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20/04/2015 | FRANCE | N°14PA02729

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 avril 2015, 14PA02729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société La Rayonnante a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 septembre 2012 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 406 458 euros correspondant au montant de l'insuffisance de participation à la formation professionnelle continue pour les années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1220502 du 22 avril 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

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rocédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société La Rayonnante a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 septembre 2012 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 406 458 euros correspondant au montant de l'insuffisance de participation à la formation professionnelle continue pour les années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1220502 du 22 avril 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin 2014 et 15 décembre 2014, la société La Rayonnante, représentée par Me Vergne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1220502 du 22 avril 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, du 25 septembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée méconnaît l'intention du législateur, qui n'a instauré la majoration de l'article L. 6331-31 du code du travail que pour sanctionner les employeurs qui ont volontairement empêché l'expression de l'intérêt collectif de ses salariés et non ceux qui ont seulement omis de respecter à la lettre leurs obligations de consultation du comité d'entreprise ;

- le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a commis une erreur de fait en estimant, à la lecture des procès-verbaux de réunion des comités d'établissement et du comité central d'entreprise, qu'il n'y avait pas eu de consultation sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise ;

- il a fait une inexacte application des articles L. 2323-33 et suivants du code du travail dès lors que, contrairement à ce qu'il a estimé, elle a respecté la volonté du législateur de favoriser l'expression d'une concertation sur les questions relatives à la formation professionnelle continue ;

- il s'est aussi fondé sur des faits matériellement inexacts et a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'elle n'avait pas transmis dans les délais les documents nécessaires à la consultation du comité d'entreprise ;

- enfin, la décision méconnaît le principe d'égalité devant la loi dans la mesure où d'autres entreprises ont été traitées différemment par les services de contrôle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2014, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société La Rayonnante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me Vergne, avocat de la société La Rayonnante.

Considérant ce qui suit :

1. La société La Rayonnante, qui exerce son activité dans le secteur du nettoyage industriel, emploie près de 3 000 salariés répartis en France dans différents établissements, plusieurs de ces établissements employant plus de cinquante salariés et comportant un comité d'établissement. La société a également mis en place un comité central d'entreprise. Elle a fait l'objet en 2011 d'un contrôle sur pièces, diligenté sur le fondement des articles L. 6361-1 et suivants et R. 6362-1 à R. 6362-8 du code du travail, aux fins de vérifier qu'elle avait satisfait, au titre des années 2007, 2008 et 2009, à ses obligations en matière de formation professionnelle. A l'issue de ce contrôle, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a, par une décision du 25 septembre 2012, estimé que la requérante n'avait, pour aucune des trois années contrôlées, respecté ses obligations en matière d'information et de consultation du comité d'entreprise sur les questions relatives à la formation professionnelle dans l'entreprise. Il lui a, en conséquence, ordonné de verser au Trésor public la somme totale de 406 458 euros par application de l'article L. 6363-31 du code du travail. La société La Rayonnante fait appel du jugement du 22 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 septembre 2012.

Sur la nature du contentieux :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 6362-6 du code du travail : " L'intéressé qui entend contester la décision administrative qui lui a été notifiée en application de l'article R. 6362-4, saisit d'une réclamation, préalablement à tout recours pour excès de pouvoir, l'autorité qui a pris la décision ".

3. La société La Rayonnante a seulement demandé au tribunal d'annuler la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, du 25 septembre 2012. Ces conclusions, auxquelles ne sont pas associées des conclusions à fin de décharge, relèvent du recours pour excès de pouvoir en vertu des dispositions de l'article R. 6362-6 du code du travail. Par suite, il y a lieu, pour apprécier la légalité de la décision contestée, de se placer à la date à laquelle cette décision a été prise.

Sur la légalité de la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris :

4. Aux termes de l'article L. 6331-31 du code du travail, dans sa version applicable avant son abrogation le 1er janvier 2015 : " L'employeur de cinquante salariés et plus atteste sur l'honneur qu'il a satisfait à l'obligation de consultation du comité d'entreprise prévue à l'article L. 6331-12. A la demande de l'administration, il produit les procès-verbaux justifiant du respect de cette obligation. A défaut, le montant des dépenses ou contributions auquel il est tenu par l'article L. 6331-19 est majoré de 50 %. ". L'article L. 6331-12 du même code dispose que les employeurs de cinquante salariés et plus " ne peuvent être regardés comme s'étant conformés aux dispositions du présent chapitre que si, ayant satisfait à l'obligation prévue à l'article L. 6331-9, ils justifient que le comité d'entreprise a délibéré sur les problèmes propres à l'entreprise, relatifs à la formation professionnelle continue dans les conditions prévues aux articles L. 2323-33 à L. 2323-39./ Les employeurs sont dispensés de cette justification lorsqu'ils produisent le procès-verbal de carence prévu à l'article L. 2324-8 ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'un employeur de cinquante salariés et plus, assujetti à l'obligation de participation au financement de la formation professionnelle continue, est tenu de justifier des délibérations annuelles du comité d'entreprise sur les problèmes de formation propres à l'entreprise dans les conditions prévues par les articles L. 2323-33 à L. 2323-29 du code du travail. Il ne peut être dispensé d'apporter une telle justification que s'il produit un procès-verbal de carence établi pour l'année au titre de laquelle il s'est acquitté de l'obligation de participation. A défaut d'une telle production, il encourt la majoration de sa contribution prévue à l'article L. 6331-31 du code du travail.

6. Le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a estimé, dans sa décision du 25 septembre 2012 par laquelle il a fait application de la majoration de 50 % prévue par les dispositions de l'article L. 6331-31 du code du travail, que la société La Rayonnante n'avait, au cours des trois années contrôlées, pas consulté le comité central d'entreprise et les comités d'établissement sur les orientations de la formation professionnelle ainsi que le prévoit l'article L. 2323-33 du code et qu'elle n'avait pas non plus procédé à la consultation du comité central d'entreprise et des comités d'établissement sur le plan de formation dans les conditions prévues à l'article L. 2323-34, ni recueilli l'avis visé à l'article L. 2323-37 sur les conditions de mise en oeuvre des contrats de professionnalisation.

7. Aux termes de l'article L. 2323-33 du code du travail, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Chaque année, le comité d'entreprise est consulté sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise en fonction des perspectives économiques et de l'évolution de l'emploi, des investissements et des technologies dans l'entreprise. / Ces orientations prennent en compte l'analyse de la situation comparée des hommes et des femmes, telle qu'elle ressort des informations fournies par l'employeur en application des articles L. 2242-2 et L. 2323-57, ainsi que les mesures arrêtées en application de l'article L. 1142-4. / Le comité d'entreprise est saisi chaque fois qu'un changement important affecte l'un de ces domaines ".

8. Il ressort des pièces du dossier que, lors du contrôle sur pièces de la société La Rayonnante, le service a consulté 55 procès-verbaux de réunions du comité central d'entreprise et des comités d'établissement pour les trois années 2008, 2009 et 2010 et a constaté qu'aucun de ces procès-verbaux ne retraçait une délibération sur les orientations de la formation professionnelle de l'entreprise. Si la société La Rayonnante se prévaut d'une note d'information adressée au mois de septembre aux présidents des comités d'établissement les invitant à recenser les besoins de formation et leur rappelant les orientations arrêtées dans la branche professionnelles en matière de formation et de développement des compétence, elle ne fournit aucun procès-verbal faisant apparaître qu'une telle consultation sur les orientations de la formation professionnelle de l'entreprise aurait effectivement eu lieu, ni aucun procès-verbal de carence. En outre, la circonstance que la requérante ait adopté les mêmes orientations de la formation professionnelle que celles arrêtées pour la branche professionnelle ne pouvait la dispenser de procéder à la consultation exigée par les dispositions de l'article L. 2323-33 du code du travail. La société La Rayonnante ne peut pas non plus se prévaloir de ce que les priorités fixées dans la branche ne seraient pas contestées par les représentants du personnel pour justifier une absence de consultation. Il s'ensuit que le préfet n'a commis ni erreur de droit ni erreur de fait en considérant que la requérante n'avait satisfait, pour aucune des années contrôlées, à l'obligation de consultation sur les orientations de la formation professionnelle fixée par l'article L. 2323-33 du code du travail. A lui-seul et sans méconnaître l'intention du législateur, ce défaut de consultation était suffisant pour entraîner l'application de la majoration de 50 % visée à l'article L. 6331-31 du code du travail, ceci quand bien même la société La Rayonnante n'aurait pas entendu entraver délibérément le dialogue social dans l'entreprise.

9. Enfin, la société La Rayonnante reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance, tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi. Il y lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu par le Tribunal administratif de Paris.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société La Rayonnante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société La Rayonnante est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société La Rayonnante et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Dhiver, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 avril 2015.

Le rapporteur,

M. DHIVERLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02729


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02729
Date de la décision : 20/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-09 Travail et emploi. Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : GICQUEAU -VERGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-04-20;14pa02729 ?
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