La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/03/2022 | FRANCE | N°21PA05446

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 mars 2022, 21PA05446


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604815/1-3 du 19 septembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 18PA03636 du 7 novembre 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce

jugement.

Par une décision n° 437414 du 30 septembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé l'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604815/1-3 du 19 septembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 18PA03636 du 7 novembre 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce jugement.

Par une décision n° 437414 du 30 septembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 7 novembre 2019 et renvoyé l'affaire devant ladite Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 novembre 2018 et 1er décembre 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Frédéric Naïm, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1604815/1-3 du Tribunal administratif de Paris du 19 septembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration n'a pas communiqué l'intégralité des documents utilisés pour fonder les redressements et dont la communication avait été demandée ; elle n'a notamment pas communiqué l'intégralité des documents obtenus auprès de la société Electricité de France (EDF), seul un tableau récapitulatif établi par l'administration elle-même ayant été transmis ;

- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et entaché la procédure d'irrégularité en ce qu'elle a inversé la charge de la preuve, commis des erreurs de fait quant à l'évaluation des matériels livrés, n'a pas démontré à quelle société en participation les matériels ont été effectivement livrés et n'a pas tenu compte de ce que les panneaux photovoltaïques constituent des immobilisations capables de fonctionner de manière autonome ;

- l'administration fiscale a manqué à son obligation de loyauté, dès lors qu'elle a simulé un contrôle sur pièces pour fonder les rehaussements et n'a pas fait état de toutes les investigations qu'elle a menées, lesquelles ne peuvent se limiter aux seules informations obtenues auprès d'EDF ;

- l'administration s'est abstenue de les informer d'éléments obtenus auprès de tiers, notamment la société DTD en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et a manqué au principe de loyauté des débats ; le service ne les a pas informé de ce que leur redressement a pour origine la vérification de comptabilité de la société DTD qui fait elle-même suite à un droit d'enquête ; le service s'est abstenu de leur communiquer la brochure de présentation de la société DTD qui pourtant fonde les redressements ; certaines informations obtenues auprès de la société EDF ont été occultées, le service ayant procédé à un retraitement de ces informations sous forme d'un tableau récapitulatif ;

- le rapport de l'expert judiciaire dont l'administration a obtenu copie dans le cadre de l'exercice de son droit de communication est entaché d'irrégularité tant sur la forme que sur le fond ;

- il résulte tant des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts que de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 et des instructions administratives référencées 7 S-5-11 du 9 décembre 2011, BOI-IS-GEO-10-30-20-20 du 12 septembre 2012 et du rescrit 2012/36 publié le 29 mai 2012 que la réduction d'impôt est acquise au titre de l'année de souscription au capital social d'une société qui a pour objet un projet d'investissement dans le domaine des énergies renouvelables et non à compter de la date à laquelle la centrale est raccordée au réseau public d'électricité ou de celle à laquelle une demande de raccordement a été faite ou un agrément du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (CONSUEL) obtenu ;

- un panneau photovoltaïque est productif d'énergie dès qu'il est livré et installé dans une zone exposée à la lumière solaire, ainsi que l'atteste un rapport d'un expert judiciaire ;

- les sociétés en participation ne sont tenues qu'à une obligation de location du matériel ; dès lors que le bien était loué au locataire, ces sociétés n'avaient plus d'obligation, notamment de résultat, et ne peuvent en conséquence être tenues par les agissements du locataire, en particulier par l'absence de raccordement au réseau par ce dernier ;

- l'instruction administrative référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, en ce qu'elle subordonne le bénéfice de la réduction d'impôt à la capacité de l'équipement à fonctionner de manière autonome, pose une condition supplémentaire non prévue par la loi fiscale ;

- il résulte des réponses ministérielles des 3 mai 2005 et 11 avril 2006, de l'instruction administrative référencée BOI-BIC-RICI-20-30-10-20 n° 140 du 12 septembre 2012, du principe de confiance légitime et de la loi du 12 avril 2000, que la réduction d'impôt ne peut pas être remise en cause par l'administration lorsqu'un contribuable se prévaut d'une attestation fiscale sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manœuvres frauduleuses est démontrée ;

- l'administration avait remis en cause l'intégralité de la réduction d'impôt résultant de ces deux investissements alors que le redressement notifié ne portait que sur l'investissement réalisé au travers de la société DTD.

Par des mémoires en défense enregistrés les 31 janvier 2019 et 15 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 19 octobre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 20 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont porté, dans leur déclaration de revenus souscrite au titre de l'année 2010, le montant de la réduction d'impôt dont ils pensaient pouvoir bénéficier en qualité d'associés de sociétés en participation (SEP), dont la gestion était assurée respectivement par la société France Energie Finances et par la société à responsabilité limitée Dom Tom Défiscalisation (DTD), sur le fondement du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, à raison d'investissements productifs réalisés outre-mer qui consistaient en l'acquisition de centrales photovoltaïques devant ensuite être exploitées par des sociétés locales. A l'issue du contrôle sur pièces de la déclaration de M. et Mme A..., l'administration fiscale a remis en cause la réduction d'impôt dont ils avaient ainsi entendu bénéficier au motif, notamment, que les investissements ne pouvaient être regardés comme ayant été réalisés au sens du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts. M. et Mme A... font appel du jugement du

19 septembre 2018, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 en conséquence de la reprise de cette réduction d'impôt et des pénalités correspondantes.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 10 novembre 2021 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France a prononcé le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 9 172 euros en droits et 1 395 euros en pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge des requérants au titre de l'année 2010 et procédant de la remise en cause de la réduction d'impôt résultant de l'investissement réalisé au travers de la société France Energie Finances. Les conclusions de la requête relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, pour soutenir que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et entaché d'irrégularité la procédure ayant conduit à la remise en cause de la réduction d'impôt afférente à l'investissement réalisé par l'intermédiaire de la société DTD, les requérants soutiennent tout d'abord que l'administration aurait inversé la charge de la preuve, commis des erreurs de fait quant à l'évaluation des matériels livrés, n'aurait pas démontré à quelle société en participation les matériels ont été effectivement livrés et n'aurait pas tenu compte de ce que les panneaux photovoltaïques constituent des immobilisations capables de fonctionner de manière autonome. Toutefois, ces différentes branches de moyen se rattachent en réalité au bien-fondé des impositions et ne sont donc pas susceptibles d'exercer une influence sur la régularité de la procédure d'imposition.

4. M. et Mme A... soutiennent également que l'administration aurait manqué à son obligation de loyauté en simulant un contrôle sur pièces pour fonder les redressements sans évoquer, puis en niant les investigations menées par ailleurs, non seulement auprès de la société EDF mais également les vérifications de comptabilité des SEP et d'autres " opérations analogues ". Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que l'administration, qui a régulièrement mis en œuvre la procédure contradictoire de rectification dans le cadre d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal des requérants, aurait procédé ainsi qu'ils l'allèguent, ni que les renseignements obtenus dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société DTD auraient fondé les rectifications contestées. Par suite, et sans qu'il soit besoin de procéder à une mesure d'instruction, le moyen analysé ci-dessus ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation s'impose à l'administration pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

6. Il résulte de l'instruction que l'administration, qui n'était pas tenue d'indiquer les modalités d'exercice du droit de communication, notamment la date des demandes de communication, s'est fondée, pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition de rectification, premièrement sur des informations relatives à la date de dépôt de demandes de raccordement faites par l'installateur " Lynx Industries Caraïbes - Cazasun ", obtenues à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de la société EDF en date des 14 décembre 2010 et 17 mars 2011, deuxièmement sur des informations relatives aux importations de matériels et panneaux photovoltaïques effectuées par les sociétés DTD, Lynx Industries Caraïbes et Lynx Industries Finances, obtenues à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de l'administration des douanes en date du 25 mars 2011 et, troisièmement, sur des informations relatives au tonnage et à la valeur des matériels et panneaux photovoltaïques, importés par la société Lynx Industries Caraïbes, ainsi qu'à l'identité des fournisseurs, obtenues à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès des transitaires en douanes antillais Géodis Wilson et Pompière SA. L'ensemble de ces informations figure dans la proposition de rectification, laquelle comporte, avec une précision suffisante, l'identité des tiers les ayant communiqués à l'administration, ainsi au surplus que le détail de ces informations qui constitue les vingt pages d'annexes de cette proposition de rectification. Il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que soutiennent les requérants, que l'administration aurait fondé les rectifications litigieuses sur d'autres éléments obtenus à la suite, notamment, d'autres opérations de contrôle ou de recherche d'informations qui auraient concerné la SARL DTD. Par ailleurs, la circonstance, à la supposer avérée, que le tableau Excel émanant du droit de communication exercé auprès de la société EDF, tel qu'il a été fourni dès le stade de la proposition de rectification, ne présenterait qu'une partie des informations communiquées par cet opérateur, est également sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors que les informations ainsi communiquées étaient suffisantes pour justifier les rehaussements détaillés dans ladite proposition de rectification et ont été certifiées par un agent de la société EDF. Enfin, la circonstance qu'une erreur matérielle ait pu, le cas échéant, être commise par la société EDF sur les dates des différentes demandes de communication était sans incidence sur l'obligation d'information qui pèse sur l'administration. Dans ces conditions, M. et Mme A..., ainsi qu'il a été dit, disposaient dès réception de la proposition de rectification, des informations suffisantes pour présenter utilement des observations afin de contester l'imposition supplémentaire en litige, ce qui a d'ailleurs été fait. Ainsi, ayant été informés de l'origine et de la teneur de l'ensemble des documents fondant les redressements et en ayant obtenu copie avant la mise en recouvrement des impositions, ils ne peuvent dès lors utilement soutenir que d'autres droits de communication, dont ils n'auraient pas été informés, auraient été exercés par l'administration fiscale. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir de la violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ou d'une méconnaissance de la loyauté des débats.

7. S'il est également soutenu que le rapport d'expertise déposé par M. C... devant le juge judiciaire, et dont l'administration a obtenu copie dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, serait entaché d'irrégularité tant en la forme que sur le fond, cette circonstance qui, au demeurant, ne ressort d'aucune décision judiciaire, demeure, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure et le bien-fondé des impositions, dès lors notamment que l'administration soutient, sans être contredite, que les constatations opérées par l'expert judiciaire ne diffèrent pas des extraits du procès-verbal de synthèse établi par les services de police, également communiqué par l'autorité judiciaire.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

8. Les règles qui ont trait à la dévolution de la charge de la preuve relèvent du bien-fondé des impositions et non de la régularité de la procédure d'imposition, comme il est soutenu à tort. Il appartient, en outre, au juge de l'impôt, d'apprécier, au vu de l'instruction, si le contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 199 undecies B du code général des impôts.

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

9. Aux termes du premier alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. (...) ". Aux termes du vingtième alinéa du même article : " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts est la date de création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer et que, dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et dès lors, en retirer des revenus.

11. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées chez des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et, par suite, productives de revenus qu'à compter de cette date. Il suit de là que le raccordement au réseau EDF est nécessaire pour une exploitation effective de ces installations, dès lors qu'il n'est pas contesté que l'électricité produite n'avait pas vocation à être consommée et stockée par les sociétés exploitantes.

12. D'une part, il résulte de l'instruction que les panneaux et kits photovoltaïques en cause ne pouvaient pas être effectivement exploités sans être intégrés dans une installation et raccordés au réseau EDF. Par suite, en relevant l'absence d'attestation de conformité et de demande de raccordement au réseau électrique au 31 décembre de l'année d'imposition, l'administration fiscale n'ajoute pas aux conditions fixées par la loi fiscale, mais se borne à mettre en œuvre les conditions légales auxquelles les investissements réalisés par les sociétés en participation sont soumis pour pouvoir être regardés comme étant réalisés au sens des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts.

13. D'autre part, il résulte de l'instruction, notamment des renseignements obtenus auprès d'EDF, qu'aucune des centrales photovoltaïques au titre desquelles a été pratiquée la réduction d'impôt litigieuse n'a fait l'objet, au cours de l'année d'imposition, d'un raccordement au réseau électrique et qu'aucun certificat de conformité n'a été délivré par l'organisme agréé que constitue le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (CONSUEL). L'administration a ainsi pu, sans méconnaître les principes de loyauté, de respect du contradictoire et d'impartialité, légalement opposer aux contribuables ces informations obtenues régulièrement, ainsi qu'il a été dit, dans le cadre de son droit de communication. Elle apporte ainsi la preuve de l'absence de toute demande de raccordement formulée par les SEP dans lesquelles les contribuables ont des parts, contrairement à ce qui est soutenu. D'ailleurs, M. et Mme A... ne contestent pas utilement ce constat de l'administration en se bornant à faire valoir que les installations photovoltaïques seraient susceptibles de fonctionner de manière autonome ou que la société EDF ne disposerait pas d'un monopole en matière de rachat d'électricité produite par une centrale photovoltaïque. Dans ces conditions, les installations photovoltaïques en cause ne pouvant être effectivement exploitées au 31 décembre de l'année d'imposition, l'administration a pu, à bon droit, estimer pour ce motif que les investissements déclarés par les requérants ne pouvaient être regardés comme ayant été effectivement réalisés au cours de ces années, et, par suite, remettre en cause la réduction d'impôt correspondante.

14. Enfin, les contribuables ne sauraient, en tout état de cause, utilement invoquer les termes de la loi de finances pour 2011 n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, qui, en excluant les investissements photovoltaïques de la réduction d'impôts prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts, a réservé le cas des souscriptions au capital social de sociétés investies dans un projet en cours de réalisation, s'agissant de dispositions postérieures à l'année au titre de laquelle les impositions supplémentaires en litige se rattachent.

15. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

16. M. et Mme A... se prévalent, sur le fondement de ces dispositions, du paragraphe n° 148 de l'instruction référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, aux termes duquel : " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail. ". Ces dispositions sont susceptibles d'être invoquées par les contribuables pour faire échec à un redressement opéré par l'administration fiscale lorsque les conditions posées par l'instruction sont remplies, notamment celle qui est énoncée au paragraphe 22, qui définit les investissements ouvrant droit à réduction d'impôt dans les termes suivants : " Conformément aux dispositions du premier alinéa du I de l'article 199 undecies B et de l'article 95 K de l'annexe II, les investissements productifs dont l'acquisition, la création ou la prise en crédit-bail est susceptible d'ouvrir droit à réduction d'impôt doivent avoir la nature d'immobilisations neuves, corporelles et amortissables. La notion même d'investissement productif implique l'acquisition ou la création de moyens d'exploitation, permanents ou durables capables de fonctionner de manière autonome ".

17. Toutefois, ces énonciations ne donnent pas une interprétation différente du dispositif légal de celle mentionnée ci-dessus en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, subordonné, ainsi qu'il a été dit, à la condition tenant à l'exploitation effective de l'immobilisation. Elles ne sauraient, dès lors, être utilement invoquées sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. En outre, les requérants ne sauraient en tout état de cause se prévaloir, sur ce même fondement, d'autres instructions administratives postérieures à l'année d'imposition en cause.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande s'agissant des impositions restant en litige.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme A... à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance.

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme A... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France

Délibéré après l'audience du 9 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2022.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 21PA05446


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05446
Date de la décision : 23/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : CABINET F. NAIM

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-23;21pa05446 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award