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16/02/2021 | FRANCE | N°20PA02236,20PA02241

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 16 février 2021, 20PA02236,20PA02241


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 10 mai 2019 par laquelle l'inspectrice du travail du département des Yvelines a autorisé son licenciement de la société Mc Donald's Paris Nord. Par une ordonnance du 26 juillet 2019, le vice-président délégué du tribunal administratif de Versailles a transmis sa demande au tribunal administratif de Paris.

Par un jugement n° 1916571/3-3 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision d

u 10 mai 2019 par laquelle l'inspectrice du travail du département des Yvelines a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 10 mai 2019 par laquelle l'inspectrice du travail du département des Yvelines a autorisé son licenciement de la société Mc Donald's Paris Nord. Par une ordonnance du 26 juillet 2019, le vice-président délégué du tribunal administratif de Versailles a transmis sa demande au tribunal administratif de Paris.

Par un jugement n° 1916571/3-3 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 10 mai 2019 par laquelle l'inspectrice du travail du département des Yvelines a autorisé le licenciement de M. A..., mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de ce dernier.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête, enregistrée le 11 août 2020 sous le n° 20PA02236 et un mémoire, enregistré le 28 janvier 2021 non communiqué, la société Mc Donald's Paris Nord, représentée par la SCP Fromont-Briens, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1916571/3-3 du 24 juin 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de ce dernier une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'inspectrice du travail de l'unité départementale des Yvelines n'était pas territorialement compétente pour se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement de M. A... dès lors, qu'en application des dispositions de l'article L. 2421-7 du code du travail et des dispositions transitoires de l'ordonnance du

22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales, les nouvelles règles de compétence territoriales n'étaient applicables qu'à compter de l'élection du comité social et économique (CSE), organisées en novembre 2019 en l'espèce ;

- les autres moyens soulevés par M. A... en première instance, relatifs au défaut de caractère contradictoire de l'enquête menée par l'administration, au vice de procédure entachant la décision de retrait de la décision de refus implicite, à l'irrégularité de la procédure interne à l'entreprise, à l'absence de bien fondé de la demande d'autorisation de licenciement et au lien avec le mandat détenu, ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2021, M. A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Mc Donald's Paris Nord la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.

II- Par une requête, enregistrée le 11 août 2020 sous le n° 20PA02241, la société Mc Donald's Paris Nord, représentée par la SCP Fromont-Briens, demande à la cour

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1916571/3-3 du 24 juin 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que ses moyens sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement et le rejet de la requête de M. A... ; que l'exécution de ce jugement emporte un risque de conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, la réintégration de l'intéressé entrainant une dégradation des conditions de travail de ses collègues alors que l'employeur est tenu d'une obligation de résultat de sécurité envers tous ses salariés, outre des conséquences difficilement réparables en termes organisationnels.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, M. A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Mc Donald's Paris Nord la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande de sursis à exécution n'est pas recevable ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la société Mc Donald's Paris Nord ne sont pas sérieux et il n'y a pas de risque de conséquences difficilement réparables.

La requête a été communiquée à la ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par ordonnance du 3 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 ;

- l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 ;

- le décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., pour la société Mc Donald's Paris Nord.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté 1er octobre 1998 en qualité d'équipier polyvalent par la société McDonald's France Restaurants, puis par la société McDonald's Paris Nord créée le

1er janvier 2008, dont le siège est situé à Guyancourt (78) et qui exploite neuf restaurants sous l'enseigne Mc Donald's, situés à Paris, dans les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne et le Val-d'Oise. Dans le dernier état de ses fonctions, M. A... était employé de restauration qualifié, au sein de l'établissement des Champs Elysées. Il bénéficie du statut de salarié protégé en qualité de membre suppléant du comité d'entreprise, de délégué syndical et d'ancien délégué du personnel titulaire. Par un courrier du 21 janvier 2019, la société Mc Donald's Paris Nord a sollicité auprès de l'inspection du travail de l'unité départementale des Yvelines l'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire. Par une décision du 10 mai 2019, l'inspectrice du travail de l'unité départementale des Yvelines a retiré sa décision implicite de rejet de la demande et a fait droit à la demande d'autorisation de licenciement de M. A.... Le recours formé par ce dernier contre cette décision devant le tribunal administratif de Versailles a été transmis par une ordonnance du 26 juillet 2019 du vice-président délégué du tribunal au tribunal administratif de Paris. Par une première requête, la société Mc Donald's Paris Nord relève régulièrement appel du jugement du 24 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 10 mai 2019 de l'inspectrice du travail du département des Yvelines. Par une seconde requête, elle demande à la cour d'en ordonner le sursis à exécution.

2. L'appel et la demande de sursis à exécution présentés par le préfet de police étant formés contre un même jugement, présentant à juger des mêmes questions et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n°20PA02236 :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article R. 2421-1 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret du 29 décembre 2017 relatif au comité social et économique : " La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué syndical, d'un salarié mandaté, d'un membre de la délégation du personnel au comité social et économique interentreprises ou d'un conseiller du salarié est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans les conditions définies à l'article L. 2421-3 (...) ". Aux termes du 4ème alinéa de l'article L. 2421-3 du même code, dans sa rédaction issue du c du 121° du I de l'article 1er de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, entrée en vigueur le 21 décembre 2017 et applicable aux demandes d'autorisation de licenciement introduites à compter de sa publication : " (...) La demande d'autorisation de licenciement est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé. Si la demande d'autorisation de licenciement repose sur un motif personnel, l'établissement s'entend comme le lieu de travail principal du salarié (...) ". Aux termes, enfin, du IV de l'article 4 de l'ordonnance du 20 décembre 2017 : " Les dispositions prévues au c du 121° (...) du I de l'article 1er de la présente ordonnance sont applicables aux demandes formées à compter de la date de sa publication ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les règles de détermination de la compétence territoriale de l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement, issues de l'ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 à compter du 21 décembre 2017, ne sont pas applicables aux demandes concernant des salariés bénéficiant de mandats amenés à disparaitre et dont le régime est couvert par des dispositions transitoires, mais le sont en revanche aux demandes concernant des salariés dont les mandats sont maintenus. Dès lors, si le salarié concerné par la demande de rupture de son contrat de travail ne bénéficie pas du statut protecteur au seul titre d'un mandat de délégué du personnel, membre du comité d'entreprise ou du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, mais bénéficie notamment du statut protecteur au titre d'un mandat de délégué syndical, voire en vertu d'anciennes fonctions représentatives, la compétence de l'inspecteur du travail ne se définit pas au regard de la présence d'un comité d'établissement et à défaut, de l'autonomie de gestion suffisante ou non de l'établissement auquel le salarié est rattaché, mais au regard des critères définis par l'article L. 2421-3 du même code, dans sa rédaction entrée en vigueur le 21 décembre 2017, eu égard au motif sur lequel repose la demande, soit le lieu de travail principal du salarié lorsque elle repose sur un motif personnel.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., membre suppléant du comité d'entreprise, et également délégué syndical et ancien délégué du personnel, est employé au sein du restaurant des Champs-Elysées situé à Paris, exécute sa prestation de travail sur un lieu. La procédure de demande d'autorisation de licenciement ayant été initiée le 21 janvier 2019, il relevait ainsi des nouvelles dispositions précitées quand bien même, à la date de saisine et de la décision de l'inspectrice du travail de l'unité territoriales des Yvelines, les élections du CSE n'avaient-elles pas encore été organisées dans son entreprise et les anciens mandats de membres du comité d'entreprise étaient-ils toujours en cours. C'est en conséquence à bon droit que les premiers juges ont considéré que la demande d'autorisation de son licenciement pour un motif disciplinaire relevait de la compétence territoriale de l'inspecteur du travail du département de Paris.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Mc Donald's Paris Nord n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision contestée du 10 mai 2019 de l'inspectrice du travail du département des Yvelines.

Sur les frais liés à l'instance :

7. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance ; dès lors, les conclusions présentées à ce titre par la société Mc Donald's Paris Nord doivent être rejetées.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Mc Donald's Paris Nord le paiement à M. A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la requête n°20PA02241 :

9. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 1916571/3-3 du 24 juin 2020 du tribunal administratif de Paris, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions de la requête n° 20PA02241 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 20PA02236 de la société Mc Donald's Paris Nord est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20PA02241.

Article 3 : La société Mc Donald's Paris Nord versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mc Donald's Paris Nord, au ministre chargé du travail et à M. F... A....

Délibéré après l'audience du 2 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. E..., premier vice-président,

M. Bernier, président assesseur,

Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.

Le rapporteur,

M-D. B...Le président,

M. E...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre chargé du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

2

N° 20PA02236 et 20PA02241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02236,20PA02241
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation. Autorité compétente.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SCP FROMONT BRIENS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-16;20pa02236.20pa02241 ?
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