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21/12/2017 | FRANCE | N°17PA00240

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 21 décembre 2017, 17PA00240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...D...B...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations primitives de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, mises à leur charge au titre des années 2008, 2009 et 2010 pour un montant total de 62 853 euros.

Par un jugement n° 1507412 du 15 novembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des pénalités mises à la charge de M. et Mme B...su

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...D...B...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations primitives de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, mises à leur charge au titre des années 2008, 2009 et 2010 pour un montant total de 62 853 euros.

Par un jugement n° 1507412 du 15 novembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des pénalités mises à la charge de M. et Mme B...sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2017, M. et MmeB..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 1507412 du 15 novembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que des intérêts de retard correspondants et des pénalités qui leur ont été infligées sur le fondement de l'article 1758 A du code général des impôts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le rejet de la comptabilité de la société à responsabilité limitée (SARL) La Cave du Marais n'est pas justifié dès lors que l'absence de détail des ventes entre juin 2008 et juillet 2009 provient de la disparition de données à la suite de la mise en place du logiciel AMI pour se conformer à ses obligations légales ; la discordance entre les ventes apparaissant sur le logiciel et les ventes comptabilisées provient uniquement de ce que la période couverte n'est pas la même ; il en est de même des discordances relatives aux achats et aux stocks ;

- l'administration n'établit pas l'existence de revenus distribués ni que les bénéfices reconstitués auraient été mis à la disposition de M.B..., qui a été regardé à tort comme le maître de l'affaire ;

- les sommes portées au crédit du compte courant de M. B...sont justifiées.

Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrés les 9 et 22 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance s'agissant de la majoration de 25% prévue au titre des contributions sociales par les dispositions combinées du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, du 2° du 7 de l'article 158 du même code et du 1 de l'article L 136-6 du code de la sécurité sociale, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- la requête est tardive et dépourvue de moyens d'appel ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lescaut ;

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) la Cave du Marais, qui exerce une activité de vente de vins et d'alcools, et dont M. B...détenait avec son épouse, 50% des parts sociales, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service, après avoir écarté une partie de sa comptabilité comme irrégulière et non probante, et reconstitué partiellement ses recettes, a rehaussé ses résultats et chiffres d'affaires au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 ; que le service a regardé les recettes non déclarées par la société ainsi que différentes sommes inscrites, et demeurées injustifiées, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B...dans les livres de la société, comme des revenus distribués à l'intéressé, taxables entre ses mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement respectivement des dispositions du 1° et du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement en date du 15 novembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé la décharge des pénalités qui leur avaient été infligées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que le directeur régional d'Ile-de-France et du département de Paris a prononcé, par une décision du 15 juin 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le dégrèvement, en droits et en pénalités, à hauteur de 3 475 euros, des cotisations de contributions sociales auxquelles M. et Mme B...ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet et qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur le fond du litige :

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions en litige :

S'agissant des distributions correspondant aux recettes omises de la société la Cave du Marais :

3. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " et qu'aux termes de l'article 110 de ce code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) " ; que lorsqu'un contribuable a, comme en l'espèce, refusé la rectification de son revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers résultant d'une reconstitution de recettes d'une entreprise assujettie à l'impôt sur les sociétés, il incombe à l'administration fiscale d'établir l'existence, le montant et l'appréhension d'une distribution de bénéfices ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à l'examen de la comptabilité de la société La Cave du Marais, la vérificatrice a relevé que le logiciel de gestion des ventes, des achats et des stocks ayant été mis en place le 7 novembre 2009, les achats comptabilisés du 1er octobre 2009 jusqu'à cette date n'avaient pas été pris en compte dans le fichier des achats à hauteur de 57 015 euros hors taxe, et que pour l'exercice ouvert le 1er octobre 2009, les ventes comptabilisées s'élevaient à 789 628 euros hors taxe alors que celles retracées dans le fichier factures informatisé s'élevaient à 741 396 euros hors taxe soit une différence de 48 232 euros hors taxe ; qu'elle a, par ailleurs, constaté des écarts injustifiés entre les achats revendus de la période du 1er octobre au 7 novembre 2009, date de mise en place du suivi informatique des ventes et des achats, conduisant à une minoration de recettes ; que les ventes de la société étaient globalisées mois par mois et qu'aucun justificatif du détail des ventes et qu'aucune facture n'avait été présentés pour la période du 1er juin 2008 au 7 novembre 2009 ; que le suivi des ventes et des stocks n'a été produit qu'au titre de la période du 7 novembre 2009 au 30 septembre 2010 ; que des discordances entre la valeur du stock issue de l'inventaire manuel et la valeur comptable au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2009 et entre la valeur déterminée par le logiciel et la valeur comptable au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2010 ont, en outre, été constatées ; que ces seuls éléments permettaient au vérificateur d'écarter comme entachée de graves irrégularités et comme dépourvue de valeur probante la comptabilité de la société La Cave du Marais ; que M. et Mme B...ne peuvent utilement se prévaloir, sans d'ailleurs apporter un quelconque élément de preuve, d'un effacement involontaire des données informatiques lors de l'installation du nouveau logiciel comptable le 7 novembre 2009, dès lors que les comptabilités informatisées doivent permettre de reconstituer à partir des pièces justificatives appuyant les données entrées, les éléments des comptes, états et renseignements, soumis à la vérification, ou, à partir de ces comptes, états et renseignements, de retrouver ces données et les pièces justificatives ; qu'ils ne contestent pas utilement les discordances constatées entre la valeur du stock déterminée par le logiciel et sa valeur comptable au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2010 en se bornant à faire valoir que le service aurait dû tenir compte d'une évaluation au coût moyen pondéré à partir d'une période de référence allant du 21 juin au 30 septembre 2010, et de ce que les vins achetés en primeur ne sont pas comptabilisés dans les stocks ; que, par suite, c'est à bon droit que le service a écarté la comptabilité de la société La Cave du Marais et a procédé à la reconstitution de ses recettes au titre de l'exercice clos en 2010 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que, pour procéder à la reconstitution des recettes de la société la Cave du Marais, la vérificatrice a corrigé le stock de clôture de l'exercice 2009 comptabilisé pour un montant de 300 004 euros hors taxe en lui substituant le stock établi lors du passage de l'administration des douanes le 28 octobre 2009 d'un montant de 332 415 euros hors taxe ; qu'ont été ajoutés à ce stock les achats non pris en compte par le nouveau logiciel correspondant aux factures présentées par la société pour la période du 30 septembre 2009 au 7 novembre 2009, pour un montant de 57 015 euros hors taxe ; que le service a ensuite soustrait de ce montant, le stock, d'une valeur de 300 004 euros, établi au 7 novembre 2009 lors de l'installation du logiciel de gestion ; que le vérificateur a ensuite appliqué au montant ainsi obtenu des achats revendus le coefficient de marge brute retenu par la société de 1,30 pour arrêter les recettes de la société à la somme de 116 253 euros hors taxe, dont il a déduit les recettes comptabilisées au titre de l'exercice et a, en conséquence, procédé à une rectification de 68 003 euros hors taxe, soit 81 332 euros toutes taxes comprises de recettes omises au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2010 ; que, tirant les conséquences de la réintégration de cette omission de recettes, elle a ensuite imposé la somme correspondante entre les mains de M. et MmeB..., sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

6. Considérant, d'une part, que, pour établir le caractère vicié dans son principe de la méthode de reconstitution utilisée par le service, M. et Mme B...soutiennent que la discordance entre la valeur du stock issue de l'inventaire manuel, la valeur du stock extraite du logiciel AMI et sa valeur comptable résulterait d'une période de comptabilisation différente, dès lors que le stock comptable a été établi le 30 septembre 2009, le stock manuel présenté au service des douanes le 28 octobre 2009, tandis que le stock enregistré dans les écritures informatiques issues du nouveau logiciel correspondrait au stock réel existant à la date de mise en service de ce logiciel le 7 novembre 2009 ; qu'ils font à cet égard valoir que le service aurait dû retenir le stock enregistré dans la comptabilité de la société à la date de clôture de l'exercice 2009 et non à celle du 28 octobre 2009 ; que, toutefois, le document de stock manuscrit produit en appel établi à une date inconnue et qui comporte de nombreuses erreurs, ne démontre pas que le service aurait à tort retenu une valeur de stock de 332 415 euros hors taxe, alors qu'il n'est, par ailleurs, pas contesté que les stocks ont été arrêtés à la date du 30 septembre 2009 à partir du document produit par la société à l'appui de sa comptabilité dans une chemise intitulée " stock au 30/09/2009 " ;

7. Considérant, d'autre part, que si les requérants reprochent au vérificateur d'avoir retenu des factures d'achat déjà comptabilisées par la société La Cave du Marais, il résulte de l'instruction que les achats ajoutés au stock arrêté au 28 octobre 2009 n'avaient pas été enregistrés dans le logiciel de gestion ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration établissant l'existence et le montant d'une distribution de bénéfices par la société la Cave du Marais à M. B..., c'est, par suite, à bon droit que M. et Mme B...ont été imposés à raison de ces distributions sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

9. Considérant, en troisième et dernier lieu, que l'administration établit que M. B...avait au cours des exercices clos en litige la qualité de maître de l'affaire de la société La Cave du Marais et qu'il a appréhendé les sommes regardées par le service comme des distributions occultes dès lors qu'il détenait 50 % du capital de cette société dont il était également le gérant de droit et qu'il disposait seul de la signature sur ses deux comptes bancaires ;

S'agissant des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M.B... :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués :(...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

11. Considérant qu'en se bornant à faire valoir l'importance des dégrèvements prononcés par le service, qui représentent plus de 80% des crédits portés au compte courant de M. B..., les requérants n'apportent pas la preuve qui leur incombe que les sommes restant injustifiées, pour des montants de 25 000 euros en 2008 et 1 997 euros en 2009, inscrites au crédit du compte-courant d'associé de celui-ci, ne constitueraient pas des revenus distribués dont M. B...serait le seul bénéficiaire ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de leur demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. et Mme B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme B...à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme B...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...D...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1)

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Poupineau, président,

Mme Lescaut, premier conseiller,

Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 décembre 2017.

Le rapporteur,

C. LESCAUTLe président,

V. POUPINEAULe greffier,

N. ADOUANELa République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 17PA00240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00240
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Christine LESCAUT
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : GERBET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-21;17pa00240 ?
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