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09/11/2017 | FRANCE | N°16PA01696

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 09 novembre 2017, 16PA01696


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Planet Conseil a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 19 novembre 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a, premièrement, annulé la décision implicite rejetant son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la décision du 13 juin 2014, deuxièmement, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 124 141 euros en application des articles L. 6362-6 et L.

6362-7-1 du code de travail et, troisièmement, lui a fait obligation de verser au...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Planet Conseil a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 19 novembre 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a, premièrement, annulé la décision implicite rejetant son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la décision du 13 juin 2014, deuxièmement, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 124 141 euros en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code de travail et, troisièmement, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 9 123 euros en application des articles L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code.

Par un jugement n° 1501078/3-3 du 22 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2016, la société Planet Conseil, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501078/3-3 du 22 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, du 19 novembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en vertu des dispositions des articles L. 6362-7-1 et R. 6362-3 du code du travail, il incombe aux agents chargés du contrôle d'ordonner, au sein de leur rapport, le remboursement aux cocontractants des sommes indûment perçues, lequel doit intervenir dans le délai imparti à la personne contrôlée pour faire valoir ses observations ; qu'à défaut, le préfet de région ordonne le versement des sommes au Trésor public ; qu'aucune disposition n'autorise en revanche le préfet de région à proroger ou réitérer la demande de remboursement des sommes aux cocontractants passé ce délai ; que la décision du 15 janvier 2014 est ainsi entachée d'une erreur de droit et d'un vice de procédure en tant qu'elle lui a ordonné de reverser à ses cocontractants la somme de 72 634 euros, ce qui entache d'une erreur de droit et d'un vice de procédure subséquents la décision du 13 juin 2014 et la décision contestée du 19 novembre 2014 ;

- la décision contestée est entachée d'illégalité en ce qu'elle alourdit le montant des sanctions prononcées à son encontre par la décision du 15 janvier 2014 devenue définitive ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle a fait application, à l'encontre d'un organisme en charge de la réalisation de bilans de compétence, des sanctions prévues aux articles L. 6362-6, L. 6354-1 et L. 6362-7-1 du code du travail qui ne sont applicables qu'aux organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2016, la ministre chargée du travail conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Planet Conseil ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la société Planet Conseil tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2014 en tant qu'elle lui ordonne de verser au Trésor public, d'une part, la somme de 51 507 euros en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail et, d'autre part, la somme de 9 123 euros en application des articles L. 6362-5 et 7 du même code, dès lors que, s'agissant de ces deux sanctions, la décision présente un caractère purement confirmatif de la décision du 15 janvier 2014 devenue définitive.

La société Planet Conseil a présenté des observations sur le moyen relevé d'office par la Cour le 18 octobre 2017. Elle soutient que ses conclusions sont recevables, dès lors, à titre principal, que la décision contestée du 19 novembre 2014 aggrave les sanctions mises à sa charge par la décision du 15 janvier 2014 et, à titre subsidiaire, que la décision du 13 juin 2014 complétant celle du 15 janvier 2014 n'était pas devenue définitive puisqu'elle a fait l'objet d'un recours préalable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bernard,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Planet Conseil a fait l'objet d'un contrôle de son activité de formation professionnelle continue portant sur ses exercices comptables 2011 et 2012 par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Ile-de-France en application de l'article L. 6361-2 du code du travail. Par la présente requête, la société Planet Conseil demande l'annulation du jugement du 22 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en date du 19 novembre 2014.

Sur les conclusions de la société Planet Conseil tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2014 en tant qu'elle lui fait obligation de verser au Trésor public les sommes de 51 507 euros et 9 123 euros :

2. Par décision en date du 15 janvier 2014, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a mis à la charge de la société Planet Conseil, premièrement, le versement au Trésor public de la somme de 51 507 euros en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail, deuxièmement, le reversement à ses cocontractants, dans un délai de trente jours, de la somme de 72 634 euros en application de l'article L. 6354-1 du même code et, troisièmement, le versement au Trésor public de la somme de 9 123 euros en application des articles L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code. Il ressort des pièces du dossier que cette décision a été notifiée à la société requérante avec mention des voies et délais de recours le 20 janvier 2014. La société n'a pas contesté cette décision, qui est donc devenue définitive le 20 mars 2014.

3. En l'absence de justification du reversement aux cocontractants de la somme précitée de 72 634 euros, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a, par décision " complémentaire " du 13 juin 2014, ordonné à la société Planet Conseil de reverser ladite somme au Trésor public en application de l'article L. 6362-7-1 du code du travail. La société Planet Conseil a formé, à l'encontre de cette dernière décision, le recours administratif préalable obligatoire prévu par l'article R. 6362-6 du code du travail. En réponse à ce recours, le même préfet lui a fait obligation, par la décision contestée du 19 novembre 2014, de verser au Trésor public, d'une part, la somme totale de 124 141 euros en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail et, d'autre part, la somme de 9 123 euros en application des articles L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code.

4. Il ressort des termes mêmes de la décision contestée du 19 novembre 2014 qu'elle présente, pour partie, le caractère d'une décision purement confirmative de la décision du 15 janvier 2014 devenue définitive et, pour une autre partie, le caractère d'une décision de rejet du recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 13 juin 2014, à laquelle elle se substitue. Ainsi, la somme totale de 124 141 euros que la décision contestée ordonne à la société requérante de verser au Trésor public en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail se décompose en deux sommes : d'une part, la somme de 51 507 euros que la société devait déjà verser au Trésor public en vertu de la décision du 15 janvier 2014 devenue définitive et, d'autre part, la somme de 72 634 euros objet du recours administratif. De même, la somme de 9 123 euros que la décision contestée ordonne à la société requérante de verser au Trésor public en application des articles L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code devait déjà être versée au Trésor public en vertu de la décision du 15 janvier 2014.

5. Par suite, les conclusions de la société requérante tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2014 en tant qu'elle lui ordonne de verser au Trésor public, d'une part, la somme de 51 507 euros en application des articles L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail et, d'autre part, la somme de 9 123 euros en application des articles L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code sont irrecevables, dès lors que, s'agissant de ces deux sanctions, la décision présente un caractère purement confirmatif de la décision du 15 janvier 2014 devenue définitive, en l'absence d'intervention d'une modification dans les circonstances de fait ou de droit entre ces deux décisions.

6. Il s'ensuit également que le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'illégalité en ce qu'elle alourdirait le montant des sommes mises à la charge de la société requérante par la décision du 15 janvier 2014 doit être écarté comme manquant en fait.

Sur les conclusions de la société Planet Conseil tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2014 en tant qu'elle lui fait obligation de verser au Trésor public la somme de 72 634 euros :

7. Aux termes de l'article L. 6313-1 du code du travail : " Les actions de formation qui entrent dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue sont : / (...) / 10° Les actions permettant de réaliser un bilan de compétences / (...) ". Aux termes de l'article L. 6361-2 du même code : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur : / 1° Les activités en matière de formation professionnelle continue conduites par : / (...) / d) Les organismes chargés de réaliser les bilans de compétences / (...) ". Aux termes de l'article L. 6362-6 du même code : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. / A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement au cocontractant des sommes perçues conformément à l'article L. 6354-1 ". Aux termes de l'article L. 6354-1 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle d'une prestation de formation, l'organisme prestataire rembourse au cocontractant les sommes indûment perçues de ce fait ". Aux termes de l'article L. 6362-7-1 du même code : " En cas de contrôle, les remboursements mentionnés [à l'article] (...) L. 6362-6 interviennent dans le délai fixé à l'intéressé pour faire valoir ses observations. / A défaut, l'intéressé verse au Trésor public, par décision de l'autorité administrative, une somme équivalente aux remboursements non effectués ". Enfin, aux termes de l'article R. 6362-3 : " Les résultats des contrôles prévus aux articles L. 6361-1 à L. 6361-3 sont notifiés à l'intéressé avec l'indication du délai dont il dispose pour présenter des observations écrites et demander, le cas échéant, à être entendu. / Ce délai ne peut être inférieur à trente jours à compter de la date de la notification ".

8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le rapport de contrôle, notifié à la société Planet Conseil le 2 octobre 2013, relevait notamment que certaines actions réalisées par la société en matière de bilans de compétence avaient fait l'objet d'une double facturation et, par suite, d'un double financement. Le rapport de contrôle ne préconisait toutefois pas le remboursement aux cocontractants de ces sommes, mais seulement l'application de la sanction prévue par les dispositions de l'article L. 6362-7-2 du code du travail, à savoir le versement au Trésor public d'une somme équivalente pour utilisation intentionnelle de documents de nature à obtenir indûment le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle. La société requérante a présenté ses observations écrites puis orales en réponse à ce rapport. Au vu des éléments nouveaux ainsi transmis par la société, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a notamment décidé de ne pas appliquer la sanction prévue par les dispositions de l'article L. 6362-7-2. En revanche, il a estimé que les bilans de compétence qui avaient fait l'objet d'une double facturation devaient être regardés comme des prestations non justifiées et non exécutées qui devaient faire l'objet d'un remboursement aux cocontractants en application des dispositions précitées des articles L. 6354-1 et L. 6362-6. Dans ces conditions, et en tout état de cause, c'est sans commettre aucune erreur de droit ou " vice de procédure " que le préfet a, par sa décision du 15 janvier 2014, accordé à la société requérante un délai pour procéder au remboursement à ses cocontractants des sommes en cause, d'un montant total de 72 634 euros. Enfin, la circonstance que la décision du 13 juin 2014 qui a ordonné le versement de cette somme au Trésor public sur le fondement du second alinéa de l'article L. 6362-7-1 soit intervenue plusieurs mois après l'expiration du délai fixé par la décision du 15 janvier 2014 pour procéder au remboursement des cocontractants est sans conséquence sur la légalité de cette décision et, par suite, sur celle de la décision du 19 novembre 2014 qui s'y est substituée.

9. En second lieu, il ressort de la combinaison des dispositions précitées des articles L. 6313-1, L. 6354-1, L. 6361-2, L. 6362-6 et L. 6362-7-1 du code du travail que les actions permettant de réaliser un bilan de compétences sont des actions de formation entrant dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue sur lesquelles l'Etat exerce un contrôle administratif et financier. En cas de contrôle, les organismes qui réalisent des bilans de compétences doivent présenter tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et doivent donner lieu au remboursement des cocontractants en application des dispositions des articles L. 6354-1 et L. 6362-6. Par conséquent, les dispositions précitées de l'article L. 6362-7-1, prévoyant le versement au Trésor public d'une somme équivalente aux remboursements prévus à l'article L. 6362-6 non effectués dans le délai fixé, sont applicables aux actions permettant de réaliser un bilan de compétences. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle lui a fait application de ces dispositions.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Planet Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Planet Conseil est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Planet Conseil et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2017.

Le rapporteur,

A. BERNARDLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01696


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01696
Date de la décision : 09/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Réouverture des délais - Absence - Décision confirmative - Existence.

Travail et emploi - Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aurélie BERNARD
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : RIQUELME

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-09;16pa01696 ?
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