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24/06/2021 | FRANCE | N°20PA00298

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 24 juin 2021, 20PA00298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi qu'aux pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1801849 du 28 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 janvier 2020 et le 1er février 2021, M. C..., représent

par la SELARL Zamour et asssociés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801849 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi qu'aux pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1801849 du 28 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 janvier 2020 et le 1er février 2021, M. C..., représenté par la SELARL Zamour et asssociés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801849 du 28 novembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'administration fiscale aux entiers dépens.

M. C... fait valoir que :

- l'administration n'ayant pas rejeté la comptabilité, les éléments déclarés conformes à la comptabilité sont réputés exacts et la charge de la preuve des rehaussements tant en matière de taxe sur la valeur ajoutée que s'agissant des bénéfices non commerciaux à raison de sommes que l'administration a regardées comme constituant des recettes encaissées sur des comptes mixtes et non facturées, incombe à l'administration ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas fondés et l'administration n'a pas répondu à sa réclamation préalable ;

- l'administration estime que l'option pour la détermination du résultat selon les créances acquises et les dépenses engagées ayant été réalisée après le 1er février 2009, elle pouvait déterminer le bénéfice imposable sur la base d'une comptabilité de caisse ;

- la méthode ne peut se fonder sur les deux méthodes en même temps comme elle le fait pourtant ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de la perception d'honoraires dans le cadre d'une procédure contradictoire ; elle n'identifie pas d'opérations correspondant à ces sommes qui ne sont dès lors pas imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

- l'administration n'établit pas la réalité d'un manquement délibéré du contribuable à ses obligations déclaratives.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance soutient que :

Le ministre soutient qu'aucun des moyens présentés par M. C... n'est fondé. Il soutient que :

- le requérant, dans le cadre de son activité d'architecte, a encaissé 1 017 481 euros sans déclarer de taxe sur la valeur ajoutée ;

- certaines sommes apparaissant au crédit de ses comptes bancaires, à hauteur de 206 206,77 euros n'ont pas donné lieu à la collecte de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- par réalisme, l'administration a accepté de déduire la taxe sur la valeur ajoutée qui grevait les loyers du cabinet ;

- la nature des crédits bancaires a fait l'objet d'une demande de justification des 20 février 2012 et 18 avril 2012 sans réponse ;

- M. C... n'ayant présenté aucune observation sur les rehaussements, il supporte la charge de la preuve ;

- le requérant a également réalisé un profit sur le Trésor contre lequel il ne présente aucun moyen ;

- le requérant a perçu des recettes commerciales de 254 264 euros enregistrées en comptabilité selon les règles de la comptabilité commerciale ;

- le contribuable a omis de déclarer 43 % de ses recettes perçues sous la forme de remises de chèques et de versement d'espèces. Le requérant ne pouvait ignorer les avoir encaissées et ne pas les avoir déclarées alors qu'il exerçait son activité en forme individuelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public ;

- et les observations orales de Me A... pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerce sous la forme individuelle une activité d'architecte, a été assujetti au titre de l'année 2009, consécutivement à un examen de sa situation fiscale personnelle pour les années 2009, 2010 et 2011, à des suppléments d'impôts commerciaux pour une somme totale de 259 420 euros, dont il a demandé la décharge au Tribunal administratif de Paris. Il relève appel du jugement de ce tribunal qui a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

S'agissant de la charge de la preuve en matière de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ".

3. Il résulte de l'instruction que M. C... a accusé réception le 25 juin 2012 de la proposition de rectification du 20 juin 2012 à laquelle il s'est abstenu de répondre dans les délais légaux y compris étendu à soixante jours, sa réponse ayant été remise en main propre au vérificateur le 13 septembre 2012. Par suite, sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du code général des impôts, il supporte la charge de la preuve initiale d'établir le caractère exagéré des impositions.

S'agissant du montant des rappels :

4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (...) ".

5. Lorsqu'un assujetti réalise une affaire moyennant un prix convenu qui ne mentionne aucune taxe sur la valeur ajoutée, dans des conditions qui ne font pas apparaître que les parties seraient convenues d'ajouter au prix stipulé un supplément de prix égal à la taxe sur la valeur ajoutée applicable à l'opération, la taxe due au titre de cette affaire doit être assise sur une somme égale au prix stipulé, diminué notamment du montant de ladite taxe.

6. Il résulte de l'instruction que M. C... n'a déclaré aucune taxe sur la valeur ajoutée collectée, alors qu'il a réalisé un chiffre d'affaires de 1 017 481 euros. L'administration était donc fondée à calculer un montant de taxe sur la valeur ajoutée " en dedans " des montants encaissés, réputés inclure ladite taxe, de 166 744, 42 euros.

7. De même les sommes considérées comme des honoraires, pour les motifs énoncés aux points suivants de l'arrêt pour des sommes de 206 207 euros ont, en application du même principe, donné lieu à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée de 33 793 euros. L'administration a cependant réduit, à juste titre, le rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces deux sommes de la taxe sur la valeur ajoutée déductible ayant grevé les loyers, soit 37 823 euros, parce que cette taxe n'avait pas davantage été déclarée.

En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux tirés de l'activité :

S'agissant des sommes qui correspondraient à des recettes facturées à hauteur de 254 264 euros :

8. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (...) ". L'article 93 A du même code dispose : " (...) le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt peut, sur demande des contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée, être constitué de l'excédent des créances acquises sur les dépenses mentionnées au 1 de l'article 93 et engagées au cours de l'année d'imposition. L'option doit être exercée avant le 1er février de l'année au titre de laquelle l'impôt sur le revenu est établi ; elle s'applique tant qu'elle n'a pas été dénoncée dans les mêmes conditions (...) ".

9. L'article 93 A du code général des impôts permet au contribuable exerçant une activité libérale qui relève normalement de la comptabilité de caisse d'opter pour les règles de la comptabilité commerciale et, ainsi, de comptabiliser, au titre des recettes, les créances acquises et, au titre des dépenses, les dépenses engagées. En l'espèce, bien que M. C... ait exercé hors délai l'option prévue par ce texte, l'administration a accepté d'établir le bénéfice non commercial de l'année 2009 de l'intéressé en se fondant sur les règles de la comptabilité commerciale alors qu'il avait lui-même enregistré certaines de ses créances et de ses charges selon cette modalité. Contrairement à ce que soutient M. C... , il ne résulte pas des pièces du dossier que l'administration aurait en réalité appliqué les règles de la comptabilité de caisse pour imposer quatre sommes d'un montant total de 254 264 euros, correspondant à des factures émises en 2009 et encaissées en 2009. Il résulte au contraire de l'instruction que l'administration s'est fondée sur le fait que les créances étaient acquises indépendamment des modalités d'encaissement. Dès lors, l'instruction publiée sous le numéro DB 5-G 221 n° 15 citée par le requérant et qui porte sur le principe des recettes encaissées selon diverses modalités de paiement, reste sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition, et ne peut être regardée comme utilement opposée à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

S'agissant des sommes d'un montant de 172 414 euros qualifiées d'honoraires :

10. Il résulte de l'instruction que l'administration a qualifié d'honoraires des sommes d'un montant total de 206 206 euros encaissées en 2009 par M. C..., au motif qu'elles l'avaient été sur ses comptes bancaires mixtes. Leur caractère professionnel au regard des mentions figurant au fichier national des comptes bancaires et assimilés n'est pas sérieusement contesté. En se bornant à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que les sommes en cause ont le caractère de recettes professionnelles, alors que ces sommes ont été perçues sur des comptes mixtes, et correspondent à quatre factures des 15 janvier, 2 mars, 10 août et 9 septembre 2009, et enregistrées pour un montant de 304 100 euros toutes taxes comprises, soit 254 264 euros hors taxes, au crédit du compte 108 intitulé " compte de l'exploitant ", et alors que ces sommes ont été payées par des clients du cabinet d'architecte et correspondent à des honoraires, l'administration établit que le caractère de recettes de ces sommes. En tout état de cause, les créances ayant été acquises en 2009 et encaissées la même année, elles étaient imposables à ce titre quelles que soient les règles de comptabilité, de caisse ou commerciale, qui devaient être adoptées.

En ce qui concerne le profit sur le trésor :

11. M. C... ne présente aucun moyen contre ce chef de rehaussement, alors que le profit sur le trésor découle mécaniquement du profit égal au montant de la taxe sur la valeur ajoutée rappelée. Le service fiscal était donc fondé à imposer ce profit égal au montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

Sur les pénalités :

12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

13. Pour établir le manquement délibéré de M. C... à ses obligations déclaratives et justifier de l'application d'une pénalité au taux de 40 % infligée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration s'est fondée, d'une part, sur l'importance des montants d'honoraires non déclarés, représentant 43 % du total des recettes déclarées, d'autre part sur le fait que les crédits ont été encaissés sous forme de chèques ou d'espèces, pour des montants parfois très élevés, avec un suivi comptable régulier, encaissés sur des comptes mixtes, qui établit que M. C... avait connaissance de ses omissions déclaratives. Ainsi, en l'espèce, M. C... doit être regardé comme ayant délibérément manqué à ses obligations déclaratives. L'administration apporte ainsi la preuve des manquements délibérés et justifie l'application des majorations prévues par les dispositions précitées.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'État n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, doit ainsi être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (pôle fiscal et affaires juridiques - service du contentieux décentralisé).

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- M. D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 24 juin 2021.

Le rapporteur,

B. D...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 20PA00298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00298
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Bruno SIBILLI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SELARL ZAMOUR et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-24;20pa00298 ?
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