La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2020 | FRANCE | N°19PA01269

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 25 juin 2020, 19PA01269


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1700408 du 7 février 2019, le Tribunal administratif de Melun a prononcé un non-lieu à hauteur de 754 euros en matière de contributions sociales, et a rejeté le surplus des conclusions

de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1700408 du 7 février 2019, le Tribunal administratif de Melun a prononcé un non-lieu à hauteur de 754 euros en matière de contributions sociales, et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 avril 2019, M. et Mme E..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1700408 du 7 février 2019 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la charge de la preuve de l'appréhension des revenus distribués appartient à l'administration dès lors que la lettre par laquelle l'avocat de la société a désigné M. E... comme étant le bénéficiaire des revenus distribués en litige n'a pas été signée par lui ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'appréhension des commissions versées à la centrale de remboursement des titres de restaurants par la mise en oeuvre de la procédure de désignation prévue par l'article 117 du code général des impôts ;

- la circonstance que les commissions n'ont pas été refacturées aux restaurateurs, alors qu'elles ont bien été versées à la centrale de remboursement des titres de restaurants qui en a été la bénéficiaire, ne traduit pas un désinvestissement.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;

- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Propizza, qui avait une activité de grossiste en produits alimentaires à destination des professionnels et des particuliers, et dont M. E... était le gérant et l'unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a estimé que la renonciation à recettes de la société résultant de l'absence de refacturation à ses clients du montant des commissions prélevées par la centrale de remboursement des titres de restaurants (CRT) qu'elle aurait dû en principe exiger en contrepartie du service rendu constitué par le paiement d'une commission pour le compte d'un tiers, était constitutive d'un acte anormal de gestion et a réintégré le montant des commissions en cause dans les résultats des exercices vérifiés de la société. Corrélativement, elle a considéré que les sommes correspondantes devaient être regardées comme des revenus distribués imposables au nom de M. E..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des 1° du 1 de l'article 109 et c) de l'article 111 du code général des impôts. Elle a, en conséquence, notifié à M. et Mme E..., par une proposition de rectification en date du 15 septembre 2014, selon la procédure de rectification contradictoire, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, et une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre des années 2011 et 2012, assorties des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue par les dispositions de l'article 1758 A du code général des impôts. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes.

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ". Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ".

3. Il résulte de la proposition de rectification notifiée à M. et Mme E... que le vérificateur a constaté, lors des opérations de contrôle, que la société Propizza avait comptabilisé au compte de charges 6272 " Frais sur CRT " des commissions correspondant aux frais que la centrale de remboursement des titres restaurant (CRT) prélève lorsqu'une société demande le remboursement de tickets restaurants remis par ses clients pour des montants de 190 905,67 euros hors taxe en 2011 et de 254 092,51 euros en 2012, ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée déductible correspondant à ces commissions pour des montants de 37 417,51 euros au titre de l'année 2011 et de 49 802,05 euros au titre de l'année 2012. Le service a relevé que des professionnels ayant encaissé des tickets restaurant dans le cadre de leurs activités les avaient utilisés pour effectuer des achats auprès de la société Propizza, alors que ces achats avaient été facturés à des sociétés clientes radiées du registre du commerce et des sociétés en 2011, et que cette pratique permettait à des professionnels, clients de la société Propizza, de ne pas déclarer le chiffre d'affaires généré par ces achats, et par suite de ne pas s'acquitter de la commission réclamée par la CRT à l'occasion de la demande de remboursement du montant de ces tickets-restaurants. Le vérificateur a donc considéré que la société Propizza n'avait pas à supporter une charge qui incombait à ces professionnels, et qu'elle aurait dû leur facturer la commission due à la CRT. Il a, en conséquence, estimé que la société Propizza s'était privée d'un revenu en renonçant à tort à facturer à ses clients professionnels le montant de la commission prélevé par la CRT qu'elle devait exiger en contrepartie du service rendu, constitué par le paiement d'une commission pour le compte d'un tiers.

4. Les requérants soutiennent que la circonstance que les commissions versées à la CRT et qui n'ont pas été refacturées aux restaurateurs ne traduit pas un désinvestissement de la société Propizza, dès lors qu'elles ont bien été versées à cette centrale qui en est la bénéficiaire. L'activité de la société Propizza n'impliquait toutefois pas qu'elle prenne en charge, sans aucune contrepartie, les commissions qui auraient dû être versées par ses clients restaurateurs à la CRT au titre de la gestion des tickets restaurants, ce paiement incombant à ces professionnels et non à la société Propizza. Le ministre fait, en outre, valoir, que les achats effectués auprès de cette société auraient dû être réglés par ces professionnels par d'autres moyens de paiement que celui des chèques restaurant réservés aux particuliers, lesquels n'auraient alors impliqué le versement d'aucune commission. L'absence de refacturation de ces commissions constitue ainsi une renonciation à recettes, et dès lors que ces recettes n'ont été ni comptabilisées, ni déclarées au titre des résultats des deux exercices en litige, elles doivent être regardées comme ayant été désinvesties de la société Propizza.

5. Il résulte de la proposition de rectification du 15 septembre 2014 que la lettre du 15 juillet 2014 par laquelle la société Propizza a désigné M. E... comme bénéficiaire des revenus distribués par elle, a été signée par Me A...'h, mandaté par ce dernier en sa qualité de gérant de la société pour la représenter dans le cadre de la procédure d'imposition. M. E... contestant être le bénéficiaire de cette distribution, il incombe à l'administration d'apporter la preuve de l'appréhension par l'intéressé des revenus imposés à son nom. Il n'est cependant pas contesté que M. E..., associé unique et gérant de la société Propizza, en assurait seul la direction et la gestion et qu'il pouvait ainsi disposer sans contrôle des fonds sociaux. Il doit ainsi être regardé comme étant le maître de l'affaire de cette société et comme ayant appréhendé les sommes de 190 905,67 euros hors taxe en 2011 et de 254 092,51 euros en 2012 correspondant aux renonciations à recettes regardées comme désinvesties à son profit. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a, sur le fondement des dispositions du 1°) du 1 de l'article 109 du code général des impôts, imposé ces sommes entre les mains de M. E... à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. Par suite, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur général des finances publiques, direction du contrôle fiscal

d'Île-de-France.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2020.

Le président de la 5ème chambre,

S.-L. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19PA01269


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01269
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Simon-Louis FORMERY
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : MADAR

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-25;19pa01269 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award