La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2017 | FRANCE | N°16PA02295

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 septembre 2017, 16PA02295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Hindila a demandé au Tribunal administratif de Paris la réduction d'un montant de 6 489 euros des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 1431141/1-2 du 24 mai 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2016, la SARL Hindila, représentée par M

e A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1431141/1-2 du 24 mai 2016 du Tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Hindila a demandé au Tribunal administratif de Paris la réduction d'un montant de 6 489 euros des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 1431141/1-2 du 24 mai 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2016, la SARL Hindila, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1431141/1-2 du 24 mai 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions, à hauteur d'un montant de 6 489 euros, et leur restitution assortie du versement des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande n'était pas tardive dès lors que la décision par laquelle l'administration a statué sur sa réclamation ne lui a été notifiée que le 14 octobre 2014, date à laquelle le pli lui a été remis au guichet de la Poste, et non le 4 octobre 2014, date correspondant à celle à laquelle elle a été avisée de la mise en instance ;

- les documents d'expédition d'usine, accompagnés des preuves de paiement, constituent en application des dispositions de l'article 74, 1, d, 5° de l'annexe III au code général des impôts la preuve de l'exportation des biens hors de l'Union européenne ;

- elle se prévaut de la doctrine de l'administration fiscale publiée le 28 mai 2013 dans la base BOFIP relative aux conditions d'entrée en vigueur du décret n° 2010-233 du 5 mars 2010 relatif aux formalités requises en matière de preuve des exportations de biens bénéficiant de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée, par laquelle l'administration fiscale a prévu que la production d'une déclaration en douane enregistrée ou son équivalent n'était plus requise, en précisant que ces modifications étaient applicables aux contrôles et litiges en cours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le litige est limité, en ce qui concerne les conclusions à fin de décharge, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 6 432 euros en droits sur les 7 605 euros rappelés et, en ce qui concerne les conclusions à fin de restitution, au remboursement d'une somme de 6 489 euros ;

- la demande formée devant le Tribunal administratif est irrecevable comme tardive dès lors que l'accusé de réception signé et retourné à l'administration est daté du 4 octobre 2014 et que la requérante n'établit pas son caractère non probant ;

- les moyens soulevés par la société Hindila ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2010-233 du 5 mars 2010 relatif aux formalités requises en matière de preuve des exportations de biens bénéficiant de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- et les conclusions de M. Platillero, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée Hindila, qui exploite une activité de création de chaussures haut de gamme qu'elle fait fabriquer en Italie et commercialise pour la plus grande partie hors de France, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant total de 13 036 euros lui ont été notifiés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire prévue aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales, à raison de livraisons intracommunautaires et d'exportations regardées comme non justifiées ; que cette société ayant contesté ces rappels, l'administration a statué sur sa réclamation par une décision d'admission partielle du 29 septembre 2014 par laquelle elle a prononcé un dégrèvement à hauteur de 5 431 euros et maintenu le surplus de ces rappels au motif que la société Hindila n'avait pas produit de documents de transport pour justifier des exportations hors UE ; que par une demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 13 décembre 2014, la société Hindila a demandé la réduction d'une somme de 6 489 euros des rappels ainsi maintenus à sa charge ; que, par le jugement du 24 mai 2016 dont elle relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté comme tardive et dès lors irrecevable sa demande, qu'il a par ailleurs regardée comme tendant à la décharge de la totalité des rappels maintenus à sa charge ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : " L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 [...] " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de réception du pli recommandé portant notification du rejet partiel par le directeur des services fiscaux le 29 septembre 2014 de la réclamation de la SARL Hindila comporte la seule mention manuscrite de la date de première présentation de ce pli, le 4 octobre 2014, et ne mentionne pas la date de sa distribution, laquelle n'est pas davantage établie par le cachet de la poste apposé sur l'avis de réception lors de la remise du pli au destinataire au bureau de poste, lequel est partiellement illisible ; que, dans ces conditions, dès lors que le délai de 15 jours prévu pour la distribution des courriers recommandés par la Poste ne prenait fin que le 19 octobre 2014, l'administration n'établit pas que cette décision a été notifiée à la société requérante plus de deux mois avant le 13 décembre 2014, date à laquelle celle-ci a saisi le Tribunal administratif de Paris ; qu'au surplus, la société requérante justifie par la production d'un document émis par la Poste, retraçant les étapes de distribution de ce courrier, que le pli contenant cette décision lui a été remis le 14 octobre 2014 au guichet du bureau de poste où il avait été mis en instance ; qu'il résulte de ce qui précède que la société Hindila est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a retenu que le pli recommandé lui avait été notifié le 4 octobre 2014, date de sa présentation, et rejeté sa demande comme irrecevable en raison de sa tardiveté ;

4. Considérant qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler le jugement et de statuer par voie d'évocation sur la demande formée par la société Hindila ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

5. Considérant qu'aux termes du I de l'article 262 du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1°les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation (...) " ; qu'aux termes de l'article 74 de l'annexe III au même code, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2010-233 du 5 mars 2010 relatif aux formalités requises en matière de preuve des exportations de biens bénéficiant de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : [...] c. Que le fournisseur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration, qui doit, après visa par l'autorité douanière compétente, conformément au code des douanes communautaire et ses dispositions d'application, être mise à l'appui du registre visé au a. Toutefois, lorsque l'exportation est réalisée par l'entremise d'un intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui, et que celui-ci est désigné comme expéditeur des biens sur la déclaration d'exportation, le fournisseur met à l'appui du registre prévu au a un exemplaire de sa facture visée par le service des douanes du point de sortie [...] d. Que, dans les cas où le fournisseur ne détient pas la déclaration d'exportation visée conformément au premier alinéa du c (...), il mette à l'appui du registre mentionné au a, pour justifier de la sortie des biens expédiés vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, (...) en plus de la déclaration en douane enregistrée par le bureau des douanes où elle a été déposée, l'un des éléments de preuve complémentaires ci-après : [...]5° Pour tous les produits autres que ceux soumis à accises ou à des contrôles douaniers particuliers et lorsqu'il s'agit d'une livraison effectuée dans les conditions prévues au premier alinéa du 2° du I de l'article 262 du code général des impôts, une déclaration du transporteur ou du transitaire qui a pris en charge les biens, accompagnée de la preuve du paiement des biens par le client établi dans un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne [...] " ;

6. Considérant que la société Hindila a regardé les livraisons de biens vers des pays tiers effectuées pour son compte à partir d'une usine située en Italie par le fabricant sous-traitant comme exonérées de taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du 1° du I de l'article 262 du code général des impôts ; que, s'agissant des livraisons litigieuses, effectuées en 2009 et 2010, l'administration a remis en cause le bénéfice de cette exonération au motif que cette société n'avait pas produit les documents exigés par les dispositions précitées de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts pour justifier des exportations en cause et particulièrement la déclaration en douane prévue au d du 1 de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts ;

7. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est au demeurant pas contesté, que les rappels de taxe en litige résultent de la remise en cause de l'exonération de livraisons intervenues en 2009 et, s'agissant de la période vérifiée du 1er au 31 décembre 2010, de livraisons intervenues avant le 8 mars 2010 ; que, dans ces conditions, si la société Hindila prétend qu'il convient de faire application de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts dans sa rédaction résultant du décret n° 2010-233 du 5 mars 2010, qui n'exigeait plus la production de la déclaration en douane susmentionnée, ce texte n'était pas celui en vigueur à la date du fait générateur des impositions en litige, antérieur à l'entrée en vigueur de ce texte le 8 mars 2010, lendemain de sa publication au journal officiel ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que la société requérante n'a pas produit la déclaration en douane prévue au d du 1 de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts dans sa rédaction applicable ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que les documents d'expédition d'usine, accompagnés des preuves de paiement, constituaient en application des dispositions du 5° du d du 1 de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts une preuve suffisante de l'exportation des biens hors de l'Union européenne ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, au plan de la loi fiscale, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le régime d'exonération sous lequel la société Hindila avait placé les livraisons de biens litigieuses ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine de l'administration fiscale :

10. Considérant que les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations et appréciations antérieures à l'imposition primitive, ou sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 80 A, qu'il s'agisse d'impositions primitives ou supplémentaires, que des interprétations antérieures à l'expiration du délai de déclaration ; que si l'instruction publiée le 28 mai 2013 dans la base BOFIP relative aux conditions d'entrée en vigueur du décret n° 2010-233 du 5 mars 2010 relatif aux formalités requises en matière de preuve des exportations de biens bénéficiant de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévoit son application aux litiges en cours, elle ne peut être regardée sur ce point comme interprétant le texte fiscal qui constitue la base légale de l'imposition contestée et, dès lors, ne peut être valablement invoquée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que, par suite, la société requérante ne peut se prévaloir de cette instruction, qui est postérieure à l'expiration du délai de déclaration des impositions dont elle conteste le rehaussement ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Hindila n'est pas fondée à demander la réduction des rappels de taxe en litige, ni, en tout état de cause, leur restitution assortie du paiement des intérêts moratoires ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1431141/1-2 du 24 mai 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Hindila devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Hindila et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 septembre 2017.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNI

Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02295
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-01-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Personnes et opérations taxables. Territorialité.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : CABINET NOUVION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-09-28;16pa02295 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award