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29/07/2016 | FRANCE | N°15PA02275

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 29 juillet 2016, 15PA02275


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée JDS Invest a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période courue du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1414070/1-1 du 8 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris

a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 juin 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée JDS Invest a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période courue du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1414070/1-1 du 8 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 juin 2015, la société JDS Invest, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1414070/1-1 du 8 avril 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour omission à statuer sur un moyen ;

- la procédure d'imposition est irrégulière pour méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et de la doctrine BOI-CF-COM 10-10-20, n° 80, pour défaut d'information de l'exercice, par le service, de son droit de communication auprès de l'un de ses clients ;

- les impositions contestées sont mal fondées au motif que le service n'est pas fondé à rehausser ses recettes au seul vu des écritures comptables de l'un de ses clients ;

- le service n'établit pas l'existence de distributions dès lors que le rehaussement de recettes est mal fondé et que son résultat avant rectification était déficitaire ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est ni motivée, ni fondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auvray ;

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée JDS Invest, qui exerce une activité de conseil et d'assistance auprès des entreprises, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle ont été mis à sa charge des suppléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des rappels en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à concurrence de 24 000 euros, ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont toutefois été abandonnés au stade de la réponse faite le 27 octobre 2010 par le service aux observations de la contribuable ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la société JDS Invest soutient que le jugement attaqué n'a pas statué sur son argumentation tirée de ce que le service ne pouvait pas rehausser ses recettes de 24 000 euros en se fondant uniquement sur une décision de gestion prise par la société Vinos Reales, juridiquement indépendante, consistant à avoir comptabilisé cette même somme en charges au titre d'un achat effectué auprès d'elle ;

3. Considérant, toutefois, que, pour rejeter les conclusions à fin de décharge formulées par la société JDS Invest, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments développés devant lui, s'est fondé sur la circonstance, qui était suffisante, qu'il résultait de l'instruction et n'était pas contesté que la société JDS Invest avait facturé des prestations de services à la société Vinos Reales sans les comptabiliser ; qu'il suit de là que la société JDS Invest n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour insuffisance de motivation ou défaut de réponse à un moyen ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a indiqué, dans la proposition de rectification du 5 juillet 2010, l'origine et la teneur des renseignements ayant servi à asseoir le rehaussement litigieux de 24 000 euros de la base imposable de la société JDS Invest et qu'elle y a notamment précisé que ces renseignements étaient issus de la vérification de comptabilité de la société Vinos Reales et, en particulier, du compte fournisseur " JDS Invest " ouvert dans les écritures de cette société, dont elle a en outre joint le détail en annexe 1 à la proposition de rectification susmentionnée ; que l'administration, qui a ainsi mis à même l'intéressée de demander communication des documents que le service a utilisés, a satisfait aux dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, lesquelles n'imposaient pas, contrairement à ce que soutient la société requérante, que l'administration transmît spontanément lesdits documents à la contribuable, dont il n'est pas contesté qu'elle ne les a pas demandés avant la mise en recouvrement des suppléments d'impôt en cause ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'administration aurait dû informer la société Vinos Reales de ce qu'elle allait utiliser les informations recueillies lors de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, procédure distincte de celle diligentée à l'encontre de la requérante ; que cette dernière ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative référencée BOI-CF-COM 10-10-20 n° 80, dès lors que la garantie prévue par cet article ne s'étend en tout état de cause pas à la procédure d'imposition ;

En ce qui concerne le bien-fondé des suppléments d'impôt sur les sociétés :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment, les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation (...) 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle (...) sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services (...) " ;

8. Considérant que la société JDS Invest soutient que le service n'était pas fondé à rehausser de 24 000 euros son résultat imposable à l'impôt sur les sociétés au seul motif que cette somme, dont il est constant qu'elle n'a pas été comptabilisée dans les produits de l'exercice clos le 30 juin 2008, était inscrite en charges dans les écritures de la société Vinos Reales, qui est juridiquement indépendante ;

9. Considérant, toutefois, que les représentants de la société JDS Invest ont confirmé, durant la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, avoir facturé des prestations de services à la société Vinos Reales pour un montant mensuel hors taxes de 4 000 euros pendant six mois, ce qui est consigné en page 15 de la proposition de rectification du 5 juillet 2010 ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que, dans ses observations du 8 septembre 2010, la requérante n'a contesté ce rehaussement pour omission de recettes qu'en faisant valoir que le service ne pouvait pas à la fois remettre en cause le caractère fiscalement déductible de cette somme de 24 000 euros des résultats de la société Vinos Reales que cette dernière avait inscrite en charges et procéder à la réintégration de cette même somme dans sa base imposable, et qu'il résulte de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires que, durant la séance du 7 avril 2011 où était présent le gérant de la société requérante, qui est d'ailleurs également celui de la société Vinos Reales, il n'a pas été contesté que les prestations correspondantes avaient été réalisées et les factures correspondantes émises, pour un montant total de 24 000 euros ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que la société JDS Invest a omis d'inscrire la somme en cause dans ses produits imposables au titre de l'exercice clos le 30 juin 2008 ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que la société JDS Invest soutient qu'en imposant à l'impôt sur les sociétés la somme litigieuse de 24 000 euros en tant que recette omise et en remettant en cause le caractère fiscalement déductible de cette même somme chez sa cliente, la société Vinos Reales, l'administration taxe deux fois la même somme et s'expose à une action en répétition de l'indu prévue à l'article 1235 du code civil, voire sur le fondement de l'enrichissement sans cause dont le principe est fixé à l'article 1371 du même code ;

11. Mais considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 9 que c'est à juste titre que l'administration fiscale a procédé au rehaussement litigieux de la base imposable de la société JDS Invest, de sorte que la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés afférente au rehaussement de 24 000 euros n'est ni indue, ni susceptible d'être qualifiée d'enrichissement sans cause, étant au surplus fait observer que le service n'a remis en cause le caractère fiscalement déductible de cette somme de 24 000 euros des résultats de la société Vinos Reales que pour défaut de production des factures correspondantes ;

12. Considérant, en troisième lieu, que la société JDS Invest ne peut utilement soutenir, dans le cadre du présent litige qui n'a pas trait à l'impôt sur le revenu, que l'administration, n'ayant pas fait usage de la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts, ne démontrerait pas l'appréhension par son gérant des sommes qu'elle a, sur le fondement du c) de l'article 111 de ce code, regardées comme distribuées à ce dernier, dès lors qu'aucun redressement n'a été, pour ce motif, mis à la charge de la société, ainsi que le relève le ministre des finances et des comptes publics ;

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :

13. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du même livre : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée (...), la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

14. Considérant que, pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, les conclusions de la société JDS Invest tendant au prononcé de la décharge de la majoration contestée de 40 % restant en litige compte tenu de l'abandon du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mentionné au point 1 ne peuvent qu'être rejetées ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société JDS Invest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée JDS Invest est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société JDS Invest et au ministre des finances et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques

d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal Paris Centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 21 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 29 juillet 2016.

Le rapporteur,

B. AUVRAY

Le président,

J. KRULIC Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02275
Date de la décision : 29/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions - Conditions de la déduction.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CABINET JURIDIQUE COURTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-07-29;15pa02275 ?
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