A...B...une somme de 5 000 000 XPF, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2012 et a mis sa charge la somme de 150 000 XPF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter

la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de la Polynés...

Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2014, présentée pour la commune de Taiarapu-Est, représentée par son maire en exercice, par MeC... ; la commune de Taiarapu-Est demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300037 du 5 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à verser à M. A...B...une somme de 5 000 000 XPF, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2012 et a mis sa charge la somme de 150 000 XPF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des sommes dues ;

4º) de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 220 000 F CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements administratifs ;

Vu la loi n° 2011-664 du 15 juin 2011 actualisant l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 ;

Vu le décret nº 2011-1552 du 15 novembre 2011 portant dispositions applicables aux agents non titulaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2014 :

- le rapport de M. Cantié, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...a été recruté par la commune de Taiarapu-Est, en qualité de directeur général des services, par un contrat d'une durée de deux ans prenant effet au

5 janvier 2010 ; que, par lettre du 23 novembre 2011, le maire de la commune a informé M. B...que son contrat, qui arrivait à expiration le 5 janvier 2012, ne serait pas renouvelé ; que, par courrier en date du 26 novembre 2011, M. B...a contesté cette décision en faisant valoir qu'en application des dispositions de l'article 73 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs, dans leur version issue de la loi du 15 juin 2011 suvisée, il était réputé titulaire d'un contrat à durée indéterminé de droit public ; que, par courrier en date du 10 janvier 2012, M. B...a demandé au maire de lui indiquer la position de la commune quant à la poursuite de son contrat ; que par un nouveau courrier du 16 janvier 2012, il a indiqué qu'à défaut de courrier officiel l'informant de son licenciement, il entendait poursuivre ses fonctions ; que le même jour, il a reçu de la commune le solde de tout compte correspondant à la fin de ses fonctions à compter du 5 janvier 2012 ; que, par jugement en date du 7 août 2012, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé la décision du 23 novembre 2011 et la décision de rejet implicite opposée aux demandes des 26 novembre 2011, 10 et 16 janvier 2012 de M.B..., et lui a enjoint de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions dans un délai de trois jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 000 F CFP par jour de retard ; que cette réintégration est intervenue le 29 octobre 2012, date à laquelle M. B...a présenté sa démission ; que, saisi par M.B..., par un jugement en date du 2 novembre 2013, le Tribunal administratif de la Polynésie française a condamné la commune de Tairapu-Est à verser à celui-ci une somme de 5 000 000 XPF, avec les intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2012, en réparation du préjudice matériel lié à son éviction illégale et aux troubles dans ses conditions d'existence du fait de l'incertitude sur sa situation professionnelle ; que la commune de Tairapu-Est relève régulièrement appel de ce jugement du 2 novembre 2013 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le juge administratif, maître de l'instruction, n'est pas tenu de répondre à des conclusions tendant au prononcé d'un sursis à statuer jusqu'à ce qu'une autre juridiction ait rendu une décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier au motif que les premiers juges n'ont pas fait droit à la demande de la commune de Tairapu-Est tendant à ce qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour rende son arrêt dans l'affaire enregistrée sous le n° 12PA04217, doit être écarté ;

Sur la responsabilité de la commune :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 73 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 susvisée, dans sa version issue de la loi du 15 juillet 2011 susvisée : " Les agents qui occupent un emploi permanent des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 1er sont réputés titulaires d'un contrat à durée indéterminée de droit public s'ils remplissent les conditions énoncées ci-après à la date de promulgation de la loi n° 2011-664 du 15 juin 2011 actualisant l' ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs : / a) Etre en fonction ou bénéficier d'un congé ; / b) Avoir accompli des services continus d'une durée minimale d'un an dans un emploi permanent des collectivités ou des établissements mentionnés à l'article 1er au cours des trois années civiles précédentes ou être bénéficiaire d'un contrat d'une durée de plus de douze mois ou renouvelé par tacite reconduction pendant une durée totale supérieure à douze mois. " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date du 26 juin 2011, date de la promulgation de la loi du 15 juin 2011 susvisée, M. B...avait été recruté en qualité de directeur général des services de la commune de Taiarapu-Est par un contrat d'une durée de deux ans, conclu le 5 janvier 2010 ; que, compte tenu de la nature du besoin auquel il répond, et alors même qu'il n'aurait été créé que récemment et aurait été occupé de façon discontinue, l'emploi considéré doit être regardé comme un emploi permanent ; que M. B...soutient d'ailleurs sans être contredit par la commune que cet emploi a fait l'objet d'une inscription budgétaire permanente sous le n° SA 19, par délibération n° 81/2009/CTE du 11 novembre 2009 ; que, dans ces conditions, et en application des dispositions précitées de l'article 73 de l'ordonnance du 4 janvier 2005, M. B...était donc réputé titulaire, à compter du 26 juin 2011, d'un contrat à durée indéterminée de droit public ; qu'il ne ressort ni des termes de ces dispositions, ni des travaux parlementaires, que le législateur aurait entendu exclure de leur champ d'application certains emplois permanents en raison de leur nature particulière ; qu'ainsi, et à supposer même que M. B...ait légalement pu, sur le fondement des dispositions du 2º du II de l'article 8 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 dans leur version alors en vigueur, selon lesquelles " des emplois permanents peuvent également être occupés par des agents non titulaires dans les cas suivants : (...) Pour les emplois de niveau " conception et encadrement " mentionnés au a de l'article 6, lorsque les besoins des services le justifient ", être recruté sur un emploi de directeur général des services, lequel, depuis l'entrée en vigueur de la loi du

15 juin 2011, peut donner lieu à la création d'un emploi fonctionnel, la commune de Taiarapu-Est n'est pas fondée à soutenir que M. B...ne pouvait pas bénéficier des dispositions précitées de l'ordonnance du 4 janvier 2005 ; qu'il suit de là que la décision du 23 novembre 2011 par laquelle le maire de la commune de Taiarapu-Est a refusé le renouvellement du contrat de M. B...doit s'analyser comme un licenciement ; que le maire ayant prononcé le licenciement de l'intéressé sans respecter la procédure propre à une telle mesure, cette décision est entachée d'illégalité ; qu'une telle illégalité est par nature fautive et, par suite, de nature à engager la responsabilité de la commune de Taiarapu-Est ;

5. Considérant, toutefois, que la commune de Taiarapu-Est expose que M. B...entretenait des relations conflictuelles avec les élus et les agents communaux, dont certains

se seraient plaints de certains propos et attitudes de l'intéressé à leur encontre, et que c'est pour cette raison que, le 10 novembre 2011, les membres du conseil municipal ont, à l'unanimité, décidé de ne pas renouveler son contrat ; qu'elle produit plusieurs attestations en ce sens, émanant notamment des maires délégués des communes associées à la commune de Taiarapu-Est, qui dénoncent des difficultés relationnelles et des tensions entre M.B..., les personnels des services techniques de ces communes et eux-mêmes ; que, dans ces conditions, et en l'absence d'éléments contraires de la part de M.B..., la commune doit être regardée comme établissant la réalité des faits dont elle

se prévaut ; que, dès lors, si M. B...fait valoir qu'il exerçait ses missions de façon professionnelle, la perte de confiance de l'autorité territoriale à son égard pouvait légalement justifier qu'il soit, pour ce motif, déchargé de ses fonctions ; qu'ainsi, l'illégalité dont la décision du 23 novembre 2011 est entachée n'est pas de nature à ouvrir à M. B...un droit à réparation des préjudices qu'il estime avoir subi ; qu'au surplus, en sa qualité de directeur des services d'une commune de petite taille confrontée à la mise en place complexe du statut général des fonctionnaires des communes et groupements de communes de la Polynésie française, M. B...se devait d'accomplir les diligences qui auraient permis à la commune de Taiaparu-Est d'être informée en temps utile de la transformation de plein droit de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée de droit public et du nouveau régime applicable, ce qu'il n'établit pas avoir fait ; que le comportement de l'intéressé s'interposant entre la faute imputable à la commune et les dommages allégués, M. B...n'est, en tout état de cause, pas fondé à rechercher la responsabilité de son ancien employeur ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Taiarapu-Est est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamnée à verser à M. A...B...une somme de 5 000 000 XPF assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2012 et a mis sa charge la somme de 150 000 XPF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Taiarapu-Est, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B...d'une quelconque somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B...le versement à la commune de Taiarapu-Est de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1300037 du 5 novembre 2013 du Tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...présentée devant le Tribunal administratif de la Polynésie française est rejetée.

Article 3 : M. B...versera à la commune de Taiarapu-Est la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 14PA01009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01009
Date de la décision : 23/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELARL FENUAVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-09-23;14pa01009 ?
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