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16/02/2016 | FRANCE | N°15PA03716

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 16 février 2016, 15PA03716


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Technival a demandé au Tribunal administratif de Polynésie Française de condamner la commune de Bora-Bora à l'indemniser des préjudices liés à l'exécution d'un contrat en 2003 par lequel la commune lui a confié la gestion d'une unité d'élimination des déchets verts par compostage.

Par un jugement n° 1100122 du 30 juin 2011, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a, en premier lieu, fait droit aux conclusions présentées par la société Technival sur le terrain quasi

-contractuel, et a en deuxième lieu, rejeté ses conclusions présentées sur le terrain qua...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Technival a demandé au Tribunal administratif de Polynésie Française de condamner la commune de Bora-Bora à l'indemniser des préjudices liés à l'exécution d'un contrat en 2003 par lequel la commune lui a confié la gestion d'une unité d'élimination des déchets verts par compostage.

Par un jugement n° 1100122 du 30 juin 2011, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a, en premier lieu, fait droit aux conclusions présentées par la société Technival sur le terrain quasi-contractuel, et a en deuxième lieu, rejeté ses conclusions présentées sur le terrain quasi-délictuel, ainsi que les conclusions reconventionnelles présentées par la commune au titre de la remise en état du matériel dégradé.

Par un arrêt n° 11PA04420 du 31 décembre 2013, la Cour, saisie d'un appel principal de la commune de Bora-Bora et d'un appel incident de la société Technival, a confirmé ce jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française.

Par une décision n° 376973 du 18 septembre 2015, le Conseil d'Etat, saisi par la commune de Bora-Bora, a annulé l'arrêt de la Cour du 31 décembre 2013 en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société Technival pour la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007 et, après avoir rejeté le surplus des conclusions des parties, a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 11 octobre 2011, 10 août 2012 et 7 décembre 2015, la commune de Bora-Bora, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 110122 du 30 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française l'a condamnée à verser à la société Technival une somme de 29 344 357 francs CFP, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2006 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Technival devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ;

3°) de condamner la société Technival, à titre principal, à lui verser une somme de 29 036 959 francs CFP ou, à titre subsidiaire, une somme de 7 375 000 francs CFP ;

4°) de mettre à la charge de la société Technival le versement de la somme de 330 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de communication du dernier mémoire produit par la société Technival ;

- la demande de la société Technival était irrecevable faute de liaison du contentieux ;

- le premiers juges ont retenu à tort le tarif contractuel pour déterminer l'indemnité due au titre de l'enrichissement en cause, les dépenses utiles pouvant seules être retenues ;

- elle n'a pas été enrichie par les prestations de mauvaise qualité de la société Technival et du fait de la dégradation des installations ;

- cette dégradation justifie la condamnation de la société Technival à lui verser une somme de 20 036 959 francs CFA, correspondant à la valeur d'achat du matériel, ou à défaut à hauteur de la somme de 7 375 000 francs CFA retenue par l'expert.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 avril 2012 et 7 janvier 2016, la société Technival, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce que, par la voie de l'appel incident, la commune de Bora-Bora soit condamnée à lui verser une somme complémentaire de 7 138 740 francs CFA, et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le contentieux, qui est relatif à des travaux publics, a été lié ;

- les conclusions indemnitaires de la commune ne sont pas fondées ;

- la commune s'est enrichie sans cause au cours de la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007 ;

- la commune a commis une faute en concluant un contrat entaché de nullité, qui lui a fait perdre les bénéfices attendus de l'exécution du contrat au cours de la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007 ;

- elle a commis une faute qui lui a fait perdre une chance de percevoir les bénéfices attendus de l'exécution du marché jusqu'à son terme ;

- elle a donné son accord à la poursuite des prestations après juin 2007.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, et la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- la délibération n° 84-20 du 1er mars 1984 portant code des marchés publics de toute nature passés au nom de la Polynésie française et de ses établissements publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les conclusions de M. Cantié, rapporteur public.

1. Considérant que, par un contrat conclu le 20 juin 2003, la commune de Bora-Bora a confié à la société Technival la gestion de l'unité d'élimination des déchets verts par compostage de Povai ; que, saisi par cette société d'une demande tendant au paiement de prestations réalisées en exécution de ce contrat, le Tribunal administratif de la Polynésie française a jugé que le contrat était " nul " et a, par suite, rejeté les conclusions que la société Technival avait présentées sur le terrain de la responsabilité contractuelle par un jugement du 26 juin 2007 ; que, par une nouvelle demande, enregistrée le 3 mars 2011 sous le n° 110122, la société Technival a saisi le Tribunal administratif de la Polynésie française de conclusions tendant à la condamnation de la commune de Bora-Bora à l'indemniser, en l'absence de paiement des prestations réalisées ; que la commune a, pour sa part, présenté des conclusions reconventionnelles tendant à l'indemnisation des frais de remise en état du matériel dégradé ; que, par un jugement du 30 juin 2011, le Tribunal administratif de la Polynésie française a, en premier lieu, fait droit aux conclusions présentées par la société Technival pour la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007, en deuxième lieu, rejeté ses conclusions pour la période postérieure au 26 juin 2007 et, en dernier lieu, rejeté les conclusions reconventionnelles présentées par la commune ; que, par un arrêt du 31 décembre 2013, la Cour administrative d'appel de Paris a confirmé ce jugement ; que saisi par la commune, le Conseil d'Etat a, par une décision du 18 septembre 2015, annulé l'arrêt du 31 décembre 2013 de la Cour en tant qu'il a fait droit aux conclusions indemnitaires de la société Technival pour la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007 et, après avoir rejeté le surplus des conclusions des parties, a renvoyé l'affaire à la Cour dans cette mesure ;

2. Considérant que le cocontractant de l'administration dont le contrat est écarté et qui ne peut, de ce fait, poursuivre sa responsabilité contractuelle, peut prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses prévues au contrat qui ont été utiles à la personne publique envers laquelle il s'était engagé ; que, dans le cas où le contrat a été écarté en raison d'une faute de l'administration, il peut en outre prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute ; qu'à ce titre, il peut demander le paiement des sommes correspondant aux autres dépenses exposées par lui pour l'exécution du contrat et aux gains dont il a été effectivement privé, notamment du bénéfice auquel il pouvait prétendre, si toutefois l'indemnité à laquelle il a droit sur un terrain quasi-contractuel ne lui assure pas déjà une rémunération supérieure à celle que l'exécution du contrat lui aurait procurée ;

3. Considérant, ainsi que l'a relevé le Conseil d'Etat dans la décision du 18 septembre 2015, que les conclusions de la société Technival dirigées contre la commune de Bora-Bora tendant à l'indemnisation des préjudices subis au cours de la période du 23 juin 2003 au 26 juin 2007 ont été présentées sur le seul fondement de la responsabilité quasi contractuelle de la commune ; que si la société Technival invoque en outre la responsabilité pour faute de la commune, pour la première fois, postérieurement à l'intervention de cette décision de la Haute juridiction et après l'expiration du délai d'appel, ces conclusions, qui reposent sur une cause juridique distincte, sont en tout état de cause irrecevables ;

4. Considérant que dès lors que la nullité du contrat liant la commune de Bora-Bora à la société Technival a été définitivement constatée par le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française du 26 juin 2007, qui a été confirmé sur ce point, la société Technival peut obtenir la condamnation de la commune à lui rembourser les dépenses utiles exposées à son profit entre le 23 juin 2003, date à laquelle le contrat a été conclu, et le 26 juin 2007 ; qu'elle ne peut en revanche réclamer le paiement du bénéfice auquel elle aurait pu prétendre ;

5. Considérant qu'à l'appui de ces conclusions indemnitaires, la société Technival se borne à demander le paiement du montant intégral des vingt-trois factures qu'elle a émises au titre de cette période, sans justifier du montant des seules dépenses utiles à la commune qu'elle a engagées, lesquelles ne peuvent donc inclure le bénéfice qui a été nécessairement intégré aux factures ; que, par suite, il y a lieu d'ordonner, avant-dire droit, un supplément d'instruction aux fins de permettre à la société Technival de produire, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, tous éléments relatifs à l'évaluation des seules dépenses utiles qu'elle a exposées au profit de la commune de Bora-Bora à l'exclusion de ses bénéfices ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de la commune de Bora-Bora, procédé par les soins de la société Technival à la mesure d'instruction dont l'objet est défini au point 5 des motifs du présent arrêt.

Article 2 : Il est accordé à la société Technival, pour l'exécution du supplément d'instruction prescrit à l'article 1er ci-dessus, un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Bora-Bora présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'a pas été statué sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bora-Bora et à la société Technival.

Délibéré après l'audience du 2 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 février 2016.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVENLe greffier,

A-L. CALVAIRELa République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03716
Date de la décision : 16/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-04 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Enrichissement sans cause.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. CANTIE
Avocat(s) : SELARL MILLET LOYANT - DEFENSE CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-16;15pa03716 ?
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