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10/04/2024 | FRANCE | N°23PA00450

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 10 avril 2024, 23PA00450


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Un rôle à jouer a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2018.



Par un jugement n° 2011485/2-3 du 8 décembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire

enregistrés les 1er février et 21 juin 2023, la société Un rôle à jouer, représentée par Me Amaury Sonet demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Un rôle à jouer a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2018.

Par un jugement n° 2011485/2-3 du 8 décembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er février et 21 juin 2023, la société Un rôle à jouer, représentée par Me Amaury Sonet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2011485/2-3 du 8 décembre 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de rectification est irrégulière en l'absence de saisine de la commission départementale des impôts ;

- les sommes perçues sur les spectacles de théâtre sont imposées au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée de 5,50 % ;

- elle a distingué les prestations relevant du taux réduit et les prestations relevant du taux normal ;

- la réponse ministérielle du 23 janvier 2006, la réponse ministérielle à la question écrite n° 18228 de M. A... publiée le 25 août 2011, la réponse ministérielle à la question écrite n° 00441 de M. B... publiée le 28 août 1997 et la circulaire administrative du 23 mars 1988 sont opposables à l'administration fiscale en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- une société comparable a fait l'objet d'un dégrèvement ;

- le critère à utiliser est la réalisation de spectacle, et ce critère est rempli ;

- elle peut se prévaloir de la position adoptée par le juge judiciaire ;

- les sujets traités dépassent le monde du travail et les représentations sont tenues dans des lieux très divers et proposées par des professionnels du théâtre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens présentés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Sonet, représentant la société Un rôle à jouer.

Considérant ce qui suit :

1. La société Un rôle à jouer a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2018, à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis en recouvrement du fait de la remise en cause de l'application du taux réduit de taxe sur les prestations pour lesquelles l'administration a considéré que la société agissait en tant que prestataire de services.

La société Un rôle à jouer relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2018.

Sur la procédure d'imposition :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". L'article L. 59 A du même livre dispose que : " I. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial (...) ou du chiffre d'affaires déterminé selon un mode réel ; / (...) II. - Dans les domaines mentionnés au I, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit ".

3. Le différend persistant entre la société requérante et l'administration fiscale porte sur le taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable et non sur le montant du chiffre d'affaires. Dès lors, et alors même que la qualification juridique de l'activité de la société requérante impliquerait l'examen de questions de fait et que les modalités de calcul du rappel de taxe de taxe sur la valeur ajoutée a conduit l'administration à procéder à une modification du chiffre d'affaires hors taxe, le présent litige ne relevait pas de la compétence de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Par suite, la procédure d'imposition n'est pas irrégulière du fait du refus de l'administration fiscale de saisir pour avis cette commission.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Aux termes de l'article 278-0 bis du code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,5 % en ce qui concerne : (...) / F.-1° Les spectacles suivants : théâtres, théâtres de chansonniers, cirques, concerts ; spectacles de variétés à l'exception de ceux qui sont donnés dans les établissements où il est d'usage de consommer pendant les séances. (...) ".

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si un contribuable remplit les conditions légales pour bénéficier d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée.

6. La société Un rôle à jouer a déclaré exercer une activité de " conseil aux entreprises, administrations, professionnels et particuliers en gestion, communication, marketing. Formation. Production et diffusion de spectacle (moins de 6 par an) - production diffusion de spectacles, pièces de théâtre, concert, danse et tout autre spectacle vivant. ". Il résulte de l'instruction, notamment des factures produites à l'instance par l'administration, que les prestations proposées par la requérante, qui consistent notamment en l'écriture de saynètes théâtrales, et en l'organisation d'animations de jeux dramatiques et d'ateliers d'improvisation, de modules théâtraux interactifs et de conférences théâtralisées, quand bien même elles seraient conduites par des comédiens, relèvent de prestations de services dans le domaine des relations humaines, destinées, dans le cadre d'un soutien au management, aux salariés des entreprises et collectivités publiques en vue d'améliorer les conditions de travail et les relations interpersonnelles au sein de l'entreprise. Si la société fait valoir que les spectacles réalisés pour le compte d'entreprise et de collectivités ne diffèrent pas par leur nature des spectacles habituellement représentés à des fins culturelles et récréatives, ne concernent pas que le monde du travail, qu'ils ont été réalisés par des professionnels du théâtre et qu'un certain nombre de spectateurs étaient volontaires, de tels arguments sont dépourvus de portée s'agissant de prestations dispensées dans le cadre professionnel précédemment décrit. Si, plus généralement, elle fait valoir qu'elle fait représenter par des comédiens des spectacles écrits par des auteurs hors du monde professionnel, notamment à l'Université et dans des salles de spectacle, elle n'identifie aucune facturation concernée par le litige, qui correspondrait à un spectacle représenté, au cours de la période d'imposition en cause, indépendamment des prestations de management au bénéfice d'une entreprise ou d'une collectivité, et qui relèverait d'activités de spectacle de théâtre au sens de l'article 278-0 bis du code général des impôts. Pour le même motif, le moyen tiré de ce que, depuis le début de son activité, elle distingue les prestations relevant du taux réduit et celles relevant du taux normal ne peut qu'être écarté. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a appliqué le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée aux recettes en cause et rappelé les droits correspondant à la différence entre taux normal et taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée.

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

7. La réponse ministérielle du 23 janvier 2006, la réponse ministérielle à la question écrite n° 18228 de M. A... publiée le 25 août 2011, la réponse ministérielle à la question écrite n° 00441 de M. B... publiée le 28 août 1997 et la circulaire administrative du

23 mars1988, qui ne qualifient pas explicitement de spectacles les prestations du type de celles offertes par la société requérante, ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application et ne peuvent par suite être valablement invoquées sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante, qui ne saurait utilement se prévaloir du dégrèvement, au demeurant non motivé, obtenu par un tiers, ni de la position adoptée par le Tribunal judiciaire de Paris dans un contentieux opposant des tiers pour l'application d'une législation distincte de la législation fiscale, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Un rôle à jouer est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Un rôle à jouer et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Topin, présidente,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 avril 2024.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLa présidente,

E. TOPIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 23PA00450 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00450
Date de la décision : 10/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TOPIN
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : BFPL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-10;23pa00450 ?
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