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10/11/2020 | FRANCE | N°19PA04084

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 10 novembre 2020, 19PA04084


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 septembre 2017 par laquelle le ministre des affaires étrangères a rejeté son recours préalable indemnitaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 262 546 euros en réparation de ses préjudices matériels et 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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n jugement n° 1717789/5-1 du 24 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 septembre 2017 par laquelle le ministre des affaires étrangères a rejeté son recours préalable indemnitaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 262 546 euros en réparation de ses préjudices matériels et 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1717789/5-1 du 24 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 décembre 2019 et 31 août 2020,

Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 24 octobre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du ministre des affaires étrangères du 19 septembre 2017 portant rejet de son recours préalable indemnitaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 262 546 euros en réparation de ses préjudices avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2017 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne prenant pas de décret d'application de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984 pour régir la situation de la requérante et des agents dans une situation comparable (agents EL 69) ;

- le tribunal ne pouvait lui opposer son refus de la proposition de titularisation qui lui avait été faite en 1988 dès lors que les agents dans sa situation avaient été fortement incités par des notes internes à refuser ces titularisations ;

- la responsabilité sans faute de l'Etat pour rupture d'égalité non justifiée entre agents de droit local et agents EL 69 est aussi engagée, dans la mesure où elle a subi un préjudice spécial et anormal ;

- elle est fondée à demander réparation d'un préjudice matériel résultant d'une moindre rémunération, et de conditions de départ à la retraite moins avantageuses, du fait notamment qu'elle a cotisé tantôt auprès des caisses françaises tantôt auprès des caisses italiennes ainsi que d'un préjudice moral ;

- en fixant une date de clôture de l'instruction au 31 août 2020 alors que l'administration n'avait produit son mémoire en défense que le 5 août 2020, et en ne lui laissant ainsi que 26 jours pour répliquer alors que la partie adverse avait disposé de huit mois pour produire sa défense, la Cour méconnait le principe d'égalité des armes entre les parties.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 août 2020, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères demande à la Cour de rejeter la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 69-697 du 18 juin 1969 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée par le ministère des affaires étrangères pour exercer ses fonctions à l'ambassade de France en Italie dans le cadre d'un contrat du 31 août 1983, d'une durée de trois ans courant à compter du 1er avril 1983, conclu en application des dispositions du décret du 18 juin 1969 visé ci-dessus portant fixation du statut des agents contractuels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif de nationalité française en service à l'étranger. Le contrat ayant été régulièrement renouvelé, elle s'est vu proposer en 1988 sa titularisation mais a refusé cette proposition. Par avenant signé le 21 juillet 2008 son contrat à durée déterminée a été transformé en contrat à durée indéterminée. Ensuite, estimant que sa situation était sensiblement moins favorable que celle des agents de droit local, elle a formé le 1er août 2017 une demande préalable indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Toutefois, par une décision du 19 septembre 2017, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rejeté cette demande. Mme B... a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 272 546 euros en réparation de ses préjudices. Cette demande a été rejetée par jugement du 24 octobre 2019 dont Mme B... interjette appel.

Sur la régularité de la procédure :

2. S'il appartient au juge d'appel de se prononcer, dans ses arrêts, sur les irrégularités de procédure, parmi lesquelles les méconnaissances du principe du contradictoire et des droits de la défense, susceptibles d'avoir entaché le jugement querellé, il ne lui appartient pas en revanche de connaitre de moyens mettant en cause la régularité de la procédure suivie devant lui. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des armes entre les parties du fait de la fixation de la clôture de l'instruction au 31 août 2020 alors que l'administration n'avait produit son mémoire en défense que le 5 août 2020, ne laissant ainsi que 26 jours à Mme B... pour répliquer est inopérant, sans qu'il soit besoin de relever qu'en tout état de cause, par ordonnance du 3 septembre 2020, l'instruction a été réouverte jusqu'au 16 septembre suivant.

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur la responsabilité pour faute :

3. Aux termes de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984 visée ci-dessus : " " Les agents non titulaires qui occupent un emploi présentant les caractéristiques définies à l'article 3 du titre Ier du statut général ont vocation à être titularisés, sur leur demande, dans des emplois de même nature qui sont vacants ou qui seront créés par les lois de finances, sous réserve : /1° Soit d'être en fonctions à la date de publication de la loi n° 83-481 du 11 juin 1983, soit de bénéficier à cette date d'un congé en application du décret n° 80-552 du 15 juillet 1980 relatif à la protection sociale des agents non titulaires de l'Etat, soit de bénéficier à cette date d'un congé en application du décret n° 82-665 du 22 juillet 1982 relatif à la protection sociale des agents non titulaires de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif ou à caractère culturel et scientifique, de nationalité française, en service à l'étranger ; /2° D'avoir accompli, à la date du dépôt de leur candidature, les services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet dans un des emplois susindiqués ; /3° De remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre Ier du statut général ".

4. Comme l'a à juste titre jugé le tribunal, il ressort de ces dispositions qu'elles sont suffisamment claires et précises et ne nécessitaient pas, par suite, l'intervention d'un décret d'application, sans qu'une telle nécessité puisse se déduire de la circonstance, alléguée par

Mme B..., que des décrets auraient été pris pour l'application de l'article 74 de cette loi.

Mme B... n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'Etat aurait commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité en s'abstenant de prendre un tel décret.

5. Par ailleurs si elle fait état de ce qu'elle a refusé la proposition de titularisation qui lui avait été faite en 1988 en raison de la note de l'administration du 25 avril 1988, dissuadant selon elle, les agents concernés de choisir la titularisation, il ressort de ce document qu'il avait pour objet d'informer les agents dans sa situation sur l'évolution de leur régime indemnitaire en cas d'acceptation de leur part, mais, alors même que cela pouvait les inciter à considérer leur situation comme plus avantageuse, chacun d'eux, demeurait libre, en prenant en compte l'ensemble des avantages et inconvénients d'une titularisation, d'accepter ou de refuser celle-ci. Ainsi Mme B... n'est fondée à rechercher, à aucun titre, la responsabilité pour faute de l'Etat.

Sur la responsabilité sans faute :

6. Mme B... soutient aussi que la responsabilité sans faute de l'Etat serait engagée à son encontre, en raison d'une rupture d'égalité dont elle s'estime victime par rapport aux agents de droit local exerçant en Italie. Or, les agents recrutés en vertu des dispositions du V de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000, sont placés dans une situation juridique différente de celle des agents relevant des dispositions du décret du 18 juin 1969 portant fixation du statut des agents contractuels de l'Etat et d'établissements publics administratifs de l'Etat de nationalité française en service à l'étranger. Dans ces conditions, il n'a pas été porté atteinte au principe d'égalité.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est fondée à demander que soit engagée la responsabilité de l'Etat à son égard ni sur le terrain de la responsabilité pour faute ni sur celui de la responsabilité sans faute. Dès lors ses conclusions à fins d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme D... premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.

Le rapporteur,

M-I. D...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA04084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04084
Date de la décision : 10/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : BALTAZAR

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-10;19pa04084 ?
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