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14/12/2016 | FRANCE | N°16PA01859

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 14 décembre 2016, 16PA01859


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Zola Restauration a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des amendes qui lui ont été infligées, sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts, au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1504842/1-1 du 6 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 7 juin et 5 septembre 2016, la société Zola Restauration, rep

résentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1504842/1-1 du 6 avril 2016 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Zola Restauration a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des amendes qui lui ont été infligées, sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts, au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1504842/1-1 du 6 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 7 juin et 5 septembre 2016, la société Zola Restauration, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1504842/1-1 du 6 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'ordonner la décharge des amendes litigeuses, subsidiairement, d'en réduire le montant aux sommes de 7 077 euros pour 2009 et 11 232 euros pour 2010, plus subsidiairement, d'en réduire le montant total à la somme de 52 624 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu à la note en délibéré qu'elle a produite devant eux et se sont contentés de la viser ;

- elle a été privée d'un débat oral et contradictoire portant notamment sur les éléments issus du contrôle opéré par la DIRECCTE (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) alors que ces éléments ont servi à l'application de l'amende litigieuse;

- les premiers juges se sont mépris sur la dévolution de la charge de la preuve en n'exigeant pas de l'administration qu'elle démontre l'inexécution des prestations ;

- faute d'identifier distinctement les facturations fictives, l'administration n'établit pas la matérialité de l'infraction ;

- le tribunal n'a pas répondu à cet argument, soulevé devant lui ;

- l'assiette de calcul de l'amende est exagérée faute pour l'administration d'avoir distingué, au sein de chaque action de formation facturée, les heures de formation qui ont été dispensées et celles qui ne l'ont pas été.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me Sobczynski, avocat de la société Zola Restauration.

1. Considérant que la société Zola Restauration, après avoir en vain demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des amendes qui lui ont été infligées, sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2009 et 2010, relève appel du jugement n° 1504842/1-1 du 6 avril 2016, par lequel ce tribunal a rejeté sa demande ; que la requête d'appel de la société Zola Restauration doit être regardée comme tendant, outre à l'annulation dudit jugement, à la décharge des amendes litigieuses, subsidiairement à leur réduction ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ;

3. Considérant que la société Zola Restauration a produit devant le tribunal administratif une note en délibéré enregistrée après l'audience ; que le tribunal administratif a bien, dans son jugement du 6 avril 2016, visé cette note en délibéré ; que dans cette note en délibéré, la société Zola Restauration n'exposait ni circonstance de fait dont elle n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction, ni circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; qu'en effet, si la société Zola Restauration faisait état dans cette note d'un précédent jugement rendu sur sa demande par le Tribunal administratif de Paris et admettant le caractère réel de certaines prestations de formation servies par elle, ce jugement était intervenu depuis le 9 octobre 2013 et, n'ayant pas été frappé d'appel en tant qu'il faisait partiellement droit à la demande de la société requérante, était donc devenu définitif à l'expiration du délai de deux mois suivant sa notification aux parties ; qu'il suit de là que la société Zola Restauration n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier au motif qu'il se borne à viser la note en délibéré susmentionnée ;

4. Considérant, en second lieu, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre dans le détail à tous les arguments développés par la société Zola Restauration à l'appui du moyen tiré de ce que la matérialité de l'infraction aux règles de facturation n'était pas établie par l'administration, ont suffisamment exposé, dans leur jugement, les raisons pour lesquelles, compte tenu de l'ensemble des indices et des anomalies relevés par l'administration, et en l'absence de toute justification apportée par la société, ce moyen devait être écarté comme non fondé ; que leur jugement satisfait, contrairement à ce que soutient la société requérante, à l'exigence de motivation posée par l'article L.9 du code de justice administrative ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables [...] " ; que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable où sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ; si, eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'une vérification de comptabilité, l'administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte au cours d'une vérification tout ou partie de la comptabilité tenue par l'entreprise vérifiée mais se trouvant chez un tiers, de soumettre l'examen des pièces obtenues à un débat oral et contradictoire avec le contribuable, il n'en est pas de même lorsque lui sont communiqués des documents ne présentant pas le caractère de pièces comptables de l'entreprise vérifiée ;

6. Considérant qu'il est constant que la vérification de comptabilité de la société Zola Restauration s'est déroulée dans les locaux de la société, que le vérificateur y a rencontré son représentant à trois reprises en octobre et novembre 2012, et que le opérations de contrôle ont été suivies de deux réunions de synthèse ; que la société requérante n'apporte aucun élément de nature à démontrer que le vérificateur se serait soustrait à tout débat oral et contradictoire ; que si elle fait valoir qu'aucun débat n'a eu lieu concernant les documents obtenus par l'administration auprès du service régional de contrôle de la formation professionnelle de la DIRECCTE d'Ile-de-France, il résulte de l'instruction que les documents en cause ne constituaient pas des pièces comptables de la société Zola Restauration ; que le service n'était dès lors pas tenu de porter ces documents à la connaissance de l'intéressée avant le terme de la vérification ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité faute pour le vérificateur d'avoir soumis à un débat oral et contradictoire avec la contribuable les documents en cause, ne peut qu'être écarté comme inopérant ; qu'au demeurant, lesdits documents, qui étaient clairement identifiés dans les deux propositions de rectification adressées à la société Zola Restauration, ont été communiqués à celle-ci dès qu'elle en a fait la demande ;

Sur le bien-fondé des amendes :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant (...) 2. De la facture, le fait de délivrer une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle " ;

8. Considérant que, s'il appartient en principe toujours à l'administration de démontrer le caractère fictif ou de complaisance de factures émises par le contribuable, lorsque l'administration apporte des indices sérieux du caractère fictif des prestations figurant sur lesdites factures, il appartient alors au contribuable de justifier que les factures qu'il a établies correspondaient à des prestations réellement exécutées ;

9. Considérant, qu'en l'espèce, pour infliger l'amende contestée, le service s'est notamment fondé sur les conclusions d'un contrôle, effectué par le service compétent de la DIRECCTE d'Ile-de-France, lequel a mis en évidence, d'une part, la mention sur diverses factures dont la liste est détaillée dans la proposition de rectification, de formateurs non recensés comme tels dans le registre du personnel de la société requérante et, d'autre part, par confrontation, pour les actions de formations concernées, avec les notes de frais de déplacement des formateurs impliqués, de nombreuses incohérences d'emploi du temps décrites également dans la proposition de rectification, illustrant l'impossibilité physique d'une présence desdits formateurs aux lieux et heures de certaines des prestations facturées qu'ils étaient censés avoir assurées ; que ce faisceau d'éléments était de nature à remettre en cause la réalité de l'exécution des actions de formation mentionnées, respectivement, sur 22 factures afférentes à 99 journées-formateur en 2009 et 44 factures portant sur 151 journées-formateur en 2010 ; qu'en se bornant, comme elle le faisait devant le tribunal administratif, à relever que les incohérences relevées ne concernent pas toutes les heures de formations comprises dans les prestations facturées, sans apporter d'ailleurs aucun élément tangible de nature à démontrer, comme elle le prétend, que des contretemps auraient conduit à modifier les horaires effectifs des formations par rapport au planning initial et que tout ou partie des formations en cause aurait bien été dispensé par ses soins, la société requérante n'invalide pas les constatations faites par l'administration ; que, dès lors, l'administration doit être considérée, eu égard à la fréquence et à la gravité des anomalies relevées, comme démontrant l'inexécution, dans leur ensemble, des actions de formations figurant sur les factures susmentionnées ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges, qui ne se sont pas mépris sur la dévolution de la charge de la preuve, ont estimé que l'administration apportait la preuve du caractère fictif, dans leur totalité, des prestations en cause, facturées par la société requérante ; qu'il suit de là que celle-ci n'est pas fondée à obtenir la décharge des amendes litigeuses, et pas davantage à demander, à titre subsidiaire, que l'amende soit ramenée aux montants de 7 077 euros pour 2009 et 11 232 euros pour 2010, ou plus subsidiairement, que son montant total soit limité à 52 624 euros ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Zola Restauration n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation du jugement et à la décharge des amendes litigieuses doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Zola Restauration est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Zola Restauration et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé la direction nationale d'enquêtes fiscales.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller

Lu en audience publique, le 14 décembre 2016.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01859


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01859
Date de la décision : 14/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SCP DELORMEAU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-14;16pa01859 ?
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