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05/07/2019 | FRANCE | N°18PA20740

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 05 juillet 2019, 18PA20740


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a saisi le Tribunal administratif de la Guyane d'une demande tendant à l'annulation du titre exécutoire émis à son encontre le 12 août 2014 par le président de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais (CCOG) en vue du recouvrement d'un trop-perçu d'un montant de 14 352 euros en exécution de la convention d'honoraires conclue le 17 mai 2013 pour la mise en oeuvre de la protection fonctionnelle accordée à un de ses agents.

Par un jugement n° 1600451 du 11 janvier 2018, le Tribunal a

dministratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a saisi le Tribunal administratif de la Guyane d'une demande tendant à l'annulation du titre exécutoire émis à son encontre le 12 août 2014 par le président de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais (CCOG) en vue du recouvrement d'un trop-perçu d'un montant de 14 352 euros en exécution de la convention d'honoraires conclue le 17 mai 2013 pour la mise en oeuvre de la protection fonctionnelle accordée à un de ses agents.

Par un jugement n° 1600451 du 11 janvier 2018, le Tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2018, au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, M.A..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 janvier 2018 du Tribunal administratif de la Guyane ;

2°) d'annuler le titre exécutoire mentionné ci-dessus du 12 août 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, d'une part, pour défaut de communication de la réponse de la CCOG au moyen d'ordre public envisagé par le tribunal, d'autre part, car ce dernier n'a finalement pas retenu ce moyen d'ordre public, enfin, car le tribunal n'a pas informé les parties de la substitution de base légale à laquelle il a procédé ;

- le titre exécutoire est entaché d'une insuffisance de motivation, à défaut d'indication des bases de la liquidation ;

- ce titre est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, en particulier du fait de l'absence de mise en oeuvre par la CCOG de la compensation légale.

Par une ordonnance du 1er mars 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour la requête présentée par M.A....

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2019, la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais, représentée par la Selarl Landot et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est devenue dépourvue d'objet dans la mesure où le requérant a payé la somme mise à sa charge par le titre exécutoire litigieux ;

- à titre subsidiaire, la requête doit être rejetée comme irrecevable pour tardiveté de la demande ;

- à titre très subsidiaire, les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 2 mai 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 21 mai 2019 à 12 heures.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 21 mai 2019 à 9h26, M. A...maintient ses conclusions par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de MeD..., pour M.A...,

- et les observations de MeC..., pour la CCOG.

Considérant ce qui suit :

1. Le directeur des services de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais a été mis en examen le 27 novembre 2009 pour des faits de favoritisme et de corruption réprimés par les articles 432-11, 432-14 et 432-17 du code pénal, commis du 1er janvier 2003 au 31 juillet 2009. Par un jugement du 4 juillet 2013, le Tribunal correctionnel de Fort-de-France l'a relaxé d'une partie des faits, déclaré coupable pour le surplus et condamné à trente mois d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende, outre l'interdiction d'exercer ses précédentes fonctions pendant cinq ans. Puis par un arrêt du 2 octobre 2014, contre lequel il s'est pourvu en cassation le 6 octobre suivant, la Cour d'appel de Fort-de-France l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis et 40 000 euros d'amende, outre la peine complémentaire de privation des droits civiques, civils et de famille pendant deux ans. Il a obtenu le bénéfice des dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 imposant à l'employeur public une obligation de protection, incluant la prise en charge du montant des honoraires de son avocat. Son conseil, MeA..., a conclu le 17 mai 2013 une convention de prise en charge de ses honoraires sur la base d'un taux horaire de 150 euros HT et avec un montant maximal de 11 650 euros HT, outre le remboursement des frais de déplacement.

2. M. A...a saisi le Tribunal administratif de la Guyane d'une demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du titre exécutoire émis à son encontre le 12 août 2014 par le président de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais, en vue du recouvrement d'un trop-perçu d'un montant de 14 352 euros TTC sur sa note d'honoraire n° 022/2013, en exécution de la convention d'honoraires du 17 mai 2013. Par un jugement du 11 janvier 2018 le Tribunal administratif de la Guyane a rejeté cette demande. M. A...relève appel de ce jugement.

Sur l'étendue du litige :

3. Contrairement à ce que soutient la CCOG, la circonstance que M. A...se soit acquitté du paiement de la somme mise à sa charge par le titre exécutoire contesté, ne rend pas sans objet ses conclusions tendant à l'annulation de ce titre.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Si le tribunal a informé les parties qu'il était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que l'ordonnateur a méconnu le champ d'application de la loi en se fondant sur les dispositions du décret du 29 décembre 1962 abrogées et non sur celles du décret du 7 novembre 2012 en vigueur, il ne les a pas informées qu'il était susceptible d'office de substituer la base légale erronée, par le décret du 7 novembre 2012. M. A...est donc fondé à soutenir, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens relatifs à la régularité du jugement, qu'il est irrégulier et doit être annulé.

5. Il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A... présentée devant le Tribunal administratif de la Guyane ainsi que sur ses moyens d'appel.

Sur la fin de non recevoir de la CCOG tirée de la tardiveté de la demande :

6. Aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la date d'émission du titre litigieux : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ". Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions, que le non-respect de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par la dernière de ces dispositions, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que le délai de forclusion, prévu par la première, lui soit opposable.

7. Il résulte de l'instruction que par courrier du 20 octobre 2015, M. A...a refusé de verser au Trésor public la somme de 12 546,10 euros, somme correspondant à un avis de compensation légale émis le 1er octobre 2015 par le trésorier de Saint Laurent du Maroni entre la dette litigieuse de 14 352 euros et une créance de 1 805,99 euros correspondant à des frais de déplacement non réglés. Si M. A...a donc manifesté ainsi avoir eu connaissance au plus tard le 20 octobre 2015 de la créance réclamée, il est constant que ni l'avis de compensation du 1er octobre 2015, ni la lettre de relance du 12 octobre 2015, ni le titre exécutoire contesté qui lui a été notifié le 9 mai 2016 par le comptable public de la trésorerie de Saint-Laurent-du-Maroni, ne comportait l'indication des voies et délais de recours en méconnaissance des dispositions mentionnées ci-dessus du code de justice administrative. La demande introduite le 11 juillet 2016, soit moins d'un an après que M. A...ait reçu notification du titre contesté, n'était donc pas tardive. La fin de non-recevoir soulevée par la CCOG doit donc être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

8. Aux termes du second alinéa de l'article 24 du décret visé ci-dessus du 7 novembre 2012 : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ... ". En l'espèce le titre litigieux, qui se borne à indiquer " erreur matérielle de trop versé " sans autres précisions, ne peut être regardé comme indiquant les bases de la liquidation. Par ailleurs il ne résulte pas de l'instruction que ces bases aient été préalablement portées à la connaissance du débiteur. Dans ces conditions, M. A...est, pour ce motif, fondé à demander l'annulation du titre litigieux.

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. D'une part, ces dispositions font obstacle à ce que M.A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse une somme quelconque à la CCOG au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1600451 du 11 janvier 2018 du Tribunal administratif de la Guyane est annulé.

Article 2 : Le titre exécutoire émis à l'encontre de M. A...le 12 août 2014 par le président de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais en vue du recouvrement d'un trop-perçu d'un montant de 14 352 euros est annulé.

Article 3 : La Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais versera une somme de 1 500 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la Communauté de Communes de l'Ouest Guyanais.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2019.

Le rapporteur,

D. PAGESLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA20740 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA20740
Date de la décision : 05/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-03 Comptabilité publique et budget. Créances des collectivités publiques.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : CABINET LANDOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-07-05;18pa20740 ?
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