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15/09/2016 | FRANCE | N°15PA04719

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 15 septembre 2016, 15PA04719


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 14 814,79 euros, assortie des intérêts légaux capitalisés à compter de la réception de sa demande préalable, le 25 juillet 2014, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité de l'arrêté du 25 octobre 2011 du préfet de Seine-et-Marne portant refus de renouvellement de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destinatio

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Par un jugement n° 1502087/3 du 15 octobre 2015, le Tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 14 814,79 euros, assortie des intérêts légaux capitalisés à compter de la réception de sa demande préalable, le 25 juillet 2014, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité de l'arrêté du 25 octobre 2011 du préfet de Seine-et-Marne portant refus de renouvellement de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.

Par un jugement n° 1502087/3 du 15 octobre 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'Etat à verser à Mme B...une indemnité de 1 000 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 décembre 2015, MmeB..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Melun du 15 octobre 2015 en ce qu'il a condamné l'Etat à ne lui verser que la somme de 1 000 euros en principal ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 14 601,79 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 25 octobre 2011, cette somme étant assortie des intérêts légaux, capitalisés à compter du 25 juillet 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'elle a subis du fait de l'arrêté illégal du préfet de Seine-et-Marne du 25 octobre 2011 divers préjudices moraux et financiers dont elle justifie.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public.

1. Considérant que Mme C...B..., ressortissante russe née le 7 avril 1987 à Voronej (Russie), est entrée en France pour la première fois le 2 septembre 2008 sous couvert d'un visa pour y suivre des études ; qu'elle a été mise en possession d'un titre de séjour portant la mention " étudiant ", régulièrement renouvelé jusqu'au 5 octobre 2010 ; que par un arrêté en date du 25 octobre 2011, le préfet de Seine-et-Marne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme B...a spontanément exécuté l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre en retournant en Russie tout en exerçant un recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté du 25 octobre 2011 ; que, par un jugement du 22 avril 2013, devenu définitif, le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 25 octobre 2011 au motif que le préfet de Seine-et-Marne avait commis une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de renouveler le titre de séjour " étudiant " de MmeB... ; que sa demande, formée par lettre du 24 juillet 2014, d'indemnisation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de cet arrêté ayant fait l'objet d'un rejet implicite, Mme B...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 14 814,79 euros en réparation de ces préjudices ; qu'elle relève appel du jugement du 15 octobre 2015 du Tribunal administratif de Melun en tant que, par ce jugement, le Tribunal a limité l'indemnisation accordée à une somme de 1 000 euros, majorée des intérêts et de la capitalisation des intérêts ; qu'elle réduit toutefois en appel le montant de l'indemnisation sollicitée à la somme de 14 601,79 euros ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

S'agissant du préjudice moral :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme B...a, comme elle en était tenue, spontanément exécuté l'obligation de quitter le territoire français litigieuse, prise à son encontre le 25 octobre 2011 et ultérieurement annulée pour illégalité, en retournant dans son pays d'origine le 30 novembre 2011 ; qu'elle établit que, du fait de cet éloignement, elle a dû interrompre ses études pendant une année alors même qu'elle avait obtenu d'excellents résultats à l'issue de sa première année de licence et qu'elle a de ce fait obtenu sa licence avec un an de retard ; qu'elle établit également que, du fait de ce retour contraint dans son pays d'origine, elle a, sauf pour de brèves périodes en Croatie et en Russie, été séparée du ressortissant français avec qui elle établit qu'elle entretenait une relation amoureuse et avec qui elle soutient sans être contredite par le préfet de Seine-et-Marne, qui n'a produit d'observations en défense ni devant la Cour ni devant les premiers juges, qu'elle vivait en union libre depuis le 1er septembre 2011 ; qu'eu égard à ces circonstances, Mme B...est fondée à soutenir qu'en fixant à 500 euros la somme destinée à indemniser son préjudice moral, le Tribunal administratif a fait une évaluation insuffisante de celui-ci ; qu'il sera fait dans les circonstances de l'espèce une juste appréciation, en tous ses composants, du préjudice moral subi par Mme B...du fait de l'illégalité de la décision attaquée en relevant à la somme totale de 2 000 euros l'indemnisation devant lui être accordée à ce titre ;

S'agissant du préjudice matériel :

3. Considérant que la requérante établit, d'une part, que du fait de l'exécution de la mesure d'éloignement illégale prise à son encontre, elle a subi un préjudice matériel correspondant, d'une part, aux parties non remboursées par ces organismes des frais d'inscription au club de tennis de Lognes pour l'année 2012 pour un montant de 180 euros et à l'Institut national des langues et civilisations orientales pour l'année 2012-2013 pour le même montant de 180 euros ; qu'en revanche, elle n'est pas fondée à demander l'indemnisation de ses frais d'inscription à l'Inalco pour l'année 2013-2014 au cours de laquelle elle a poursuivi ses études en France auprès de cet organisme ; que, d'autre part, elle est fondée à demander l'indemnisation des frais qu'elle a supportés au titre des démarches entreprises pour obtenir un visa de retour en France pour un montant total de 202,23 euros et au titre de ses frais de retour en France qu'elle évalue à une somme totale non contestée de 1 501,26 euros ; qu'en revanche, dans les circonstances particulières de l'espèce, elle n'est pas fondée à demander l'indemnisation de ses frais de départ de France le 30 novembre 2011 dès lors qu'il résulte de l'instruction que les dépenses correspondantes avaient été engagées antérieurement à la décision d'éloignement, aux fins, initialement, d'un séjour en Russie auprès de sa famille, et qu'elles ne peuvent, dans ces conditions, être regardées comme ayant été exposées du fait de l'intervention de l'arrêté litigieux ; que la requérante n'est pas davantage fondée à demander l'indemnisation des divers frais de voyages entre la Russie et la Croatie engagés pour rejoindre son compagnon pendant la période d'éloignement ni des frais personnellement exposés par ce dernier pour la rejoindre en Russie ; qu'il résulte de ce qui précède que, en ce qui concerne son préjudice matériel, Mme B...est seulement fondée à demander que la somme de 500 euros allouée à ce titre par le Tribunal administratif soit portée une somme totale de 2 313,49 euros ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...est seulement fondée à demander que l'indemnité que le Tribunal administratif de Melun a condamné l'Etat à lui verser pour un montant total de 1 000 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices, soit portée à la somme totale de 4 313,49 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

5. Considérant que la somme supplémentaire de 3 313,49 euros, allouée par le présent arrêt, portera intérêts à compter du 25 juillet 2014, date de la réception à la préfecture de Seine et Marne de la réclamation préalable de MmeB... ; que les intérêts échus à la date du 25 juillet 2015 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à Mme B...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme que l'Etat a été condamné par le Tribunal administratif de Melun à verser à Mme B...en réparation de ses préjudices est portée à 4 313,49 euros.

Article 2 : La somme supplémentaire de 3 313,49 euros, allouée par le présent arrêt, portera intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2014. Les intérêts dus sur cette somme seront capitalisés à la date du 25 juillet 2015 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 septembre 2016.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNILe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA04719


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04719
Date de la décision : 15/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-04-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Responsabilité et illégalité. Illégalité engageant la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : SELARL ACACCIA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-15;15pa04719 ?
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