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23/09/2021 | FRANCE | N°20PA03026

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 23 septembre 2021, 20PA03026


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sakar a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1902034 du 9 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 octobre 2

020 et le 19 janvier 2021, la société Sakar, représentée par Me Bensaid, demande à la Cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sakar a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1902034 du 9 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 octobre 2020 et le 19 janvier 2021, la société Sakar, représentée par Me Bensaid, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902034 du 9 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la charge financière résultant du prêt que la société Nerima Enterprises Company Limited lui a accordé au taux de 5,5 % est justifiée ;

- ce taux s'explique notamment par la circonstance que la société Nerima Entreprises Company Limited n'a exigé la constitution d'aucune garantie ;

- ce taux est proche du taux de 4,58 % rémunérant un emprunt d'un montant de 500 000 euros que l'une de ses filiales, la SCI Jankar, a souscrit en 2012 auprès de la Société Générale ;

- l'administration fiscale ne saurait se prévaloir de l'article 238 A du code général des impôts dès lors qu'elle a admis le principe de la charge en ne remettant en cause que le taux d'emprunt ;

- la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a rendu un avis favorable à l'abandon du rehaussement ;

- le bulletin officiel des finances publiques référencé BOI-IS-BASE-35-20-10 justifie la prise en compte d'un taux d'intérêt supérieur au taux légal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 janvier 2021 et le 29 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- et le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aggiouri ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiées (SAS) Sakar, qui est la société holding d'un groupe de sociétés exploitant des garages de contrôle technique, exerce, d'une part, une activité de prestation de services au profit des sociétés du groupe et, d'autre part, une activité de prise de participation, d'acquisition, de gestion, de cession de valeurs immobilières et titres. A la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er octobre 2012 et le 30 septembre 2015, la société Sakar a été assujettie, notamment, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 à raison de la remise en cause du caractère déductible d'intérêts d'emprunt versés à la société Nerima Enterprises Company Limited, qui détient l'intégralité de son capital, calculés au taux fixe de 5,5 % en application d'un contrat du 31 mars 2012. L'administration fiscale, après avoir remis en cause, en se fondant notamment sur l'article 212 du code général des impôts, l'ensemble des intérêts d'emprunt déduits par la société Sakar à raison de ce prêt, a, à la suite de la saisine de l'interlocuteur départemental, admis la déduction des intérêts d'emprunt dans la limite d'un taux d'intérêt de 2,84 %, calculé en application du 3° du 1. de l'article 39 du code général des impôts. La société Sakar relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions qui lui ont été ainsi assignées.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 212 du code général des impôts : " I.- Les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise liée directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39, sont déductibles dans la limite de ceux calculés d'après le taux prévu au premier alinéa du 3° du 1 de l'article 39 ou, s'ils sont supérieurs, d'après le taux que cette entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues ".

3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant [...] notamment : / [...] 3° Les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans [...] ".

4. D'une part, en vertu du 12 de l'article 39 du code général des impôts, des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ou lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies précédemment, sous le contrôle d'une même tierce entreprise.

5. D'autre part, il résulte de la combinaison des dispositions de l'article 39 et du I de l'article 212 du code général des impôts que les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise qui en détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social ou y exerce en fait le pouvoir de décision, ou qui est placée sous le contrôle d'une même tierce entreprise que la première, sont déductibles dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises d'une durée initiale supérieure à deux ans ou, s'il est plus élevé, au taux que l'entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues. Le taux que l'entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues s'entend, pour l'application de ces dispositions, du taux que de tels établissements ou organismes auraient été susceptibles, compte tenu de ses caractéristiques propres, notamment de son profil de risque, de lui consentir pour un prêt présentant les mêmes caractéristiques dans des conditions de pleine concurrence. L'entreprise emprunteuse, à qui incombe la charge de justifier du taux qu'elle aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants pour un prêt consenti dans des conditions analogues, a la faculté d'apporter cette preuve par tout moyen.

6. Pour justifier de ce que le taux d'intérêt consenti par la société Nerima Enterprises Company Limited était comparable au taux d'intérêt qu'elle aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues, la société Sakar, dont le capital est intégralement détenu par la société Nerima Enterprises Company Limited, fait valoir que ce taux est proche du taux de 4,58 % rémunérant un emprunt d'un montant de 500 000 euros que l'une de ses filiales, la SCI Jankar, a souscrit en 2012 auprès de la Société Générale, aux fins d'acquérir des biens immobiliers à Saint-Doulchard. Toutefois, la société Sakar, qui est une holding mixte, ne peut être regardée comme présentant des caractéristiques analogues à celles de la SCI Jankar, qui est l'une de ses filiales. De plus, l'emprunt souscrit par la SCI Jankar au taux, hors assurances et frais, de 3,75 %, et dont le montant correspond au quart de la somme que la société Sakar a emprunté auprès de la société Nerima Enterprises Company Limited, a permis l'acquisition de biens immobiliers, alors que l'emprunt en cause a été souscrit par la société Sakar aux fins d'acquisition de nouvelles sociétés. Si la société Sakar fait également valoir que le taux de 5,5 % s'expliquerait par la circonstance que la société Nerima Enterprises Company Limited n'a exigé la constitution d'aucune garantie, elle n'établit pas que cette circonstance justifierait le taux pratiqué en l'espèce. Enfin, si la société requérante soutient que le même taux serait appliqué, par principe, à l'ensemble des sociétés du groupe, elle n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ses allégations. Ainsi, la société Sakar n'établit pas qu'elle aurait pu obtenir un taux de 5,5 % de la part d'établissements ou d'organismes financiers indépendants pour un prêt consenti dans des conditions analogues, au sens de l'article 212 du code général des impôts. Il suit de là que c'est à bon droit, sur le fondement de ces dispositions, que l'administration fiscale n'a admis la déduction des intérêts d'emprunt que dans la limite d'un taux d'intérêt de 2,84 %.

7. En second lieu, la société Sakar ne saurait utilement se prévaloir de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires en date du 25 mai 2018, qui ne s'impose pas à l'administration fiscale.

Sur l'interprétation de la loi fiscale :

8. La société Sakar n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine référencée BOI-IS-BASE-35-20-10, qui ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sakar n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

10. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions de la société Sakar présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Sakar est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sakar et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021, où siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 septembre 2021.

Le rapporteur,

K. AGGIOURILa présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20PA03026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03026
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : BENSAID

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-09-23;20pa03026 ?
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