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15/02/2016 | FRANCE | N°14PA03819

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 15 février 2016, 14PA03819


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level et M. D... B..., intervenu en cours d'instance, ont demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF) à lui verser la somme de 4 500 euros en réparation du préjudice causé par les travaux de remplacement de conduites d'électricité qu'elle a effectuées sur la portion de voie publique au droit de la copropriété du 12, rue Emile Level, entre le mois de mai 2010 et le mois de mars 2011.<

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Par un jugement n° 1118542/3-3 du 24 juin 2014, le Tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level et M. D... B..., intervenu en cours d'instance, ont demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF) à lui verser la somme de 4 500 euros en réparation du préjudice causé par les travaux de remplacement de conduites d'électricité qu'elle a effectuées sur la portion de voie publique au droit de la copropriété du 12, rue Emile Level, entre le mois de mai 2010 et le mois de mars 2011.

Par un jugement n° 1118542/3-3 du 24 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du syndicat.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 août 2014 et par des mémoires enregistrés les 31 mars et 31 août 2015 et présentés par Me Olivier, avocat, le syndicat des copropriétaires du 12 rue Emile Level, représenté par son syndic et M. B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1118542/3-3 du 24 juin 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner la société ERDF à leur verser la somme de 4 500 euros en réparation des préjudices causés par les travaux qu'elle a effectués devant le 12, rue Emile Level ;

3°) de mettre à la charge de la société ERDF, dans le dernier état de leurs écritures, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les requérants soutiennent que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- les premiers juges ont méconnu le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 38-1 du décret du 19 décembre 1991, l'article 16 du code de procédure civile et le principe du contradictoire, compte-tenu de ce qu'ils ont statué avant qu'il ne soit définitivement statué sur la demande d'aide juridictionnelle de M. B... ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la requête introductive d'instance était irrecevable dès lors que le syndicat s'est acquitté du montant de la contribution à l'aide juridique et que les copropriétaires se sont trouvés dans l'impossibilité matérielle d'autoriser M. B...à représenter le syndicat dans le présent litige ; l'autorisation d'ester a en outre été votée par la copropriété le 31 juillet 2014 ;

- c'est également à tort que les premiers juges ont estimé irrecevable l'intervention volontaire de M. B...en raison de ce qu'il ne présentait pas de nouvelles conclusions ou de nouveaux moyens ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

- le préjudice de jouissance subi par les copropriétaires revêt un caractère d'anormalité compte-tenu de la durée des travaux litigieux, des difficultés d'usage et d'accès à l'immeuble qui en ont résulté et des nuisances sonores causées ;

- ces troubles auraient pu être évités en déplaçant le chantier sur un terrain vague immédiatement voisin ;

- il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice de jouissance en l'évaluant à la somme de 4 500 euros ;

Par un mémoire en défense enregistré le 7 juillet 2015, la société ERDF, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du Syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level et de M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société ERDF soutient que :

- la requête est irrecevable ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par une décision du 8 janvier 2015, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a refusé d'admettre le syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, et M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi du 28 Pluviôse an VIII ;

- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour son application ;

- la loi n° 91-647du 10 juillet 1991 et son décret d'application, n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lapouzade,

- les conclusions de M.A...,

- les observations de M. B...,

- et les observations de M. Poidevin, avocat, pour ERDF (Electricité Réseau Distribution France).

Considérant ce qui suit :

1. La société ERDF (Electricité Réseau Distribution France) a effectué entre les mois de mai 2010 et mars 2011 des travaux de modernisation du réseau électrique sur la portion de chaussée aux droits de l'immeuble du syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, à Paris. Le syndicat, représenté par son syndic, et M.B..., ont demandé le 16 juillet 2011 à la société ERDF d'indemniser les copropriétaires de leur préjudice de jouissance causé par ces travaux. Par un courrier du 17 août 2011, la société ERDF a opposé un refus à cette demande. Le 19 septembre 2011, le syndicat a saisi le médiateur national de l'énergie qui, par courrier du 12 octobre, s'est estimé incompétent pour émettre des recommandations dans le cadre du litige opposant le syndicat à la société ERDF. Le syndicat a saisi le 19 octobre le Tribunal administratif de Paris aux fins de condamner la société ERDF à l'indemniser à hauteur de 4 500 euros des préjudices subis par les copropriétaires. Par un jugement du 24 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions du syndicat et celles de M.B..., intervenu en son nom à l'instance. Le syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, et M. B...interjettent appel de ce jugement.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société ERDF.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont rejeté la requête du syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, et l'intervention de M. B...au motif qu'elles n'étaient pas fondées. Par suite, les moyens tirés de ce que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables les conclusions des requérants doivent être écartés comme inopérants.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 43-1 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 : " Sans préjudice de l'application des dispositions relatives à l'admission provisoire, la juridiction avisée du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle est tenue de surseoir à statuer dans l'attente de la décision statuant sur cette demande (...) ". Aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " le jugement de l'affaire principale qui est instruite ne peut être retardé par une intervention ".

4. Il résulte de l'instruction que la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B..., en tant qu'intervenant à l'instance, le 6 février 2014, a été rejetée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Paris du 8 avril 2014, notifiée le 17 avril 2014, contre laquelle M. B...a formé un recours le 2 mai 2014. M. B... soutient que le Tribunal administratif de Paris ne pouvait, ainsi qu'il l'a fait, statuer avant que ne soit intervenue la décision du Président de la Cour statuant sur son recours.

5. Toutefois, dès lors que M. B...avait la qualité d'intervenant à l'instance et non de partie principale, les dispositions de l'article 43-1 du décret du 19 décembre 1991, ne faisaient pas obstacle à ce que l'affaire qui était instruite soit jugée, conformément aux dispositions de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, avant que n'intervienne la décision statuant sur la demande d'aide juridictionnelle de M.B.... Ce faisant, il n'a pas été porté atteinte au droit à un recours effectif notamment garanti par les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lequel droit a été pleinement exercé par la partie principale, au regard de laquelle son effectivité doit s'apprécier. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du décret du 10 décembre 1991 et des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En dernier lieu, ne peuvent également qu'être écartés, comme inopérants, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du code de procédure civile, qui n'est pas applicable devant les juridictions administratives, et le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire, au soutien duquel M. B...ne peut utilement faire valoir que les premiers juges ont statué sur sa demande avant qu'il ne soit définitivement statué sur sa demande d'aide juridictionnelle.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

7. La responsabilité du maître de l'ouvrage est engagée, même sans faute, à raison des dommages que l'ouvrage public dont il a la garde peut causer aux tiers. Il appartient toutefois au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués, et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter, sans contrepartie, les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général.

8. Les copropriétaires du 12, rue Emile Level, et M. B...soutiennent qu'ils ont subi certaines gênes dans leurs conditions de vie du fait des travaux réalisés devant leur immeuble par la société ERDF, tenant, notamment, aux difficultés qu'ils ont rencontrées pour accéder à leur domicile, aux nuisances sonores et à l'encombrement de la chaussée par des baraquements et engins de chantier. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment des photographies versées au dossier, que l'encombrement de la chaussée et la réalisation des travaux aient privés les copropriétaires d'un accès à leur domicile. Les requérants ne peuvent utilement faire valoir, à l'appui de conclusions qu'il était possible à ERDF de déployer son chantier sur un terrain à immédiate proximité. Par suite, les gênes qu'ils allèguent, à supposer qu'elles aient persisté pendant neuf mois, n'ont pas excédé la limite de celles que les riverains des voies publiques sont tenus de supporter sans indemnité dans des circonstances similaires. Enfin, s'agissant des nuisances sonores, les requérants n'apportent pas la preuve de leur fréquence et de leur intensité mais se cantonnent à des allégations peu circonstanciées qui ne permettent pas de caractériser l'existence d'un dommage anormal. Dès lors, leurs conclusions tendant à ce que leur soit versée une indemnité de 4 500 euros en réparation du préjudice qu'ils auraient subi pendant la durée du chantier, ne sont pas susceptibles d'être accueillies.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société ERDF, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, et M.B..., au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers la somme de 3 000 euros que demande la société ERDF.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level, et de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société ERDF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., syndicat des copropriétaires du 12, rue Emile Level et à la société ERDF.

Délibéré après l'audience du 1er février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2016.

Le président-rapporteur,

J. LAPOUZADE

Le président assesseur,

I. LUBEN

Le greffier,

A. CLEMENT

La République mande et ordonne au préfet de Paris, préfet de la région Île-de-France, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03819


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03819
Date de la décision : 15/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité fondée sur l'égalité devant les charges publiques.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jacques LAPOUZADE
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SCP COURTEAUD PELLISSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-15;14pa03819 ?
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