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08/11/2023 | FRANCE | N°22PA00440

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 08 novembre 2023, 22PA00440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée à associé unique Immo Best International a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courue du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, ainsi que des intérêts de retard et des majorations y afférents, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 a

insi que des intérêts de retard et des majorations y afférents, et enfin de prononce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée à associé unique Immo Best International a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courue du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, ainsi que des intérêts de retard et des majorations y afférents, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard et des majorations y afférents, et enfin de prononcer le rétablissement des déficits qu'elle a déclarés au titre des exercices clos de 2013 à 2015.

Par un jugement n° 2006503/1-1 du 7 décembre 2021 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2022 la société Immo Best International, représenté par Me Goldstein, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2006503/1-1 du 7 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, ainsi que des intérêts de retard et des majorations s'y rapportant, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard et des majorations s'y rapportant, et enfin de prononcer le rétablissement des déficits qu'elle a déclarés au titre des exercices clos de 2013 à 2015 ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférents, ainsi que le rétablissement des déficits déclarés, au titre des exercices 2013 à 2015, correspondant aux rehaussements notifiés à raison des frais liés aux véhicules utilisés par la société IMMO BEST et des passifs remis en cause, ainsi que la décharge des majorations de 40 % assises sur les rappels de TVA mis à sa charge au titre des mois de février 2016 et de mars 2016, sur le fondement de l'article 1728, 1 b du code général des impôts et, enfin, la décharge des majorations de 40 % assises sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2014 ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de prononcer la décharge des majorations de 40 % assises sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour avoir omis de statuer sur les moyens tirés de l'invocation de la doctrine administrative en ce qui concerne le caractère oral et contradictoire du débat avec l'administration fiscale, de l'absence de preuve d'un acte anormal de gestion concernant la déduction des indemnités kilométriques relatives au véhicule Audi A8, et de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit ;

- la procédure de vérification de comptabilité est irrégulière dès lors que les opérations se sont déroulées dans les locaux de l'administration et n'ont pas donné lieu à un débat oral et contradictoire ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en ce qui concerne la remise en cause de la déductibilité des frais liés au véhicule Audi A8 :

- les frais liés au véhicule Audi A8 sont justifiés par un usage professionnel et n'ont pas été valablement remis en cause faute de preuve d'un acte anormal de gestion ;

- le montant des frais dont la déductibilité a été remise en cause est en tout état de cause erroné ;

- la déductibilité des frais liés au véhicule Ducati est justifiée par un usage professionnel et n'a pas été valablement remise en cause faute de preuve d'un acte anormal de gestion ;

- la déductibilité des frais liés aux trois véhicules prêtés n'a pas été valablement remise en cause faute de preuve d'un acte anormal de gestion ;

- la reprise du report à nouveau créditeur du compte courant d'associé de M. A... d'un montant de 15 087,50 euros inscrit au 1er janvier 2013 est injustifiée dès lors qu'il est issu de l'exercice clos le 31 décembre 2012 qui est prescrit ;

- les montants de 3 433 euros et 24 462 euros portés au crédit de ce compte, respectivement au cours des exercices clos en 2014 et 2015, ne pouvaient pas être réintégrés, seul le solde créditeur de ce compte au 31 décembre de chaque année pouvant l'être ;

- la majoration prévue par le 1-b) de l'article 1728-1 du code général des impôts à raison des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents à février et mars 2016 est irrégulière faute de mise en demeure de souscrire une déclaration l'informant des pénalités encourues ;

- la majoration de l'impôt sur les sociétés pour manquement délibéré est infondée faute de preuve d'une intention délibérée d'éluder l'impôt.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (sarl) Immo Best qui exerçait une activité d'agence immobilière a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, étendue au 30 avril 2016 en matière de TVA. A l'issue de cette vérification, elle a fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) selon la procédure de taxation d'office, à l'exception des rappels afférents aux mois de mars, juin, septembre 2013 d'une part, aux mois de mars, juin, septembre et décembre 2014, d'autre part, et aux mois de juin, septembre, et décembre 2015, de troisième part, ainsi que de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, selon la procédure contradictoire, pour les exercices clos en 2013, 2014 et 2015, assortis des intérêts de retard, de la majoration de 10 % prévue au a du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, de la majoration de 40 % prévue au b. du 1. du même article 1728 du et de la majoration de 40 % mentionnée au a de l'article 1729 du même code. Elle fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la décharge intégrale en droits, intérêts de retard et majorations ou, à titre subsidiaire, la décharge partielle, de ces rappels de TVA et cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, et également de prononcer le rétablissement des déficits qu'elle a déclarés au titre des exercices clos de 2013 à 2015.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que la requérante avait soulevé en première instance le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition était irrégulière faute d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur dans les conditions décrites par la doctrine de l'administration exprimée dans une réponse ministérielle et dans une instruction référencée BOI-CF-PGR-20-20, et que ce moyen n'a pas été analysé dans le jugement attaqué. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de régularité, la requérante est fondée à soutenir que le jugement est pour ce motif entaché d'irrégularité, et à en demander l'annulation.

3. Il y a lieu, pour la Cour, de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par la société Immo Best devant le Tribunal administratif de Paris.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Si ces dispositions ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit, en principe, se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux, si cette circonstance n'a pas fait obstacle à la possibilité pour les représentants de l'entreprise vérifiée d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire.

5. Il est constant que la requérante a demandé, après que la première intervention du vérificateur eut lieu dans ses locaux, le 12 juillet 2016, en présence de son gérant, que les opérations de vérification de sa comptabilité, d'ailleurs tenue au moyen de systèmes informatisés, se poursuivent dans les locaux de l'administration. Il résulte par ailleurs du compte rendu de ces opérations que cinq réunions se sont tenues dans les locaux de l'administration en présence du conseil désigné par la société et également d'un collaborateur, qu'elles ont donné lieu à des échanges de pièces et arguments dont il ne résulte nullement que la requérante se serait heurtée à un refus de débat oral et contradictoire, et qu'une réunion de synthèse s'est tenue le 23 novembre 2016 en présence de M. A..., de Me Gouget et son collaborateur. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la vérification de comptabilité serait entachée d'irrégularité pour s'être poursuivie dans les locaux de l'administration et n'avoir pas permis la tenue d'un débat oral et contradictoire doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la nature des impôts, ainsi que les années d'imposition concernées.

7. Il ressort des termes de la proposition de rectification du 2 décembre 2016 adressée à la requérante que celle-ci comporte, en ce qui concerne les charges afférentes à un véhicule de marque Audi, que l'administration a considérées comme n'étant pas déductibles, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 2 décembre 2016 serait insuffisamment motivée sur ce point.

8. Enfin, si la requérante invoque l'application à son profit de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-50-20, relative aux mentions de la mise en demeure de déposer une déclaration de TVA qui lui a été adressée le 13 juin 2016, celle-ci est toutefois inopposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dès lors que les exigences des mentions de la mise en demeure touchent à la procédure d'imposition et non, contrairement à ce que soutiennent les requérants, à l'établissement des pénalités.

Sur le bien-fondé des impositions

En ce qui concerne le profit sur le Trésor :

9. Aux termes du 1 de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce code, le bénéfice imposable est " le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises ". Le 2 du même article dispose que " le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...). L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...). " Il résulte de ces dispositions que le contribuable réalisant des opérations soumises à la TVA et tenant une comptabilité hors taxe, qui, avant la clôture d'un exercice, n'a pas déclaré et acquitté spontanément la TVA qu'il a encaissée auprès de ses clients au cours de l'exercice, a minoré son résultat de cet exercice du montant de cette taxe, dès lors que celle-ci, faute d'avoir été liquidée à la clôture de l'exercice, ne constitue pas une dette devant être prise en compte au passif du bilan établi lors de cette clôture et susceptible de contrebalancer la majoration d'actif résultant de l'absence de déclaration et d'acquittement de la taxe encaissée. En revanche, le contribuable bénéficiant, sauf option expresse contraire de sa part, de la " déduction en cascade " prévue par l'article L. 77, premier alinéa, du livre des procédures fiscales, est en droit de déduire le rappel de TVA qui lui est réclamé du résultat imposable du même exercice, ce qui a pour effet de contrebalancer la majoration d'actif ci-dessus mentionnée.

10. Il est constant que la requérante ne s'était pas acquittée auprès du Trésor public, à la clôture de chaque exercice en litige, d'une partie de la TVA exigible grevant les prestations de services qu'elle a facturées et qu'elle est réputée avoir encaissée, que la TVA nette ainsi due par la société, dont le calcul opéré par l'administration n'est pas contesté, a engendré pour elle un " profit sur le Trésor " d'un montant égal à ces fractions de taxe non acquittées, et qu'il y avait lieu, en conséquence, de rapporter lesdits montants à ses résultats en application des principes énoncés au point 9. Il est également contant que la requérante a bénéficié, lors de l'établissement des conséquences financières du contrôle, du mécanisme dit " de la cascade de TVA " ayant contrebalancé la majoration d'actif résultant du non acquittement de la TVA. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le profit ainsi réalisé par elle chaque année aurait été déjà comptabilisé dans les résultats qu'elle a déclarés pour contester le profit sur le Trésor qui a été réintégré à son bénéfice imposable. Par voie de conséquence de ce qui précède, la requérante n'est pas davantage fondée à demander le rétablissement de ses déficits reportables en conséquence de l'annulation de ce profit sur le Trésor égal, en l'espèce, à la différence entre les rappels de TVA collectée et la TVA déductible admise par le service.

En ce qui concerne les charges :

11. En vertu du 1 de l'article 39 du code général des impôts, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment les frais généraux de toute nature. D'une part, pour être admis en déduction des bénéfices imposables, les frais et charges doivent être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation, se rattacher à la gestion normale de l'entreprise, correspondre à une charge effective, être appuyés de justificatifs suffisants, et être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés. En application de ces dispositions, l'administration a remis en cause le caractère déductible des indemnités kilométriques allouées à son gérant, M. A..., au titre de de l'utilisation de son véhicule personnel et d'un véhicule appartenant à la société, ainsi que les charges afférentes à l'entretien de trois véhicules appartenant à des tiers.

12. En premier lieu, en ce qui concerne le véhicule de marque Audi appartenant à M. A..., aux termes du 7ème alinéa de l'article 83-3 du code général des impôts, applicables à M. A..., gérant de la société ayant bénéficié de ces indemnités kilométriques payées sur son compte courant d'associé : " Lorsque les bénéficiaires de traitements et salaires optent pour le régime des frais réels, l'évaluation des frais de déplacement, autres que les frais de péage, de garage ou de parking et d'intérêts annuels afférents à l'achat à crédit du véhicule utilisé, peut s'effectuer sur le fondement d'un barème forfaitaire fixé par arrêté du ministre chargé du budget en fonction de la puissance administrative du véhicule, retenue dans la limite maximale de sept chevaux, du type de motorisation du véhicule, et de la distance annuelle parcourue ". Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'a pas fondé la réintégration au résultat des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 des indemnités kilométriques allouées à M. A... sur le fait que cette allocation constituerait un acte anormal de gestion, mais sur l'absence de justification par la société, pour chaque exercice, du nombre de kilomètres parcourus par M. A... avec ce véhicule pour des motifs professionnels. La requérante, qui seule peut le faire, n'établit pas ce nombre par ses seules déclarations, générales, sur la nécessité pour M. A... d'effectuer de nombreux déplacements professionnels, ni que les montants respectifs de 17 955 euros en 2013, 37 293 euros en 2014 et 34 085 euros en 2015 qu'elle a comptabilisés en charges au titre de ces indemnités kilométriques seraient justifiés, alors qu'elle a par ailleurs comptabilisé sur les mêmes exercices des charges de carburant et d'entretien liées à ce même véhicule, et que le carnet d'entretien de ce véhicule mentionne un nombre total de kilomètres parcourus inférieur à celui qu'elle a retenu pour le calcul des indemnités en litige.

13. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'a pas fondé la réintégration au résultat des exercices clos en 2013 et 2014 des indemnités kilométriques qu'elle a allouées à M. A..., à raison du véhicule de marque Ducati, sur le fait que cette allocation constituerait un acte anormal de gestion, mais sur le seul motif, non contesté, que ce véhicule n'appartient pas à M. A... mais est immatriculé au nom de la société, et ne peut dès lors donner lieu au versement d'indemnités kilométriques.

14. Enfin, par ses seules affirmations la requérante, qui seule peut le faire, ne justifie pas que les charges d'entretien et de carburant afférentes à trois véhicules de marques Smart et Renault, qu'elle a comptabilisées lors de l'exercice clos en 2015, correspondraient à une utilisation de ces véhicules pour les besoins de son activité d'agence immobilière, alors que lesdits véhicules ne sont pas immatriculés à son nom ni à celui de son gérant, mais au nom de tiers. Par suite l'administration était également fondée, sur le seul fondement des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, à remettre en cause la déductibilité de ces charges.

En ce qui concerne le passif injustifié :

15. Aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ".

16. En ce qui concerne les sommes qui ont été portées au crédit du compte courant de M. A... pour un montant de 3 433 euros au titre de l'exercice clos en 2014 et de 24 462 euros au titre de celui clos en 2015, la requérante n'établit ni n'offre d'établir qu'elles constitueraient la contrepartie de dettes contractées par la société à l'égard de M. A.... Par suite, le service était fondé à réintégrer les sommes en cause dans les résultats des exercices clos en 2014 et 2015.

17. En revanche, en se bornant à relever qu'un à-nouveau créditeur de 15 087,50 euros inscrit à l'ouverture, le 1er janvier 2013, de l'exercice 2013 qui est le premier exercice non prescrit, au compte courant de M. A..., ne serait pas justifié par une dette de la société à l'égard de son associé, sans faire valoir que cet à-nouveau aurait été encore inscrit à ce compte à la clôture de ce même exercice, l'administration n'établit pas que cette somme devait être réintégrée au bénéfice net de l'exercice clos le 31 décembre 2013. La requérante est par suite fondée à soutenir que la somme de 15 087,50 euros doit être exclue des bases de l'impôt sur les sociétés de l'année 2013 et, par suite, à obtenir la décharge, en droits, intérêts de retard et majorations, résultant de cette réduction de sa base taxable.

Sur les majorations :

18. En premier lieu, aux termes de l'article 1728-1 du code général des impôts : " " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de (...) : b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai [...]. "

19. Il résulte de ce qui est jugé au point 8 que la requérante ne peut utilement, pour contester le bien-fondé de la majoration de 40 % qui lui a été appliquée pour non-dépôt des déclarations de TVA des mois de février et de mars 2016 dans le délai de trente jours suivant la mise en demeure qui lui a été adressée le 13 juin 2016, soutenir que cette mise en demeure n'aurait pas mentionné les pénalités encourues en cas de non-respect du délai imparti.

20. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] ".

21. En ayant exactement relevé que la requérante avait déclaré un résultat fiscal égal à zéro au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014, alors qu'il est constant que les éléments de sa comptabilité faisaient ressortir un résultat de 208 061 euros que la société ne pouvait dès lors ignorer, et en ayant relevé que celle-ci ne pouvait se prévaloir d'une simple erreur en invoquant la remise au vérificateur, suite à la réception d'une mise en demeure le 16 juin 2016, d'une nouvelle liasse fiscale faisant figurer un bénéfice de 208 061 euros, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant l'intention délibérée de la requérante d'éluder l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014. Cette intention délibérée est également établie au titre des trois exercices en litige par le constat que la société a procédé, pour chacun de ces exercices et pour des montants substantiels, à la déduction d'indemnités kilométriques afférentes, dans un cas, à un véhicule lui appartenant, et dans l'autre, à un véhicule pour l'usage professionnel duquel elle ne détenait aucun justificatif, tout en ayant par ailleurs déduit des charges pour l'entretien de ces mêmes véhicules.

22. Il résulte de tout ce qui précède que la société Immo Best est seulement fondée à demander que la base du supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013 soit réduite de la somme de 15 088 euros.

Sur les frais de l'instance :

23. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Immo Best présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2006503/1-1 du 7 décembre 2021 le Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La base de l'impôt sur les sociétés assigné à la société Immo Best au titre de l'exercice clos en 2013 est réduite de la somme de 15 088 euros.

Article 3 : La société Immo Best est déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, en droits, intérêts de retard et pénalités, résultant de la réduction de base prononcée à l'article 2.

Article 4 : Le surplus de la demande et des conclusions de la société Immo Best présentées en appel sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée à associé unique Immo Best et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur régional d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2023.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00440


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00440
Date de la décision : 08/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL REINHART MARVILLE TORRE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-11-08;22pa00440 ?
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