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31/03/2023 | FRANCE | N°22PA03459

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 31 mars 2023, 22PA03459


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. BO... AQ... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019, ensemble les décisions de nomination à ce grade de M. AP... H..., M. AX... BA..., M. E... BB..., M. C... AR..., Mme T... I..., M. R... AJ..., M. F... AE..., M. AK... D..., M. AA... S..., M. AS... AY..., M. AP... Y..., Mme BN... AO..., M. BK... BJ..., M. B... A..., M. AI.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. BO... AQ... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019, ensemble les décisions de nomination à ce grade de M. AP... H..., M. AX... BA..., M. E... BB..., M. C... AR..., Mme T... I..., M. R... AJ..., M. F... AE..., M. AK... D..., M. AA... S..., M. AS... AY..., M. AP... Y..., Mme BN... AO..., M. BK... BJ..., M. B... A..., M. AI... N..., M. AG... BM..., M. X... AU..., M. AV... AT..., M. BL... O..., M. BK... AM..., M. AN... AF..., M. BH... K..., Mme V... Comte, M. G... AL..., M. BD... AC..., M. BF... M..., M. AH... AW..., M. BQ..., M. BE... BP..., M. BI... Z..., Mme AZ... Q..., M. BG... J..., M. L... P..., Mme BC... AB... et de Mme AD... W....

Par un jugement n° 1913729 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu sur la demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 2019 et annulé les nominations au grade de brigadier-chef de police des personnes ci-avant nommées.

Procédure devant la Cour :

I. Sous le numéro 22PA03459 :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2022, M. AH... AW..., représenté par Me Laporte, demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1913729 du 2 juin 2022 du tribunal administratif de Paris et à l'Etat de lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête de M. AQ... était prématurée cependant que les mémoires complémentaires sont intervenus alors que sa nomination était devenue définitive ;

- le jugement n° 1914190 du 4 février 2022 ne saurait avoir d'effet sur sa situation personnelle dès lors qu'il ne lui a pas été notifié ;

- son avancement est en tout état de cause devenu définitif en raison de l'intervention de l'arrêté du 2 septembre 2021 le nommant à l'échelon 2 du grade de brigadier-chef de police.

Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a produit un mémoire le 7 mars 2023, après la clôture de l'instruction.

La requête a été communiquée à M. AQ... qui n'a pas produit de mémoire en défense.

II. Sous le numéro 22PA03463 :

Par une requête enregistrée le 27 juillet 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1913729 du 2 juin 2022 du tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier pour avoir prononcé un non-lieu en se fondant d'office sur l'annulation de l'arrêté du 2 août 2019 prononcée par le jugement n° 1914190 du 4 février 2022, alors que ce jugement n'était pas définitif pour avoir été frappé d'un pourvoi en appel le 4 avril 2022 ;

- les moyens soulevés en première instance par M. AQ... sont infondés.

La requête a été communiquée à M. AQ... et aux personnes ci-avant nommées dont les nominations ont été annulées, lesquels n'ont pas produit de mémoire en appel.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Perroy,

- et les conclusions de Mme Lorin, rapporteure publique désignée en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement n° 1913729 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Paris, saisi par M. AQ... d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur en date du 2 août 2019 relatif au tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police nationale au titre de 2019, ensemble plusieurs arrêtés de nomination à ce grade, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 août 2019 et annulé, conformément aux conclusions de la demande de M. AQ..., 35 arrêtés de nomination au grade de brigadier-chef de la police nationale prononcées par le ministre de l'intérieur au titre de l'année 2019. Par sa requête, le ministre de l'intérieur demande à la Cour d'annuler ce jugement. M. AW..., dont la nomination a été annulée par le même jugement, en demande également l'annulation.

Sur la jonction :

2. Les requêtes enregistrées sous les nos 21PA03459 et 21PA03463 concernant le même jugement du tribunal administratif de Paris, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. Au soutien du dispositif du jugement attaqué, les premiers juges ont retenu que par un jugement n° 1914190 du 4 février 2022, passé en force de chose jugée, le tribunal administratif de Paris avait annulé l'arrêté du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019 en sorte que les conclusions tendant à son annulation étaient devenues sans objet et qu'il devait être fait droit à la demande d'annulation des arrêtés de nomination pris sur son fondement. Toutefois, lorsque le juge administratif a annulé un acte administratif par une première décision juridictionnelle, et que, dans le cadre d'une seconde instance, il est à nouveau saisi de conclusions aux mêmes fins, il ne peut prononcer un non-lieu que si sa première décision est devenue définitive. Or, en l'espèce, le jugement n° 1914190 ayant été notifié le 4 février 2022 et le ministre de l'intérieur en ayant relevé appel devant la Cour le 4 avril 2022, dans le délai prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative, il n'était pas définitif lorsque les premiers juges ont statué sur l'instance n° 1913729. Par suite, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que le jugement dont s'agit est irrégulier.

4. Il y a lieu, pour la Cour, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. AQ... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les fins de non-recevoir :

5. En premier lieu, l'irrecevabilité de conclusions présentées contre une décision non encore intervenue peut être couverte en cours d'instance par l'intervention de la décision prématurément attaquée entre l'introduction de l'instance et le jugement du litige. Il en résulte que si M. AW... fait grief au recours que M. AQ... a introduit devant le tribunal administratif de Paris le 26 juin 2019 d'avoir été prématuré, il ressort des pièces du dossier qu'il visait expressément l'arrêté du ministre de l'intérieur portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef pour l'année 2019 et que celui-ci figurait dans le dossier de première instance, en sorte que ce recours était, en ce qui concerne cet arrêté, recevable. Par ailleurs, M. AQ... était également recevable à demander l'annulation des mesures individuelles de nomination intervenues en exécution du tableau d'avancement qui n'étaient pas devenues définitives, ce qui était le cas de l'arrêté de nomination de M. AW..., qui a été attaqué dans les délais de recours. La fin de non-recevoir soulevée par M. AW... ne peut, par suite, qu'être écartée.

6. En second lieu, aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation ".

7. Il ressort des pièces du dossier d'une part, que l'arrêté du ministre de l'intérieur en date du 2 août 2019 relatif au tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police nationale au titre de 2019 a été joint à la présente requête par M. AQ... et que d'autre part, s'agissant des décisions de nomination contestées, leur communication a été sollicitée, en vain, par l'intéressé. Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par le ministre et tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

8. Aux termes de l'article 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'avancement de grade a lieu de façon continue d'un grade au grade immédiatement supérieur. Il peut être dérogé à cette règle dans les cas où l'avancement est subordonné à une sélection professionnelle. (...) Sauf pour les emplois laissés à la décision du Gouvernement, l'avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : 1° Soit au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents,·2° Soit par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, après une sélection par voie d'examen professionnel. (...) ". Aux termes de l'article 17 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Pour l'établissement du tableau d'avancement de grade qui est soumis à l'avis des commissions administratives paritaires, il est procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents susceptibles d'être promus compte tenu des notes obtenues par les intéressés, des propositions motivées formulées par les chefs de service et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. Cette appréciation prend en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le fonctionnaire et l'ancienneté ". Aux termes de l'article 13 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat : " Les fonctionnaires sont inscrits au tableau par ordre de mérite. Les candidats dont le mérite est jugé égal sont départagés par l'ancienneté dans le grade ".

9. M. AQ... soutient que ses mérites professionnels sont supérieurs à ceux de 35 brigadiers promus brigadiers chefs en sorte que l'arrêté du 2 août 2019 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Il ressort des pièces du dossier que M. AQ... était titulaire du grade de brigadier depuis le mois de juin 2011, justifiant ainsi d'une ancienneté significative dans le grade, et a obtenu la note chiffrée de 6 sur une échelle de 7 lors des évaluations conduites au titre des années 2016, 2017 et 2018. Ses mérites professionnels ont par ailleurs fait l'objet d'appréciations élogieuses, l'intéressé ayant au surplus des qualités de formateur saluées par sa hiérarchie et des aptitudes à l'encadrement mises en avant dès 2016. La comparaison des mérites respectifs de cet agent et de plusieurs de ceux qui ont été promus, établit que M. AQ... présentait, pour l'application des principes et règles précités au point 8, des mérites supérieurs. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'il soulève dans ses écritures, M. AQ... est fondé à soutenir que le ministre de l'intérieur a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'arrêté du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de 2019, ainsi que, par voie de conséquence, les 35 arrêtés individuels de nomination au grade de brigadier-chef pris en exécution de ce tableau dont M. AQ... demande l'annulation.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. L'exécution du présent arrêt implique seulement que le ministre de l'intérieur réexamine la candidature de M. AQ..., ainsi que celles des fonctionnaires dont les arrêtés de nominations sont annulés, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard.

Sur les conclusions de M. AW... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. AW... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1924729 du 2 juin 2022 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de 2019, ensemble les nominations au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019 de M. AP... H..., M. AX... BA..., M. E... BB..., M. C... AR..., Mme T... I..., M. R... AJ..., M. F... AE..., M. AK... D..., M. AA... S..., M. AS... AY..., M. AP... Y..., Mme BN... AO..., M. BK... BJ..., M. B... A..., M. AI... N..., M. AG... BM..., M. X... AU..., M. AV... AT..., M. BL... O..., M. BK... AM..., M. AN... AF..., M. BH... K..., Mme V... Comte, M. G... AL..., M. BD... AC..., M. BF... M..., M. AH... AW..., M. BQ..., M. BE... BP..., M. BI... Z..., Mme AZ... Q..., M. BG... J..., M. L... P..., Mme BC... AB... et de Mme AD... W... sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la candidature de M. AQ... et de M. AP... H..., M. AX... BA..., M. E... BB..., M. C... AR..., Mme T... I..., M. R... AJ..., M. F... AE..., M. AK... D..., M. AA... S..., M. AS... AY..., M. AP... Y..., Mme BN... AO..., M. BK... BJ..., M. B... A..., M. AI... N..., M. AG... BM..., M. X... AU..., M. AV... AT..., M. BL... O..., M. BK... AM..., M. AN... AF..., M. BH... K..., Mme V... Comte, M. G... AL..., M. BD... AC..., M. BF... M..., M. AH... AW..., M. BQ..., M. BE... BP..., M. BI... Z..., Mme AZ... Q..., M. BG... J..., M. L... P..., Mme BC... AB... et de Mme AD... W... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. AW... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, à M. U... AW..., M. BO... AQ..., M. AP... H..., M. AX... BA..., M. E... BB..., M. AR... C..., Mme T... I..., M. R... AJ..., M. F... AE..., M. AK... D..., M. AA... S..., M. AS... AY..., M. AP... Y..., Mme BN... AO..., M. BK... BJ..., M. B... A..., M. AI... N..., M. AG... BM..., M. X... AU..., M. AV... AT..., M. BL... O..., M. BK... AM..., M. AN... AF..., M. BH... K..., Mme V... Comte, M. G... AL..., M. BD... AC..., M. BF... M..., M. AH... AW..., M. BQ..., M. BE... BP..., M. BI... Z..., Mme AZ... Q..., M. BG... J..., M. L... P..., Mme BC... AB... et de Mme AD... W....

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Perroy, premier conseiller,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023.

Le rapporteur,

G. PERROY

La présidente,

C. VRIGNON-VILLALBA

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos 22PA03459-220346302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03459
Date de la décision : 31/03/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: Mme LORIN
Avocat(s) : LAPORTE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-03-31;22pa03459 ?
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