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30/06/2015 | FRANCE | N°14PA00448

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2015, 14PA00448


Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2014, présentée pour Mme B...C..., demeurant..., par Me D... ; Mme C...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1302453/2-1 du 26 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 12 décembre 2012 du président de l'université Paris-V René Descartes rejetant sa demande de validation des acquis de l'expérience, d'autre part, à la condamnation de l'Université Paris-V René Descartes au versement d'une somme de 338 000 euros, assortie

des intérêts au taux légal et des intérêts capitalisés, en réparation d...

Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2014, présentée pour Mme B...C..., demeurant..., par Me D... ; Mme C...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1302453/2-1 du 26 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 12 décembre 2012 du président de l'université Paris-V René Descartes rejetant sa demande de validation des acquis de l'expérience, d'autre part, à la condamnation de l'Université Paris-V René Descartes au versement d'une somme de 338 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et des intérêts capitalisés, en réparation de ses préjudices ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Université Paris-V René Descartes le versement de la somme de 4 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que ses visas ne font pas mention du moyen invoqué dans son mémoire enregistré le 27 juin 2013, concernant l'absence de critère prédéfinis de sélection pour le DESS de psychologie clinique et pathologique, et qu'il est insuffisamment motivé dès lors qu'il n'a pas été répondu à ce moyen ;

- les premiers juges n'ont pas pris en compte sa formation, les diplômes qu'elle a obtenus et son expérience professionnelle et ont estimé à tort qu'elle n'avait pas soumis de dossier de validation des acquis de l'expérience, alors que le courriel du 30 novembre 2010 ne constitue pas une lettre officielle, que l'université a refusé sa réinscription en DESS de psychologie clinique et pathologique et que le directeur de l'institut de psychologie a émis en réalité un avis " de recevabilité " défavorable, en faisant obstacle à l'examen de ce dossier par la commission compétente ;

- le tribunal administratif a considéré à tort qu'elle n'avait pas justifié que des informations erronées et incomplètes, susceptibles d'engager la responsabilité pour faute de l'université, lui avaient été fournies et que l'université lui avait donné des assurances qu'elle obtiendrait la validation de ses acquis de l'expérience ;

- elle a démontré dans ses écritures présentées en première instance que la décision attaquée devait être annulée et que l'université, qui a commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité, doit être condamnée à réparer l'ensemble des préjudices subis ;

- elle a droit aux intérêts sur la somme réclamée à compter de sa demande indemnitaire préalable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2014, présenté pour l'université Paris-V René Descartes, représentée par son président, par MeA..., qui conclut au rejet de la requête, à la condamnation de Mme C...à une amende pour recours abusif de 3 000 euros et à la mise à sa charge du versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- le moyen de la requête tiré de l'insuffisante motivation du jugement est irrecevable dès lors que le mémoire en réplique en cause ne lui a pas été communiqué ;

- l'argumentation de la requérante portant sur les critères de recrutement des étudiants et sur la motivation de l'intéressée est inopérante ; les premiers juges n'étaient dès lors pas tenus d'y répondre ;

- les autres moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés ;

- aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'administration n'est établie ;

- le recours formé par Mme C...présente un caractère abusif ;

Vu les pièces dont il résulte que, en application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de l'Université Paris-V René Descartes tendant à la condamnation de Mme C...au paiement d'une amende pour recours abusif, dès lors que le prononcé d'une telle condamnation relève des pouvoirs propres du juge administratif ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 9 juin 2015, présenté pour MmeC..., par Me D... qui confirme ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le décret n° 2002-590 du 24 avril 2002 relatif à la validation des acquis de l'expérience par les établissements d'enseignement supérieur ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2015 :

- le rapport de M. Cantié, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me Blanchard, avocat de l'université Paris-V René Descartes ;

1. Considérant que, par courrier du 7 octobre 2012 adressé au président de l'université Paris-V René Descartes, Mme C..., titulaire d'une maîtrise de psychologie clinique et pathologique, s'est plainte de ce qu'elle n'avait pu obtenir, malgré ses nombreuses démarches, la validation des acquis de son expérience en vue de l'obtention du diplôme de master de psychologie clinique et pathologique, en raison de fautes imputables à cette université ; que, par ce courrier, elle a sollicité la validation des acquis de son expérience et le versement d'une indemnité de

338 000 euros en réparation de ses préjudices matériels et du préjudice moral ; que ces demandes ont été rejetées par décision du président de l'université en date du 12 décembre 2012 ; que Mme C...relève appel du jugement du 26 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision, d'autre part, à la condamnation de l'Université Paris-V René Descartes au versement d'une somme de 338 000 euros assortie des intérêts au taux légal et des intérêts capitalisés ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; qu'aux termes de l'article R. 741-2 du même code : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application " ;

3. Considérant que Mme C...fait grief aux premiers juges de ne pas avoir visé son moyen tiré de l'absence de critère prédéfinis de sélection pour le recrutement au sein du DESS de psychologie clinique et pathologique, qu'elle avait invoqué dans son mémoire en réplique enregistré le 27 juin 2013, et de ne pas avoir répondu à ce moyen dans les motifs du jugement ; que, toutefois, le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé sa décision en estimant que le président de l'université Paris-V René Descartes était tenu de rejeter la demande de validation des acquis de l'expérience présentée par Mme C...et qu'aucune faute imputable à cette université n'était établie, n'avait pas à faire mention, dans les visas ou les motifs du jugement, de l'ensemble de l'argumentation de la requérante ; que l'absence de visa de l'argument invoqué, qui ne saurait être regardé comme un moyen, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ; que, dès lors, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que ce jugement est entaché d'irrégularité ;

Sur la demande tendant à l'annulation de la décision du 12 décembre 2012 en tant que celle-ci prononce le rejet de la demande de validation des acquis de l'expérience :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 613-3 du code de l'éducation, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Toute personne qui a exercé pendant au moins trois ans une activité professionnelle, salariée, non salariée, bénévole ou de volontariat, en rapport avec l'objet de sa demande, peut demander la validation des acquis de son expérience pour justifier tout ou partie des connaissances et des aptitudes exigées pour l'obtention d'un diplôme ou titre délivré, au nom de l'État, par un établissement d'enseignement supérieur (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 613-4 du même code : " La validation prévue à l'article L. 613-3 est prononcée par un jury dont les membres sont désignés par le président de l'université ou le chef de l'établissement d'enseignement supérieur en fonction de la nature de la validation demandée (...) Le jury se prononce au vu d'un dossier constitué par le candidat, à l'issue d'un entretien avec ce dernier et, le cas échéant, d'une mise en situation professionnelle réelle ou reconstituée, lorsque cette procédure est prévue par l'autorité qui délivre la certification. Il se prononce également sur l'étendue de la validation et, en cas de validation partielle, sur la nature des connaissances et aptitudes devant faire l'objet d'un contrôle complémentaire. / La validation produit les mêmes effets que le succès à l'épreuve ou aux épreuves de contrôle des connaissances et des aptitudes qu'elle remplace (...) " ; que selon l'article 3 du décret du 24 avril 2002, alors en vigueur : " La demande de validation est adressée au chef d'établissement en même temps que la demande d'inscription auprès de cet établissement en vue de l'obtention du diplôme. Un candidat ne peut déposer, au cours de la même année civile et pour un même diplôme, qu'une seule demande et ne peut en saisir qu'un seul établissement. La demande précise le diplôme postulé. S'il postule des diplômes différents, le candidat ne peut au total déposer plus de trois demandes de validation au cours de la même année civile. Ces obligations et l'engagement sur l'honneur du candidat à les respecter doivent figurer sur chaque formulaire de candidature à une validation d'acquis de l'expérience. / La demande de validation est accompagnée d'un dossier dans les conditions prévues à l'article 4. " ; qu'aux termes de l'article 4 du même décret : " Le dossier présenté par le candidat doit expliciter par référence au diplôme postulé les connaissances, compétences et aptitudes qu'il a acquises par l'expérience. / Il comprend les documents rendant compte de cette expérience et de la durée des différentes activités dans lesquelles le candidat l'a acquise ainsi que, le cas échéant, les attestations correspondant aux formations suivies et aux diplômes obtenus antérieurement. " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le courrier du 7 octobre 2012 adressé par Mme C...au président de l'université Paris-V René Descartes ne tendait pas à l'inscription de l'intéressée en vue de l'obtention du diplôme de master de psychologie clinique et pathologique et n'était pas accompagné du dossier prévu par les dispositions de l'article 4 du décret du 24 avril 2002, alors applicable ; que le président de l'université, qui n'est pas habilité à prononcer lui-même la validation des acquis de l'expérience, était donc tenu, en application des dispositions de l'article 3 du même décret, de rejeter la demande de validation des acquis de l'expérience présentée par

Mme C...; que, dès lors, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que la décision du 12 décembre 2012 est illégale en tant qu'elle emporte le rejet de sa demande de validation des acquis de l'expérience ;

Sur la responsabilité de l'Université Paris-V René Descartes :

6. Considérant que, contrairement à ce que soutient MmeC..., il ne résulte pas de l'instruction que l'université Paris-V René Descartes aurait méconnu les règles en vigueur en refusant sa réinscription, en 1996, au D.E.S.S. de psychologie clinique et pathologique, compte tenu des résultats obtenus par l'intéressée aux examens et des éléments caractérisant sa situation ; qu'il n'est pas établi que l'université aurait dissuadé Mme C...de présenter un dossier de validation des acquis de l'expérience postérieurement aux avis défavorables émis par les instances compétentes le 23 juin 2004 et le 16 avril 2009 sur les demandes présentées par l'intéressée, ni qu'elle aurait donné à celle-ci des assurances qu'elle obtiendrait une telle validation en l'encourageant à suivre une préparation spécifique organisée par l'Université de Bretagne occidentale à Brest ou en l'accompagnant dans sa démarche ; qu'il n'est pas davantage démontré que Mme C...aurait vainement tenté de soumettre un tel dossier au jury mentionné à l'article L. 613-4 du code de l'éducation, ni que les services de l'université auraient fourni des informations erronées ou incomplètes qui auraient conduit l'intéressée à renoncer à sa démarche liée à son projet d'obtenir le titre de psychologue ; que si elle soutient que le courriel du 30 novembre 2010 l'invitant à souscrire à l'organisation d'un jury ne constitue pas une lettre officielle, elle ne conteste pas l'avoir réceptionnée, et il lui appartenait d'en tirer les conséquences en présentant une demande dans les formes requises ; que, dans ces conditions, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que l'université Paris-V René Descartes aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3000 euros " ; que la faculté prévue par ces dispositions constitue un pouvoir propre du juge ; que, dès lors, les conclusions de l'université Paris-V René Descartes tendant à ce que

Mme C...soit condamnée au paiement d'une telle amende ne sont pas recevables et doivent être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Université Paris-V René Descartes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés par Mme C...et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de

Mme C...le versement de la somme que réclame l'université Paris-V René Descartes au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'université Paris-V René Descartes sur le fondement des articles R. 741-12 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à l'université Paris-V René Descartes.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- M. Cantié, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 juin 2015.

Le rapporteur,

C. CANTIÉLe président,

E. COËNT-BOCHARD

Le greffier,

A.-L. CALVAIRELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA00448


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00448
Date de la décision : 30/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Enseignement et recherche - Questions générales - Examens et concours.

Professions - charges et offices - Accès aux professions.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-30;14pa00448 ?
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