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10/12/2014 | FRANCE | N°13PA02989

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 10 décembre 2014, 13PA02989


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les

29 juillet 2013 et 7 janvier 2014, présentés pour la SARL Velvet Technology, dont le siège est 39 rue de Turenne à Paris (75003), représentée par son gérant en exercice, par MeA... ; la société Velvet Technology demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1218766/7 du 11 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la créance détenue sur l'État au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2011, pour un montant total

de 89 005 euros, sous la forme d'une imputation d'un montant de 82 500 euros sur l...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les

29 juillet 2013 et 7 janvier 2014, présentés pour la SARL Velvet Technology, dont le siège est 39 rue de Turenne à Paris (75003), représentée par son gérant en exercice, par MeA... ; la société Velvet Technology demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1218766/7 du 11 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la créance détenue sur l'État au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2011, pour un montant total de 89 005 euros, sous la forme d'une imputation d'un montant de 82 500 euros sur l'impôt sur les sociétés et du remboursement du surplus, soit 6 505 euros ;

2°) de prononcer la restitution sollicitée ;

3°) d'enjoindre à l'administration de transmettre le dossier complet au ministre chargé de la recherche aux fins de permettre l'expertise demandée par le conciliateur fiscal du département de Paris ou, à défaut, de désigner un expert aux fins d'émettre un avis sur l'éligibilité des projets inclus dans l'assiette du crédit d'impôt recherche ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'État au remboursement du timbre fiscal ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,

- et les observations de Me A...-B..., pour la société Velvet Technology ;

1. Considérant que la société Velvet Technology, parallèlement à une activité de conseil en stratégie et en management, fournit des prestations de service tant en matière de gestion de la relation client qu'en matière de mercatique ; qu'elle revendique une expertise forte sur l'ensemble des outils et moyens techniques dédiés aux problématiques de pilotage et d'accompagnement à la réalisation, d'une part, de projets " Customer Relationship Management ", dits CRM, qui ont pour objet d'analyser les informations relatives aux clients et aux prospects dans le but de les fidéliser en leur offrant le meilleur service, d'autre part, de projets de " Business Intelligence ", qui tendent à donner de l'intelligence aux données et à les transformer en informations pour gagner en efficacité et rentabilité ; que la société Velvet Technology relève appel du jugement n° 1218766/7 du 11 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la créance détenue sur l'État au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2011, pour un montant total de 89 005 euros, sous la forme d'une imputation d'un montant de 82 500 euros sur l'impôt sur les sociétés et du remboursement du surplus, soit 6 505 euros ;

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) / II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes. (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations (...) / c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations (...) / j) Les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 euros par an (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté " ; qu'il résulte de ces dispositions que des opérations consistant à perfectionner des matériels ou procédés existants ou à en développer des fonctionnalités particulières et qui se traduisent par des améliorations non substantielles de techniques déjà existantes ne caractérisent pas des opérations de développement expérimental présentant un caractère de nouveauté ;

4. Considérant que les dépenses dont la société Velvet Technology demande le remboursement au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2011 pour un montant total de 89 005 euros se rapportent à trois projets ; que le premier projet de recherches, intitulé " Marketing Automation ", vise le développement d'un outil destiné à favoriser l'échange de données informatiques d'un point de vue mercatique, tandis que le deuxième projet, dénommé " Web Analytics ", tend à élaborer une solution d'analyse du comportement des internautes sur les sites internet et qu'enfin le troisième projet, dénommé " Veeva ", consiste, en améliorant les performances de la technologie homonyme proposée par l'éditeur Veeva Systems, à développer un outil de gestion de la relation client destiné à être utilisé par des visiteurs médicaux dans le domaine pharmaceutique ; que la société requérante, en se prévalant notamment devant la Cour d'une étude de ses travaux diligentée par ses soins, fait grief au service d'avoir à tort rejeté sa demande au motif que les activités exercées dans le cadre des trois projets qu'elle a développés en 2011 ont le caractère d'opérations de développement expérimental ;

5. Considérant, en premier lieu, que la société requérante, à travers l'étude précitée produite devant la Cour, présente le projet " Marketing Automation " comme une solution novatrice comportant une amélioration substantielle aux techniques existantes, dans la mesure où elle combine des outils de mesure de l'audience d'un site internet, dépourvus de données personnelles, et des outils d'e-mail marketing de type gestion de la relation client recourant au contraire à des données personnelles ; qu'il résulte de l'instruction que, comme l'ont relevé les premiers juges, si la société Velvet Technology dresse un état de l'art assorti de longs développements rédigés en des termes très généraux, exposant que les solutions techniques existantes ne seraient pas satisfaisantes car lacunaires, et si elle fait état de l'élaboration par ses soins de prototypes, elle ne décrit, en tout état de cause, jamais précisément les caractéristiques desdits prototypes et reconnaît qu'il s'agit d'une combinaison d'outils existants de gestion de la relation client, à savoir Neolane et Salesforce, reposant sur la réalisation d'une interface bidirectionnelle ; qu'en outre, il résulte de l'instruction, notamment de l'étude réalisée à la demande de la société Velvet Technology et produite devant la Cour, que, s'agissant du projet " Marketing Automation ", à l'issue de l'année 2011, la société requérante " n'a pas été en mesure de mettre en avant des résultats en adéquation avec les performances escomptées dans le cadre d'une solution à portée commerciale " ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante fait valoir, s'agissant du projet " Web Analytics ", que la solution, qui doit permettre une analyse extrêmement fiable du comportement des internautes à travers l'identification précise de leurs besoins, est innovante dans la mesure où elle ne se fonde sur aucune opération promotionnelle pour faire le lien entre la situation " en ligne " et " hors ligne " des clients et qu'en cela, elle constitue un indicateur de pilotage unique, car elle n'influence pas le comportement des internautes ; que, toutefois, la société se borne, en guise d'état des lieux, à présenter de manière générale les principes régissant la discipline du " web analytics " et à faire valoir son expérience en la matière ; que la société requérante admet en outre qu'à l'issue de l'année 2011, si la version prototype, dont au demeurant elle ne précise pas les caractéristiques, a permis quelques avancées au bénéfice de ses clients, les problématiques de gestion de fuite de mémoire ne permettaient pas une utilisation prolongée de la solution et interdisaient donc une utilisation industrielle ; qu'ainsi, les travaux de la société Velvet Technology n'ont pas, en 2011, apporté une amélioration substantielle par rapport à l'état de l'art et aux connaissances ou techniques existantes dans le domaine du " web analytics " ;

7. Considérant, en troisième lieu, s'agissant du projet " Veeva ", que la société Velvet Technology allègue que son caractère innovant et original tient dans la connexion entre les deux bases de données Veeva et Cegedim, extrêmement hétérogènes sur le plan technologique, et la possibilité de travailler en mode totalement déconnecté ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la société requérante se borne à des développements généraux sur la gestion de la relation client dans le domaine pharmaceutique ; qu'elle ne dresse pas un état de l'art antérieur aux travaux qu'elle a conduits permettant de savoir en quoi leurs retombées seraient radicalement nouvelles au regard des techniques existantes, en particulier celles des éditeurs Siebel et Cegedim, alors qu'au surplus, cette offre se fonde sur la technologie déjà proposée par l'éditeur Veeva Systems qu'elle ambitionne d'améliorer dans le cadre d'un partenariat avec ce dernier ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les projets développés par la société Velvet Technology, alors même qu'ils s'inscriraient, comme celle-ci le fait valoir, dans une logique de maintien de son avance technologique, ne pouvaient être regardés comme apportant des améliorations substantielles présentant un caractère de nouveauté au sens des dispositions législatives précitées ; qu'en outre, si la société requérante soutient que ses trois projets ont tenté de dépasser des difficultés ou verrous technologiques, il résulte de l'instruction et, comme l'a relevé l'expert du ministère chargé de la recherche consulté dans le cours de la procédure de première instance, lequel a, contrairement à ce que soutient la société requérante, conclu à l'inéligibilité des travaux en cause au crédit d'impôt recherche, qu'aucune incertitude scientifique ou technique n'a été identifiée dans les projets " Web Analytics " et " Veeva ", les incertitudes identifiées dans le cadre du projet " Marketing Automation " relevant pour leur part de problématiques classiques du développement informatique ; que c'est, dès lors, à bon droit que l'administration fiscale n'a pas admis le caractère innovant de ces projets ; que, pour les mêmes motifs, et alors qu'au surplus elle ne les justifie pas, les dépenses de veille technologique que la société allègue avoir exposées en raison des travaux en litige ne peuvent être retenues ;

Sur le bénéfice de la doctrine administrative :

9. Considérant que la société Velvet Technology invoque le bénéfice de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 nos 160, 170 et 290 du 12 septembre 2012 ; que ce faisant, la société requérante, alors même qu'elle soutient le contraire, doit être regardée comme invoquant la garantie prévue par le premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, une telle garantie ne peut être invoquée que pour contester les rehaussements d'impositions auxquels procède l'administration ; qu'ainsi, la société Velvet Technology ne peut se prévaloir de cette doctrine, laquelle au surplus ne contient aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle retenue par le présent arrêt, pour contester le refus de l'administration de faire droit à sa demande tendant au bénéfice du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2011 ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de recourir à l'expertise sollicitée, que la société Velvet Technology n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation dudit jugement et à la restitution du crédit d'impôt recherche de l'année 2011 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'aucune circonstance particulière ne justifie qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de l'article R. 761-1 de ce même code ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Velvet Technology est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 13PA02989


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02989
Date de la décision : 10/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : BONDIGUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-12-10;13pa02989 ?
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