La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2015 | FRANCE | N°14PA02543

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 01 juin 2015, 14PA02543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011, le Tribunal administratif de Paris a annulé la note du 9 mai 1996 par laquelle le sous-directeur des bureaux du cabinet du ministre de la défense a informé le bureau des sous-officiers de la direction du personnel militaire de l'armée de l'air de la décision de ne pas agréer la candidature de M. A...et a rejeté le surplus des conclusions de M.A..., ainsi que celles présentées par le ministre de la défense au titre des articles L. 761-1 et R. 742-1 du

code de justice administrative.

M. B...A...a demandé au Tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011, le Tribunal administratif de Paris a annulé la note du 9 mai 1996 par laquelle le sous-directeur des bureaux du cabinet du ministre de la défense a informé le bureau des sous-officiers de la direction du personnel militaire de l'armée de l'air de la décision de ne pas agréer la candidature de M. A...et a rejeté le surplus des conclusions de M.A..., ainsi que celles présentées par le ministre de la défense au titre des articles L. 761-1 et R. 742-1 du code de justice administrative.

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'exécution du jugement

n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011, ainsi que l'annulation de la décision du ministre de la défense datée du 26 février 2013 refusant à nouveau d'agréer sa candidature et la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 633 000 euros assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts, en raison du préjudice subi, ainsi, enfin, qu'une indemnité de 20 000 euros en raison de son préjudice moral.

Par un jugement n°1300450/5-3 du 9 avril 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 10 juin et le 4 août 2014, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1300450/5-3 du 9 avril 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision n°001457 du 26 février 2013 ;

3°) de condamner le ministre de la défense et des anciens combattants au versement de la somme de 633 000 euros dont il a été illégalement privé, assortie des intérêts moratoires à compter du 8 avril 2008 et de leur capitalisation, ainsi que de la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- n'ayant pas disposé d'indications suffisantes sur l'origine exacte de son préjudice avant le 8 avril 2008, la créance dont il se prévaut n'est pas prescrite ;

- il n'a pas bénéficié, devant le tribunal, d'un procès équitable et impartial, en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; à cet égard, le rapporteur public n'établit pas avoir fait l'objet d'une désignation conforme à l'article R222-23 du code de justice administrative ; rapporteur du jugement dont l'exécution était demandée, il aurait dû, au surplus, se récuser ; en outre, le sens de ses conclusions, qui a fait l'objet d'une modification, n'a pas été communiqué aux parties dans le délai légal ;

- enfin, les premiers juges n'ont pas contrôlé la matérialité des faits s'agissant des motifs de sa mutation dans l'intérêt du service, et ont entaché leur jugement de dénaturation des faits, détournement de pouvoir et discrimination, alors que cette mutation était une sanction disciplinaire déguisée ; en effet, le ministre se trouvait dans une situation de compétence liée et ne pouvait refuser son agrément ; subsidiairement, il se devait, à tout le moins, de motiver son refus ; en outre, le tribunal ne pouvait suggérer le sens que devait prendre la nouvelle décision du ministre, dans le cadre d'une annulation pour illégalité externe ; les juges de l'exécution étaient donc tenus de prendre en compte l'illégalité du jugement initial pour procéder à la définition des mesures d'exécution ;

- sa demande d'indemnisation est, en conséquence, fondée ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête, à la condamnation de M. A...sur le fondement de l'article R.741-12 du code de justice administrative et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 de ce code.

Il soutient que :

- les conclusions de M. A...dirigées contre la décision portant mutation dans l'intérêt du service et contre la décision n°1457 du 26 février 2013 sont irrecevables car relevant d'un contentieux distinct, alors que ces décisions sont par ailleurs devenues définitives ;

- les conclusions indemnitaires de M. A...ont déjà été rejetées par le jugement du tribunal dont l'exécution est demandée, devenu définitif ;

- le jugement du 12 juillet 2011 a été pleinement exécuté par la nouvelle décision de refus d'agrément du 26 février 2013 ;

- il appartient à la Cour d'apprécier le bien-fondé d'une amende pour recours abusif en l'espèce ;

Par ordonnance du 18 février 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 mars 2015.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 10 mars 2015, M.A..., représenté par MeC..., a persisté dans ses conclusions, par les mêmes moyens.

Il soutient, en outre, que :

- le ministre doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits dans la présente instance ;

- il appartenait au juge de l'exécution de mettre en demeure le ministre de produire les éléments de nature à démontrer le bien-fondé du jugement dont l'exécution était demandée ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011 ;

- le code de la défense ;

- la loi n°70-2 du 2 janvier 1970 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sirinelli,

- et les conclusions de Mme Vrignon, rapporteur public.

Une note en délibéré présentée par Me C...pour M. A...a été enregistrée le 20 mai 2015.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement (...), la partie intéressée peut demander au tribunal administratif (...) qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 921-6 du même code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président (... ) du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. (...) " ;

2. Considérant que, par un jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé la note du 9 mai 1996 par laquelle le sous-directeur des bureaux du cabinet du ministre de la défense avait informé le bureau des sous-officiers de la direction du personnel militaire de l'armée de l'air de la décision de ne pas agréer la candidature de M. A...au recrutement de la fonction publique sur le fondement de l'article 3 de la loi n°70-2 du 2 janvier 1970 et, d'autre part, a rejeté le surplus des demandes de l'intéressé, ainsi que les conclusions présentées par le ministre de la défense au titre des articles L.761-1 et R.742-1 du code de justice administrative ; que M. B...A...relève appel du jugement n°1300450/5-3 du 9 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'exécution du jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.222-23 du code de justice administrative : " Dans chaque tribunal administratif, selon ses besoins, un ou plusieurs premiers conseillers ou conseillers sont chargés, par arrêté du vice-président du Conseil d'Etat pris sur proposition du président de la juridiction et après avis conforme du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, d'exercer les fonctions de rapporteur public. / Lorsque le fonctionnement du tribunal administratif l'exige, un premier conseiller ou conseiller qui exerce les fonctions de rapporteur public peut être rapporteur dans les affaires sur lesquelles il n'est pas ou n'a pas été appelé à conclure. " ;

4. Considérant, d'une part, que M. E...D...a été désigné pour exercer, à compter du 1er septembre 2013, des fonctions de rapporteur public au Tribunal administratif de Paris, par un arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 8 juillet 2013 ; que M. A...n'est donc pas fondé à contester la régularité de sa désignation ; que, d'autre part, et eu égard en particulier à la nature de l'office attribué au juge statuant sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, la circonstance que M. D...ait été rapporteur du jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011 n'était pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce en qualité de rapporteur public dans l'affaire concernant l'exécution de ce jugement ; que, dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le déroulement de la procédure devant le tribunal ne serait pas conforme aux prescriptions des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant, en second lieu, qu'à supposer que M. A...entende soutenir qu'il n'a pas été régulièrement informé du sens des conclusions du rapporteur public avant l'audience du 26 mars 2014, il n'assortit ce moyen d'aucune précision alors, par ailleurs, qu'il ressort de la fiche skipper du dossier de première instance que le sens de ces conclusions a été mis en ligne le 24 mars 2014, soit dans un délai raisonnable avant l'audience ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le rapporteur public aurait modifié le sens de ses conclusions avant l'audience; que la circonstance qu'à sa demande de communication des conclusions du rapporteur public, le tribunal lui ai envoyé par erreur la note du rapporteur est sans incidence sur la régularité de la procédure ; que ce moyen doit donc également être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement :

6. Considérant, en premier lieu, que le jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011 a, au motif qu'elle était entachée d'incompétence, annulé la décision du 9 mai 1996 par laquelle le sous-directeur des bureaux du cabinet du ministre de la défense avait informé le bureau des sous-officiers de la direction du personnel militaire de l'armée de l'air de la décision de ne pas agréer la candidature de M.A... ; qu'il a écarté les autres moyens invoqués par M. A...à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation, et a rejeté ses conclusions indemnitaires ; qu'ainsi, l'exécution de ce jugement impliquait seulement que l'autorité compétente pour ce faire se prononce à nouveau sur la candidature de M. A...; que le ministre de la défense, compétent en la matière, ayant pris une nouvelle décision de refus d'agrément en date du 26 février 2013, M. A...n'est donc pas fondé à soutenir que le jugement n° 0812298-1006641 du 12 juillet 2011 n'aurait pas été exécuté ; qu'enfin, il ne saurait soutenir, à cet égard, que le ministre, qui a produit devant la Cour un mémoire en défense avant la clôture de l'instruction, aurait acquiescé aux faits au seul motif que cette production était ultérieure au délai fixé par la mise en demeure adressée par la Cour ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que M. A...n'est pas fondé, dans le cadre de la présente requête, à demander la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité au titre des préjudices matériel et moral qu'il aurait subis, ces conclusions ayant été expressément rejetées par le jugement n° 0812298-1006641 dont l'exécution est demandée ; qu'il ne saurait davantage contester utilement la régularité ou le bien-fondé du jugement n° 0812298-1006641, qu'il n'a pas contesté par la voie de l'appel, et que le tribunal, saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, ne pouvait pas connaître ;

8. Considérant, en dernier lieu, que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision n° 001457 du 26 février 2013 constituent un litige distinct de celui tranché par le jugement dont l'exécution est demandée, et sont, en conséquence, irrecevables ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R.741-12 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'en vertu de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ; que la faculté prévue par ces dispositions constitue un pouvoir propre du juge, et qu'ainsi les conclusions du ministre de la défense tendant à son application, en l'espèce, sont irrecevables ; que, toutefois, et dès lors que la requête de M. A...présente un caractère abusif, il y a lieu de lui infliger une amende de 500 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

12. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que le ministre de la défense ne justifie pas avoir exposé des frais non compris dans les dépens pour se défendre dans la présente instance ; que les conclusions qu'il a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...est condamné à verser une amende de 500 euros pour recours abusif.

Article 3 : Les conclusions présentées par le ministre de la défense sur le fondement des articles R.741-12 et L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- Mme Sirinelli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juin 2015.

Le rapporteur,

M. SIRINELLILe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

3

N° 14PA02543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02543
Date de la décision : 01/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Règles générales de procédure - Composition des juridictions.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Prescription d'une mesure d'exécution.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie SIRINELLI
Rapporteur public ?: Mme VRIGNON-VILLALBA
Avocat(s) : THIANT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-01;14pa02543 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award