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27/10/2020 | FRANCE | N°20PA00847

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 27 octobre 2020, 20PA00847


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D..., agissant pour le compte de son épouse, Mme F... H... épouse D..., et de lui-même, a demandé à la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône d'annuler la décision du 3 juin 2008 par laquelle le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de remise gracieuse d'un indu de 31 126,70 euros au titre d'allocations de revenu minimum d'insertion perçues au cours de la période du 1er avril 2003 au 28 février 2007. Par une décision du 22 janvier 2014

notifiée le

1er avril 2014, la commission départementale d'aide sociale des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D..., agissant pour le compte de son épouse, Mme F... H... épouse D..., et de lui-même, a demandé à la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône d'annuler la décision du 3 juin 2008 par laquelle le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de remise gracieuse d'un indu de 31 126,70 euros au titre d'allocations de revenu minimum d'insertion perçues au cours de la période du 1er avril 2003 au 28 février 2007. Par une décision du 22 janvier 2014 notifiée le

1er avril 2014, la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande.

Par une requête du 24 mai 2017, Mme F... D..., représentée par Me B..., a demandé à la Commission centrale d'aide sociale d'annuler la décision du 22 janvier 2014 notifiée le 1er avril 2014 de la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône et de mettre à la charge du conseil départemental des Bouches-du-Rhône la somme de 1 500,00 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle a soutenu que :

- la composition de la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône était irrégulière ;

- elle n'avait pu consulter les pièces du dossier en conséquence de quoi le principe du contradictoire avait été méconnu ;

- la demande de remboursement de l'indu n'était pas fondée dans son principe et dans son montant au sens de l'article 1235 du code civil.

Le 4 septembre 2018, la Commission centrale d'aide sociale a rejeté l'appel formé par Mme D....

Procédure devant la cour :

Par une décision n° 425.449 du 24 février 2020, le Conseil d'Etat a annulé la décision du 4 septembre 2018 de la Commission centrale d'aide sociale et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris où elle a été enregistrée le 25 février 2020 sous le numéro 20PA00847.

Par un mémoire, enregistré le 22 septembre 2020, M. D... représentant son épouse, soutient que :

- son épouse et lui-même n'ont pas commis de fraude ni fait de fausses déclarations ; ils ont remis spontanément leurs avis d'imposition au département ; s'ils ont manqué de vigilance dans leurs déclarations trimestrielles, ils n'ont pas dissimulé au département leurs avancées dans la recherche d'emploi pour son épouse et la création de sa société ; il a été relaxé par le tribunal correctionnel le 20 février 2009 ;

- leur démarches amiables ont été vaines, motifs pris de la fraude qui leur était reprochée alors que celle-ci ne pouvait légalement leur être opposable conformément à ce qu'a jugé le Conseil d'Etat qui a invalidé la décision de la Commission centrale d'aide sociale ;

- l'action, qui devait être intentée dans un délai de deux ans, est prescrite ;

- séparés de corps, parents de deux enfants, ils sont confrontés à des difficultés financières.

Le conseil départemental des Bouches-du-Rhône n'a pas conclu.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., allocataires du revenu minimum d'insertion à compter du mois de novembre 1997, ont fait l'objet d'un contrôle à l'issue duquel la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône a décidé de récupérer un indu de revenu minimum d'insertion d'un montant total de 31 126,70 euros, au titre de la période du 1er avril 2003 au 28 février 2007. Ils ont contesté devant la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône le rejet par le président du conseil général des Bouches-du-Rhône, le 3 juin 2008, de leur demande de remise gracieuse de cet indu. M. E... D..., agissant pour le compte de son épouse, Mme F... H... épouse D..., ainsi que pour lui-même, a demandé à la commission départementale d'aide sociale des Bouches-du-Rhône d'annuler cette décision. Ils relèvent appel de la décision du 22 janvier 2014 notifiée le 1er avril 2014 par laquelle la commission départementale d'aide sociale a rejeté leur demande.

Sur la régularité de la décision du de la commission départementale d'aide sociale des Bouches du Rhône :

2. Par sa décision n° 2010-110 QPC du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a considéré que les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles étaient contraires à la Constitution dès lors que, les commissions départementales d'aide sociale étant des juridictions administratives du premier degré, compétentes pour examiner les recours formés, en matière d'aide sociale, contre les décisions du président du conseil général ou du préfet, les dispositions du code de l'action sociale et des familles ne pouvaient prévoir que siégeaient dans cette juridiction trois conseillers généraux élus par le conseil général et trois fonctionnaires de l'État en activité ou à la retraite, désignés par le représentant de l'État dans le département, sans que des dispositions législatives applicables à cette commission n'instituent, tant des garanties appropriées permettant de satisfaire au principe d'indépendance des fonctionnaires siégeant dans cette juridiction, que des garanties d'impartialité faisant obstacle à ce que des fonctionnaires puissent siéger lorsque cette juridiction connaît de questions relevant des services à l'activité desquels ils ont participé.

3. Il ressort des pièces du dossier que la décision de la commission départementale d'aide sociale des Bouches du Rhône du 22 avril 2014 mentionne qu'elle a été rendue par

M. Truc, président, vice-président du tribunal de police et Mme Suel, secrétaire et rapporteur de la commission, outre quatre autres personnes nommément désignées qualifiées d'" adjoints au rapporteur ", sans préciser en quelles qualités ces dernières ont siégé au sein de la commission départementale d'aide sociale. L'omission de telles mentions relatives à la qualité de membres ayant siégé fait obstacle à la vérification de ce que les principes d'indépendance et d'impartialité des fonctionnaires ont été respectés. M. et Mme D... sont ainsi fondés à soutenir que la décision de la commission départementale d'aide sociale des Bouches du Rhône est irrégulière, a siégé dans une formation inconstitutionnelle à une date à laquelle cette inconstitutionnalité pouvait être opposée, faute de désigner les fonctions de membres de la commission départementale d'aide sociale et, dès lors, à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par M. et Mme D... devant les premiers juges.

Sur la décision du 3 juin 2008 du président du conseil général des Bouches du Rhône :

5. Aux termes de l'article L. 262-41 du code de l'action sociale et des familles demeuré applicable, sous réserve des dispositions transitoires de la loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion, aux allocations de revenu minimum d'insertion versées avant l'entrée en vigueur des dispositions relatives au revenu de solidarité active, dans sa rédaction applicable jusqu'au 24 mars 2006 : " Tout paiement indu d'allocations est récupéré (...) / En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général ".

6. Lorsqu'il statue sur un recours dirigé contre une décision refusant ou ne faisant que partiellement droit à une demande de remise gracieuse d'un indu de revenu minimum d'insertion, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention qu'à sa qualité de juge de plein contentieux de l'aide sociale, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d'examiner si une remise gracieuse totale ou partielle est justifiée et de se prononcer lui-même sur la demande en recherchant si, au regard des circonstances de fait dont il est justifié par l'une et l'autre parties à la date de sa propre décision, la situation de précarité du débiteur et sa bonne foi justifient que lui soit accordée une remise ou une réduction supplémentaire.

7. M. et Mme D..., dont le recours est dirigé contre décision portant rejet de demande gracieuse et qui n'ont pas contesté le bien-fondé de l'indu, ne peuvent dans le cadre de la présente instance utilement soutenir, ni que le principe de l'existence de leur dette ne serait pas établi, ni que l'action en recouvrement de l'ordonnateur serait prescrite.

8. Les requérants ne produisent aucune pièce relative à leur situation financière et n'établissent en conséquent pas être dans une situation de précarité à la date du présent arrêt.

9. Il résulte de ce qui précède que, pour ce seul motif, M. et Mme D... ne sont pas fondés à contester le bien-fondé de la décision du président du conseil général des Bouches du Rhône du 3 juin 2008.

DECIDE :

Article 1er : La décision de la commission départementale d'aide sociale des Bouches du Rhône du 22 janvier 2014 notifiée le 1er avril 2014 est annulée.

Article 2 : La demande de M. et Mme D... devant la commission départementale d'aide sociale des Bouches du Rhône et leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... H... épouse D..., à M. E... D... et au département des Bouches du Rhône.

Délibéré après l'audience publique du 6 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

- M. C..., premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 27 octobre 2020.

Le rapporteur,

M-G... A... Le président,

M. C...

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 20PA00847


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00847
Date de la décision : 27/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : WAHED

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-27;20pa00847 ?
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