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01/07/2022 | FRANCE | N°20PA00272

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 01 juillet 2022, 20PA00272


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

E... un jugement n° 1822746 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. et Mme C....

Procédure devant la Cour :

E... une requête et un mémoire, enregistrés le 27 janvier 202

0 et le 10 novembre 2020, M. et Mme C..., représentés E... Me Guillot et Me Bourasset, demandent ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

E... un jugement n° 1822746 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. et Mme C....

Procédure devant la Cour :

E... une requête et un mémoire, enregistrés le 27 janvier 2020 et le 10 novembre 2020, M. et Mme C..., représentés E... Me Guillot et Me Bourasset, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1822746 du 4 décembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il mentionne que M. C... a bénéficié des avoirs logés dans les comptes bancaires associés au " profil client " Solaria Management Inc ;

- la proposition de rectification du 22 décembre 2016 n'est pas suffisamment motivée ;

- elle s'est fondée sur des documents obtenus frauduleusement ;

- elle a ce faisant méconnu le principe de légalité de la preuve énoncé E... l'article 9 du code de procédure civile ;

- le service a méconnu le principe de loyauté, dès lors qu'il détenait déjà, en 2010, les informations qu'il leur a ensuite opposées, qu'ils n'ont pu avoir accès au dossier au dossier pénal à la date à laquelle ils ont reçu le courrier portant demande d'éclaircissements et de justifications, et que le service n'a pas fait état de tous les éléments qu'il détenait dans sa demande d'éclaircissements et de justifications ;

- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- l'administration n'établit pas que M. C... aurait bénéficié des avoirs logés sur les comptes associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS ;

- l'administration s'est constituée une preuve à elle-même ;

- la méthode de reconstitution utilisée E... le service est arbitraire ;

- les montants calculés sont erronés ;

- les taux de change retenus E... le service sont erronés ;

- le service n'a pas tenu compte des avances apparaissant dans les procès-verbaux ;

- les majorations pour manœuvres frauduleuses ne sont pas justifiées ;

- les sanctions de même nature ne peuvent se cumuler au-delà de la peine encourue la plus élevée.

E... un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

E... une ordonnance du 21 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 juillet 2021, à 12 heures.

Un mémoire a été produit E... M. et Mme C... le 3 juin 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- et le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une demande d'entraide judiciaire présentée E... les autorités suisses, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice a fait procéder, le 20 janvier 2009, à une perquisition au domicile de M. A..., ancien informaticien de la filiale établie à Genève (Suisse) de la banque britannique HSBC Private Bank, soupçonné d'avoir dérobé des données de sa " base clients ". L'autorité judiciaire, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, a communiqué les données ainsi saisies à l'administration fiscale, le 9 juillet 2009, le 2 septembre 2009 et le 12 janvier 2010. L'administration fiscale a estimé qu'il existait une présomption que M. C... détienne des avoirs à l'étranger non déclarés logés sur des comptes bancaires de la banque HSBC établie à Genève. Sur avis conforme de la commission des infractions fiscales, elle a donc porté plainte contre l'intéressé auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Créteil, le 7 août 2012, estimant, notamment, qu'il s'était frauduleusement soustrait à l'établissement et au paiement d'une partie des impôts dus. Ensuite, l'administration fiscale a, sur le fondement des articles L. 81, L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, exercé son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, le 8 janvier 2016, afin de consulter et de prendre copie des pièces de la procédure judiciaire visant M. C.... Au regard des informations obtenues, le service a procédé au contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. et Mme C... au titre des années 2006 à 2014, leur adressant dans ce cadre des demandes d'éclaircissements et de justifications demeurées vaines. Le service a donc mis en œuvre la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales. Au terme de ce contrôle, M. et Mme C... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2006 à 2014. M. et Mme C... relèvent appel du jugement E... lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. et Mme C... se bornent à soutenir, pour contester la régularité du jugement attaqué, que les premiers juges ont mentionné le " profil client " Solaria Management Inc, alors que l'administration fiscale n'a pas estimé qu'ils étaient détenteurs d'avoirs sur des comptes bancaires associés à ce profil client. Toutefois, cette seule circonstance n'est pas de nature, E... elle-même, à entacher la régularité du jugement attaqué. E... suite, le moyen doit être écarté.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. [...] ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue E... l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée [...] ".

4. Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

5. La proposition de rectification du 22 décembre 2016, après avoir visé et cité les dispositions des articles L. 169, L. 188 B et L. 188 C du livre des procédures fiscales, pour justifier l'extension du délai de reprise au-delà du délai de trois ans prévu E... les dispositions de l'article L. 169, fait état des demandes d'éclaircissements et de justifications communiquées à M. et Mme C..., en application des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, et mentionne le recours, en l'absence de réponse satisfaisante, à la procédure de taxation d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales. La proposition de rectification indique également que le service a pu avoir accès, le 8 janvier 2016, à diverses pièces issues de la procédure pénale, à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire. Enfin, et après avoir visé et cité les dispositions de l'article 151 du code général des impôts, la proposition de rectification décrit les modalités de reconstitution des avoirs détenus E... M. C... sur les comptes associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS, logés auprès de la banque HSBC au titre des années 2006 à 2014, et détermine les montants correspondants. A cet égard, si les requérants soutiennent que c'est à tort que le service a attribué à M. C... la moitié des avoirs détenus sur les comptes bancaires associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS, de tels arguments, qui ressortissent au bien-fondé des rehaussements en litige, ne sont pas de nature à remettre en cause le caractère suffisant de la motivation de la proposition de rectification au regard des principes énoncés au point 3. Ainsi, l'administration fiscale a suffisamment motivé la proposition de rectification du 22 décembre 2016. E... suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de communication :

6. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

7. M. et Mme C... soutiennent que l'administration fiscale aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle ne leur aurait pas communiqué, en dépit de leur demande, l'ensemble des pièces obtenus de tiers ayant fondé les rectifications. Toutefois, l'administration fiscale a annexé au courrier daté du 23 mai 2016, adressé à M. et Mme C..., portant demande d'éclaircissements et de justifications, plusieurs procès-verbaux issus de la procédure pénale, enregistrés respectivement le 7 janvier 2013 sous le numéro 4, le 15 juillet 2103 sous les numéros 45 et 140, le 23 juillet 2014 sous les numéros 165 et 168 et le 24 juillet 2014 sous le numéro 172. Or, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration fiscale aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers pour fonder les rectifications. En particulier, les éléments d'identité fournis à la banque HSBC ainsi que les montants des sommes figurant sur les différents comptes bancaires associés aux profils clients enregistrés auprès de cette banque, analysés dans la proposition de rectification du 22 décembre 2016, sont mentionnés dans le procès-verbal enregistré sous le numéro 140. Si M. et Mme C... soutiennent que l'administration fiscale aurait dû leur communiquer les fiches de synthèse issus des fichiers émanant de la banque HSBC, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration fiscale aurait fondé les rectifications sur ces synthèses. Ainsi, l'administration fiscale n'ayant pas fondé les rehaussements sur d'autres documents que ceux qu'elle a communiqués, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne l'utilisation de documents considérés comme " frauduleux " :

8. Eu égard aux exigences découlant notamment de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, l'administration fiscale ne saurait se prévaloir, pour établir une imposition, de pièces ou documents obtenus E... une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales E... le juge. Toutefois, la seule circonstance qu'avant de mettre en œuvre à l'égard d'un contribuable les pouvoirs qu'elle tient du titre II du livre des procédures fiscales aux fins de procéder au contrôle de sa situation fiscale et de recueillir les éléments nécessaires pour, le cas échéant, établir des impositions supplémentaires, l'administration aurait disposé d'informations relatives à ce contribuable issues de documents initialement obtenus de manière frauduleuse E... un tiers est, E... elle-même, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.

9. Les impositions en litige sont fondées non pas sur les documents que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice a transmis à l'administration fiscale à la suite de la perquisition effectuée en 2009 au domicile de M. A..., mais sur les pièces de la procédure judiciaire visant M. C..., après que l'administration fiscale eut porté plainte contre lui et exercé, le 8 janvier 2016, son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire. La seule circonstance que, avant de mettre en œuvre à l'égard de M. C... les pouvoirs qu'elle tient du titre II du livre des procédures fiscales aux fins de procéder au contrôle de son dossier fiscal et de recueillir les éléments nécessaires pour établir les impositions litigieuses, l'administration aurait disposé d'informations relatives à ce contribuable issues de documents obtenus de manière frauduleuse E... M. A..., est, E... elle-même, sans incidence tant sur la régularité de la procédure d'imposition que sur l'opposabilité des pièces obtenues régulièrement E... la suite. E... ailleurs, si M. C... soutient que l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur des pièces déclarées ultérieurement illégales, il résulte de l'instruction que la cour d'appel de Paris a, dans son arrêt du 27 mars 2020, rejeté l'ensemble des exceptions de nullité dont se prévalait l'intéressé. Le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait irrégulière à raison de l'illicéité des preuves utilisées E... l'administration fiscale doit dès lors être écarté. Pour le même motif, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de " légalité de la preuve " doit en tout état de cause être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance du devoir de " loyauté " :

10. En premier lieu, M. et Mme C... soutiennent que, alors que l'administration fiscale était déjà en possession, dès janvier 2010 au plus tard, des éléments qu'elle leur a opposés dans la proposition de rectification du 22 décembre 2016, à savoir, selon eux, les fichiers dérobés E... M. A... au sein de la banque HSBC, elle a clôturé leur examen contradictoire de situation fiscale personnelle entamé en 2010, au titre des années 2008 et 2009 sans mettre à leur charge de rehaussement. Toutefois, il résulte de l'instruction, et en particulier des termes de la proposition de rectification du 22 décembre 2016, que M. C... a déclaré lui-même, dans le cadre de son examen contradictoire de situation fiscale personnelle, ne détenir aucun compte à l'étranger, de sorte que l'administration fiscale ne peut être regardée comme ayant méconnu l'article L. 50 du livre des procédures fiscales. E... ailleurs, et ainsi qu'il a été dit précédemment, les impositions en litige sont fondées non pas sur les documents que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice a transmis à l'administration fiscale à la suite de la perquisition effectuée en 2009 au domicile de M. A..., mais sur les pièces de la procédure judiciaire visant M. C..., après que l'administration fiscale eut porté plainte contre lui et exercé, le 8 janvier 2016, son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration fiscale se serait fondée, pour établir les impositions en litige, sur des éléments qu'elle détenait déjà à la date de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle de M. C... au titre des années 2008 et 2009.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts, ainsi que des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger [...] ".

12. Si M. et Mme C... soutiennent que l'administration fiscale aurait dû faire état, dans sa demande d'éclaircissements et de justifications du 23 mai 2016, du procès-verbal, issu de l'enquête préliminaire, enregistré le 22 janvier 2014 sous le numéro 77, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale, après avoir invité les requérants, dans le courrier du 23 mai 2016, à justifier de leurs " avoirs et revenus d'avoirs détenus auprès de la banque HSBC Private Bank ", en application des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, a fait état des informations qu'elle détenait, issus de la procédure pénale, quant aux bénéficiaires et aux soldes des comptes bancaires associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS. Elle a également annexé à son courrier plusieurs procès-verbaux issus de cette procédure, enregistrés respectivement le 7 janvier 2013 sous le numéro 4, le 15 juillet 2103 sous les numéros 45 et 140, le 23 juillet 2014 sous les numéros 165 et 168 et le 24 juillet 2014 sous le numéro 172. A cet égard, la seule circonstance que l'administration fiscale n'a pas joint à ce courrier le procès-verbal enregistré le 22 janvier 2014 sous le numéro 77 ne saurait entacher la procédure d'imposition d'irrégularité dès lors qu'elle ne saurait avoir induit en erreur M. et Mme C... quant à la portée des éclaircissements et des justifications qui leur ont été clairement demandés.

13. En troisième lieu, la circonstance que M. et Mme C... n'auraient pu avoir accès au dossier pénal à la date à laquelle ils ont reçu le courrier du 23 mai 2016 portant demande d'éclaircissements et de justifications, à la supposer établie, ne saurait caractériser une méconnaissance E... l'administration du devoir de loyauté, alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. et Mme C... ont été en mesure de demander, sur le fondement de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, la communication des procès-verbaux issus de la procédure pénale, utilisés E... le service pour fonder les rectifications et que, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le courrier du 23 mai 2016 comportait, en annexe, plusieurs procès-verbaux rédigés dans le cadre de cette procédure.

14. E... suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu son devoir de loyauté.

Sur le bien-fondé des impositions :

15. En application des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il appartient à M. et Mme C..., qui ont été régulièrement taxés d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues E... l'administration.

16. Aux termes de l'article 151 du code général des impôts : " Pour l'application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, l'impôt sur les revenus des avoirs à l'étranger est établi sur le produit du montant de ces avoirs E... la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées ".

En ce qui concerne la détention des avoirs logés sur les comptes associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS :

17. En premier lieu, si les requérants soutiennent que M. C... n'était pas détenteur des avoirs en cause, il ressort des motifs de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 mars 2020, qui a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 16 janvier 2017 quant à la culpabilité, notamment, des faits de fraude fiscale au titre des années d'imposition 2008, 2009 et 2010, que l'intéressé avait omis de déclarer une base imposable totale de 54 631 euros au titre des années 2008 à 2010, correspondant à la moitié des revenus d'avoirs issus des comptes associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS. E... ailleurs, et s'agissant des autres années d'imposition, le service s'est fondé sur un ensemble d'éléments collationnés à partir des pièces issues de la procédure pénale, notamment le procès-verbal enregistré sous le numéro 140, résumant les informations concernant M. C..., enregistrés auprès de l'établissement HSBC Private Bank, ainsi que les montants apparaissant sur les comptes bancaires en cause, lesquels permettent d'établir, notamment E... le recoupement des éléments relatif à l'identité, la domiciliation et à l'activité professionnelle de l'intéressé figurant dans les documents émanant de la banque HSBC Private Bank, et mentionnés dans ce procès-verbal, que M. C..., dont le nom apparaît sur les " profils clients " 20504 HV et 7657 SS, avait bénéficié des avoirs figurant sur ces comptes. Si les requérants soutiennent que le numéro de passeport figurant dans les procès-verbaux utilisés E... le service aurait été délivré en 1999 et que l'adresse mentionnée ne serait plus la sienne, ils ne contestent pas que ce passeport appartenait à M. C... et qu'il a habité à l'adresse en cause jusqu'en 1993. Ainsi, les requérants n'apportent aucun élément permettant d'établir que, en dépit des constatations concordantes effectuées E... le service, M. C... ne pourrait être regardé comme ayant bénéficié des avoirs logés sur les comptes bancaires associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 SS.

18. En second lieu, l'administration fiscale a estimé que M. C... était détenteur de la moitié des avoirs logés sur les comptes associés aux " profils clients " 7657 SS et 20504 HV, l'autre moitié étant détenue, pour ces deux profils, E... un de ses frères, prénommé Richard. Si les requérants soutiennent que les avoirs détenus sur les comptes associés aux " profils clients " 7657 SS et 20504 HV ont également bénéficié à un autre des frères de M. C..., prénommé Serge, la seule circonstance que le nom de ce dernier apparaît sur ces " profils clients ", ne suffit pas à l'établir, en l'absence d'élément d'identification figurant dans les procès-verbaux, permettant de déduire, E... recoupements, que l'intéressé aurait effectivement disposé de comptes bancaires au sein de l'établissement HSBC Private Bank et détenu, dans ce cadre, de tels avoirs. Enfin, si M. et Mme C... soutiennent que les procès-verbaux issus de la procédure pénale n'auraient aucune valeur probante, ils n'apportent aucun élément permettant de remettre utilement en cause les constatations effectuées E... l'administration fiscale - laquelle ne s'est pas, contrairement à ce qu'ils soutiennent, " constitué une preuve à elle-même " - sur la base de ces procès-verbaux. E... suite, c'est à bon droit que le service a imposé les requérants sur le fondement des dispositions de l'article 151 du code général des impôts à raison de la moitié des revenus des avoirs issus des comptes associés aux " profils clients " 20504 HV et 7657 HV, dont M. C... a eu la disposition au titre des années 2006 à 2014.

En ce qui concerne la détermination des revenus des avoirs :

19. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 22 décembre 2016, que l'administration fiscale a reconstitué les revenus des avoirs à l'étranger de M. C... en se fondant sur les soldes des comptes associés au " profil client " 7657 SS au 30 avril 2006, tels qu'ils apparaissaient dans les fichiers émanant de la banque HSBC Private Bank, cités E... le procès-verbal du 15 juillet 2013 répertorié sous le numéro 140. Le service a ensuite déterminé le montant des avoirs détenus au 1er janvier 2006, en se fondant sur la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées, et en procédant E... extrapolation en arrière, sur la base du solde détenu au 30 avril 2006. Pour déterminer le montant des avoirs détenus E... M. C... au titre de la période comprise entre le 31 décembre 2006 et le 31 décembre 2014, en l'absence des relevés bancaires correspondant à ces comptes, que les requérants n'ont jamais produits, le service a procédé E... extrapolation en avant, s'appuyant, au titre de l'année 2006, sur le solde constaté au 30 avril 2006, et au titre des années 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, sur le solde calculé E... ses soins au titre, respectivement, des années 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013 - soldes qu'il a à chaque fois multipliés E... la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées. Le service a procédé selon la même méthode pour déterminer le montant des avoirs correspondant aux comptes associés au " profil client " 20504 HV, en s'appuyant sur le solde de ces comptes au 31 décembre 2006. M. et Mme C... ne peuvent soutenir que la méthode ainsi utilisée E... le service, qui ne méconnaît pas les dispositions de l'article 151 du code général des impôts, serait " arbitraire ", alors E... ailleurs qu'il leur appartenait, en tout état de cause, d'apporter eux-mêmes des précisions quant aux montants exacts des avoirs que M. C... possédait à l'étranger, ce qu'ils n'ont pas fait, en dépit de la demande d'éclaircissements et de justifications qui leur a été adressée E... l'administration fiscale sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales.

20. En deuxième lieu, si M. et Mme C... soutiennent que le service avait connaissance des soldes figurant sur les comptes associés aux " profils clients " 7657 SS et 20504 HV au 1er janvier 2006, ainsi que, pour le premier de ces profils, au 1er janvier 2007, et qu'il pouvait, selon eux, en déduire le montant des revenus associés, sans recourir à la méthode décrite au point précédent, le service pouvait à bon droit, et dès lors que l'article 151 du code général des impôts était en l'espèce applicable, procéder au calcul prévu E... ces dispositions. En tout état de cause, M. et Mme C..., qui, ainsi qu'il a été dit précédemment, ne produisent pas leurs relevés de comptes bancaires, et n'apportent E... ailleurs aucune précision quant aux mouvements observés sur ces comptes, n'établissent pas, E... leurs seules allégations, que le montant des revenus des avoirs ainsi fixé E... l'administration fiscale serait supérieur au montant qu'ils ont réellement perçu. E... suite, le moyen doit être écarté.

21. En troisième lieu, si M. et Mme C... soutiennent que l'administration fiscale aurait dû tenir compte, pour le calcul des sommes imposables sur le fondement de l'article 151 du code général des impôts, d'" avances " qui apparaissent sur les comptes associés au " profil client " 7657 SS, ils n'apportent aucune précision au soutien de leurs allégations, alors que le procès-verbal enregistré sous le numéro 140 fait seulement état de sommes répertoriées, indifféremment et sans aucune précision, en tant que " prêts et avances ". E... suite, le moyen doit être écarté.

22. En quatrième lieu, en retenant le taux de change dollars américains/euros en vigueur à la date à laquelle le montant des avoirs a été déterminé, soit à la date du 31 décembre 2006 pour le " profil client " 20504 HV et à la date du 30 avril 2006 pour le " profil client " 7657 SS, le service n'a pas méconnu les dispositions de l'article 151 du code général des impôts. E... suite, le moyen doit être écarté.

Sur les majorations :

23. En premier lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / [...] 80 % en cas de manœuvres frauduleuses [...] ".

24. Les pénalités pour manœuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration.

25. Pour appliquer la majoration de 80 % prévue E... les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts aux impositions supplémentaires mises à la charge de M. et Mme C... au titre des années 2006 à 2014, l'administration fiscale s'est fondée sur la circonstance que M. C... avait entendu dissimulé ses avoirs auprès d'un établissement situé en Suisse, Etat pratiquant le secret bancaire et ne coopérant pas avec les autorités fiscales françaises à l'époque des faits. Il suit de là que les agissements de M. C... étaient destinés à égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. E... suite, l'administration fiscale établit les manœuvres frauduleuses de nature à justifier, E... application de l'article 1729 du code général des impôts, la majoration de 80 % dont ont été assortis les redressements notifiés au titre des années 2006 à 2014 à raison des revenus des avoirs que M. C... détenait à l'étranger. E... suite, les requérants ne sont pas fondés à demander la décharge de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses prévue E... l'article 1729 du code général des impôts.

26. En second lieu, les requérants soutiennent que les majorations pour manœuvres frauduleuses qui ont été appliquées E... le service aux impositions en litige doivent être plafonnées pour tenir compte de l'amende infligée à M. C... E... le juge pénal. Ce faisant, ils peuvent être regardés comme revendiquant le bénéfice de la réserve d'interprétation émise E... la décision du Conseil constitutionnel n° 97-395 DC du 30 décembre 1997 selon laquelle, " lorsqu'une sanction administrative est susceptible de se cumuler avec une sanction pénale, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues ". Toutefois, il résulte de l'instruction que la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 27 mars 2020, a seulement condamné M. C... à une peine d'emprisonnement de dix-huit mois avec sursis et a réformé sur ce point le jugement du tribunal de grande instance de Créteil, qui avait condamné l'intéressé à une peine d'emprisonnement de dix-huit mois, dont neuf avec sursis, et à une amende de 25 000 euros. Ainsi, et dès lors qu'aucune amende pénale ne demeure à la charge de M. C... au titre des faits en cause, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le principe de proportionnalité aurait été méconnu du fait du cumul de la majoration en litige avec une amende prononcée E... le juge pénal.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, E... le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. E... voie de conséquence, les conclusions qu'ils présentent sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, où siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public E... mise à disposition au greffe, le 1er juillet 2022.

Le rapporteur,

K. D...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA00272


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00272
Date de la décision : 01/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : GUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-01;20pa00272 ?
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