La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/12/2016 | FRANCE | N°15PA04456

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 30 décembre 2016, 15PA04456


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cofinfo a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger de l'obligation de payer la somme de 239 243,92 euros résultant d'une mise en demeure, tenant lieu de commandement, décernée le 3 juin 2014 pour le recouvrement d'une créance de l'Etat résultant d'un arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 5 juin 2007.

Par un jugement n° 1418929/3-3 du 13 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête enregistrée le 9 décembre 2015 et des mémoires enregistrés les 26 avril et 2 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cofinfo a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger de l'obligation de payer la somme de 239 243,92 euros résultant d'une mise en demeure, tenant lieu de commandement, décernée le 3 juin 2014 pour le recouvrement d'une créance de l'Etat résultant d'un arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 5 juin 2007.

Par un jugement n° 1418929/3-3 du 13 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2015 et des mémoires enregistrés les 26 avril et 2 juin 2016, la société Cofinfo, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 13 octobre 2015 ;

2°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 239 243,92 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la mise en demeure a été signée par une autorité incompétente ;

- la décision rejetant la réclamation préalable a été également signée par une autorité incompétente ;

- la mise en demeure ne comporte pas la référence des textes sur lesquels elle se fonde ; elle ne comporte pas non plus la mention du comptable assignataire ;

- l'Etat a commis un détournement de pouvoir et a méconnu l'autorité de la chose jugée en réclamant le remboursement de la somme en litige, en refusant d'expulser les squatters qui occupaient l'immeuble, en exigeant la réalisation de travaux qui ne pouvaient être effectués compte tenu de la présence de ceux-ci, et en procédant toutefois illégalement à leur expulsion dès l'expropriation de l'immeuble :

- l'Etat a méconnu les dispositions de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant d'exécuter une décision de justice revêtue de l'autorité de la chose jugée et en refusant d'indemniser la société Cofinfo des travaux réalisés d'office par l'administration ;

- il a également méconnu l'article 1er du Premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 avril et 13 mai 2016, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la contestation relative à la régularité formelle de l'acte de poursuites ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la contestation relative à la régularité formelle de l'acte de poursuites relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 24 mai 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Cofinfo.

1. Considérant que la société Cofinfo, venant aux droits de la société Kentucky, a acquis en 1997 un immeuble situé dans le 11ème arrondissement de Paris, afin de le rénover et de le donner en location ; que les locaux ont été occupés par des squatters ; que le président du Tribunal de grande instance de Paris a ordonné, en 2000, leur expulsion ; que la société a ensuite demandé à plusieurs reprises au préfet de police, entre 2000 et 2005, le concours de la force publique ; que l'Etat n'a pas accordé ce concours, a fait réaliser, aux frais de la société, des travaux de rénovation de l'immeuble, puis a engagé une procédure d'expropriation ; que par un jugement du 14 mars 2006, le Tribunal administratif de Paris a déclaré l'Etat responsable du préjudice subi par la société jusqu'en 2006 du fait du refus de concours de la force publique, sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques ; qu'il a condamné l'Etat à verser à la société Cofinfo la somme de 1 645 358,75 euros, représentant les pertes de loyers et charges subis et les frais de procédure ; que, sur appel du ministre de l'intérieur, la cour de céans, par un arrêt du 5 juin 2007 devenu définitif, a réformé ce jugement et ramené le montant de l'indemnisation à la somme de 689 424 euros ; que la société Cofinfo s'est vue réclamer le remboursement de la différence entre la somme de 1 645 358,75 euros, versée par l'Etat en exécution du jugement du 14 mars 2006, et la somme de 689 424 euros retenue par le juge d'appel ; qu'un titre de perception a été émis, pour un montant de 1 187 185,54 euros, par le ministre de l'intérieur, le 4 août 2008 ; que par un jugement du 11 décembre 2009, confirmé par un arrêt de la cour de céans du 20 janvier 2011, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Cofinfo tendant à l'annulation de ce titre de perception ; que la somme due n'ayant été que partiellement recouvrée par le biais d'une saisie à tiers détenteur, une mise en demeure de payer le reliquat, soit la somme de 239 243,92 euros, a été notifiée à la société Cofinfo le 3 juillet 2014 ; qu'après avoir formé une réclamation préalable auprès du comptable public, rejetée le 2 septembre 2014, la société Cofinfo a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger de l'obligation de payer cette somme ; que par un jugement du 13 octobre 2015, dont la société requérante fait appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt./ Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions précitées qu'il n'appartient pas au juge administratif de connaître des contestations en la forme des actes de recouvrement, lesquelles relèvent de la compétence du juge judiciaire ; que la mise en demeure en litige, valant commandement, constitue un acte de recouvrement ; qu'ainsi, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, doivent être écartés comme portés devant une juridiction incompétente pour en connaître les moyens tirés, d'une part, de ce que la mise en demeure du 3 juin 2014 n'aurait pas été signée par l'ordonnateur compétent et ne comporterait pas la référence du texte sur lequel est fondée la créance ni la mention du comptable assignataire et, d'autre part, de ce que la décision du 2 septembre 2014 rejetant la réclamation de la société Cofinfo aurait été signée par une autorité incompétente ;

4. Considérant, d'autre part, que les autres moyens soulevés par la requérante, tirés de ce que l'Etat aurait commis un détournement de pouvoir et méconnu l'autorité de la chose jugée en réclamant le remboursement de la somme en litige et qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 1er du Premier protocole additionnel à cette convention tendent à remettre en cause le bien-fondé de la somme réclamée ; qu'ils ne peuvent dès lors être utilement invoqués à l'appui d'un recours relatif à un acte de recouvrement ; que la société requérante a, au demeurant, comme il a été dit au point 2 ci-dessus, déjà contesté, sans succès, le bien-fondé du titre de perception émis le 4 août 2008, son recours ayant été définitivement rejeté ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Cofinfo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Cofinfo est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cofinfo, au ministre des finances et des comptes publics et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs-Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA04456


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04456
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-07-01 Comptabilité publique et budget. Règles de procédure contentieuse spéciales à la comptabilité publique. Recouvrement des créances.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : DOUEB

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;15pa04456 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award