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09/02/2024 | FRANCE | N°23PA01455

France | France, Cour administrative d'appel, 9ème chambre, 09 février 2024, 23PA01455


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par deux requêtes enregistrées sous le n° 1810328 et le n° 1911647, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite née le 16 juin 2018 et la décision expresse du 5 juillet 2018 par lesquelles le Centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a rejeté sa demande indemnitaire et de condamner cet établissement à lui verser la somme de 171 550,76 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis sur la période du 1er

janvier 2014 au 14 mars 2018.



Par un jugement nos 1810328, 1911647 du 7 févrie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes enregistrées sous le n° 1810328 et le n° 1911647, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite née le 16 juin 2018 et la décision expresse du 5 juillet 2018 par lesquelles le Centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a rejeté sa demande indemnitaire et de condamner cet établissement à lui verser la somme de 171 550,76 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis sur la période du 1er janvier 2014 au 14 mars 2018.

Par un jugement nos 1810328, 1911647 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 avril 2023, M. A..., représenté par Me Labourier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1810328, 1911647 du 7 février 2023 rendu par le tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre principal, de condamner le CASVP à lui verser la somme de 156 550,76 euros, au titre des heures supplémentaires effectuées ;

3°) à titre subsidiaire, au titre du préjudice financier, d'enjoindre au CASVP de procéder au chiffrage des heures supplémentaires réalisées et à la liquidation de la somme due sur la base de la durée de sa présence effective, dans un délai de deux mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de condamner le CASVP à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral subi ;

5°) de mettre à la charge du CASVP la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les juges de première instance ont omis de répondre au moyen tiré du préjudice moral et ont ainsi entaché leur jugement d'un défaut de motivation ;

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs ;

- en refusant l'indemnisation des périodes d'astreinte au titre des heures supplémentaires réalisées, le CASVP a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Le dispositif d'astreinte mis en place au sein du CASVP doit être regardé comme un temps de travail effectif ouvrant droit à indemnisation, dès lors qu'il demeure à la disposition immédiate et permanente de son employeur et qu'aucun déplacement extérieur au domicile n'est autorisé, en l'absence de toute modalité prévue à cet effet ;

- les modalités d'encadrement de ces astreintes générales, continues et absolues sont constitutives d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité du CASVP en méconnaissance de la réglementation communautaire et de la réglementation relative à la réduction de la durée du temps de travail ;

- l'organisation des astreintes, telle qu'elle a été définie, a eu pour effet de porter atteinte à la santé des agents, en particulier à leur équilibre psychologique en méconnaissance de la réglementation en vigueur sur la protection de la santé des travailleurs, mais également au droit au respect d'une vie privée et familiale normale. Elle méconnaît la liberté constitutionnelle du droit d'aller et venir ainsi que le principe d'égalité de traitement, présente un caractère discriminatoire et constitue une rupture d'égalité devant les charges publiques ;

- les fautes ainsi commises par le CASVP sont à l'origine de préjudices directs et certains ;

- le préjudice financier résultant de l'absence d'indemnisation de ses périodes d'astreinte doit être évalué à la somme de 156 550,76 euros ;

- le préjudice moral lié aux conditions d'exercice de ces astreintes et à leurs répercussions sur son état de santé et sa vie privée et familiale, sera indemnisé à hauteur de 50 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 89/391/CEE concernant la santé et la sécurité au travail ;

- la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant la notion de période de travail ;

- la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant l'aménagement du temps de travail ;

- le code général de la fonction publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;

- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 ;

- le décret n° 2005-542 du 19 mai 2005 ;

- l'arrêté n° 00-219 du 3 juillet 2000 portant règlementation applicable aux gardiens des résidences personnes âgées du Centre d'action sociale de la ville de Paris ;

- le règlement particulier adopté par le conseil d'administration du CASVP le 26 décembre 2001 concernant le cycle de travail des agents des résidences appartements ;

- la délibération n° 009 du conseil d'administration du CASVP du 4 avril 2016 fixant les modalités de rémunérations des astreintes et interventions effectuées par certains personnels du CASVP ;

- la délibération n° 080 du conseil d'administration du CASVP du 12 octobre 2018 portant organisation de l'activité des gardiens des résidences appartements pour personnes âgées du CASVP ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Labourier, représentant M. A..., les observations de M. A... et de Me Belahouane, représentant le Centre d'action sociale de la ville de Paris.

Une note en délibéré, enregistrée le 24 janvier 2024, a été présentée par Me Grimaldi, pour le Centre d'action sociale de la ville de Paris et n'a pas été communiquée.

Une note en délibéré, enregistrée le 26 janvier 2024, a été présentée par Me Labourier, pour M. A... et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., agent hospitalier social, exerçait les fonctions de gardien de la résidence appartements " Léon Frot " du Centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) et était logé par nécessité absolue de service. Par un courrier du 12 avril 2018, il a présenté une demande préalable indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis dans le cadre du dispositif d'astreinte mis en place par l'établissement. Cette demande a été rejetée par une décision du 5 juillet 2018. Par la présente requête, M. A... relève régulièrement appel du jugement du 7 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la condamnation du CASVP à lui verser la somme globale de 171 550,76 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il résulte des points 6 et 7 du jugement contesté que les premiers juges ont énoncé précisément les éléments de fait et les motifs qui les ont conduits à écarter toute illégalité fautive commise par le CASVP, le bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal administratif étant sans incidence sur la régularité du jugement. Par ailleurs, dès lors que le tribunal écartait la responsabilité de l'administration et rejetait par suite les conclusions indemnitaires qui lui étaient présentées, il n'avait pas à se prononcer sur le préjudice moral dont l'intéressé entendait obtenir réparation et constitué par la privation de liberté, l'atteinte portée à sa vie privée et familiale, ou les obligations de l'employeur en matière de santé et de sécurité. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué et de ce que les premiers juges auraient omis de répondre à ce préjudice doivent être écartés.

3. En second lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. A... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché son jugement d'une contradiction de motifs pour demander l'annulation du jugement attaqué, un tel moyen tendant en réalité à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur les modalités d'exercice des périodes d'astreinte.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l'article 2 sont fixées par la collectivité ou l'établissement, dans les limites applicables aux agents de l'État, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements ". Aux termes de l'article 5 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature, applicable aux agents de la fonction publique territoriale en vertu de l'article 1er du décret du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale : " Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle l'agent, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'administration, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ". Aux termes de l'article 4 du décret du 12 juillet 2001 susvisé : " L'organe délibérant de la collectivité (...) détermine (...) les conditions de mise en place des cycles de travail prévus par l'article 4 du décret du 25 août 2000 susvisé (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " L'organe délibérant de la collectivité (...) détermine (...) les cas dans lesquels il est possible de recourir à des astreintes, les modalités de leur organisation et la liste des emplois concernés ".

5. Aux termes de l'article 1er du décret n° 2005-542 du 19 mai 2005 relatif aux modalités de la rémunération ou de la compensation des astreintes et des permanences dans la fonction publique territoriale : " (...) bénéficient d'une indemnité non soumise à retenue pour pension ou, à défaut, d'un repos compensateur certains agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant : / 1° Lorsqu'ils sont appelés à participer à une période d'astreinte (...) ". L'article 2 de ce décret dispose que : " Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle l'agent, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'administration, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ainsi que, le cas échéant, le déplacement aller et retour sur le lieu de travail. / La permanence correspond à l'obligation faite à un agent de se trouver sur son lieu de travail habituel, ou un lieu désigné par son chef de service, pour nécessité de service, un samedi, un dimanche ou lors d'un jour férié. ". Enfin, aux termes de l'article 3 du même décret : " La rémunération et la compensation des obligations décrites à l'article 1er (...) ne peuvent être accordées aux agents qui bénéficient d'une concession de logement par nécessité absolue de service (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions, d'une part, qu'une astreinte s'entend comme une période pendant laquelle l'agent, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'administration, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif. D'autre part, si un agent territorial qui bénéficie d'une concession de logement à titre gratuit pour nécessité absolue de service ne peut pas prétendre au paiement ou à la compensation de ses périodes d'astreinte et de permanence, y compris lorsque ces périodes ne lui permettent pas de quitter son logement, il peut toutefois prétendre au paiement ou à la compensation d'heures supplémentaires, à la double condition que ces heures correspondent à des interventions effectives, à la demande de l'autorité hiérarchique, réalisées pendant le temps d'astreinte ou de permanence, et qu'elles aient pour effet de faire dépasser à cet agent les bornes horaires définies par le cycle de travail.

7. L'arrêté du 3 juillet 2000 portant règlementation applicable aux gardiens des résidences pour personnes âgées du Centre d'action sociale de la ville de Paris prévoit que les gardiens bénéficient d'un logement par nécessité absolue de service et sont astreints à une résidence permanente dans l'établissement pendant toute la durée de leur activité. Leur journée de travail est organisée en trois périodes : le temps de travail effectif dans la plage d'ouverture de la loge de 7h00 à 20h00, le temps de pause quotidienne fixé à deux heures et le temps d'astreinte fixé localement aux moments de moindre activité, la durée hebdomadaire de travail étant fixée à 39h00. Le règlement concernant le cycle de travail des agents des résidences appartements annexé à la délibération n° 080 du conseil d'administration du CASVP du 12 octobre 2018 concernant l'organisation de l'activité des gardiens, qui a abrogé le règlement particulier adopté par le même conseil le 26 décembre 2001, précise que durant la nuit, le gardien est d'astreinte à son domicile de 20h00 à 7h00 du lundi au vendredi. Ce règlement a réduit l'amplitude horaire d'ouverture de la loge les lundis et vendredis et précisé l'obligation pour les gardiens de demeurer à domicile ou à proximité durant les périodes d'astreinte. Enfin, la délibération n°009 du conseil d'administration du CASVP du 4 avril 2016 fixe les modalités de rémunérations des astreintes et interventions effectuées par certains personnels de cet établissement.

8. Il résulte de l'instruction que M. A... exerce ses fonctions de gardien d'un établissement sur une durée légale de travail hebdomadaire de 39h00. Ses horaires de travail sont fixés le lundi de 8h00 à 18h00 et du mardi au vendredi de 8h12 à 18h00, avec une pause méridienne de deux heures. Il assure également une astreinte, quatre jours par semaine, de 18h00 à 8h00.

9. M. A... soutient que pendant ses périodes d'astreinte, il restait à la disposition permanente et immédiate de son employeur en raison du caractère fréquent des sollicitations des résidents auxquelles il était tenu de répondre et de l'obligation qui était faite aux gardiens de demeurer à leur domicile. Toutefois, si en application de la règlementation applicable aux gardiens des résidences pour personnes âgées du CASVP, les gardiens sont contraints à une résidence permanente au sein de l'établissement pendant la durée de leur service en contrepartie du logement gratuit attribué par nécessité absolue de service et soumis à une période d'astreinte quotidienne qui leur impose d'être à la disposition des résidents, cette circonstance, inhérente à l'exercice d'une astreinte, n'est pas de nature à démontrer, à elle seule, que M. A... était ainsi en situation de travail effectif. En outre, le règlement particulier mentionné, annexé à la délibération du conseil d'administration du CASVP du 12 octobre 2018, dispose que le gardien n'est pas à la disposition permanente et immédiate du Centre. Par suite, la circonstance que M. A... n'aurait pu librement circuler à proximité de l'établissement pendant l'exercice d'une astreinte n'implique pas davantage que ce temps soit qualifié de temps de travail effectif. Il ne démontre ainsi pas avoir été exposé à des contraintes qui auraient, de manière objective et significative, limité sa liberté de vaquer librement à ses occupations personnelles et de se consacrer à sa vie privée et familiale au cours de ses périodes d'astreinte. A ce titre, il ne justifie ni de la fréquence ni de la nature de ses interventions auprès des résidents qui n'auraient pas donné lieu au paiement d'heures supplémentaires par le CASVP compte tenu du temps de travail effectif accompli, ni de ce que ces interventions n'auraient pas fait l'objet d'un temps de repos compensateur. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le CASVP aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en refusant de retenir que les périodes d'astreinte devaient être regardées comme des périodes de travail effectif nécessitant d'être indemnisées à ce titre.

10. En deuxième lieu, la seule circonstance que les gardiens sont contraints de demeurer au sein de l'établissement afin de répondre rapidement aux sollicitations des résidents ne suffit pas à établir le caractère général, continu et absolu de ces astreintes. L'interdiction de sortie de domicile qui leur a été opposée, même temporairement dans l'attente de leur dotation en téléphone portable, ne permet pas, à elle seule, de démontrer qu'ils auraient été à la disposition permanente de leur employeur. Par ailleurs et contrairement à ce que soutient M. A..., si la règlementation adoptée par le CASVP applicable aux gardiens des résidences pour personnes âgées n'a pas défini l'étendue d'un périmètre de sortie autorisée au cours des périodes d'astreinte ou n'a introduit que tardivement la dotation des gardiens d'un téléphone portable professionnel, ces circonstances ne permettent pas de retenir un défaut d'encadrement de ces périodes d'astreinte de la part du CASVP. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les modalités d'encadrement de ces périodes d'astreinte seraient constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité du CASVP.

11. En troisième lieu, M. A... ne démontre pas que l'organisation des astreintes édictée par le CASVP aurait été prise en méconnaissance de la règlementation applicable en matière de prévention et de sécurité des agents, notamment en terme de risques psycho-sociaux, par la seule circonstance qu'elle prévoit une obligation de résidence permanente au sein de l'établissement, où est situé son domicile, au cours de ces périodes, ou par la circonstance que le système d'alarme susceptible d'être déclenché par les résidents est relié à la loge. A ce titre, il ne justifie par aucune pièce la fréquence et la nature des interventions liées au déclenchement de ce dispositif au cours de l'exercice des astreintes. Cette obligation de présence n'est pas davantage, en tant que telle, susceptible de révéler une situation de harcèlement. Ainsi qu'il a été dit au point 9, il n'est pas établi que l'intéressé, logé avec sa famille par nécessité absolue de service, n'ait pu se consacrer à ses activités personnelles et à sa vie privée et familiale durant l'exercice des astreintes auxquelles il était assujetti. De même, la seule circonstance que les gardiens sont tenus de demeurer à domicile durant leurs astreintes n'est pas de nature à démontrer une violation de la liberté constitutionnelle d'aller et venir. Il est par ailleurs constant que les gardiens bénéficient, hors congés annuels, d'une pause méridienne de deux heures et de deux jours de repos consécutifs durant les week-ends. Enfin, dès lors que les gardiens sont tenus à une résidence permanente dans l'établissement ou à proximité depuis le règlement adopté en 2018 durant l'exercice d'une astreinte et que la dotation en téléphone portable des gardiens ne constituait pas une obligation à laquelle était tenu le CASVP, la circonstance que certains agents n'ont pu en bénéficier ou que cette dotation a été échelonnée dans le temps n'est ni contraire au principe d'égalité entre agents ni constitutive d'une discrimination.

12. En quatrième lieu, si M. A... entend engager la responsabilité du CASVP au titre de la rupture d'égalité devant les charges publiques, il n'assortit ses allégations d'aucune précision susceptible d'en apprécier le bien-fondé. Par suite et en tout état de cause, il n'est pas fondé à demander l'engagement de la responsabilité sans faute du CASVP.

13. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été indiqué au point 9 du présent arrêt que le tribunal n'a pas entaché son jugement de contradiction de motifs en relevant que M. A..., tenu de demeurer à son domicile pendant les périodes d'astreinte, ne justifiait pas précisément de la nature et de la fréquence des tâches qui lui étaient assignées dans des conditions permettant de déterminer une impossibilité de vaquer à ses occupations personnelles.

14. Il résulte de tout ce qui précède qu'en l'absence de faute de nature à engager la responsabilité du CASVP, M. A... ne peut prétendre à l'indemnisation d'aucun préjudice. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au directeur général du Centre d'action sociale de la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 9 février 2024.

La rapporteure,

C. LORINLe président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°23PA01455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01455
Date de la décision : 09/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI-MOLINA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-09;23pa01455 ?
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