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09/11/2021 | FRANCE | N°19PA03002

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 09 novembre 2021, 19PA03002


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... et M. B... ont saisi le Tribunal administratif de Paris de deux demandes tendant à ce qu'une expertise soit diligentée afin d'évaluer leurs préjudices résultant de la déscolarisation de leur fille de septembre 2011 à mai 2012 et à la condamnation de l'Etat à verser respectivement la somme globale de 28 631,87 euros à Mme C... et la somme globale de 40 539,89 euros à M. B..., outre des conclusions au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 1706383, 1719889/1-3 du 17 avril 2019, le Tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... et M. B... ont saisi le Tribunal administratif de Paris de deux demandes tendant à ce qu'une expertise soit diligentée afin d'évaluer leurs préjudices résultant de la déscolarisation de leur fille de septembre 2011 à mai 2012 et à la condamnation de l'Etat à verser respectivement la somme globale de 28 631,87 euros à Mme C... et la somme globale de 40 539,89 euros à M. B..., outre des conclusions au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1706383, 1719889/1-3 du 17 avril 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 septembre 2019, Mme A... C..., représentée par Me Andrieux, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 avril 2019 du Tribunal administratif de Paris;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 28 631,87 euros, somme portant intérêts capitalisés;

3°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, d'une part, faute de comporter l'analyse des conclusions et moyens, d'autre part, car le tribunal n'a pas donné suite à sa demande de changement d'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, enfin, dès lors que les premiers juges ont procédé à une jonction des affaires sans lui notifier les mémoires reçus dans l'instance de M. B...;

- le jugement attaqué est mal fondé car l'illégalité de la decision implicite de rejet de leur demande du 26 août 2011 est bien à l'origine des prejudices matériels et moraux afférents à la déscolarisation de sa fille sur la période septembre 2011-avril 2012, au minimum de septembre 2011 à janvier 2012;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à solliciter un partage de responsabilité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2021, le recteur de l'académie de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête est irrecevable, pour tardiveté, s'en rapportant, pour le fond, à son mémoire de première instance.

Par une ordonnance du 29 avril 2021, la clôture de l'instruction a été reportée du

30 avril 2021 au 17 mai 2021 à 12 heures.

Un mémoire a été déposé pour Mme C... le 23 septembre 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Par une décision du 18 juin 2019, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique,

- et les observations de Mme C....

Une note en délibéré, présentée par Mme C..., a été enregistrée le 2 novembre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. L'enfant Angélina, fille de Mme C... et de M. B..., scolarisée en moyenne section de maternelle au titre de l'année scolaire 2010-2011, a été admise en cours préparatoire par décision du 24 juin 2011 de la commission départementale d'appel. En conséquence, le 30 juin 2011, la directrice de l'école maternelle des Trois Bornes, où l'enfant était scolarisée, a établi un certificat de radiation de cette école à l'issue de l'année scolaire

2011-2012. Par courrier du 30 juin 2011, Mme C... et M. B... ont demandé au maire du XIe arrondissement de Paris de procéder à l'inscription d'Angélina au sein de l'école élémentaire des Trois Bornes pour l'année scolaire 2012-2013, par dérogation aux secteurs définis par le conseil de Paris. Par décision du 12 juillet 2011, cette autorité a refusé de faire droit à leur demande, au motif que l'inscription de l'enfant Angelina aurait été du ressort du maire du 20ème arrondissement, eu égard à l'adresse mentionnée par la décision de la commission départementale d'appel précitée du 24 juin 2011. Par courrier du 26 août 2011, les requérants ont formé un recours contre cette décision, faisant valoir qu'ils étaient en réalité domiciliés dans le 11ème arrondissement, au 83 de la rue Jean-Pierre Timbaud. Faute de réponse dans un délai de deux mois, une décision implicite de rejet de ce recours est née deux mois après sa réception par l'administration. Enfin, par courrier du 19 décembre 2011, les requérants ont réitéré leur demande, faisant cette fois valoir une élection de domicile au 5 de la cité d'Angoulême, adresse située dans le secteur de l'école élémentaire des Trois Bornes. Ils ont toutefois, le 12 janvier 2012, été invités par le directeur général des services de la mairie du 11ème arrondissement, suivant en cela la recommandation émise le 15 décembre 2011 par la médiatrice de la Ville de Paris au vu des éléments relatifs à leur domiciliation, à procéder à l'inscription de leur fille à l'école élémentaire du secteur dont dépend leur domicile au

83 de la rue Jean-Pierre Timbaud. Par un jugement n°1205622 du 26 novembre 2013 devenu définitif, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite par laquelle le maire du XIe arrondissement de Paris a rejeté le recours gracieux formé le 26 août 2011 par les requérants contre la décision du 12 juillet 2011. Mme C... et M. B... ont saisi le Tribunal administratif de Paris de deux demandes tendant à ce qu'une expertise soit diligentée afin d'évaluer leurs préjudices et à la condamnation de l'Etat à verser respectivement la somme globale de 28 631,87 euros à Mme C... et la somme globale de 40 539,89 euros à

M. B..., outre des conclusions au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 17 avril 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Mme C... relève appel de ce jugement.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le recteur de l'académie de Paris :

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le jugement attaqué énonce de manière complète les conclusions et moyens des requêtes et des mémoires. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, alors que l'avocat de Mme C... désigné au titre de l'aide juridictionnelle avait bien déposé une requête, le tribunal n'était pas tenu de surseoir à statuer du fait de la demande de la requérante tendant à la désignation d'un nouvel avocat au titre de l'aide juridictionnelle. Ce moyen doit donc être écarté.

4. En troisième lieu, même si le tribunal a procédé à la jonction des deux demandes de Mme C... et de M. B..., il n'était pas tenu de communiquer à cette dernière les mémoires produits par l'administration dans la seule instance présentée par M. B.... Enfin, la circonstance que le ministère de l'éducation nationale n'avait pas été appelée en la cause n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué.

5. Il résulte de tout ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué doivent être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. Quelle qu'en soit la nature, une illégalité est fautive et, comme telle, susceptible d'engager la responsabilité de l'autorité administrative décisionnaire dès lors qu'elle est à l'origine des préjudices subis. L'intervention d'une décision illégale constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité sous réserve pour le requérant d'établir l'existence des préjudices invoqués et d'un lien de causalité entre cette décision et les préjudices.

7. En l'espèce, les requérants ont demandé au tribunal l'indemnisation d'un préjudice matériel et moral lié à la privation de revenus professionnels qu'ils auraient pu percevoir pendant la période où ils ont été contraints de s'abstenir de rechercher un emploi pour demeurer auprès de leur enfant durant la période de déscolarisation de celle-ci, à la non perception de l'allocation de rentrée scolaire, aux achats de matériels scolaires, à l'équivalent du salaire d'un enseignant par parent pour la durée pendant laquelle ils ont dû assurer l'instruction de leur enfant et aux souffrances psychiques endurées ainsi qu'à l'atteinte à leur réputation.

8. Or, si le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite, entachée d'inexactitude matérielle des faits, rejetant le recours gracieux formé le 26 août 2011 par les requérants, cette décision n'avait pour conséquence, de même que la décision initiale du

12 juillet 2011, que d'inviter, certes à tort, les requérants à inscrire leur fille dans le 20ème arrondissement de Paris. Il ne résulte pas de l'instruction que les requérants auraient été dissuadés d'effectuer une telle démarche ni que celle-ci aurait nécessairement été vaine.

Au surplus, l'administration a invité les parents de l'enfant Angélina, le 12 janvier 2012, à procéder à l'enregistrement de sa demande d'inscription à l'école du secteur de leur domicile sis

83 rue Jean-Pierre Timbaud Paris 11ème, démarche que la famille a refusé d'effectuer au profit du maintien de sa demande d'inscription dérogatoire initiale à l'école des Trois Bornes.

Dès lors, comme les premiers juges l'ont estimé à juste titre, le lien de causalité direct entre la faute de l'administration et les préjudices invoqués, liés au défaut de scolarisation de l'enfant Angelina pour la période en litige, n'est pas établi. Les conclusions indemnitaires de

Mme C... doivent donc être rejetées.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à Mme C..., à la ville de Paris, au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et au recteur de l'académie de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Célerier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 novembre 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA03002 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03002
Date de la décision : 09/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : ANDRIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-09;19pa03002 ?
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