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21/03/2018 | FRANCE | N°17PA00072

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 21 mars 2018, 17PA00072


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Euskal Konfederazioa a demandé au Tribunal administratif de Paris d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent.

Par une ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013, le président de

la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Euskal Konfederazioa a demandé au Tribunal administratif de Paris d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent.

Par une ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013, le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA02895 du 7 avril 2015, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre cette ordonnance.

Par une décision n° 390829 du 30 décembre 2016, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi présenté par l'association Euskal Konfederazioa, a annulé l'arrêt n° 13PA02895 du 7 avril 2015 de la Cour administrative d'appel de Paris et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par un mémoire, enregistré le 8 mars 2017, la société France Télévisions, représentée par la Scp Piwnica-Molinie, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'association Euskal Konfederazioa au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société France Télévisions soutient que les moyens soulevés par l'association Euskal Konfederazioa ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 13 mars 2017, l'association Euskal Konfederazioa, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'enjoindre au président de France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales ;

3°) de condamner France Télévisions à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non respect des obligations légales et réglementaires qui lui incombent ;

4°) de mettre à la charge de France Télévisions la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association s'en réfère, pour le développement de ses moyens, à ses précédentes écritures.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

- le décret n° 2009-796 du 23 juin 2009 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pena,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la société France Télévisions.

1. Considérant que l'association Euskal Konfederazioa a demandé à la société France Télévisions, par un courrier du 11 février 2013, de mettre fin à ce qu'elle estimait être une inégalité de traitement dans les programmes des services de télévision qu'elle édite entre la langue basque et les autres langues régionales et de lui verser une indemnité en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis ; que le président de France Télévisions a implicitement rejeté sa demande indemnitaire et l'a informée des raisons de l'évolution du volume d'émissions en langue basque entre 2007 et 2011 par un courrier du 23 mai 2013 qui doit être regardé comme un refus de modifier le volume de diffusion consacré aux émissions en langue basque ; que l'association Euskal Konfederazioa a relevé appel de l'ordonnance du 26 juin 2013 par laquelle le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la société France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et à sa condamnation à lui verser la somme de

30 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait du traitement infligé par la société France Télévisions à la langue basque ; que, par un arrêt du 7 avril 2015, la cour administrative d'appel de Paris a confirmé ladite ordonnance ; que l'association Euskal Konfederazioa s'étant pourvue en cassation, le Conseil d'Etat, par une décision du 30 décembre 2016, a considéré que la Cour avait commis une erreur de droit en jugeant que la décision contestée de la société France Télévisions ne pouvait être regardée comme relative à l'organisation du service public ; que le Conseil d'Etat a en conséquence annulé l'arrêt du 7 avril 2015 et renvoyé cette affaire devant la Cour pour qu'il y soit statué ;

2. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 43-11 de la loi du

30 septembre 1986, la société France Télévisions assure " la promotion de la langue française et, le cas échéant, des langues régionales " et met en valeur " la diversité du patrimoine culturel et linguistique de la France " ; qu'aux termes du sixième alinéa de l'article 44 de cette même loi " France Télévisions conçoit et diffuse en région des programmes qui contribuent à la connaissance et au rayonnement de ces territoires et, le cas échéant, à l'expression des langues régionales " ; que ces obligations sont précisées par l'article 40 du cahier des charges de la société fixé par le décret du 23 juin 2009 conformément aux dispositions de l'article 48 de cette même loi, aux termes duquel : " France Télévisions veille à ce que, parmi les services qu'elle édite, ceux qui proposent des programmes régionaux et locaux contribuent à l'expression des principales langues régionales parlées sur le territoire métropolitain et en outre-mer " ; qu'il résulte de ces dispositions que la société France Télévisions est chargée d'une mission de service public de conception et de diffusion de programmes en langues régionales ; que la détermination de la part de chaque langue régionale dans le temps d'antenne consacré à de tels programmes relève de l'organisation du service public ; que, dès lors, une décision qui a un tel objet est susceptible, à la différence des décisions par lesquelles France Télévisions choisit les émissions en langue régionale qu'elle diffuse et arrête les conditions de leur programmation, d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la juridiction administrative est compétente pour connaître de l'action engagée par l'association Euskal Konfederazioa contre la société France Télévisions en vue d'obtenir qu'il soit enjoint à la société France Télévisions d'assurer l'égalité de traitement dans le temps d'antenne entre la langue basque et les autres langues régionales et à sa condamnation à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait du traitement infligé par la société France Télévisions à la langue basque ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, la demande de l'association Euskal Konfederazioa ; que, dès lors, l'association Euskal Konfederazioa est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant que le tribunal administratif de Paris a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sa demande ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association Euskal Konfederazioa tant devant le Tribunal administratif de Paris que devant la Cour ;

5. Considérant que l'association Euskal Konfederazioa, en se bornant à affirmer que les programmes diffusés en langue basque sont moins nombreux que ceux dans les autres langues régionales, et que le temps alloué aux émissions dans cette langue serait en diminution, n'établit pas que France Télévisions ne respecterait pas ses obligations en matière de contribution à l'expression de la langue basque ni qu'elle aurait porté atteinte au principe d'égalité et qu'elle lui aurait causé, de ce fait, un préjudice direct, actuel et certain ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de l'association Euskal Konfederazioa doit être rejetée ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société France Télévisions, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'association Euskal Konfederazioa demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1307342/2-1 du 26 juin 2013 du président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande présentée par l'association Euskal Konfederazioa devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : L'association Euskal Konfederazioa versera à la société France Télévisions une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Euskal Konfederazioa et à la société France Télévisions.

Délibéré après l'audience du 6 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 mars 2018.

Le rapporteur,

E. PENALe président,

M. BOULEAULe greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de la culture en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 17PA00072


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00072
Date de la décision : 21/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Eléonore PENA
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : HARDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-21;17pa00072 ?
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