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07/04/2015 | FRANCE | N°13PA02895

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 07 avril 2015, 13PA02895


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Euskal Konfederazioa a demandé au Tribunal administratif de Paris d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent.

Par une ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013, le président de

la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Euskal Konfederazioa a demandé au Tribunal administratif de Paris d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent.

Par une ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013, le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 24 juillet 2013 et le 21 mars 2014, l'association Euskal Konfederazioa, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013 du président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales ;

3°) de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent ;

4°) de mettre à la charge de France Télévisions la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association soutient que :

- la mise en valeur de la diversité du patrimoine culturel et linguistique de la France fait partie des missions des organismes du secteur public audiovisuel depuis la loi du 30 septembre 1986 et la prise en compte des langues régionales est inscrite dans la loi du 5 mars 2009 et le cahier des charges de France Télévisions, ces missions procèdent donc bien de prérogatives de puissance publique ;

- il existe une différence de traitement entre le temps d'antenne accordé aux émissions en langue basque et celui accordé aux autres langues régionales notamment l'alsacien, le corse et l'occitan, qui porte atteinte au principe d'égalité et cause à l'association un préjudice certain, actuel et direct.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 octobre 2013 et 28 mars 2014, la société France Télévisions, représenté par la Scp Piwnica-Molinie, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'association Euskal Konfederazioa au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société France Télévisions soutient que :

- la requête ne ressort pas de la compétence de la juridiction administrative ;

- les moyens soulevés par l'association Euskal Konfederazioa ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 10 mars 2014, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 mars 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

- le décret n° 2009-796 du 23 juin 2009 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marino,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me Piwnica, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société France Télévisions.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Euskal Konfederazioa fait appel de l'ordonnance du 26 juin 2013 par laquelle le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la société France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et à sa condamnation à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait du traitement infligé par la société France Télévisions à la langue basque.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance (...) 2° Rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative (...) ".

3. En vertu de l'article 47 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, la société nationale de programme France Télévisions est une société anonyme dont l'Etat détient directement la totalité du capital. En application de l'article 43-11 de la même loi, elle poursuit, dans l'intérêt général, des missions de service public. Au titre de ces missions, il lui appartient notamment de proposer une programmation reflétant la diversité de la société française et d'assurer " la promotion de la langue française et, le cas échéant, des langues régionales " et de mettre en valeur la diversité du patrimoine culturel et linguistique de la France. Cette mission est rappelée à l'article 40 du cahier des charges de la société fixé par le décret du 23 juin 2009 susvisé qui dispose que : " France Télévisions veille à ce que, parmi les services qu'elle édite, ceux qui proposent des programmes régionaux et locaux contribuent à l'expression des principales langues régionales parlées sur le territoire métropolitain et en outre-mer ". En application des articles 48-1 et suivants de la loi du 30 septembre 1986 précitée, le non respect par la société France Télévisions de ses missions peut entraîner le prononcé de sanctions par le Conseil supérieur de l'audiovisuel.

4. Par deux courriers en date des 11 février 2013 et 3 mai 2013, l'association a demandé à la société France Télévisions, d'une part, de remédier à la différence de traitement entre le temps d'antenne accordé aux émissions en langue basque et celui accordé aux émissions en langues alsacienne, bretonne, corse et occitane et, d'autre part, à ce qu'il lui soit allouée une somme de 30 000 euros. Par courrier du 23 mai 2013, le président-directeur général de France Télévisions l'a informée des raisons de cette différence et a implicitement rejeté sa demande indemnitaire.

5. Toutefois, d'une part, les missions confiées à la société France Télévisions de concevoir et programmer des émissions de télévision à caractère national et régional et plus particulièrement de promouvoir les principales langues régionales ne procèdent pas, en elles-mêmes, de la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique. D'autre part, il ne ressort ni des dispositions précitées, ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire que la société France Télévisions soit tenue d'accorder un temps d'antenne précis aux émissions destinées à contribuer à l'expression des langues régionales ni qu'elle doive assurer une parité dans la programmation des émissions contribuant à l'expression des langues régionales. Dès lors, le refus de remédier à la différence de traitement entre le temps alloué aux émissions en langue basque et celui alloué aux autres langues régionales ne touche pas à l'organisation même du service dont la société France Télévisions a la charge et la demande d'injonction ainsi que les conclusions indemnitaires présentées par l'association requérante ne ressortissent pas de la compétence de la juridiction administrative.

6. Il résulte ainsi de ce qui précède que l'association Euskal Konfederazioa n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société France Télévisions sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Euskal Konfederazioa est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société France Télévisions sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Euskal Konfederazioa et à la société France Télévisions.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 avril 2015.

Le rapporteur,

Y. MARINOLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENTLa République mande et ordonne à la ministre de la culture et de la communication en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA02895


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02895
Date de la décision : 07/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.

Radio et télévision - Service public de radio et de télévision.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : HARDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-04-07;13pa02895 ?
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