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27/01/2022 | FRANCE | N°20PA03806

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 27 janvier 2022, 20PA03806


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1910176 du 12 octobre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 décembre 2020 et le 17 juin 2021, Mme

A..., représentée par Me Rieutord, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1910176 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1910176 du 12 octobre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 décembre 2020 et le 17 juin 2021, Mme A..., représentée par Me Rieutord, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1910176 du 12 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le service a méconnu le délai de reprise ;

- le service n'était pas fondé à imposer entre ses mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les sommes inscrites au crédit de son compte courant d'associée, dès lors que cette écriture comptable a été passée à son insu et qu'elle n'a pu disposer de cette somme du fait de la situation financière de la société ;

- les impositions litigieuses la placent dans une situation de grande précarité ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 ;

- et le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aggiouri ;

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les sociétés Nautilus, SD 31 et Aneth, dont Mme A... était associée, ont fait l'objet de vérifications de comptabilité portant notamment sur l'année 2012. Parallèlement, Mme A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, à l'issue duquel l'administration fiscale a estimé que les sommes de 250 000 euros et 130 000 euros figurant au crédit du compte courant d'associé, ouvert, en son nom, dans les écritures de la société Aneth constituaient des revenus distribués entre ses mains. Elle a, en conséquence, assujetti Mme A..., selon la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due [...] ". Aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun [...] ". Les dispositions des articles L. 169 et L. 189 du même livre sont rendues applicables en matière de contributions sociales par l'effet des dispositions combinées, d'une part, des articles 1600 - 0 C, 1600 - 0 F bis et 1600 - 0 - G du code général des impôts et de la loi du 30 juin 2004, d'autre part, de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale.

3. Eu égard à l'objet des dispositions des articles L. 169 et L. 189 du livre des procédures fiscales, relatives à la détermination du délai dont dispose l'administration pour exercer son droit de reprise, la date d'interruption de la prescription est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification a été présenté à l'adresse du contribuable. Il en va de même dans le cas où le pli n'a pu lui être remis lors de sa première présentation et que, avisé de sa mise en instance, il l'a retiré ultérieurement ou a négligé de le retirer.

4. Il résulte de l'instruction que, à l'issue de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont Mme A... a fait l'objet, le service a émis une proposition de rectification, datée du 18 décembre 2015, afin de lui notifier les rehaussements envisagés en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012. Si Mme A... soutient qu'elle n'a pas reçu cette proposition de rectification avant l'expiration, le 31 décembre 2015, du délai de reprise prévu par les dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale produit un accusé de réception du pli contenant cette proposition comportant les mentions " présenté/avisé le 19/12/15 " et " pli avisé et non réclamé ". Ainsi l'administration fiscale établit que Mme A... a bien été avisée, avant le 31 décembre 2015, de la mise en instance du pli qui contenait la proposition de rectification du 18 décembre 2015 relative aux impositions supplémentaires dues au titre de l'année 2012. Dès lors, et contrairement à ce que soutient Mme A..., la prescription du droit de reprise de l'administration a été valablement interrompue. En conséquence, le moyen tiré de ce que les impositions en litige auraient été établies en méconnaissance de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales doit - à supposer que la requérante ait entendu le maintenir - être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : [...] / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices [...] ". Les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.

6. Le service a relevé que deux chèques, d'un montant de 250 000 euros et de 130 000 euros, avaient été émis, respectivement le 29 mars 2012 et le 29 avril 2012, par la SCI SD 31 au profit de la société Aneth, et que le 30 mars 2012 et le 2 mai 2012, les mêmes sommes avaient été comptabilisés au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de Mme A... dans les livres de la société Aneth. Ces sommes ont été regardées comme des revenus distribués entre les mains de Mme A..., sur le fondement du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts.

7. D'une part, si Mme A... soutient que la société Aneth a enregistré un déficit de 89 128 euros au 31 décembre 2012, que sa dette s'élevait, à cette date, à 708 064 euros, et qu'elle a été placée en cessation de paiement à compter du 28 novembre 2012, puis en liquidation judiciaire le 27 février 2014, ces seules circonstances ne sauraient établir que la requérante n'aurait pu disposer des sommes de 250 000 euros et de 130 000 euros en litige, alors que, d'une part, ainsi qu'il a été dit précédemment, ces montants avaient été, avant d'être crédités au compte courant d'associé de Mme A..., versés à cette société par la société SD 31, par deux chèques émis respectivement le 29 mars 2012 et le 29 avril 2012, d'autre part que la société a présenté un résultat d'exploitation positif au titre de l'exercice clos en 2012, le déficit provenant d'opérations de cession de valeurs mobilières de placement, dont il n'est pas établi que le résultat, s'il a été inscrit en charges nettes, aurait donné lieu à un décaissement de trésorerie.

8. D'autre part, en se bornant à se prévaloir d'une attestation sommaire datée du 14 octobre 2020 du gérant de la société, qui est également le père de ses enfants, ainsi que des circonstances que ce dernier a été regardé par l'administration comme le maître de l'affaire dans le cadre de la vérification de comptabilité de cette société et que l'inscription des sommes de 250 000 euros et de 130 000 euros n'aurait pas fait l'objet d'un vote par l'assemblée générale des associés de la société Aneth, Mme A... n'établit pas que les écritures comptables en cause auraient été passées à son insu ni qu'elle n'aurait pu avoir accès à la comptabilité de la société Aneth, dont elle était associée.

9. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que Mme A... avait disposé de la somme totale de 380 000 euros et qu'elle a, par conséquent, imposé cette somme comme un revenu distribué entre les mains de l'intéressée au titre de l'année 2012, sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

10. Enfin, si Mme A... se prévaut de sa situation financière délicate, ce moyen est inopérant au soutien des conclusions aux fins de décharge des impositions en litige.

Sur les pénalités :

11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] ".

12. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale se prévaut de l'importance de la minoration de revenus et de la circonstance que Mme A... ne pouvait ignorer avoir disposé au cours de l'année 2012 de la somme de 380 000 euros prélevée dans la trésorerie de la SCI SD31, dont elle est la gérante. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a fait application de la majoration prévue par les dispositions du a de l'article 1729 du code général des impôts lorsque le manquement délibéré est établi, et a donc assorti les impositions en litige de la majoration au taux de 40 % prévue par ces dispositions.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, où siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre ;

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure ;

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 janvier 2022.

Le rapporteur,

K. AGGIOURILa présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03806
Date de la décision : 27/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : RIEUTORD

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-01-27;20pa03806 ?
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