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29/06/2022 | FRANCE | N°21PA03651

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 29 juin 2022, 21PA03651


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Agence Création de Votre Voyage (ACVV) a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Par un jugement n° 2006634/2-2 du 14 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a réduit la base de l'impôt sur les sociétés de la société Agence Création de Votre Voyage au titre de l'année 2017, l'a déchargée de la cotisation supplémentaire d'imp

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Agence Création de Votre Voyage (ACVV) a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Par un jugement n° 2006634/2-2 du 14 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a réduit la base de l'impôt sur les sociétés de la société Agence Création de Votre Voyage au titre de l'année 2017, l'a déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017, a mis à la charge de l'Etat le versement à la société de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et des mémoires enregistrés les 1er juillet et 23 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la Cour d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement du 14 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris, et de décider que la société Agence Création de Votre Voyage sera rétablie à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés dont la décharge a été prononcée par les premiers juges pour un montant de 152 906 euros.

Il soutient que :

- les procès-verbaux ne figurent pas sur un registre coté et paraphé ou sur des feuillets mobiles numérotés et paraphés page par page ;

- ils n'ont pas de date certaine ;

- ils ne répondent pas aux exigences de l'article R. 223-26 du code de commerce ;

- les sommes comptabilisées en 2018 et 2019 l'ont été postérieurement à l'envoi de la proposition de rectification.

Il se réfère pour le surplus à ses observations présentées en première instance.

Par des mémoires en défense enregistrés les 31 août et 4 octobre 2021, la société Agence Création de Votre Voyage, représentée par Me Nathalie Aflalo et Me Xavier Bouillot, conclut au rejet du recours du ministre, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Agence Création de Votre Voyage (ACVV), créée le 1er juillet 1993, exerce depuis le 1er janvier 2016 l'activité de location d'un fonds de commerce d'agence de voyage. À l'issue d'un contrôle sur pièces diligenté selon la procédure contradictoire qui a porté sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2017, l'administration a mis à sa charge, par une proposition de rectification du 17 juillet 2018, une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2017 assortie des intérêts de retard et mise en recouvrement par un avis du 15 novembre 2018. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement du 14 juin 2021 en tant que le Tribunal administratif de Paris a réduit la base de l'impôt sur les sociétés de la société ACVV au titre de l'année 2017, l'a déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés correspondante à laquelle elle a été assujettie au titre de ladite année, et a mis à la charge de l'Etat le versement à cette société de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. L'article 209 du code général des impôts dispose que : " Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice dans la limite d'un montant de 1 000 000 € majoré de 50 % du montant correspondant au bénéfice imposable dudit exercice excédant ce premier montant. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté dans les mêmes conditions sur les exercices suivants. Il en est de même de la fraction de déficit non admise en déduction en application de la première phrase du présent alinéa ".

3. Il résulte de l'instruction qu'aux termes de sa déclaration de résultats de l'exercice clos le 31 décembre 2017, déposée le 10 mai 2018, la société ACVV, dont le montant des déficits reportables des exercices précédents s'élevait à 2 910 032 euros, a imputé un déficit de 1 967 517 euros sur le bénéfice comptable déclaré du même montant et a ainsi déclaré un bénéfice fiscal nul. En application des dispositions précitées du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts, l'administration a ramené le montant du déficit imputable à la somme de 1 483 759 euros et rehaussé le bénéfice fiscal de la société ACVV.

4. La société ACVV a soutenu devant les premiers juges que les dispositions du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts ne sauraient lui être appliquées dès lors que le bénéfice comptable de l'exercice 2017 et, par suite, le montant des déficits reportables imputables pour conduire à un bénéfice fiscal nul était inférieur à 1 000 000 d'euros. Elle a fait valoir que le produit exceptionnel résultant de l'abandon de créance consenti par son dirigeant et intégré dans le bénéfice comptable de l'exercice 2017 ne s'élevait pas à 1 607 651 euros comme déclaré à l'origine mais à 562 678 euros, ainsi qu'il résulterait d'un procès-verbal du 30 décembre 2017 par lequel l'associé unique aurait décidé de l'abandon définitif en trois étapes, au titre des années 2017, 2018 et 2019, de la créance en compte courant d'associé inscrite à son nom, l'abandon s'élevant, au titre de l'année 2017, à un montant de 562 678 euros. Elle en déduisait que le montant du bénéfice comptable devait être ramené à un montant de 922 543 euros, emportant un bénéfice fiscal nul, la limitation des reports de déficits en vertu des dispositions précitées de l'article 209 du code général des impôts ne trouvant pas à s'appliquer.

5. L'article L. 223-31 du code de commerce dispose que : " L'associé unique ne peut déléguer ses pouvoirs. Ses décisions, prises au lieu et place de l'assemblée, sont répertoriées dans un registre ". L'article R. 223-26 du même code dispose que : " Chaque décision prise par l'associé unique en lieu et place de l'assemblée est consignée par lui sur le registre prévu au troisième alinéa de l'article L. 223-31. Le registre est tenu au siège social. Il est coté et paraphé, soit par un juge du tribunal de commerce, soit par un juge du tribunal judiciaire, soit par le maire de la commune du siège social ou un adjoint du maire, dans la forme ordinaire et sans frais. La certification des copies ou extraits du registre est faite conformément aux dispositions de l'article R. 221-4 ".

6. Il résulte de l'instruction que le procès-verbal du 30 décembre 2017 figure au sein du registre prévu au troisième alinéa de l'article L. 223-31 du code de commerce précité, précédé d'un procès-verbal en date du 5 juin 2017 et suivi par un procès-verbal en date du 29 juin 2018, soit antérieurement à la notification de la proposition de rectification intervenue le 17 juillet 2018. En effet, les documents produits au dossier montrent la première page du registre, paraphée et marquée de perforations indiquant l'enregistrement au tribunal de commerce et le numéro du registre. Ces perforations se retrouvent sur les copies des feuillets recto-verso comportant les trois procès-verbaux susmentionnés, chaque feuillet comportant un numéro, et les numéros des différents feuillets se suivant sans interruption. Le ministre ne saurait par suite valablement soutenir que les procès-verbaux ne figurant pas sur un registre coté et paraphé, ou sur des feuillets mobiles non seulement numérotés mais également paraphés page par page, ils n'auraient pas date certaine et ne répondraient pas aux exigences de l'article R. 223-26 du code de commerce. Par suite, et alors même que les sommes comptabilisées en 2018 et 2019 l'ont été postérieurement à l'envoi de la proposition de rectification, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la société ACVV était fondée à soutenir que le montant de son bénéfice comptable de l'exercice clos en 2017 devait prendre en compte, au titre de l'abandon de la créance en compte courant d'associé, le seul montant de 562 678 euros.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge litigieuse. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Agence création de votre voyage de la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Agence création de votre voyage la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société Agence création de votre voyage.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2022.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

J. CHAMPESME

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 21PA03651


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03651
Date de la décision : 29/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BOUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-29;21pa03651 ?
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