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19/02/2019 | FRANCE | N°18PA00979

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 19 février 2019, 18PA00979


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'intérêt de retard et des majorations de 10 % qui ont été appliqués, sur le fondement des articles 1727 et 1758 A du code général des impôts, à la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, la contribution sur les hauts revenus et les contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, à titre subsidiaire, de limiter le calcul des intérêts de retard et des maj

orations en les calculant sur une base

de 534 euros.

Par un jugement n° 161187...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'intérêt de retard et des majorations de 10 % qui ont été appliqués, sur le fondement des articles 1727 et 1758 A du code général des impôts, à la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, la contribution sur les hauts revenus et les contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, à titre subsidiaire, de limiter le calcul des intérêts de retard et des majorations en les calculant sur une base

de 534 euros.

Par un jugement n° 1611878/2-1 du 23 janvier 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 mars et 26 décembre 2018,

M. et Mme A..., représentés par la SCP Arbor Tournoud et Associés, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1611878/2-1 du 23 janvier 2018 ;

2°) d'annuler la décision de rejet de réclamation du 2 juin 2016 ;

3°) de prononcer la décharge sollicitée devant le tribunal ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'erreur qu'ils ont commise sur leurs déclarations de revenus a été de porter à tort le prix de revient de l'investissement Scellier réalisé en 2012 dans la case destinée au montant de la réduction d'impôt ; ainsi l'erreur se limite à une erreur de report ; cette réduction d'impôt étant plafonnée par la loi, l'administration n'aurait pas dû tenir compte du montant ainsi déclaré à tort et aurait dû, d'elle-même, déterminer la réduction d'impôt en tenant compte de l'ensemble des dispositifs de plafonnement comme le prévoient les doctrines administratives BOI-IR-LIQ-20-20-40 n° 1 publiée le 21 janvier 2013 et BOI-IR-RICI n° 30 publiée le 29 juillet 2015 ; ainsi, dans le cas de leur investissement d'un montant de 300 000 euros, il ne pouvait être tenu compte pour 2013 et 2014 que d'une réduction de 8 333 euros et le plafond étant de 7 799 euros, les pénalités ne pouvaient porter que sur la différence soit 534 euros ;

- pour l'année 2014, ils ont procédé en octobre 2015 à la correction des éléments déclarés, une déclaration rectificative étant déposée en ligne ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le caractère spontané de cette correction n'était pas exigé et la circonstance qu'ils n'aient procédé à cette correction de leur déclaration qu'après avoir reçu une proposition de rectification n'a pas à être prise en considération et ne saurait justifier l'application des intérêts de retard et de la majoration ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que cette possibilité de correction sans sanction constituait une mesure gracieuse et ne constituait pas une interprétation formelle de la loi fiscale ;

- la décision du service de les assujettir à des pénalités est contraire au principe d'égalité devant la loi et devant les charges publiques garanti par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, et par le Préambule de la Constitution de 1946, dès lors que les autres contribuables pouvaient rectifier leur déclaration en ligne, sans encourir de sanctions.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Par ordonnance du 13 décembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée

au 28 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. et MmeA..., l'administration a constaté que les intéressés avaient porté, dans leurs déclarations de revenus des années 2013 et 2014, un montant erroné au titre du report de la réduction d'impôt pour investissement locatif dit Scellier et avaient ainsi bénéficié de réductions d'impôt excédant celles auxquelles ils étaient en droit de prétendre. Par une proposition de rectification en date

du 30 septembre 2015, elle a procédé à la reprise de ces crédits d'impôt et a notifié à

M. et Mme A...des compléments d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales assortis des intérêts de retard et de la majoration

de 10 % sur le fondement, respectivement, des articles 1727 et 1758 A du code général des impôts. Les requérants, qui ont accepté les droits supplémentaires ainsi mis à leur charge, ont demandé en vain au Tribunal administratif de Paris de les décharger de ces pénalités et, à titre subsidiaire, d'asseoir celles-ci sur une base de 534 euros.

2. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I.-Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. (...) / III.-Le taux de l'intérêt de retard est de 0,40 % par mois. Il s'applique sur le montant des créances de nature fiscale mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. (...) ". L'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect, par les contribuables, de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales.

3. Aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. / II. - Cette majoration n'est pas applicable : / a) En cas de régularisation spontanée ou lorsque le contribuable a corrigé sa déclaration dans un délai de trente jours à la suite d'une demande de l'administration ; / b) Ou lorsqu'il est fait application des majorations prévues par les b et c du 1 de l'article 1728, par l'article 1729 ou par le a de l'article 1732 ; ".

4. Premièrement, il résulte de l'instruction qu'au titre des années 2013 et 2014, les requérants ont mentionné en ligne 7 GS de leur déclaration de revenus n° 2042-C, où il était précisé " investissement locatif Scellier-Report de 1/9 de la réduction d'impôt ", le montant total de leur investissement locatif de 280 745 euros au lieu du montant de la réduction d'impôt à laquelle ils pouvaient prétendre au titre de chacune de ces années et qui s'élevait à 7 799 euros. Par ailleurs il est constant que de ce fait, ils ont bénéficié de réductions d'impôt s'élevant

à 94 797 euros en 2013 et 73 794 euros en 2014 au lieu de 7 799 euros pour chaque année. Ainsi, les inexactitudes entachant leurs déclarations ayant eu pour effet de minorer l'impôt dû par eux, c'est à bon droit qu'en application des dispositions précitées des articles 1727 et 1758 A du code général des impôts, l'administration a appliqué aux compléments d'impôt résultant de la remise en cause de ces crédits d'impôt, des intérêts de retard et la majoration de 10 %. Les requérants ne sont à cet égard pas fondés à soutenir qu'il incombait à l'administration de repérer leur erreur et de rectifier d'elle-même les montants erronés déclarés par eux alors qu'il leur appartenait, en tout état de cause, de porter les montants exacts sur leurs déclarations en suivant les indications dénuées d'ambiguïté figurant sur le formulaire, et qu'au demeurant eux mêmes n'ont procédé à aucune rectification spontanée à la réception de leur avis d'imposition pour l'année 2014, intervenue le 31 juillet 2015, qui mentionnait ces réductions d'impôt particulièrement et anormalement élevées. M. et MmeA..., qui ne contestent pas avoir bénéficié à tort de réductions d'impôt s'élevant à 94 797 euros pour 2013 et à 73 794 euros pour 2014, ne sont pas davantage fondés à prétendre que, l'administration connaissant le montant du plafond de la réduction d'impôt susceptible d'être obtenue du fait d'un investissement dit Scellier, l'intérêt de retard et la majoration de 10 % qui leur ont été appliqués, auraient dû être calculés sur une assiette limitée à 534 euros soit la différence entre ce plafond, selon eux de 8 333 euros, et le montant de 7 799 euros correspondant à la réduction à laquelle ils avaient droit .

5. Si les requérants invoquent les doctrines administratives contenues dans les publications référencées BOI-IR-LIQ-20-20-40 n° 1 publiée le 21 janvier 2013 et BOI-IR-RICI n° 30 publiée le 29 juillet 2015, ils ne peuvent utilement s'en prévaloir dès lors qu'elles ne comportent pas une interprétation de la loi différente de celle dont il leur a été fait application.

6. Deuxièmement, les requérants font valoir qu'ils ont procédé, en octobre 2015, à la correction des éléments déclarés au titre de l'année 2014 en déposant en ligne une déclaration rectificative le 16 octobre 2015. Toutefois, il résulte de l'instruction que cette déclaration a été télétransmise postérieurement à la réception par eux, le 3 octobre 2015, d'une proposition de rectification du 30 septembre 2015. Dès lors, cette rectification ne peut être regardée ni comme une déclaration spontanée ni comme répondant à une demande de l'administration au sens du II de l'article 1758 A du code général des impôts. En conséquence M. et Mme A...ne sauraient prétendre, pour ce motif, à la décharge de la majoration de 10 %.

7. Troisièmement, M. et Mme A...font valoir que l'administration, qui a offert aux contribuables ayant souscrit en ligne leurs déclarations des revenus afférents à l'année 2014, la possibilité de corriger celles-ci jusqu'au 27 novembre 2015, a porté atteinte aux principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques, garantis respectivement par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et par le Préambule de la Constitution de 1946, en refusant de prendre en compte, sans application de l'intérêt de retard et de la majoration de 10 % susmentionnée, leur déclaration rectificative déposée en ligne le 16 octobre 2015. Toutefois, à supposer que l'administration, alors même que le dispositif de correction susmentionné n'a pas entrainé un report de la date limite de déclaration, n'ait pas appliqué les intérêts et majorations de retard aux contribuables ayant spontanément procédé à des corrections avant le 27 novembre 2015, elle n'aurait ce faisant procédé à aucune interprétation ni aucune prise de position formelle pouvant lui être opposée sur le fondement des articles L. 80 A ou L. 80 B du livre des procédures fiscales, la tolérance invoquée par les requérants ne comportant aucune dérogation expresse aux dispositions de l'article 1758 A qui leur sont appliquées. Les requérants ne sont pas davantage fondés à se prévaloir d'une rupture d'égalité, dès lors qu'ils se trouvaient dans une situation différente de celle susdécrite, n'ayant corrigé leurs déclarations qu'après avoir été informés, par la réception d'une proposition de rectification, qu'ils étaient l'objet d'un contrôle fiscal.

8. De tout ce qui précède, il résulte que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Les conclusions de leur requête tendant à l'annulation du jugement et à la décharge des pénalités litigieuses doivent, par suite, être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 6 février 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 février 2019.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00979


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00979
Date de la décision : 19/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SCP ARBOR TOURNOUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-02-19;18pa00979 ?
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