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30/12/2016 | FRANCE | N°15PA02288

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 30 décembre 2016, 15PA02288


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au juge des référés du Tribunal administratif de Paris, d'une part, de condamner l'Etat à lui verser une provision de 195 385 euros au titre du préjudice résultant de la carence de l'Etat à mettre en place un plan d'apurement de sa dette et du préjudice moral en résultant, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1412350/6-1 du 18 mai 201

5, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a fait partiellement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au juge des référés du Tribunal administratif de Paris, d'une part, de condamner l'Etat à lui verser une provision de 195 385 euros au titre du préjudice résultant de la carence de l'Etat à mettre en place un plan d'apurement de sa dette et du préjudice moral en résultant, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1412350/6-1 du 18 mai 2015, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a fait partiellement droit à sa demande en lui octroyant une provision de 53 461 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juin 2015, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) demande à la Cour d'annuler l'ordonnance n° 1412350/6-1 du 18 mai 2015 du juge des référés du Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que c'est à tort que le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a retenu la responsabilité de l'Etat qui n'aurait pas rempli son rôle dans la négociation du plan d'apurement entre M. B...et ses créanciers, alors que ce dernier avait déjà saisi le juge des référés du même tribunal et s'était vu accorder une provision de 74 692 euros par une ordonnance annulée par arrêt de la Cour du 31 juillet 2013 qui avait écarté le moyen tiré de la carence de l'Etat.

Vu la décision en date du 3 juillet 2015 par laquelle le magistrat désigné par le président de la Cour administrative d'appel a, en application de l'article L. 522-1 du code de justice administrative, décidé le renvoi de cette affaire à une formation collégiale.

Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2016 M. D...B...représenté par Me G..., conclut en sa qualité d'héritier de M. C...B...à la confirmation de l'ordonnance attaquée en ce qu'elle constate l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de l'Etat à l'égard de M. C...B...et condamne l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à ce que la provision soit portée à la somme de 195 385 euros au titre de l'ensemble des préjudices de M. C...B...et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance.

Par un mémoire enregistré le 30 novembre 2016, M. E... B...et Mme F...B..., représentés par le cabinet de Sèze-Blanchy, concluent en leur qualité d'héritiers de M. C... B..., à la confirmation de l'ordonnance attaquée en ce qu'elle constate l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de l'Etat à l'égard de M. C... B...et condamnent l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à ce que la provision soit portée à la somme de 195 385 euros au titre de l'ensemble des préjudices de M. C...B...et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 3 000 euros à verser à chacun d'eux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance.

Vu la mise en demeure adressée le 25 mai 2016 au Premier ministre, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 ;

- le décret n° 2014-1698 du 29 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- et les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public.

1. Considérant que l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) relève appel de l'ordonnance du 18 mai 2015 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a octroyé à M. C...B..., sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 53 461 euros au titre du préjudice résultant de la carence de l'Etat à mettre en place un plan d'apurement de sa dette et du préjudice moral en résultant ; que M. D... B..., M. E... B...et Mme F...B..., en leur qualité d'héritiers de M. C... B...décédé le 4 mai 2015, concluent à la confirmation de l'ordonnance attaquée, en ce qu'elle constate l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de l'Etat à l'égard de M. C...B..., et à sa réformation, en ce que qui concerne le montant de la provision allouée ;

Sur l'existence de l'obligation :

2. Considérant, qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 4 juin 1999 relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 29 décembre 2014 : " (...) Si la demande est déclarée éligible, la commission adresse sa décision au préfet. Celui-ci la notifie au bénéficiaire par lettre recommandée avec avis de réception et assure le traitement du dossier ; avec le concours du trésorier-payeur général, il invite les créanciers et le débiteur à négocier un plan d'apurement global et définitif de l'ensemble de la dette de l'intéressé. Le plan établi comporte les abandons de créance librement acceptés et les modalités de paiement des sommes restant dues par le débiteur en fonction de ses capacités contributives et de la valeur de ses actifs. Le plan d'apurement doit être signé par le débiteur et par ses créanciers douze mois au plus après la date de notification par le préfet de la décision d'éligibilité de la demande prise par la commission. A défaut d'accord dans ce délai, le préfet transmet le dossier à la commission. Celle-ci peut soit constater l'échec de la négociation, soit, dans les cas limitativement énumérés ci-après, émettre un avis motivé favorable à la prolongation du délai de négociation (...) Au vu de cet avis, le président de la mission interministérielle aux rapatriés peut accorder un délai supplémentaire (...) Le président de la mission notifie à l'intéressé, le cas échéant, sa décision de prolonger le délai de négociation. En cas de rejet de la prorogation, il informe la commission qui constate l'échec de la négociation. Lorsque la commission constate l'échec de la négociation, elle notifie à l'intéressé le rejet de la demande. " ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : " Si les éléments du dossier la rendent indispensable, une aide de l'Etat peut être attribuée par le ministre chargé des rapatriés dans les limites de 77 000 euros et de 50% du passif. Ces limites peuvent être dépassées lorsque le règlement du dossier le nécessite (...) " ; que le décret n° 2014-1698 du 29 décembre 2014 a, notamment, transféré les missions dont ces dispositions chargeaient le préfet au directeur général de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, et celles dont étaient investis la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée et le président de la mission interministérielle aux rapatriés, au ministre chargé des rapatriés ;

4. Considérant que, par jugement du 22 janvier 2010, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision rejetant implicitement le recours administratif préalable formé par M. C... B...à l'encontre la déclaration d'inéligibilité de sa demande de bénéfice du dispositif de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée et a fait injonction au Premier ministre de déclarer cette demande éligible ; qu'à la suite du jugement du même tribunal du 30 mars 2012 assortissant cette injonction d'une astreinte, le Premier ministre a déclaré M. B...éligible audit dispositif par une décision du 9 mai 2012 ; que M. B...a saisi le préfet des Landes par courrier du 3 août 2012 en vue de l'engagement d'un plan d'apurement ; que ce dernier a, par un courrier du 21 novembre 2012, certifié que le dossier avait été transmis aux services compétents pour qu'il y soit donné suite ; que toutefois, à la date où M. C... B...a saisi le juge des référés du Tribunal administratif de Paris, il n'est pas contesté qu'aucune invitation à négocier un plan d'apurement n'avait été adressée aux créanciers et au débiteur ; que la carence non justifiée de l'Etat dans le traitement de ce dossier durant trois ans constitue une faute de nature à engager sa responsabilité ; que cette faute a, comme l'a à juste titre estimé le juge des référés du tribunal, entraîné pour M. C...B...un préjudice moral de nature à faire naître une obligation non sérieusement contestable à la charge de l'Etat ; qu'en revanche, cette faute ne saurait être regardée comme à l'origine d'une perte de chance pour M. C... B...d'obtenir un accord avec ses créanciers et, le cas échéant, une aide de la part de l'État, lesquels étaient conditionnés à l'initiative du débiteur lui-même d'élaborer un plan d'apurement de ses dettes et à l'issue des négociations avec ses créanciers ; que le caractère extrêmement aléatoire desdites négociations, auxquelles l'autorité administrative n'a pas part, ne saurait faire naître à son encontre une obligation non sérieusement contestable d'indemniser le préjudice financier de M. C...B... ;

Sur le montant de la provision :

5. Considérant qu'il n'apparaît pas que le premier juge aurait fait une évaluation excessive du montant de la provision allouée à M. C...B...au titre de son préjudice moral en la fixant à 5 000 euros et, en l'état de l'instruction, l'ONAC ne produit aucun élément de nature à justifier de réduire le montant de cette provision ; qu'ainsi, en tenant compte du montant non discuté, et qui ne paraît pas excessif en l'état de l'instruction, du préjudice moral de M. C...B..., le montant de la provision versée à ce dernier et transmise à ses héritiers doit être ramené à 5 000 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au remboursement des dépens :

6. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'ONAC, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse aux intimés une somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que leur demande tendant au remboursement des dépens de l'instance doit être également rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le montant de la provision allouée à M. C...B...est ramené à 5 000 euros.

Article 2 : L'ordonnance n° 1412350/6-1 du 18 mai 2015 du juge des référés du Tribunal administratif de Paris est réformée en ce qu'elle a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. D... B..., M. E... B...et Mme F... B...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, au Premier ministre, au ministre de la défense, à M. D... B..., à M. E... B...et à Mme F...B....

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- Mme Julliard, première conseillère,

- MmeA..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au Premier ministre en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA02288


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02288
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : SCP NOURY-LABEDE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;15pa02288 ?
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