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07/06/2023 | FRANCE | N°22PA01810

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 07 juin 2023, 22PA01810


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 2106860 du 21 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :



Par une requête et deux mémoires enregistrés les 20 avril, 26 juillet et 19 octobre 2022, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 2106860 du 21 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 20 avril, 26 juillet et 19 octobre 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Mosser, demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2106860 du 21 février 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de la somme de 69 137 euros correspondant aux majorations pour manquement délibéré assortissant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 ainsi que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 2013, 2014 et 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le quantum du litige s'élève à 69 137 euros en ce qu'il comprend la contestation des majorations pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de TVA pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 ainsi que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2013, 2014 et 2015 ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve d'un manquement délibéré.

Par trois mémoires en défense, enregistrés les 14 juin, 12 septembre et 16 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête, en ce que les conclusions tendant à une décharge des majorations pour manquement délibéré infligées avec le rehaussement des impositions sur le revenu au titre de l'année 2015 sont irrecevables pour méconnaître l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, et en ce que, s'agissant des autres conclusions, le moyen invoqué à l'appui de celles-ci n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Perroy,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,

- et les observations de Me Mosser pour les époux A....

Considérant ce qui suit :

1. L'Eurl Maidoche, dont M. A..., qui exploite par ailleurs l'entreprise individuelle Sylwester située en Pologne, est le gérant et unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a mis à sa charge des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des exercices 2013, 2014 et 2015, ensemble des majorations sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, du fait de l'activité déployée en France par l'entreprise individuelle Sylwester. M. et Mme A... ont par suite, dans le cadre de l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle parallèlement conduit par le service, été assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des années 2013, 2014 et 2015 sur le fondement des dispositions du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts ainsi qu'à des majorations pour manquement délibéré. Par leur requête, M. et Mme A... demandent à la Cour l'annulation du jugement n° 2106860 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des majorations pour manquement délibéré qui ont été mises à leur charge au titre des années 2013 à 2015, à hauteur d'un montant de 20 823 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de 35 222 euros au titre de l'impôt sur le revenu des années 2013 et 2014 et demandent, en outre, la décharge de la majoration pour manquement délibéré portant, à hauteur de 13 092 euros, sur les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. Aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : " L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10. / Toutefois, le contribuable qui n'a pas reçu la décision de l'administration dans un délai de six mois mentionné au premier alinéa peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que les requérants ont, d'une part, par un courrier du 14 novembre 2019, sollicité auprès de l'administration fiscale le dégrèvement des majorations de 40 % pour manquement délibéré s'élevant à 20 823 euros appliquées aux rappels de la taxe sur la valeur ajoutée pour la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et, d'autre part, par un courrier du 29 novembre 2019, sollicité le dégrèvement de la somme de 35 222 euros correspondant aux majorations de 40 % pour manquement délibéré appliquées aux rehaussements d'impôt sur le revenu au titre des années 2013 et 2014. Ces réclamations contentieuses ont été rejetées par les services de l'administration fiscale par des courriers du 9 mars 2021. Les requérants ont par la suite contesté ces majorations devant le tribunal administratif. En revanche, ils n'ont présenté de réclamation préalable devant l'administration, pour contester les majorations pour manquement délibéré assortissant les rehaussements de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015, que le 14 octobre 2022, soit au cours de l'instance d'appel. Quand bien même une décision de rejet de cette dernière réclamation est née à la date du présent arrêt du fait de l'expiration du délai de six mois courant à compter de la présentation à l'administration de la réclamation préalable des intéressés, les conclusions enregistrées devant la Cour portant sur la décharge des majorations pour manquement délibéré appliquées aux rehaussements de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015 n'ont pas fait l'objet d'un recours devant le tribunal administratif comme le prévoient les dispositions de l'article

R. 199-1 du livre des procédures fiscales. Leur demande de décharge de la majoration dont a été assortie la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de l'année 2015 est ainsi, comme le fait valoir le ministre, irrecevable pour méconnaître des dispositions de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales. Elle ne peut, par suite, qu'être rejetée.

Sur les pénalités :

4. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

5. Pour établir l'existence d'un manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt.

6. Pour appliquer la majoration pour manquement délibéré aux rappels de la taxe sur la valeur ajoutée dus par l'entreprise individuelle Sylwester et aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de M. et Mme A..., sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale a relevé que l'activité de l'Eurl Maidoche et celle de l'entreprise individuelle Sylwester étaient similaires et avaient permis à M. A..., en créant la confusion entre ces deux entités, de minorer la base imposable de l'Eurl Maidoche en ne déclarant pas en France une partie des sommes facturées par l'entreprise Sylwester qu'il avait pourtant encaissées sur un compte français et qui provenaient d'opérations de rénovation effectuées en France pour le compte de clients français. Elle se prévaut également de l'importance des sommes qui n'ont pas été déclarées au titre des bénéfices industriels et commerciaux tirés de l'activité de l'entreprise individuelle Sylwester, à savoir 132 479 euros (12,49 % du chiffre d'affaires déclaré) en 2013 et 118 122 euros (16,98 % du chiffre d'affaires déclaré) en 2014, tout comme au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, dont le montant non déclaré représente 49 % de la TVA due en 2013, 88 % en 2014 et 82 % en 2015.

7. Si les requérants soutiennent qu'ils n'avaient pas l'intention de se soustraire à l'imposition dès lors qu'ils avaient déclaré l'ensemble des bénéfices issus de l'activité de l'entreprise Sylwester en Pologne, le procès-verbal du contrôle fiscal réalisé par l'administration fiscale polonaise qu'ils produisent à l'appui de ces allégations démontre au contraire que leurs déclarations aux autorités polonaises ne permettaient pas à ces dernières de vérifier si l'entreprise Sylwester dégageait des revenus au titre d'un établissement stable situé en France, en sorte que ce document n'établit pas que M. A... n'aurait pas déclaré en France les bénéfices de cette société pour les avoir, à tort mais de bonne foi, déclarés en Pologne. S'ils soutiennent par ailleurs que l'administration polonaise aurait réduit les bases imposables à due concurrence de celles in fine déclarées en France, ils n'apportent aucune précision à l'appui de cette allégation, alors que le procès-verbal de contrôle fiscal polonais ne permet pas d'effectuer un tel recollement. Dans ces conditions, compte tenu notamment de l'importance des rehaussements et de leur caractère répété, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du caractère délibéré du manquement de M. et Mme A... à leurs obligations fiscales et, par suite, du bien-fondé des majorations de 40 %, infligées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, en litige.

8. Il suit de là que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. et Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'île de France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

- M. Perroy, premier conseiller,

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 7 juin 2023.

Le rapporteur,

G. PERROYLa présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA0181002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01810
Date de la décision : 07/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : CABINET BERNARD LAGARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-07;22pa01810 ?
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