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25/10/2021 | FRANCE | N°20PA01922

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 25 octobre 2021, 20PA01922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (Sas) A... Développement a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et de condamner l'Etat au paiement d'intérêts moratoires sur les sommes versées.

Par un jugement n° 1817795/1-1 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. >
Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 juillet 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (Sas) A... Développement a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et de condamner l'Etat au paiement d'intérêts moratoires sur les sommes versées.

Par un jugement n° 1817795/1-1 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 juillet 2020, le 16 avril et le 31 mai 2021, la société A... Développement, représentée par Me Gryner, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1817795/1-1 du 9 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, en ne mentionnant pas dans la proposition de rectification sa lettre du 5 septembre 2014 et la réponse reçue, le mouvement d'argent en provenance de la société Warner, la copie de l'avenant au contrat de cession d'actions de la société A... Investissements à cette société Warner ;

- elle a méconnu l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales et l'instruction fiscale BOI-CF-INF n° 3 article 280 du 12 septembre 2012, faute de visa de l'agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire ;

- l'avis de mise en recouvrement des impositions en litige méconnaît l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, faute de faire référence à la proposition de rectification du 3 décembre 2014, alors que la vérification de la comptabilité ne concernait que la société requérante en tant que membre du groupe fiscalement intégré ;

- l'administration qui n'a pas procédé à une vérification de la comptabilité d'autres sociétés membres du groupe fiscalement intégré, ne pouvait se contenter de faire référence à la lettre d'information datée du 24 novembre 2015 ;

- l'avis de mise en recouvrement ne fait état que de montant globaux ;

- les montants figurant sur cet avis ne correspondent pas à ceux mentionnés dans la lettre d'information en ce qui concerne les intérêts de retard et les majorations.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 mars 2021, le 11 mai 2021 et le 25 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Par une ordonnance du 8 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2021.

Un mémoire a été enregistré le 2 juillet 2021, présenté pour la Sas A... Développement, par Me Gryner.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société A... Développement qui exerce des activités de holding financière et de prestations de services, est également la société mère d'un groupe fiscalement intégré au sens des dispositions de l'article 223-1 du code général des impôts. A l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en tant que société membre de ce groupe, l'administration lui a notifié, par une proposition de rectification en date du 3 décembre 2014 et, selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales au titre des exercices clos en 2011 et 2012. Sa réclamation ayant fait l'objet d'une décision expresse de rejet le 20 septembre 2018, elle a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des suppléments d'impositions mis en recouvrement à la suite de cette opération de contrôle. Elle relève appel du jugement n° 1817795/1-1 du 9 juin 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition, afin de permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

3. Il résulte de l'instruction que, lors de la vérification de comptabilité de la société A... Développement, l'administration a contesté l'inscription au compte courant d'associé de M. A... d'une somme de 1 724 800 euros, résultant d'une cession, en janvier 2011, d'actions de la société A... Investissements à la société Warner Music France. Estimant, après avoir exercé son droit de communication auprès de cette dernière société, que le bénéficiaire de la cession était la société requérante, et non son associé, M. A..., elle a rejeté comme un passif injustifié cette inscription, et rehaussé en conséquence les résultats de la société A... Développement. Si cette société relève que la proposition de rectification du 3 décembre 2014 ne mentionne pas la lettre adressée le 5 septembre 2014 à la société Warner Music France en vue d'obtenir copie du chèque et du virement afférent à la cession de la société A... Investissements, l'administration fait valoir que la société Warner Music France n'a pas transmis ces pièces et s'est contentée, par un courriel du 22 septembre 2014, de confirmer avoir versé un complément de prix à la société A... Développement par chèque au mois de janvier 2011. Elle fait valoir que ce n'est que, dans l'exercice d'un second droit de communication exercé le 7 octobre 2014 lors de son passage dans les locaux de la société Warner Music France, et mentionné dans la proposition, qu'elle a obtenu la production de documents justifiant le règlement à la contribuable vérifiée des actions en cause. Elle établit également avoir fourni, en annexe à la réponse aux observations en date du 18 mars 2015, copie de l'avenant au contrat de cession d'actions de la société A... Investissements, seul document que cette société sollicitait dans ses observations, à l'exclusion du chèque de règlement lui-même dont, au demeurant, plus loin dans ses observations, elle confirmait connaître l'existence. Il est constant que ces informations obtenues au mois d'octobre 2014 qui étaient les seules permettant d'identifier précisément la bénéficiaire réelle de la cession en cause, ont été transmises à sa demande à la société A... Développement et lui permettaient d'engager utilement un débat sur les motifs du rehaussement envisagé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit de communication prévu à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

4. En deuxième lieu, en vertu des dispositions des articles L. 80 E et R. 80 E du livre des procédures fiscales, seul un agent de catégorie A ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire a compétence pour appliquer une pénalité prévue à l'article 1729 du code général des impôts. De même, un nouveau visa d'un agent ayant cette qualité est nécessaire sur un nouveau document d'imposition, en cas de modification de la motivation, de la base légale, de la qualification ou des motifs de cette pénalité.

5. En l'absence de différence entre la lettre du 24 novembre 2015 adressée à la société A... Développement et la proposition de rectification du 3 décembre 2014, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 80 E et R. 80 E du livre des procédures fiscales, ne peut qu'être écarté.

6. La société A... Développement ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la méconnaissance des dispositions de l'article 280 de l'instruction BOI-CF-INF du 12 septembre 2012, qui n'a pas trait à l'interprétation de la loi fiscale.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " A l'issue (...) d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...), le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai. / Pour une société membre d'un groupe mentionné à l'article 223 A du code général des impôts, l'information prévue au premier alinéa porte, en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, (...) et les pénalités correspondantes, sur les montants dont elle serait redevable en l'absence d'appartenance à un groupe (...) ". Et aux termes de l'article R. 256-1 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. (...) Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. / Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts (...) la société mère d'un groupe ou l'établissement public industriel et commercial qui s'est constitué seul redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats d'un groupe est amené à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'un ou de plusieurs membres du groupe, l'administration adresse à cette société mère ou à cet établissement public, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle ou il est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document (...) ".

8. D'une part, et en application de dispositions combinées du code général des impôts, l'avis de mise en recouvrement émis le 29 janvier 2016 des impositions supplémentaires assignées à la société A... Développement, en tant que société mère d'un groupe fiscalement intégré, se réfère à la lettre d'information du 24 novembre 2015, et les montants des droits et des pénalités qu'il indique reprennent les sommes mentionnées dans cette lettre d'information, laquelle, au surplus, se réfère à la proposition de rectification du 3 décembre 2014 notifiée à la société requérante, en tant que société membre de ce groupe. D'autre part, l'absence de ventilation, dans cet avis, des pénalités pour manquement délibéré et intérêt de retard constitue une simple erreur matérielle qui n'a pas eu pour effet de priver la requérante de la possibilité de contester, le cas échéant, utilement ces pénalités et intérêts, dès lors qu'elle avait par ailleurs reçu, en tant que membre du groupe fiscalement intégré, les informations nécessaires sur ces majorations. Le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement doit, par suite, être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société A... Développement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Doivent, par voie de conséquence, être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que, en tout état de cause, celles tendant au versement d'intérêts moratoires.

D E C I D E :

Article 1er: La requête de la société A... Développement est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société A... Développement et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Soyez, président,

- Mme Jurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 octobre 2021.

Le rapporteur,

J. E. SOYEZ Le président

C. JARDIN

Le greffier,

C BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA01922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01922
Date de la décision : 25/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Rectification (ou redressement).


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : GRYNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-25;20pa01922 ?
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