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29/07/2022 | FRANCE | N°20PA03317

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 29 juillet 2022, 20PA03317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) de l'Olivier a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) à lui verser, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des travaux entrepris en février 2017 sur le bâtiment édifié sur la parcelle cadastrée section AY n° 385 à Villejuif, les sommes, d'une part, de 7 134,10 euros actualisée à la date du jugement selon l'indice BT 01, assortie des intérêts au taux légal à compter du

jugement ainsi que de la capitalisation de ces intérêts et, d'autre part, de 3 500 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) de l'Olivier a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) à lui verser, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des travaux entrepris en février 2017 sur le bâtiment édifié sur la parcelle cadastrée section AY n° 385 à Villejuif, les sommes, d'une part, de 7 134,10 euros actualisée à la date du jugement selon l'indice BT 01, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement ainsi que de la capitalisation de ces intérêts et, d'autre part, de 3 500 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement.

Par un jugement n° 1809319 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande comme présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2020, et un mémoire en réplique enregistré le 3 mars 2021, la société civile immobilière (SCI) de l'Olivier, représentée par Me Guillot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1809319 du 1er octobre 2020 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de condamner la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) à lui verser, d'une part, la somme de 7 134,06 euros au titre des dommages matériels subis, arrêtée au mois de juin 2017 actualisable en fonction de l'indice BT 01 du coût de la construction, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ainsi que de la capitalisation de ces intérêts et, d'autre part, la somme de 3 500 euros au titre du préjudice d'agrément et de jouissance ;

3°) de mettre à la charge de la RATP la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande d'indemnisation s'inscrit, non pas dans le cadre de l'indemnisation de son expropriation mais dans celle de l'indemnisation de dommages de travaux publics générés

par la RATP dans le cadre de sa mission de service public consistant en la

démolition du bâtiment devenu momentanément sa propriété, soit des désordres qui ne sont pas indemnisables dans le cadre de la procédure d'expropriation et qui relèvent de la compétence du juge administratif ; en effet, il ne s'agit pas d'un litige connexe à la procédure d'expropriation ;

- en qualité de tiers aux travaux litigieux, elle a droit à la réparation des préjudices qu'elle a subis à l'occasion de ces derniers sur le fondement du régime de la responsabilité sans faute ; ès qualité de maître d'ouvrage, la responsabilité de la RATP est engagée à son égard en raison des infiltrations décrites par l'expert judiciaire qui a évalué le montant des réparations correspondantes à 8 482,93 euros HT soit 10 191,52 euros TTC, dont 70 % incombe à la RATP, soit un préjudice évalué à 7 134,10 euros ;

- le préjudice d'agrément et de jouissance devra par ailleurs être indemnisé à hauteur de la somme de 3 500 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 janvier 2021 et le 13 octobre 2021, la RATP, représentée par la Selarl Le Sourd Desforges, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI de l'Olivier sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en application des dispositions des articles L. 311-5 et L. 321-1 du code de l'expropriation et conformément aux différentes décisions rendues par le juge judiciaire, seul ce dernier est compétent pour connaitre des demandes de la SCI de l'Olivier ;

- à titre subsidiaire, les demandes de la SCI de l'Olivier ne sont pas fondées dès lors que le préjudice invoqué a déjà été indemnisé et les nouvelles demandes au même titre ont été rejetées par le juge judiciaire ;

- aucune faute ne saurait lui être imputée au titre de la responsabilité délictuelle alors même que la SCI de l'Olivier a elle-même commis des fautes ;

- les préjudices d'agrément et de jouissance ne sont pas établis.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'expropriation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- et les observations de Me Guillot, avocat de la SCI de l'Olivier, et de Me Duconseil, avocat de la Régie Autonome des Transports Parisiens.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI de l'Olivier était propriétaire d'une parcelle sise 42, avenue de Stalingrad à Villejuif, cadastrée section AY n° 116, qui a été ultérieurement divisée en deux parcelles désormais cadastrées section AY n° 384 et n° 385. Par un arrêté inter-préfectoral du 1er février 2005, les préfets de l'Essonne et du Val-de-Marne ont déclaré d'utilité publique des travaux relatifs à la réalisation d'une ligne de tramway entre Villejuif et Athis-Mons. En conséquence de cet arrêté, la parcelle cadastrée AY n° 385 a fait l'objet d'une procédure d'expropriation au profit de la RATP. La première ordonnance du juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Créteil fixant l'indemnité d'expropriation a été rendue le 9 avril 2009 et l'ordonnance d'expropriation a été rendue le 9 novembre 2009. Toutefois, les travaux de démolition du bâtiment édifié sur la parcelle expropriée cadastrée AY n° 385 n'ont été effectués qu'au mois de février 2017. Par un courrier du 10 juillet 2018, la SCI de l'Olivier a demandé à la RATP de lui verser une somme de 10 191,52 euros TTC en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de ces travaux de démolition. La RATP n'a pas répondu à cette demande. Par un jugement du 1er octobre 2020 dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté la requête présentée par la SCI de l'Olivier, tendant à la condamnation de la RATP, comme présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 311-5 du code de l'expropriation : " A défaut d'accord sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l'expropriation. ". Aux termes de l'article L. 321-1 du même code de l'expropriation : " Les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation. ". L'indemnité d'expropriation doit en principe couvrir tous les dommages subis par l'exproprié du fait de l'opération entreprise, même au regard des parcelles qui demeurent sa propriété.

3. Il résulte de l'instruction que le montant de l'indemnité d'expropriation de la parcelle cadastrée section AY n° 385 a été fixé par un jugement du juge de l'expropriation du Val-de-Marne du 9 avril 2009, puis par des arrêts de la cour d'appel de Paris du 28 juin 2012, 19 mars 2015 et du 27 avril 2017, lesquels ont notamment alloué à la SCI requérante une indemnité correspondant aux

frais de remise en état de la partie de bâtiment conservée par elle sur la parcelle cadastrée section AY n° 384. L'expert nommé par une ordonnance de référé (référé préventif) du 29 juin 2015 du président du tribunal de grande instance de Créteil, dans son rapport rédigé le 30 avril 2018, soit après la réalisation par la RATP, en février 2017, des travaux de démolition du bâtiment qui se trouvait sur la parcelle expropriée cadastrée AY n° 385, et notamment après une réunion d'expertise sur place le 11 mai 2017, a constaté qu'au rez-de-chaussée, dans la première pièce éclairée sur rue, des traces d'humidité importantes étaient visibles au pied du mur, que le parquet était soulevé et que le plafond était affecté par l'humidité, que dans la seconde pièce des décollements d'enduit et de peinture au-dessus de la plinthe étaient observables et que le parquet était soulevé, a également observé à l'étage la présence de taches d'humidité sur les enduits, a estimé que " ces désordres ont tout d'abord pour origine l'insuffisance des protections provisoires mises en place par la RATP sur l'ossature béton qui supportera la nouvelle façade que doit réaliser la SCI de l'Olivier [et que] d'autres taches d'humidité dans les locaux mettent en évidence des désordres dus à l'absence d'utilisation des locaux et l'absence de chauffage depuis plusieurs années " et a émis l'avis que ces désordres étaient imputables pour 70% à la RATP du fait de l'insuffisance des protections réalisées et pour 30% à la SCI de l'Olivier du fait de l'absence d'occupation des locaux. La SCI de l'Olivier, dans le cadre du présent litige, demande l'indemnisation de ces préjudices sur la base d'un devis établi pour la reprise des peintures et parquets pour une somme de 8 482,93 euros HT soit 10 191,52 euros TTC, soit un préjudice évalué à 7 134,10 euros pour la part de 70 % incombant à la RATP, ainsi que l'indemnisation du préjudice d'agrément et de jouissance à hauteur de la somme de 3 500 euros. Toutefois, alors au demeurant que la cour d'appel de Paris a jugé, dans un arrêt du 14 juin 2018, que le litige connexe, relatif aux désordres dus au retard mis par la RATP à procéder à la démolition du bâtiment, relevait de la compétence du juge judiciaire, ces préjudices ne sont pas séparables de l'opération d'expropriation elle-même, dont ils procèdent directement, et ainsi leur éventuelle indemnisation ne relève pas de la compétence du juge administratif ; la cour d'appel de Paris a au demeurant admis la compétence du juge judiciaire en rejetant, dans un arrêt du 30 septembre 2021, les conclusions de la SCI l'Olivier tendant à la condamnation de la RATP à lui payer 30 % de la somme de 10 191,52 euros, soit la somme de 3 057,56 euros, au motif que " le premier juge a donc exactement considéré que l'absence de location n'est pas due à une contrainte imposée par la RATP, mais bien d'une décision de gestion de la SCI de l'Olivier [et qu'il] convient en conséquence de confirmer le rejet de la demande de la SCI l'Olivier au titre des désordres consécutifs aux travaux de démolition ". Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les conclusions de la SCI de l'Olivier comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur les frais liés à l'instance :

4. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par la SCI de l'Olivier doivent être rejetées.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI de l'Olivier le paiement à la RATP de la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI de l'Olivier est rejetée.

Article 2 : La SCI de l'Olivier versera à la RATP une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI de l'Olivier et à la RATP.

Délibéré après l'audience publique du 21 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juillet 2022.

Le président rapporteur,

I. A...L'assesseure la plus ancienne,

M. B...

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03317
Date de la décision : 29/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : GUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-29;20pa03317 ?
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