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23/03/2017 | FRANCE | N°15PA01255

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 mars 2017, 15PA01255


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société ADS Ouvrages d'Art (ADS), agissant en qualité de mandataire du groupement constitué par les sociétés ADS et Entreprise MAES, a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) et Réseau Ferré de France à leur verser la somme globale de 1 750 426,46 euros HT, majorée des intérêts de droit à compter de la date de la réclamation formée le 8 octobre 2012 au titre des sujétions et travaux supplémentaires engendrés par l'exécution d'un

marché de travaux de rénovation de la grande halle voyageur de la gare de Pau (Pyré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société ADS Ouvrages d'Art (ADS), agissant en qualité de mandataire du groupement constitué par les sociétés ADS et Entreprise MAES, a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) et Réseau Ferré de France à leur verser la somme globale de 1 750 426,46 euros HT, majorée des intérêts de droit à compter de la date de la réclamation formée le 8 octobre 2012 au titre des sujétions et travaux supplémentaires engendrés par l'exécution d'un marché de travaux de rénovation de la grande halle voyageur de la gare de Pau (Pyrénées Atlantiques).

Par un jugement n° 1309608/3-1 du 27 janvier 2015, le Tribunal administratif de Paris a condamné la SNCF à verser à la société ADS une somme de 238 170,31 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2012, sous réserve des sommes déjà versées, et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement les 26 mars 2015 et 3 novembre 2015, la société ADS, représentée par la SCP Mazzieri, Bellon et Cabanne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1309608/3-1 du 27 janvier 2015 ;

2°) de condamner la SNCF et RFF à verser aux membres du groupement la somme de 1 750 426,46 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la SNCF et RFF le versement à son profit d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- les demandes de modifications de la maîtrise d'oeuvre en cours de chantier, non prévues par le cahier des clauses techniques particulières, ont engendré un décalage du programme des travaux et des pertes d'efficience qui sont imputables à la maîtrise d'ouvrage et qui doivent être prises en compte financièrement à hauteur de 52 377,68 euros HT au titre des modifications de l'échafaudage, de 49 086,08 euros HT s'agissant des retards imputables à la tenue du Grand Prix de Pau, de 205 323,57 euros HT au titre de la dépose d'installations électriques, de 34 827,98 euros HT au titre des interventions sur les caténaires, de 141 602,43 euros HT au titre de la non mise à disposition des caténaires et voies, de 162 715,38 euros HT au titre du travail le dimanche soir ;

- le groupement a été soumis à des travaux supplémentaires non prévus par le marché et des sujétions imprévues ayant engendré des surcoûts à hauteur de 79 104,00 euros HT au titre d'études supplémentaires, 7 251,20 euros HT au titre de l'intervention d'un contrôleur technique supplémentaire, de 15 870,90 euros HT au titre des modifications de la signalisation,

de 1 494,43 euros HT au titre de la réception des élus et 3 684,45 euros HT au titre du travail de nuit non prévu ;

- l'allongement de la durée du chantier de 20 semaines a engendré une perte d'exploitation de 323 026,93 euros HT ;

- les intempéries justifient une prolongation du délai de 25 jours et une indemnisation à hauteur de 118 680,02 euros HT ;

- la pénalité de 5 900 euros appliquée pour remise tardive du dossier de récolement est injustifiée en l'absence de tout retard ;

- elle a droit sur le total des sommes demandées à la révision des prix prévue à l'article 11 du cahier des prescriptions spéciales, pour un montant de 149 227,41 euros HT.

Par mémoires enregistrés les 1er octobre 2015 et 8 février 2016, l'établissement SNCF Réseau, représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société ADS le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable faute d'être accompagnée d'une copie du jugement attaqué et de sa notification ;

- elle est irrecevable dès lors qu'elle constitue une reproduction pure et simple de la demande de première instance qui n'a pas été régularisée avant l'expiration du délai d'appel ;

- à titre subsidiaire, et pour les mêmes motifs que ceux développés en première instance, la requérante n'est pas fondée à demander à être indemnisée au-delà des sommes allouées par les premiers juges.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire ;

- le cahier des clauses et conditions générales applicables aux marchés de travaux de la SNCF (CCCG) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour SNCF Réseau.

1. Considérant que la Société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF), agissant au nom et pour le compte de Réseau ferré de France (RFF) en qualité de maître d'ouvrage délégué, a confié au groupement solidaire formé des entreprises ADS Ouvrages d'Art et MAES, par un marché à prix global et forfaitaire conclu le 22 décembre 2010, la réalisation de travaux de rénovation de la grande halle voyageur de la gare de Pau ; qu'estimant avoir subi des préjudices financiers du fait de l'allongement du chantier et de divers travaux supplémentaires et sujétions imprévues, la société ADS, après le rejet d'une réclamation préalable, a saisi le Tribunal administratif de Paris qui, par un jugement du 27 janvier 2015, a condamné la SNCF à lui verser une somme de 238 170,31 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2012, et rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que la société ADS fait appel de ce jugement et demande que la SNCF et RFF, aux droits desquels vient l'établissement SNCF Réseau, soient condamnés à lui verser une somme de 1 750 426,46 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2012 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant, en premier lieu, que si le titulaire d'un marché a droit à l'indemnisation intégrale du préjudice qu'il a subi du fait de retards dans l'exécution de celui-ci, imputables au maître de l'ouvrage ou à d'autres cocontractants et distincts de l'allongement de la durée du chantier due à la réalisation de travaux supplémentaires, il résulte de l'instruction, et n'est pas contesté par la société ADS, que le délai contractuel d'exécution des travaux confiés au groupement était, en l'absence de tout avenant signé par les parties, de 446 jours ; qu'il est également constant que la

durée totale d'exécution des travaux, réceptionnés le 30 mars 2012 avec effet au 27 mars 2012, a été arrêtée à 408 jours ; que de ce seul fait, la société ADS n'est pas fondée à demander que la SNCF soit condamnée à l'indemniser des préjudices qui auraient résulté pour elle, notamment sous la forme de pertes d'exploitation, d'un allongement de la durée du chantier du fait des interruptions de celui-ci pour le déplacement d'un échafaudage, de l'organisation du Grand Prix de Pau, de la dépose des équipements électriques, de l'intervention des services de la SNCF sur les caténaires et enfin de l'absence de mise à disposition de voies et d'agents caténaires par la SNCF ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat ;

4. Considérant que la société ADS demande la condamnation de la SNCF à l'indemniser des travaux supplémentaires non rémunérés et des surcoûts engendrés par le déplacement d'un échafaudage, par l'indisponibilité d'une aire de stockage pendant la tenue du grand prix automobile de Pau, par la dépose des équipements électriques par une entreprise tierce, par l'intervention du service caténaire de la SNCF, par l'absence de mise à disposition de voies et d'agents caténaires par la SNCF aux périodes contractuelles, par le surcroît de travail dominical demandé, par des études de modélisation non prévues au contrat, par des frais de contrôle technique non prévus au contrat, par des modifications de la signalisation du chantier, par des remplacements de pièces de charpente non prévus au contrat et enfin par l'organisation d'une visite du chantier par des élus ; qu'en appel elle se borne à formuler les mêmes demandes qu'en première instance, sans aucunement critiquer les motifs du jugement et sans apporter aucun élément de droit ou de fait nouveau justifiant que ces surcoûts excéderaient les montants retenus par les premiers juges, à hauteur de la somme totale de 238 170,31euros ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10.11 du cahier des clauses et conditions générales des marchés de travaux de la SNCF : " Les prix sont réputés comprendre toutes les dépenses résultant de l'exécution des travaux (...). A l'exception des seules sujétions mentionnées dans le marché comme n'étant pas couvertes par les prix, ceux-ci sont réputés tenir compte de toutes les sujétions d'exécution des travaux qui sont normalement prévisibles dans les conditions de temps et de lieu où s'exécutent ces travaux, telles que : les phénomènes naturels (...) " ; que l'article 20.22 de ce même cahier stipule : " Dans le cas d'intempéries, au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt total des travaux, les délais d'exécution correspondants sont prolongés du nombre de journées réellement constatées au cours desquelles le travail à été arrêté du fait des intempéries conformément aux dites dispositions, en défalquant, s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisible indiqué au marché. Lorsque l'arrêt des travaux n'est que partiel, l'éventuelle décision de prolongation des délais d'exécution est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que la survenance d'intempéries ayant interrompu le chantier a seulement pour objet de reporter le délai d'achèvement des travaux, sans ouvrir de droit à indemnisation ; que le délai contractuel d'exécution de ces travaux ayant été respecté, ainsi qu'il a été dit au point 2, la société ADS n'est pas fondée à demander à être indemnisée au titre des intempéries ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 15.4 du cahier des prescriptions spéciales : " (...) Le dossier de récolement sera remis dans un délai d 30 jours suivant la réception. " ; qu'en application des stipulations de l'article 17.2.2 de ce même cahier, relatives aux pénalités de retard dans la remise de ces documents, l'entrepreneur est passible d'une pénalité journalière de 100 euros à partir du premier jour de retard ; qu'aux termes de l'article 73.21 du cahier des clauses et conditions générales : " (...) La réception, si elle est prononcée, prend effet à la date que la personne responsable du marché a retenue pour l'achèvement des travaux " ;

7. Considérant qu'il est constant que la date d'effet de la réception des travaux a été fixée par les parties au 27 mars 2012 et que la société MAES, membre du groupement titulaire du marché, n'a remis son dossier de récolement que le 27 juin 2012 ; que de ce seul fait, et nonobstant une remise de son dossier de récolement par la société ADS dans les délais contractuels, la SNCF était fondée à mettre en oeuvre, à l'encontre du groupement, une pénalité de retard en application des stipulations précitées, dont le montant de 5 900 euros n'est pas contesté ;

8. Considérant, enfin, que si l'article 11 du cahier des prescriptions spéciales applicable stipule que : " Les prix sont révisables selon les modalités fixées ci-après (...) ", ces stipulations ne sont pas applicables au montant de la somme allouée à la société ADS, laquelle n'a pas le caractère d'un prix contractuel mais d'une indemnité ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ADS n'est pas fondée à demander la réformation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a limité à la somme de 238 170,31 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2012, le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de SNCF Réseau ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de SNCF Réseau, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société ADS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société ADS une somme de 2 000 euros à verser à SNCF Réseau sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société ADS Ouvrages d'Art est rejetée.

Article 2 : La société ADS Ouvrages d'Art versera à SNCF Réseau une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société ADS Ouvrages d'Art et à SNCF Réseau.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 23 mars 2017.

Le rapporteur,

P. HAMON Le président,

B. EVEN

Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de la culture et de la communication en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA01255


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01255
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Indemnités.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : MAZZIERI BELLON CABANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-23;15pa01255 ?
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