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24/09/2021 | FRANCE | N°20PA01670

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 24 septembre 2021, 20PA01670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 59 000 euros, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, ainsi que les intérêts de retard à compter de la réception de la demande indemnitaire préalable et la capitalisation de ces intérêts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1819873 du 11 jui

n 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. C....

Procédure devant la Cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 59 000 euros, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, ainsi que les intérêts de retard à compter de la réception de la demande indemnitaire préalable et la capitalisation de ces intérêts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1819873 du 11 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2020, M. C..., représenté par

Me Mendiboure, demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement entrepris ;

2) de condamner l'Etat à lui verser l'indemnité déjà mentionnée pour un montant de 46 000 euros au titre du préjudice financier, et pour un montant de 15 000 euros au titre du préjudice moral ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'administration ne pouvait légalement refuser de statuer sur sa demande de démission dans un délai de quatre mois, au motif qu'il n'aurait pas présenté le 22 janvier 2016 une démission sans équivoque ; elle a accepté en fait sa démission dès le 20 septembre 2016, tout en refusant de constater cette acceptation par une décision formalisée ;

- cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration et lui a causé directement un préjudice financier, d'un montant de 46 000 euros, au titre des soldes non perçues de janvier 2017 à novembre 2018, ainsi qu'un préjudice moral qu'il évalue à 15 000 euros, en raison de l'impossibilité de cotiser pour sa retraite et de postuler un autre emploi.

Par un mémoire en défense, enregistré 16 mars 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., gardien de la paix affecté à la préfecture de police, a formé le 2 juillet 2018 un recours préalable auprès du préfet de police, tendant à la réparation d'un préjudice financier, d'un montant de 44 000 euros, au titre des soldes non perçues de janvier 2017 à octobre 2018, et d'un préjudice moral d'un montant de 15 000 euros, au motif qu'en refusant de statuer sur sa démission présentée le 22 janvier 2016, l'administration a commis une illégalité fautive. Son recours ayant été implicitement rejeté, il a saisi le Tribunal administratif de Paris qui a rejeté son recours contentieux par un jugement du 11 juin 2020 dont appel.

Sur la responsabilité :

2. Aux termes de l'article 24 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La cessation définitive de fonctions qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire résulte : / (...) 2° De la démission régulièrement acceptée (...) ". Et aux termes de l'article 58 du décret du 16 septembre 1985 visé ci-dessus relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions : " La démission ne peut résulter que d'une demande écrite de l'intéressé marquant sa volonté expresse de quitter son administration ou son service. Elle n'a d'effet qu'autant qu'elle est acceptée par l'autorité investie du pouvoir de nomination et prend effet à la date fixée par cette autorité. La décision de l'autorité compétente doit intervenir dans le délai de quatre mois à compter de la réception de la demande de démission ".

3. Eu égard à la portée d'une démission et à l'exigence, posée par la loi du 13 juillet 1983, qu'elle soit régulièrement acceptée, il résulte des dispositions précitées du décret du 16 septembre 1985 que, si l'autorité investie du pouvoir de nomination dispose d'un délai de quatre mois pour notifier une décision expresse d'acceptation ou de refus, sans que puisse naître, à l'intérieur de ce délai, une décision implicite de rejet, elle se trouve dessaisie de l'offre de démission à l'expiration de ce délai, dont le respect constitue une garantie pour le fonctionnaire, et ne peut alors se prononcer légalement que si elle est à nouveau saisie dans les conditions prévues par l'article 58 du décret précité.

4. Il résulte de l'instruction que, du 11 mars 2015 au 20 septembre 2016, M. C... a été placé en congé de maladie ordinaire et que c'est au cours de ses congés qu'il a présenté une demande de démission à effet du 26 avril 2016 par lettre en date du 22 janvier 2016, dont il ne présente au demeurant pas une version signée, ni un accusé de réception, puis le 1er juin 2016 à effet du 26 juin suivant. Dans ces conditions, l'administration était fondée à estimer que le gardien de la paix ne se trouvait pas dans un état qui lui permettait d'apprécier la portée de sa décision. Si, le 20 septembre 2016, le docteur A..., médecin du service de médecine statutaire et de contrôle de la police nationale a jugé l'agent apte à exercer ses fonctions et à présenter valablement sa démission, M. C... n'a ni repris son service, ni surtout présenté une nouvelle demande de démission dans les conditions mentionnées à l'article 58 du décret du 16 septembre 1985 visé ci-dessus, comme l'y invitait l'administration, notamment dans sa lettre du 9 décembre 2016, puis dans un courriel du 15 février 2017. Ainsi, faute de présenter une nouvelle demande de démission, le requérant n'a pas fait courir le délai de quatre mois au cours duquel l'autorité compétente doit statuer, sous peine d'être dessaisie au profit du supérieur hiérarchique et d'exposer son refus de statuer à l'annulation du juge de l'excès de pouvoir. Par suite, et sans qu'importent les circonstances que, par l'arrêté du 29 octobre 2018, le ministre de l'intérieur a radié le demandeur à compter du 18 novembre 2018 en se fondant sur sa demande en date du 22 janvier 2016 et que l'administration lui a précédemment réclamé son matériel professionnel, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées au point 2 du présent arrêt, en refusant de statuer dans un délai de quatre mois sur la demande présentée le 21 janvier 2016. De même, M. C... ne saurait soutenir que l'administration, par son comportement, a accepté sa démission, tout en refusant de constater cette démission par une décision formalisée, alors qu'il ne s'est plus présenté à son service après la fin de son congé de maladie, le 20 septembre 2016, et que l'administration l'a invité à plusieurs reprises à régulariser sa situation comme mentionné précédemment. Par suite, en l'absence d'illégalité fautive, la responsabilité de l'administration n'est pas engagée.

Sur les préjudices :

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en l'absence de responsabilité de l'administration pour illégalité fautive, M. C... n'est pas fondé à solliciter la réparation de préjudices matériel et moral.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices résultant du refus de l'administration d'accepter sa démission présentée le 22 janvier 2016. Par voie de conséquences, doivent également être rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice et de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Soyez, président-assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 septembre 2021.

Le rapporteur,

J.-E. SOYEZ Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 20PA01670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01670
Date de la décision : 24/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-08 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Démission.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : MENDIBOURE-CAZALET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-09-24;20pa01670 ?
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