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13/10/2021 | FRANCE | N°20PA00836

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 13 octobre 2021, 20PA00836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge des impositions auxquelles ils ont été assujettis en droits et pénalités au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1900347 du 12 décembre 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 mars et 15 juillet 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Nadine Pidjot

-Allard, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Ca...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge des impositions auxquelles ils ont été assujettis en droits et pénalités au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1900347 du 12 décembre 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 mars et 15 juillet 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Nadine Pidjot-Allard, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du

12 décembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge et subsidiairement la réduction des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 300 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont dénaturé les faits en estimant que l'intégralité des factures d'achat n'avait pas été produite ;

- les premiers juges ont estimé à tort que les chiffres d'affaires et les marges retenues par l'administration n'étaient pas contestées ;

- ils ont à tort rejeté les attestations des clients et estimé que la reconstitution par les crédits bancaires était régulière et que le contrôle des comptes bancaires mixtes n'était pas constitutif d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ;

- la méthode de reconstitution est viciée ;

- la vérificatrice a cru reconstituer les résultats d'une société ;

- la reconstitution par les crédits bancaires sans tenir compte des remboursements aux clients aboutit à des résultats irréalistes ;

- les attestations des clients avaient un caractère probant ;

- l'administration a pu reconstituer sur le fondement de l'article 18-1 du code des impôts le montant total des achats revendus à partir des factures produites et ne pouvait en conséquence prendre en compte, sur le fondement du 2 de l'article 18 du même code, les crédits bancaires figurant sur un compte bancaire mixte sans établir leur caractère commercial ;

- pour obtenir une évaluation à la hausse des ventes de plats à emporter, lesquelles avaient été évaluées selon la première méthode à partir des éléments recueillis sur place, la vérificatrice a décidé de façon très arbitraire d'appliquer le ratio obtenu (ventes marchandises/ ventes de plats) aux montants des crédits bancaires redressés en totalité ;

- la mise en œuvre de procédures d'office ne permet pas au service de taxer des sommes sans rapport avec la réalité économique ;

- le contrôle des comptes bancaires mixtes et la taxation qui s'en est ensuivie des sommes inexpliquées dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux était constitutif d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble irrégulière, faute d'avis de vérification séparé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2020, le gouvernement de la

Nouvelle-Calédonie, représenté par le cabinet Briard, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme B... A... la somme de 5 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me Masquard, représentant le gouvernement de la

Nouvelle-Calédonie.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerce en qualité d'exploitant individuel sous l'enseigne " Le Barachois " une activité d'alimentation générale, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période qui a couru du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016. M. et Mme B... relèvent appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande en décharge des cotisations mises à leur charge à l'issue de ce contrôle au titre de l'impôt sur les revenus des années 2015 et 2016.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de l'instruction que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de statuer sur tous les arguments soulevés par les requérants à l'appui de leurs moyens, ont répondu aux moyens soulevés devant eux. Contrairement à ce qui est soutenu, ils n'ont nullement dénaturé l'argumentation qui leur était soumise, dans la mesure où ils ont constaté que la reconstitution ayant abouti aux chiffres d'affaires reconstitués était effectivement contestée et où ils ont répondu à la contestation développée à cet égard. Les erreurs de fait et de droit qu'ils ont pu commettre sont sans influence sur la régularité du jugement. Le jugement ne saurait par suite être regardé comme étant entaché d'irrégularité.

Sur la procédure d'imposition :

3. Il résulte de l'instruction que l'avis de vérification du 20 décembre 2017 indiquait que les opérations de vérification devaient porter sur l'activité professionnelle de M. B... sous l'enseigne " Le Barachois " et que la vérificatrice a effectué des contrôles visant les déclarations et opérations de l'entreprise individuelle de M. B.... La circonstance qu'au cours de la vérification de comptabilité, le vérificateur ait examiné un compte bancaire mixte de l'intéressé ne suffit pas à caractériser le début d'une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble, dès lors que seul le compte bancaire ouvert au nom de M. D... a été examiné et que les comptes personnels des époux B... n'ont pas donné lieu à un contrôle. Contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que les crédits bancaires figurant sur ce compte mixte aient été rattachés à l'activité professionnelle de M. B... ne saurait non plus être regardée comme caractéristique d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble. Au surplus, les impositions litigieuses résultant de la mise en œuvre de la procédure de l'évaluation d'office pour défaut de déclaration malgré l'envoi de mises en demeure, les moyens tirés de ce que la procédure de contrôle aurait été irrégulière sont tout état de cause inopérants.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Aux termes de l'article 978 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie : " Peuvent être évalués d'office, les bénéfices des contribuables qui perçoivent des revenus industriels, commerciaux ou artisanaux (...) lorsque ces contribuables sont imposés selon le régime du bénéfice réel, que la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal et qu'ils n'ont pas régularisé leur situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure. (...) ". Aux termes de l'article 1099 du code des impôts : " Lorsque l'imposition a été établie suivant la procédure de taxation d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition (...) " et, en vertu de l'article 1100 du même code : " En cas de procédure d'office, le contribuable doit démontrer le caractère exagéré de l'imposition. ". Les bénéfices de M. B... ayant été évalués d'office, les requérants ont la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'ils contestent.

5. Aux termes du I de l'article 18 du même code général des impôts de la

Nouvelle-Calédonie : " Le bénéfice net est déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises y compris notamment les cessions d'éléments quelconque de l'actif, soit en cours soit en fin d'exploitation. ". Aux termes du II de l'article 18 du même code : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ".

6. En vertu des dispositions de l'article 1101 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie un procès-verbal de constatation de défaut de présentation de comptabilité a été dressé le

25 janvier 2018. Le service a calculé la moyenne arithmétique des chiffres d'affaires reconstitués obtenus pour les années 2015 et 2016 par application de deux méthodes de reconstitution différentes pour arrêter le résultat fiscal imposable des années 2015 et 2016 et déterminer les impositions supplémentaires à la charge de M. et Mme B....

7. En premier lieu, et contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que l'administration fiscale ait calculé la moyenne arithmétique des chiffres d'affaires reconstitués obtenus pour les années 2015 et 2016 par application de deux méthodes de reconstitution différentes, la première sur la base des achats revendus déterminés à partir des factures d'achats produites par l'intéressé et des informations obtenues par le biais du droit de communication, la deuxième à partir des crédits bancaires constatés sur le compte bancaire mixte de l'entreprise, ne révèle par elle-même aucun vice de la reconstitution, le contribuable ne pouvant en conséquence se prévaloir des résultats de la première méthode pour remettre en cause la prise en compte par le service des résultats de la seconde. La combinaison de ces deux méthodes, qui ont toutes les deux pour objet d'identifier le montant des recettes réalisées par l'entreprise et de déterminer le résultat par différence entre le chiffre d'affaires reconstitué et le montant des achats estimés sont conformes aux dispositions du I de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie et ne sauraient en tout état de cause être regardées comme procédant d'une confusion entre les dispositions du I et du II de cet article. La circonstance qu'aient été retenus pour la détermination du résultat selon la deuxième méthode de reconstitution les achats justifiés et retenus pour le calcul de la première méthode, en l'absence de tout élément permettant d'établir que lesdits achats ont été sous-estimés par le service, n'est pas non plus de nature à faire regarder comme viciée la reconstitution litigieuse. Il en est de même de la circonstance que la répartition entre plats à consommer sur place et plats à emporter dans les encaissements ait été déterminée sur la base de la répartition constatée à l'issue de la première méthode.

8. En deuxième lieu, et contrairement à ce qui est également soutenu, en l'absence de comptabilité, le service a pu régulièrement prendre en compte, dans le cadre de la deuxième méthode de reconstitution, les crédits bancaires figurant sur le compte bancaire de l'entreprise sur lesquels étaient encaissées des recettes professionnelles, alors même que ce compte était un compte mixte, et que l'activité était exercée sous la forme d'une entreprise individuelle, point sur lequel le service ne s'est d'ailleurs pas mépris. M. et Mme B..., qui ont la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'ils contestent, ne sauraient en outre valablement soutenir, en se bornant à produire des attestations manuscrites émanant de clients, qu'un certain nombre d'achats auraient été payés par des remises de chèques en contrepartie d'une restitution de sommes en espèces, et que le chiffre d'affaires calculé sur la base des crédits bancaires encaissés est en conséquence exagéré. La circonstance que l'administration aurait pris en compte les déclarations de certains clients est à cet égard sans incidence.

9. Enfin, en se bornant à faire valoir que les résultats obtenus sont irréalistes et que la mise en œuvre de procédures d'office ne permet pas au service de taxer des sommes sans rapport avec la réalité économique, M. et Mme B... n'apportent pas la preuve de l'exagération des impositions qu'ils contestent.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sur le fondement desdites dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Platillero, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2021.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président-assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative,

F. PLATILLERO

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 20PA00836


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00836
Date de la décision : 13/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SELARL NADINE PIDJOT-ALLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-13;20pa00836 ?
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